Comment utiliser la théorie dans un mémoire ou une thèse

Cet exemple de cadre théorique de mémoire vise à vous donner un aperçu des attentes académiques relatives à cette partie du mémoire de fin d’études, afin de vous permettre de mieux réussir la rédaction de votre propre cadre théorique.

Introduction

Au fil des ans, les progrès technologiques ont entraîné des améliorations de la productivité industrielle, à commencer par la première révolution industrielle. Aujourd’hui, une quatrième révolution industrielle se profile à l’horizon.

Poussée par les progrès technologiques et l’application accrue des technologies de l’information et de la communication, cette révolution numérique peut avoir un impact immense sur la façon dont les produits sont développés, produits et vendus. En effet, la digitalisation offre des opportunités pour stimuler la productivité, la croissance des revenus et la compétitivité, tout en permettant le développement de nouveaux modèles commerciaux innovants. En outre, la digitalisation peut conduire à une fabrication plus durable, améliorer la qualité des produits et la sécurité des travailleurs. Cependant, cette révolution numérique implique plusieurs défis, par exemple liés à la sécurité des données, à l’intensité capitalistique des investissements et au manque de compétence des travailleurs industriels.

Pour certains secteurs, comme celui de l’énergie, la digitalisation engendre différents impacts sur les acteurs. Le secteur de l’énergie est au cœur de l’économie, car le développement technologique de l’information et de la communication influence non seulement la rentabilité mais également les opportunités de revenus en modifiant les modèles commerciaux.

La transformation numérique et le développement de stratégies commerciales permettent aux organisations de s’adapter aux besoins individuels de leurs clients, de suivre les tendances du secteur des affaires et de s’aligner les unes sur les autres dans les réseaux de valeur. Ces changements permettent aux organisations d’acquérir un avantage concurrentiel.

Cependant, la digitalisation est bien plus qu’un simple développement de l’automatisation. La transformation numérique est une transformation d’entreprise rendue possible par la numérisation. La numérisation est « un processus multidimensionnel qui conduit à la convergence des mondes réel et virtuel, devenant le principal moteur de l’innovation et du changement dans l’économie » (Mille-Alliance -2015). Il faut noter que l’efficacité énergétique est au cœur du système énergétique : atteindre un niveau élevé d’efficacité énergétique doit être fondamental pour une stratégie plus large répondant aux défis politiques. Les innovations numériques récentes offrent de nouvelles façons d’aborder les défis existants en matière d’efficacité énergétique et de trouver des moyens exceptionnels de les résoudre, tout en offrant une toute nouvelle opportunité de faire passer l’efficacité énergétique au niveau supérieur en améliorant l’environnement réglementaire et politique, l’analyse des données et une meilleure connectivité des parties prenantes dans tous les segments du secteur de l’énergie – de la production à la consommation.

La numérisation de l’énergie est façonnée par quatre tendances clés dans le paysage sectoriel au sens large : la datafication, la décarbonation, l’augmentation des liens intersectoriels et la décentralisation. Ces tendances, et leurs interactions avec la numérisation de l’énergie, modifient rapidement les frontières et le fonctionnement du système énergétique en s’éloignant des modèles de système traditionnels.

La transformation de l’économie vers une économie numérique fait l’objet d’études et de documents publiés par la Commission européenne. Toutefois, les variables spécifiques au secteur de l’énergie n’ont jusqu’à présent pas été proposées pour suivre les progrès vers l’avenir numérique. L’Union Européenne, dans le document stratégique “Europe 2020”, considère la numérisation du secteur de l’énergie comme un facteur clé d’une croissance intelligente basée sur la connaissance technologique et l’innovation. Ensuite, le processus de surveillance est important en termes de production d’énergie et accès aux technologies numériques, adoption et utilisation des technologies numériques, impact des technologies numériques, évolution de l’économie et du marché du travail, etc. Outre les attentes ancrées dans le processus de numérisation liées au développement des modèles commerciaux, il existe également des menaces identifiées dans le secteur de l’énergie. D’autre part, la transformation numérique et le secteur de l’énergie sont étroitement liés et dépendent l’un de l’autre, car ils assurent le progrès économique.

Avec la digitalisation de l’économie, le nombre d’acteurs et la diversité des types d’acteurs augmentent au sein du système énergétique. Cela est lié à une diversification des modèles commerciaux, à de nouveaux types de relation client et à des tendances de décentralisation qui permettent une participation plus granulaire et active au système énergétique. Dans ce contexte numérique six catégories de défis en matière de gouvernance sont identifiées : défis de distribution, de la culture organisationnelle, de la politique, de la réglementation et de l’automatisation.

Alors que la numérisation continue de s’accélérer dans l’ensemble de l’économie, les modèles de gouvernance existants sont remis en question de manière nouvelle et inattendue. Au sein de l’énergie, cela se manifeste en termes de domaines problématiques inconnus, de nouvelles dynamiques d’acteurs et de changements d’échelle des problèmes.

La confluence des systèmes énergétiques et numériques signifie que les défis de gouvernance émergents seront pertinents, bien qu’à des degrés divers, pour les paysages de gouvernance supervisant à la fois l’énergie et les questions numériques plus larges. Ceci est important car cela implique un changement dans la façon dont les institutions, les systèmes réglementaires et politiques interagissent. Cela ouvre également des portes à l’innovation ; potentiellement créer, adapter ou combiner des outils de nouvelles façons pour relever les défis émergents.

Tout cela nous pousse à nous intéresser sur l’impact de la digitalisation au niveau des acteurs énergétique à travers la problématique suivante : « L’impact de la digitalisation dans le secteur de l’énergie : Quelles influences sur les comportements des acteurs ? ».

Partie I : Analyse Théorique

  1. La libéralisation d’un secteur régulé

Historiquement, de nombreuses réglementations ont été mises en place dans le secteur de l’énergie pour favoriser la compétitivité, assurer le respect des normes fixées, et une réglementation accrue avec divers intervenants du secteur. Les réglementations visent à avoir un impact positif sur le secteur de l’énergie, visant à transformer l’économie en créant davantage d’opportunités pour la participation des entreprises privées. D’autre part, la déréglementation fait référence à l’élimination ou à la modification substantielle des politiques au niveau de l’État dans l’industrie, réduisant la supervision gouvernementale et le contrôle des acteurs de l’industrie. Au cours des trois dernières décennies, les gouvernements nationaux et régionaux se sont efforcés de mettre en œuvre la déréglementation dans le secteur de l’énergie, de réduire les prix des produits de base comme l’électricité et d’améliorer la compétitivité de l’industrie, et d’éviter les défis posés par la réglementation.

Cette situation a par la suite été renforcée par la digitalisation qui a engendrée de nouvelles pratiques. En effet, la technologie est un aspect important des mesures de déréglementation. Il a joué un rôle important dans le renforcement des efforts de déréglementation. Lorsque l’industrie de l’électricité cessera d’être un monopole, les entités opérant dans le secteur pourraient devenir plus motivées pour protéger leurs marchés. L’une des stratégies utilisées par les entités consiste à adopter la technologie, améliorant ainsi la satisfaction des clients. Par exemple, les entités de l’industrie électrique ont adopté des systèmes informatiques flexibles et orientés vers le changement. L’adoption de nouvelles technologies a eu un impact sur l’économie, réduisant les coûts d’exploitation et des services publics. Les entreprises ont également développé des systèmes de facturation sur mesure améliorés et une tarification en temps réel de l’électricité. Certaines entreprises ont adopté des logiciels spécifiques pour obtenir des données de consommation auprès de gros consommateurs d’électricité.

Egalement, il faut noter que le potentiel des nouvelles entreprises numériques entrantes perturbe de manière permanente le paysage des acteurs. Toutefois, ces nouveaux entrants sont confrontés à la concurrence de la puissance d’accès aux données des opérateurs historiques.

Les systèmes de gestion de l’énergie, les plates-formes d’interaction directe entre pairs et autres bénéficient des opportunités créées par la numérisation remettent en question le cadre réglementaire apparu à l’ère de la libéralisation. Comme leurs homologues des télécoms, les régulateurs de l’énergie sont confrontés à un paysage beaucoup plus animé, plein de zones grises où les rôles conventionnels s’estompent.

  1. La situation d’oligopole

Le secteur énergétique est traditionnellement considéré comme un monopole naturel soumis à une réglementation stricte. Cependant, au cours des deux dernières décennies, la possibilité d’introduire la concurrence dans l’industrie a été évoquée et de nombreux systèmes énergétiques dans le monde se sont déjà organisés autour d’un marché de production.

  • Un secteur naturellement monopolistique

Jusqu’aux années 1980, l’industrie énergétique dans le monde était composée d’entreprises nationalisées ou d’entreprises privées, généralement de très grande taille et qui sont fortement réglementées. Plusieurs facteurs expliquent cette situation, mais la principale tient à l’existence d’un monopole naturel. Si le système est de petite taille, les technologies appliquées à la production présentent des économies d’échelle, c’est-à-dire que le coût total de l’approvisionnement en électricité est inférieur lorsqu’un seul générateur de taille est utilisé. Dans ces circonstances, les grandes usines sont privilégiées et il ne sert à rien de vouloir mettre en concurrence plusieurs entreprises, puisque la solution la plus économique est qu’une seule entreprise réalise tous les investissements et capte toutes les économies d’échelle. À mesure que la consommation d’électricité augmente et, par conséquent, la taille du secteur, l’impact des économies d’échelle diminue progressivement.1

Dans ces conditions, l’organisation la plus appropriée du système électrique présente une approche centralisée qui permet de bénéficier d’économies d’échelle et de coordination. Cette centralisation s’est traduite de manière différente dans l’organisation du secteur selon les pays. Ce système se présente généralement sous deux formes 2:

  • Une première option consiste en une entreprise publique unique contrôlant entièrement l’activité électrique du pays. Cette société est chargée de décider des investissements nécessaires en installations et infrastructures pour s’adapter aux besoins des consommateurs, ainsi que de réaliser l’exploitation du système. Les investissements et les frais de fonctionnement sont financés par l’argent public. Le gouvernement, par l’intermédiaire de l’entreprise, détermine ce que les consommateurs doivent payer pour profiter de l’électricité. C’est le système adopté jusqu’à il y a quelques années par bon nombre de pays dans le monde. L’un des exemples les plus notables est le cas de la France, à travers la société Électricité de France ;
  • Une alternative différente est celle d’un secteur composé de plusieurs entreprises privées, mais dont le comportement dépend du gouvernement. Les décisions d’investissement sont prises par les entreprises, mais pour entreprendre de tels investissements, elles doivent demander l’autorisation du régulateur. S’ils l’obtiennent, ils réalisent l’investissement, qui est ensuite payé par l’administration publique via les tarifs. L’exploitation du système est assurée par les entreprises elles-mêmes, sous la surveillance régulière du régulateur. C’était le modèle utilisé aux États-Unis, entre autres pays, jusqu’au milieu des années 1980.

Dans ce contexte, le processus de libéralisation transfère le risque aux entreprises privées, afin qu’elles consacrent plus d’attention à leurs études et à leurs investissements puisque ce qui est en jeu, c’est leur propre investissement. Si une erreur est commise, elle n’affectera plus les consommateurs, mais les conséquences seront subies par l’entreprise qui la commet. Par conséquent, avec la déréglementation du secteur, il y a plus d’incitations à maximiser l’efficacité économique, puisque le bénéfice des entreprises dépend directement de leurs décisions. Par exemple, si une entreprise décide de construire une usine qui n’est pas adéquate ou efficace, le marché pénalisera cette décision. Le fait qu’il y ait un ensemble d’agents prenant des décisions fait que le marché choisit les entreprises les plus efficaces, de sorte que l’erreur d’une entreprise n’affecte pas les consommateurs. Dans un système centralisé, les consommateurs n’ont pas le choix, ils seront donc inévitablement affectés par la défaillance du seul agent existant.3

  • Un monopole entravé

Pour que la déréglementation du secteur de l’électricité soit possible, une série d’événements ont dû se produire. L’un des facteurs les plus importants a été l’augmentation de la taille des systèmes électriques, qui réduit considérablement les effets des économies d’échelle. L’augmentation de la capacité de transmission des réseaux élargit les marchés auxquels les entreprises peuvent accéder depuis leurs différentes usines. D’autre part, le développement des nouvelles technologies a également contribué à rendre les économies d’échelle moins importantes qu’elles ne l’étaient auparavant. Aujourd’hui, la technologie la plus intéressante semble être celle des centrales à cycle combiné, qui ont des rendements maximaux. Par conséquent, les investissements ne doivent pas nécessairement être aussi élevés, ce qui permet l’apparition de petites entreprises capables de survivre face aux grandes entreprises.

En outre, le grand développement technologique qui s’est produit ces derniers temps dans les communications, les mesures et le traitement de l’information a été également un aspect critique pour le secteur de l’électricité et sa libéralisation, car cela facilite les processus nécessaires au fonctionnement du marché et les coûts associés sont réduits.4

La nature changeante des monopoles du secteur de l’énergie, en raison de la numérisation, est discutée comme un sous-défi réglementaire et deux problèmes principaux sont identifiés 5:

  • Le monopole de l’énergie change : la numérisation modifie la ou les fonctions des monopoles énergétiques physiques existants. Cela se traduit notamment par la montée en puissance de la collecte et du traitement des données au sein des réseaux énergétiques, ainsi que dans la transition ;
  • Nouveaux monopoles numériques : la numérisation crée de nouveaux types de monopoles au sein du système énergétique. Celles-ci peuvent inclure, mais sans s’y limiter : des jardins clos de données, des protocoles de collecte/traitement/modélisation de données, une infrastructure de comptage et des « plates-formes » propices au marché.

La numérisation et d’autres avancées technologiques, telles que les nouvelles sources d’énergie renouvelable et l’amélioration de la capacité de stockage des batteries, perturbent le secteur de l’énergie, des services publics et des ressources. D’importantes opportunités de transformation apparaissent lorsque ces technologies sont combinées. Et l’émergence de ces technologies modifie le paysage concurrentiel, offrant des avantages de coût aux concurrents ainsi qu’une ouverture pour de nouveaux entrants extérieurs au secteur. En conséquence, de nombreuses entreprises sont aux prises avec un mélange de défis qui ne peuvent être satisfaits par une réponse tactique. Par conséquent, une situation d’oligopole nait.

Selon la théorie économique, une concurrence parfaite avec un grand nombre de fournisseurs et de consommateurs se traduit par des prix égaux au coût marginal et par une utilisation efficace des ressources en termes d’efficacité à la fois productive et allocative. Dans un cadre statique, cela maximiserait le total bien-être pour la société. En revanche, des barrières à l’entrée élevées dues, par exemple, à des économies d’échelle substantielles, à des coûts fixes ou irrécupérables élevés, à des barrières juridiques, à des brevets ou à la propriété exclusive des ressources peuvent entraîner un faible nombre d’entreprises sur le marché. De tels marchés avec seulement quelques fournisseurs de biens ou services et de nombreux clients sont qualifiés de marchés oligopolistiques.6

Contrairement aux entreprises sur des marchés parfaitement concurrentiels, les entreprises d’un oligopole peuvent influencer le prix et la quantité sur le marché en raison du pouvoir de marché détenu en raison du petit nombre d’entreprises. Pourtant, lorsqu’elles maximisent leurs profits, les entreprises oligopolistiques doivent tenir compte des réactions de leurs rivaux. Comme elles ne peuvent pas agir de manière indépendante, les entreprises doivent anticiper la réaction probable de tout concurrent à tout changement donné dans leur décision de fixation de prix ou de quantité. Dans le même temps, ils sont confrontés à l’incertitude quant à la réaction réelle de leurs rivaux à leurs actions.7

L’idée selon laquelle l’industrie énergétique est dominée par des monopoles est si largement répandue qu’elle a monopolisé une grande partie de la réflexion, des stratégies des investisseurs aux dossiers juridiques des organismes de surveillance. Pourtant, il devient de plus en plus difficile à tenir. Après une longue période d’ossification, l’industrie entre dans une phase dynamique. Depuis ces dernières années, les marchés numériques évoluent vers des oligopoles, dans lesquels les deuxième et troisième entreprises rivalisent vigoureusement avec l’opérateur historique. Les grandes entreprises se disputent les clients. La structure émergente de l’industrie est bien loin du capitalisme ouvert et diffus d’auparavant. La numérisation est une tendance émergente qui réorganise le paysage énergétique et permet de progresser vers des améliorations continues de l’efficacité énergétique.8

La numérisation sous un angle positif élargit les marchés des entreprises et augmente le choix des consommateurs. D’un point de vue négatif, cela peut augmenter de manière incontrôlable l’insécurité et la concurrence entre les entreprises locales et mondiales, il peut devenir difficile de rivaliser pour les petites et moyennes entreprises, donc une monopolisation du marché mondial peut apparaître même si les concurrents sont de plus en plus nombreux.9

Le développement de plateformes numériques dans d’autres secteurs a été particulièrement identifié comme produisant de fortes tendances monopolistiques et des marchés « le gagnant prend tout » animés par cinq caractéristiques : des effets de réseau forts ; de fortes économies d’échelle et de gamme; coûts marginaux proches de zéro ; rendements élevés de l’utilisation des données ; et de faibles coûts de distribution qui permettent une portée mondiale. Les enseignements tirés d’autres secteurs indiquent également que la régulation économique à elle seule ne constitue peut-être pas la meilleure approche pour réglementer les monopoles numériques, qui présentent des caractéristiques très différentes des monopoles physiques tels que les réseaux énergétiques. Compte tenu de la centralité de la réglementation monopolistique dans le secteur de l’énergie, parallèlement aux défis liés à la réglementation monopolistique numérique rencontrés ailleurs, ce sous-défi représente un domaine de recherche plus approfondie.

  1. La concurrence pure et parfaite

Au cours de ces 20 dernières années, le secteur énergétique a été libéralisé pour fonctionner de manière concurrentielle afin d’encourager une prise de décision plus efficace. Cet objectif est pleinement atteint dans un environnement de concurrence parfaite mais, à l’heure actuelle, il existe de multiples marchés où le niveau de concurrence n’est pas si élevé. Par conséquent, pour l’étude des marchés réels de l’énergie, des modèles d’équilibre sont nécessaires qui reflètent que les conditions de concurrence parfaite ne sont pas vérifiées, mais que les décisions des entreprises peuvent influencer les prix.10

Illustration 1 : Les caractéristiques d’une concurrence pure et parfaite

Source : Finon, D. (2008).

Les caractéristiques des activités du secteur énergétique sont très diverses, tant sur le plan technique qu’économique, et seules certaines d’entre elles peuvent être exercées dans des conditions concurrentielles. Le transport et la distribution sont des monopoles naturels qui continuent d’être fortement réglementés dans le monde. Dans la plupart des pays, les mêmes entreprises s’occupent de la production et de la distribution, de sorte que la déréglementation a exigé, au moins, une séparation claire, au sein d’une même entreprise, des différentes activités incluses dans le secteur.

Dans un marché concurrentiel, les entreprises prennent leurs décisions pour maximiser leur propre profit, il n’est donc en principe pas garanti que le système se comporte de la manière la plus efficace.

Dans le secteur énergétique, lorsque les décisions sont prises de manière optimale, d’un point de vue centralisé et avec une information parfaite, cela permet d’obtenir la meilleure solution possible pour le système traditionnel. Par ailleurs, l’autre système fait que chaque agent prend ses décisions en maximisant son propre bénéfice sur la base du prix du marché et dans des conditions de concurrence parfaite. Dans ces conditions, la taille relative de chaque entreprise par rapport à la taille globale du système est faible, de sorte que les décisions de production des entreprises ne peuvent modifier significativement le prix de marché. Ensuite, les entreprises décident de leur production en supposant que le prix du marché est indépendant de leurs décisions11.

  1. La stratégie pour s’adapter au changement

Par ailleurs, l’intégration croissante de technologies telles que le Big Data, la Blockchain ou l’Intelligence Artificielle offre d’énormes possibilités et alternatives qu’il est difficile de regrouper sous un même parapluie. Cependant, du point de vue du secteur de l’énergie, je pense qu’ces technologies pourraient être classées en trois grands domaines où les technologies numériques ont un plus grand impact. D’une part, dans les actifs et les processus. D’autre part, chez le consommateur. Et, troisièmement, dans les entreprises et leurs employés. Mais peut-être que le principal changement que cette transformation a introduit ces dernières années est lié au consommateur. Cela nous amène à parler du deuxième groupe. Grâce à l’accès à plus d’informations via des appareils intelligents, tels que la téléphonie ou les compteurs intelligents, le citoyen acquiert une plus grande capacité de décision et un rôle plus actif dans la demande. Et tout cela sert à sensibiliser les consommateurs à l’importance d’une utilisation plus durable de l’énergie.

Cela, dit, mes technologies numériques changent le monde et les changements introduits et la rapidité avec laquelle ils se produisent sont sans précédent. D’où l’importance de la mise en place d’une stratégie pour s’adapter le plus efficacement possible.

C’est notamment pour cette raison que dans le cadre de ce second chapitre, nous perlerons essentiellement de ce qu’est la stratégie d’adaptation au changement.

  1. La démarche stratégique

Là où le changement est la seule constante, des processus et des structures sont nécessaires pour gérer ce changement. Au niveau de la gestion, des processus et des structures doivent être mis en place pour transposer les visions politiques et les dispositions législatives dans la pratique. Dans le domaine de l’énergie, il est important de tenir compte des structures et des processus existants lors de la recherche de solutions de gestion et d’adaptation à la digitalisation. Un équilibre entre entités centrales et acteurs plus décentralisés s’impose, avec pour objectif premier d’aligner tous les acteurs vers des objectifs communs. C’est notamment pour cette raison qu’il est important de réfléchir à une stratégie bien déterminée pour s’adapter au changement.

La stratégie comporte des mécanismes pour faire face à l’incertitude dans le secteur de l’énergie causée par les changements technologiques. Plus il y a de stratégies pouvant être utilisées dans un modèle d’affaires donné, plus le risque d’incertitude résultant d’un modèle d’affaires donné est faible. Cela implique également le constat que les business models ne sont pas aussi élastiques que les stratégies digitales.12

  1. Enjeux de la démarché stratégique pour les entreprises

Actuellement, la promotion de pratiques efficaces qui affectent favorablement les processus de compétitivité et de productivité des entreprises implique le développement d’un ensemble de stratégies qui commencent par reconnaître les caractéristiques et les besoins de l’environnement commercial, ainsi que les attentes des clients et les avantages du concurrence, afin de promouvoir une valeur ajoutée basée sur une réflexion stratégique, associée à des composantes clés telles que la planification, l’adaptation et le changement13.

Illustration 2 : Les étapes de la démarche stratégique

Source : Grandval, S. Ahmed H. (2005)

En ce sens, l’orientation de la stratégie dans les entreprises s’avère fondamentale, car elle comprend le développement d’un ensemble de compétences et de capacités organisationnelles, qui sont établies dans le but d’analyser une série de données et d’informations pertinentes de l’environnement, dans le but de produire des processus d’adaptation et de transformation de la structure de l’entreprise, générant ainsi de meilleures stratégies qui ont un impact favorable sur le développement et la croissance économique.

Sans aucun doute, le développement de la pensée stratégique est essentiel pour les organisations d’aujourd’hui, au milieu des défis complexes auxquels elles doivent faire face, associés à la compétitivité, à l’internationalisation et à la mondialisation. Par conséquent, il est essentiel que les approches stratégiques tiennent compte non seulement de l’analyse des conditions environnementales pour générer de meilleurs processus de production, mais aussi de l’importance de promouvoir des attitudes de changement et de transformation, qui permettent aux organisations de participer en permanence à des dynamiques de croissance qui partent d’un l’interaction et la connaissance de l’environnement.

  1. Les objectifs

L’objectif de cette démarche stratégique est alors d’analyser la manière dont la gestion du changement doit être établie au sein des entreprises comme un outil fondamental qui guide les processus de planification et de réflexion stratégique. En particulier, il est basé sur la reconnaissance que les défis auxquels les entreprises doivent faire face aujourd’hui les obligent à maintenir une attitude constante de volonté de changement, car le maintien de structures de gestion figées et de modèles de développement statiques n’est pas réalisable en fonction de la dynamique de l’innovation, de la croissance technologique et les changements de comportement des clients qui caractérisent l’environnement commercial d’aujourd’hui14.

L’un des principes fondamentaux qui doivent être inclus dans la réflexion stratégique des entreprises est précisément la gestion et l’adaptation au changement, comme un moyen de maintenir une attitude de recherche, de découverte et d’innovation, qui leur permet non seulement de surmonter les défis liés à la compétitivité, mais aussi d’améliorer leur positionnement et leur rentabilité.

La stratégie organisationnelle est comprise comme un ensemble d’activités qui partent d’un processus préalable d’analyse, de systématisation de l’information et de planification, qui a pour but de guider les processus de prise de décision, d’améliorer le comportement et les activités d’une entreprise et de promouvoir de nouveaux principes et pratiques commerciaux, productifs et économiques qui impactent favorablement un marché donné.

Cependant, aujourd’hui, de nombreuses entreprises ont tendance à oublier l’importance de concevoir et d’appliquer des processus de planification stratégique adéquats, générant ainsi un ensemble de problèmes qui limitent considérablement les résultats et la portée des objectifs organisationnels. Clergeau, C., Glasberg, O. & Violier, P. (2014) soulignent qu’il existe trois principales lacunes qui sont commises au niveau organisationnel lors de la conception et de la mise en œuvre de la planification stratégique, à savoir :

  • L’erreur dans la prédiction : Dans ce cas, la planification est proposée comme un outil prédictif concernant l’avenir, mais les entreprises ne tiennent pas compte du fait qu’il est fondamentalement impossible de savoir à l’avance quels changements et dynamiques vont être générés dans le futur du marché. , ni prévoir quel sera le comportement des concurrents ;
  • L’erreur dans l’interdépendance des stratégiques : Les entreprises, dans la conduite de leurs processus de planification, séparent la stratégie de l’opération, et ne définissent pas les stratégies qui coordonnent les efforts des deux sphères et qui établissent les bases d’une planification stratégique à long terme ;
  • L’erreur dans la formalisation : les procédures formelles de planification stratégique sont insuffisantes pour faire face aux changements constants de l’environnement. La raison en est que les entreprises ne favorisent pas l’apprentissage, liant la pensée et l’action.

Dans l’ensemble, ces carences peuvent être évitées à condition d’établir des principes qui guident les attitudes liées à la réflexion, à l’analyse fine de l’environnement et à l’adaptation au changement, comme moyen d’harmoniser les objectifs, d’améliorer la cohérence entre les capacités des ressources humaines avec la mission organisationnelle, et de favoriser de meilleurs processus de création de valeur.15

Généralement, les raisons pour lesquelles les entreprises commettent des erreurs sont liées au manque de stratégies qui aident à comprendre l’ensemble des besoins et des préférences des clients, à bien comprendre les caractéristiques des marchés et à l’incapacité de prévoir les effets de l’environnement aux activités et aux projets commerciaux. La stratégie organisationnelle est fragilisée lorsqu’il y a des défaillances dans la coordination opérationnelle et managériale, lorsqu’il y a une absence de canaux de communication pour diffuser les objectifs de planification, et aussi lorsqu’une attitude négative n’est pas favorisée en interne induisant une résistance au changement.16

Cependant, bien qu’il s’agisse de circonstances courantes qui empêchent les entreprises de développer une planification stratégique optimale – et qui les conduisent à commettre des erreurs qui les empêchent d’obtenir les résultats escomptés, la principale raison pour laquelle une planification stratégique inadéquate est générée réside dans des processus de gestion médiocres. Il est alors important d’établir une stratégie d’adaptation aux changement, qui permet d’améliorer l’agencement des activités, les approches de production et de création de valeur, afin d’établir une cohérence adéquate entre l’offre et les besoins de l’environnement, avec les nouvelles techniques qui ont été développées, et avec les nouveaux modèles de relation client17.

  1. Le diagnostique stratégique

Généralement, les entreprises ne réalisent pas de diagnostics structurés ou approfondis leur permettant de reconnaître la nécessité de mettre en œuvre des changements, ou les stratégies qui doivent être mises en œuvre pour les réaliser. C’est pourquoi nous soulignons son importance dans le cadre de ce travail.

Le diagnostic stratégique reflète le changement comme étant intentionnel et stratégique et parfois peu fréquent, le changement se produisant généralement au sein d’une seule organisation ou d’un seul groupe. Des objectifs clairs, des mesures et des commentaires sont impliqués et relient les individus aux orientations de l’organisation. Les processus de changement concernent la réalisation d’objectifs et peuvent être axés sur les personnes, y compris la formation et le travail aux côtés d’individus et d’équipes pour les impliquer. La mesure et la rétroaction sur la réalisation des objectifs et l’encouragement de la participation sont les rôles des leaders dans ces approches de changement.18

Illustration 3 : Les éléments du diagnostic stratégique

Source : Paturel, R. (2016).$

En règle générale, les organisations ont tendance à s’adapter aux changements du marché de l’une des deux manières suivantes : elles “ajoutent” pour incorporer les changements, ou elles les “intègrent”.

Ainsi, une fois que le besoin de changement a été identifié et que les lignes générales ont été établies sur ce que devrait être la situation après le changement, il est nécessaire d’avoir autant d’informations que possible sur ce qu’est la situation actuelle avant de commencer le processus de changement. Réaliser ce diagnostic de manière adéquate et efficace nécessite un certain temps, qui dépasse, à de nombreuses reprises, les prévisions faites par la direction. Généralement, le diagnostic effectué n’est ni structuré ni approfondi, ne se matérialisant pas dans un document clair et élaboré. De plus, le diagnostic effectué ne comprend que le facteur qui a causé le changement.19

  1. Les orientations et la mise en œuvre

Après le diagnostic stratégique, les stratégies d’adaptation au changement nécessite de passer par une phase d’orientation et de mise en œuvre. L’orientation implique la matérialisation des besoins constatés dans des objectifs spécifiques pour des domaines spécifiques de l’organisation. Dans certains cas, les entreprises ne fixent normalement pas d’objectifs spécifiques ou ne déterminent pas une séquence d’actions pour les atteindre. Leur action est assez réactive, c’est-à-dire qu’une fois qu’un processus de changement a commencé, le reste des actions est le résultat, non d’une planification, mais de situations imprévues qui surviennent et auxquelles elles sont contraintes de faire face.

La mise en œuvre du changement implique la réalisation de chacune des actions programmées dans la phase de planification. En premier lieu, il faut souligner le retard important dans la mise en œuvre du changement, allant même parfois jusqu’à ne pas le mettre en œuvre. En revanche, lorsque les entreprises décident mettre en œuvre les actions stratégiques, il arrive souvent qu’elles se limitent exclusivement au facteur technique, sans tenir compte des interrelations avec le reste des facteurs, ce qui entraîne d’importants problèmes de rigidité lors de la réalisation du changement, c’est-à-dire un manque de flexibilité dans leur structure, la résistance au changement due à une culture négative et au manque de motivation et de formation du personnel20. En fait, il est important de noter qu’à de nombreuses reprises, des changements techniques sont effectués et on observe la manière dont le reste des facteurs sont totalement à la « marge », ne réagissant que lorsqu’ils sont directement affectés.

  1. Mise en place de la transformation numérique au sein de l’entreprise en général

Numérisation ou digitalisation ? Quelle est la différence ? La première tient à la confusion de son sens. Comme le dit Moatti, A. (2016), en français, la différence sémantique réside dans le fait que l’on parlera davantage du numérique (par opposition à l’analogique) pour désigner les supports de l’évolution technologique, sa matérialité, tandis que le digital et la digitalisation seraient des termes plus utilisés pour décrire les expériences qui provoquent ces matérialités. Bien que dans les discours cette différence ne soit pas si nette, cette première réflexion montre la complexité de l’analyse engendrée par ce phénomène technologique en assimilant causes, moyens et conséquences, posant également le problème du point focal avec lequel ce phénomène digital/numérique est appréhendé.

Le deuxième problème est que le terme « digitalisation » est souvent utilisé dans des discours insinuant une rupture dans l’évolution technologique. Une « révolution » est annoncée (en fait, beaucoup parlent de la quatrième révolution industrielle). D’un point de vue historique et anthropologique, la numérisation s’inscrit dans une dynamique évolutive et continue de l’homme envers les techniques qu’il crée. Cependant, la dynamique technologique actuelle, dont le tournant a commencé avec l’arrivée des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC), dessine une trajectoire exponentielle tant en ampleur qu’en vitesse. En effet, certains auteurs montrent à quel point le phénomène numérique se déroule de manière continue et disruptive, illustrant la complexité de sa lecture historique.21

Afin de mieux comprendre les raisons qui ont poussé les entreprises à se convertir dans la digitalisation, il est important de comprendre l’évolution de cette digitalisation dans la société en général et dans la vie de tous les jours.

Dans le discours sur le développement technologique, on parle généralement de la technologie comme si elle fonctionnait indépendamment des gens, le développement, l’innovation et le changement technologique sont pris pour acquis, comme si les gens et la société étaient de simples spectateurs du spectacle technologique. Or, d’un point de vue éco-systémique, le changement technologique n’est possible que s’il s’accompagne d’un changement socioculturel, et donc des habitudes, coutumes, comportements et coexistence de tous les acteurs sociaux concernés.

Depuis l’émergence du terme digitalisation, les effets de la digitalisation sur la société sont au cœur des débats. Nambisan, S., Lyytinen, K., Majchrzak, A.,& Song, M. (2017) décrivent les implications de la numérisation sur la société, dans le contexte de la lutte contre les objections et la possibilité d’une exploration assistée par ordinateur des phénomènes sociaux. L’étude et l’exploration du concept de numérisation ont produit d’énormes quantités de littérature, soulignant la manière dont la structure des médias numériques façonne et influence le monde moderne. Dans ce contexte, la numérisation a commencé à aborder la structuration de divers domaines de la vie sociale autour de la communication numérique et des infrastructures médiatiques.22

  1. La transformation numérique

Le processus de transformation numérique est omniprésent et affecte toutes les parties des organisations et leur façon de faire des affaires. Cette transformation peut s’expliquer à travers quatre phénomènes : les caractéristiques de la transformation, les moteurs, les impacts et les zones transformées 23:

  • Les caractéristiques de la transformation : le comportement de la transformation numérique a été qualifié de complexe, radical, perturbateur, évolutif et continu. Comme certaines de ces caractéristiques sont des contradictions, cela peut prêter à confusion ;
  • Les moteurs : La littérature existante a identifié plusieurs attributs qui peuvent activer et influencer le processus de transformation numérique. Par exemple, Schütz, Gabrielle & Noûs, Camille. (2021) ont identifié trois facteurs externes : la technologie numérique, la concurrence numérique et le comportement des clients numériques. Cependant, Pointeau, B. (2015) insistent sur le fait qu’il ne suffit pas d’utiliser uniquement les technologies numériques pour conduire le processus de transformation numérique. Les capacités numériques décrites comme les compétences technologiques possédées ou requises par les employés, les clients et les autres parties prenantes dans différents domaines qui peuvent permettre à l’organisation de prospérer dans un environnement numérique sont essentielles pour les organisations, en en plus d’autres facteurs tels que les stratégies et la culture pour réaliser la transformation numérique ;
  • les impacts : les impacts de la transformation numérique sont les effets de l’expérience des organisations et ces effets peuvent être positifs ou négatifs. De plus, les impacts qu’il crée sont classés en deux catégories : axés sur le client et axés sur l’organisation. Cependant, une valeur réalisée par les deux catégories est la création de valeur, qui représente l’impact ultime que les organisations recherchent dans la transformation numérique  ;
  • Les zones transformées : ce sont les zones impactées au cours du processus de transformation numérique. Les recherches existantes suggèrent plusieurs domaines impactés, mais les domaines clés sont les processus opérationnels, les modèles commerciaux et les expériences client. De plus, l’accent mis sur ces trois domaines engage la transformation d’autres aspects des organisations. La transformation numérique est donc bien plus qu’un virage technologique puisqu’elle a un impact stratégique et peut toucher tous les aspects de l’organisation.
  1. L’ambidextrie

Il est important de noter que la transformation numérique n’est pas un processus technologique, bien que la technologie joue un rôle important dans le processus de transformation en tant que catalyseur. Les gens sont au centre de la transformation numérique, et en même temps, ils sont la principale cause de résistance au changement. Un facteur important à prendre en compte lors de l’approche d’un projet de transformation numérique est de changer la mentalité des collaborateurs, vers un processus dans lequel ils se sentent à l’aise d’expérimenter des idées sur de nouveaux produits et services numériques, ou la déconstruction de la chaîne de valeur à repenser et les préparer aux nouveaux défis numériques.

Un autre facteur important à prendre en compte dans la digitalisation des entreprises est appelé “ambidextérité”, qui n’est rien de plus que de décider combien d’efforts et de ressources vont être alloués à la numérisation de la chaîne de valeur actuelle, par rapport au niveau d’effort et de ressources alloués à la génération numérique de nouveaux produits et services numérisés. L’importance de ce concept réside dans la continuité opérationnelle de l’entreprise, car concentrer les efforts sur un seul domaine, par exemple, la numérisation de la chaîne de valeur actuelle, laisserait une large marge à la concurrence pour capter les clients de l’organisation avides de nouveaux produits et services différenciant.24

Tableau 1 : Développement de la notion d’ambidextrie dans l’étude des organisations

Le concept d’ambidextrie organisationnelle met en évidence la capacité de certaines organisations à explorer et exploiter simultanément les processus de connaissance. L’ambidextrie implique de considérer une relation orthogonale entre ces deux processus et non comme des construits opposés, donc que l’interaction entre exploration et exploitation n’est pas un jeu à somme nulle et que le développement combiné des deux types d’apprentissage est possible. De même, et selon Koubaa, S. (2017), l’ambidextrie est composée de deux dimensions : le niveau et l’équilibre. Le premier fait référence au volume total d’exploration et d’exploitation réalisé par la société ; tandis que le second indique la symétrie dans les deux orientations. Selon les auteurs cités, le déploiement du concept est important, car chaque dimension présente des particularités du point de vue de ses antécédents, et chacune influence de manière différente la performance de l’entreprise. Les actions stratégiques concernant une transition maîtrisée des anciennes aux nouvelles technologies sont au cœur de l’ambidextrie organisationnelle.

Les processus d’innovation passent nécessairement par la mise en pratique de « l’ambidextrie » de l’entreprise, qui est l’un des principaux enjeux pour rentabiliser la digitalisation. Dans la prise de décision au sein de l’entreprise, car il est essentiel de trouver un équilibre entre le maintien de processus consolidés dans l’activité de l’entreprise et l’exploration de nouvelles idées. Pour éviter que la transformation n’entraîne des pertes économiques importantes à long terme, il est plus efficace de mettre en œuvre le processus progressivement, en commençant par les départements clés, tels que les ressources humaines et le marketing25.

Egalement, il faut noter que la numérisation des entreprises implique le transfert des tendances technologiques qui dirigent notre société vers le monde des affaires. C’est une réponse aux nouvelles demandes des clients, qui transfèrent de plus en plus d’opérations physiques vers le numérique. Par conséquent, cette démarche doit s’inspirer des valeurs culturelles, de ce qui caractérise la société d’aujourd’hui. Cela implique qu’au-delà des références à ce que fait la concurrence, l’important est de se concentrer sur les clients. L’entreprise doit répondre à leurs besoins.

Figure 1 : Trois dimensions indispensables dans l’innovation ambidextre collaborative

Source : Peng, H. (2015)

L’ambidextrie organisationnelle et la transformation numérique sont deux corps de littérature distincts. Cependant, les deux domaines de recherche concernent l’apprentissage et l’innovation, et sont nécessaires pour la survie à long terme. Cela peut s’expliquer par le fait que les organisations peuvent utiliser l’ambidextrie pour piloter la transformation digitale car les deux champs de recherche amènent les organisations à changer leur mode de fonctionnement : l’ambidextrie organisationnelle en assurant un équilibre entre exploration et exploitation, et la transformation digitale en changeant le business model en ligne avec de nouvelles innovations technologiques. Comme ces deux corpus de littérature constituent un processus continu qui se développe dans le temps au sein des organisations, mais dont les impacts entraînent un changement radical pour les organisations, il est évident qu’ils peuvent être combinés.

  1. La transformation digitale pour améliorer la performance

L’économie d’aujourd’hui se caractérise par une nature trépidante sans précédent et des changements qui viennent de toutes les directions26. La transformation numérique en tant que mégatendance du 21e siècle facilite de manière décisive ce progrès en bouleversant les modèles, les procédures, les normes et les modèles commerciaux qui existaient auparavant. Nambisan, S., Lyytinen, K., Majchrzak, A.,& Song, M. (2017) affirment que la numérisation fait référence à la fois à une transformation de l’« analogique » au « numérique » (par exemple, un passage des espèces aux paiements électroniques) et à la facilitation de nouvelles formes de création de valeur (par exemple, l’accessibilité, la disponibilité, et transparence) ». Meyenberg, Ute. (2018) élargit l’expression au terme de transformation numérique. La transformation numérique est alors un processus de réinvention de l’entreprise pour numériser les opérations et formuler des relations de chaîne d’approvisionnement étendues. Une perspective plus holistique est appliquée par Dudézert, A. (2018) qui déclare que la transformation numérique est l’évolution numérique délibérée et continue d’une entreprise, d’un modèle commercial, d’un processus d’idée ou d’une méthodologie, à la fois stratégiquement et tactiquement.

La numérisation, associée aux changements technologiques en cours, engendre de nouveaux processus et structures d’entreprise, qui conduisent souvent à l’obsolescence des pratiques commerciales traditionnelles et à l’innovation des modèles commerciaux. Les avantages de ce mouvement peuvent difficilement être niés. Grâce à la numérisation et à Internet en tant qu’infrastructure numérique clé, les informations peuvent être collectées de manière très rapide, efficace et peu coûteuse27. En outre, les nouvelles normes de communication et les nouvelles propositions de valeur numérique placent l’orientation client au centre de l’attention, simplifiant l’interaction avec les clients et les autres parties prenantes grâce au soutien des technologies de l’information et de la communication (TIC), et conduisent à la réduction des coûts de transaction. Cela améliore la gestion des coûts internes et facilite les processus internes. De plus, la richesse et la quantité des informations clients améliorent la satisfaction client et l’expérience client. Selon les résultats de l’étude de Dussart, Christian. (2017), les entreprises pionnières qui sont à l’avant-garde de la numérisation enregistrent une croissance des revenus plus élevée ainsi que des marges nettes plus élevées par rapport à des concurrents moins numérisés.

Illustration 4 : Les impacts de la digitalisation sur la performance

Source : Westerman, G., Bonnet, D., & McAfee, A. (2014), p.12

Il y a quelques années, l’accent est mis sur le terme « conception d’entreprise numérique » comme étant la nouvelle approche pour prendre des décisions stratégiques avec le soutien des technologies numériques. Cela devient possible grâce à l’intégration des technologies dans les éléments d’un modèle d’entreprise pour poursuivre des objectifs stratégiques et contribuer à l’augmentation des performances et à l’établissement d’un avantage concurrentiel. Brasseur, M., & Biaz, F. (2018) partagent cette opinion et qualifient les modèles d’affaires de central pour les innovations de la nouvelle ère. Ces résultats perspicaces jettent les bases d’un nouveau domaine de recherche appelé « modèles commerciaux numériques »28. Dudézert, A. (2018) explique que le « numérique » est le nouvel attribut standard pour les éléments du modèle d’entreprise. Cela s’applique également aux éléments individuels d’un modèle d’entreprise. Les canaux sont constamment déplacés vers le commerce en ligne sans intermédiaires, les activités allant de l’automatisation, de l’efficacité et de la flexibilité. Même les flux de revenus passent des modèles classiques à de nouvelles alternatives.

Un modèle commercial numérique est un modèle dont la logique commerciale sous-jacente reconnaît délibérément les caractéristiques de la numérisation et en tire parti. Dans la pratique, la numérisation remet en question les modèles commerciaux dans le but d’optimiser les processus existants, d’augmenter l’efficacité globale, la qualité des produits et des services et de réduire les coûts de transaction29. Une perspective nuancée inclut la servitisation numérique, qui sont des modèles commerciaux qui améliorent les biens et services non numériques traditionnels avec la mise en œuvre de technologies numériques, en tant qu’activité clé dans une entreprise numérique. En ce qui concerne l’innovation du modèle d’affaires, Meyenberg, Ute. (2018) suggère que l’activité principale pour changer avec succès le modèle d’affaires d’une entreprise est la combinaison de composants physiques avec des parties numériques afin d’offrir au client une solution entièrement numérique des deux mondes.

  1. Les nouvelles opportunités d’affaire de la révolution digitale

La numérisation des contenus, le développement de plates-formes numériques, la diffusion de l’Internet haut débit et la disponibilité d’appareils multifonctionnels n’ont pas seulement généré des changements dans la communication, des contenus et des supports d’information. L’effet combiné de ces technologies a transformé l’organisation industrielle en facilitant la convergence la chaine de valeur vers une structure interdépendante. Cette transformation modifie non seulement le business des entreprises existantes, mais favorise également l’apparition de nouvelles entreprises qui déploient des fonctions d’intermédiation, ainsi que de nouveaux business models dans des secteurs adjacents.

La vitesse de croissance de la technologie est exponentielle, alors que les organisations et la société en général évoluent à une vitesse de changement linéaire, de sorte que l’impact de ces technologies sur les organisations est transcendantal. Les processus commerciaux dans les chaînes de valeur sont transformés offrant une plus grande efficacité et efficience, la communication et la coordination entre les employés et les différents secteurs de l’entreprise sont éclipsées par de nouvelles plateformes basées sur les réseaux sociaux d’entreprise et les plateformes virtuelles. Dans ce contexte, de nouvelles opportunités se présentent pour la livraison d’une plus grande valeur et une meilleure expérience client et dans la façon dont les entreprises communiquent. Ainsi, les opportunités d’amélioration organisationnelle offertes par la digitalisation sont nombreuses 30:

  • En cassant les silos internes, la digitalisation favorise une collaboration plus étroite entre marketing et CRM, entre recherche et développement (R&D), marketing et production, etc. ;
  • En facilitant l’accès à la formation et à l’apprentissage, grâce au e-learning et maintenant à l’émergence des cours en ligne ouverts en entreprise, des parcours de développement plus individualisés et donc plus riches deviennent possibles ;
  • La digitalisation aide en développant des communautés avec le monde extérieur (clients, influenceurs, fournisseurs, partenaires, etc.) ;
  • Il ouvre des opportunités en élargissant le champ d’expérimentation, en testant rapidement les versions bêta des futures offres, comme le font les pure players du numérique auprès de leurs collaborateurs ;
  • Elle accélère les processus de prise de décision et rebat les cartes sur les rôles et les responsabilités au sein de l’organisation, avec la mise en place de réseaux auto-organisés aux côtés de structures hiérarchiques.

Par conséquent, de nouvelles opportunités seront créées grâce aux développements technologiques.


  1. La digitalisation dans le secteur énergétique

Comme dans n’importe quel secteur, les entreprises du secteur énergétique ont également dû se réinventer pour s’adapter au marché et aux nouvelles habitudes de la concurrence. Des transformations digitales se sont alors imposées que ce soit au niveau de la distribution, de la communication, etc.

  • Communication Stratégies Numériques

Les stratégies de digitalisation introduisent un changement organisationnel global qui rompt avec le statu quo actuel, modifie radicalement le fonctionnement de l’entreprise, et par conséquent, nécessite de changer la culture de l’organisation. Un tel changement global doit être correctement préparé en raison de l’importance du secteur de l’énergie. Les processus de communication jouent un rôle clé dans cette préparation et assurent l’échange d’informations pour évaluer et mesurer les performances stratégiques mesurées entre les entreprises et les pays. La communication permet alors de préparer le terrain pour un changement de la réalité organisationnelle. Elle permet de réduire les angoisses sociales liées à la transformation énergétique.

  • Exploitation du big data

La numérisation de l’énergie est encadrée par des changements dans les logiciels et le traitement des données, les technologies de l’énergie physique et la connectivité. Les changements dans les logiciels et le traitement des données sont particulièrement influents, car ils permettent de tirer des informations des données énergétiques et de prendre des mesures en fonction de ces informations. L’application d’algorithmes d’optimisation et d’apprentissage automatique se développe à mesure que la numérisation de l’énergie se développe. Les technologies de contrôle automatisé offrent la possibilité de lier les avancées des technologies numériques aux besoins d’un système énergétique basé sur la production renouvelable intermittente.

1 Dulac, J. & Abergel, T. (2018). Énergie et bâtiments : regards sur le reste du monde. Annales des Mines – Responsabilité et environnement, 90, 17-21. https://doi.org/10.3917/re1.090.0017

2 Angelier J.-P., (2005). Électricité et gaz naturel : du monopole public à la concurrence réglementée. Une perspective historique », Working paper, 2005 (téléchargeable à l’adresse : http://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00120737/en/)

3 Auverlot, D. & Lavergne, R. (2019). Quel équilibre futur pour l’offre et la demande d’énergie dans la transition vers un monde neutre en carbone ?. Annales des Mines – Responsabilité et environnement, 95, 7-9. https://doi.org/10.3917/re1.095.0007

4 AIE (2017a), Energy Technology Perspectives 2017, Paris, Debra Justus and Justin French-Brooks

5 AIE (2017c), Digitalization & Energy, Paris, Paris, Trevor Morgan.

6 Aurélien Evrard, Stefan C. Aykut. (2017). Une transition pour que rien ne change ? Changement institutionnel et dépendance au sentier dans les « transitions énergétiques » en Allemagne et en France. Revue internationale de politique comparée, Vol. 24 (1-2), pp.17-49. hal-03301625

7 Marty F. (2011). Une régulation du secteur de l’énergie au travers des procédures d’engagements ? – Réflexions sur le contentieux concurrentiel européen. IDEP – Institut d’économie publique

8 Finon, D. (2008). La fourniture d’énergie entre concurrence et développement durable : nouvelles régulations et nouvelles stratégies. Flux, 74, 9-21. https://doi.org/10.3917/flux.074.0009

9 Clastres C. (2014). Concurrence, régulation et insertion des nouvelles technologies de l’énergie dans les marchés énergétiques. Economies et finances. Faculté d’Economie de Grenoble

10 Auverlot, D. & Lavergne, R. (2019). Quel équilibre futur pour l’offre et la demande d’énergie dans la transition vers un monde neutre en carbone ?. Annales des Mines – Responsabilité et environnement, 95, 7-9. https://doi.org/10.3917/re1.095.0007

11 Angelier J.-P., (2005). Électricité et gaz naturel : du monopole public à la concurrence réglementée. Une perspective historique », Working paper, 2005 (téléchargeable à l’adresse : http://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00120737/en/)

12 Duriez, B. Hémidy, L. (1996). Le conseil en gestion stratégique : une nouvelle approche du conseil en gestion ?. Ensemble, Revista electronica de la Casa de Argentina en Paris, Ministerio de Educación, Argentine, ) pp.10-14. hal-02693619

13 Grandval, S. Ahmed H. (2005). L’apport de la théorie des jeux à la démarche d’analyse stratégique. Vie et Sciences de l’Entreprise, ANDESE, 2005, 168 – 169 (3), 10.3917/vse.168.0006. hal-01672504

14 Grandval, S. Ahmed H. (2005). L’apport de la théorie des jeux à la démarche d’analyse stratégique. Vie et Sciences de l’Entreprise, ANDESE, 2005, 168 – 169 (3), 10.3917/vse.168.0006. hal-01672504

15 Clergeau, C., Glasberg, O. & Violier, P. (2014). Chapitre 6. La démarche stratégique. Dans : , O. Glasberg & P. Violier (Dir), Management des entreprises du tourisme: Stratégie et organisation (pp. 123-146). Paris: Dunod.

16 Soparnot, R. (2000). Chapitre 1. La stratégie et les fonctions de l’entreprise. Dans : , R. Soparnot, Management des entreprises: Stratégie. Structure. Organisation (pp. 7-87). Paris: Dunod.

17 Soparnot, R. (2000). Chapitre 1. La stratégie et les fonctions de l’entreprise. Dans : , R. Soparnot, Management des entreprises: Stratégie. Structure. Organisation (pp. 7-87). Paris: Dunod.

18 Meier O. (2018). Diagnostic stratégique. Dunod, 5e édition

19 Bruna, M. (2020). Du diagnostic stratégique à l’alignement. Gestion 2000, 37, 67-85.

20 Kalika, Michel & Gauzente, Claire. (2001). Orientation stratégique externe et performance : le cas des moyennes entreprises du secteur agroalimentaire. La Revue des Sciences de Gestion Direction et Gestion. 28.

21 Moatti, A. (2016), « Le numérique rattrapé par le digital ? ». Le Débat, <halshs- 01720052>.

22 Nambisan, S., Lyytinen, K., Majchrzak, A.,& Song, M. (2017). Digital Innovation Management: Reinventing la Innovation Management Research in a Digital World. MIS Quarterly, 41(1), p. 223-238.

23 Pointeau, B. (2015). « La nouvelle réalité du monde commercial face au digital », Bain &Company, disponible sur journaldunet.com

24 Bouchet, Yannick & Bertacchini, Yann & bénet, didier. (2016). L’entreprise du 21ème siècle résiliente et ambidextre, le numérique comme hypothèse de travail (2016).. revue internationale d’intelligence économique.

25 Bonesso, S., Fabrizio Gerli, F. et Scapolan, A. (2014). The individual side of ambidexterity: Do individuals’ perceptions match actual behaviors in reconciling the exploration and exploitation trade-off?. European Management Journal, vol. 32 (3), 392-405.

26 Meyenberg, Ute. (2018). Entreprise du futur : les enjeux de la transformation numérique des entreprises. Terminal. 10.4000/terminal.2215.

27 DUDÉZERT, A. (2018). La transformation digitale des entreprises. Repères La Découverte.

28 Brasseur, M., & Biaz, F. (2018). L’impact de la digitalisation des organisations sur le rapport au travail : entre aliénation et émancipation. Question(s) de management, 21(2), p. 143-155.

29 Johansson, J., et al. (2017). Work and Organization in a Digital Industrial Context. Management Revue, 28(3), p. 281-297.

30 Johansson, J., et al. (2017). Work and Organization in a Digital Industrial Context. Management Revue, 28(3), p. 281-297.

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