Cet exemple de mémoire vise à vous donner un aperçu des attentes académiques relatives à la rédaction de mémoire dans ce domaine de compétence.
Sommaire
I. Entreprise familiale, de quoi parle-t-on ? 4
I-1. Définition et origine du capital social 4
I-2. Les caractéristiques spécifiques des entreprises familiales 7
1-3-1. Les valeurs familiales 10
1-3-2. Réseaux au sein de l’entreprise familiale 10
1-3-3. La question de confiance 11
I-4. La question de compétitivité 12
II. L’éducation familiale paternaliste, quel lien avec la question de compétitivité ? 14
II-1. Liens entre la notion de famille, d’entrepreneuriat et d’entreprise familiale 14
II-2. L’entreprise familiale entrepreneuriale et l’éducation familiale paternaliste 16
III. Le genre, quelle influence sur le choix du successeur en entreprise familiale 19
III-1. La succession comme un processus dynamique 19
III-2. Quelle relation entre prédécesseur/successeur ? 20
III-3. La place du genre dans la succession 21
III-3-1. Une préférence pour les fils 23
III-3-2. Manque de crédibilité et de légitimité chez les héritières 23
III-4. Place et rôle du patriarcat 25
Partie II : Étude empirique 26
I-1. Choix de l’étude qualitative 26
I-3. Technique de collecte de données 28
II. Présentation et discussion des résultats 30
II-1. Cas de succession dans les entreprises étudiées 30
II-2. Résumé des études de cas 42
III. Discussion de l’impact du genre sur la succession 46
Références bibliographiques 52
Introduction
L’entreprise familiale n’a été étudiée en profondeur dans le domaine universitaire que relativement récemment. La plupart des travaux ont choisi de se concentrer sur les éléments communs aux PME en général, sans entrer dans le détail de la nature et de l’origine de la spécificité de l’entreprise familiale (Poulain-Rehm, T. (2006). Compte tenu de l’importance de ces entreprises tant en termes de production que d’emploi, il est quelque peu choquant que pendant longtemps, des études aient été menées dos à la nature différentielle des entreprises familiales. Heureusement, cette situation a pris un tournant substantiel et, depuis quelques années, la recherche académique s’est penchée sur les traits communs à ces entreprises, ainsi que sur les déterminants de la prospérité et de la pérennité de ces types d’entreprises.
L’étude des entreprises familiales est devenue un protagoniste dans le contexte académique actuel en raison de l’importance que ce type d’organisations ont dans les structures productives des économies, développées et en développement, trouvant le centre de sa pertinence dans le pouvoir générateur d’emplois qu’elles représentent et l’esprit d’entreprise qu’incarnent leurs fondateurs. Cependant, malgré les excellents antécédents de nombreuses entreprises familiales bien connues et les modèles de gestion qui se sont développés autour d’elles, beaucoup d’autres ont encore des “goulots d’étranglement” dans leur performance, entre autres raisons, en raison d’une maintenance difficile dans le temps, en raison des crises dites générationnelles. Grâce à quoi, diverses études sont orientées vers le problème de la succession et les stratégies de professionnalisation de leurs ressources humaines, administratives et financières qui leur permettent de réduire les problèmes typiques de leur nature (Basco R.; Rodriguez M.J.P. (2009).
Notre travail s’insère dans le cadre de cette littérature sur la compétitivité des entreprises familiales. Notre objectif principal est d’analyser dans quelle mesure certaines spécificités des entreprises familiales sont source d’avantage concurrentiel stratégique et, ainsi, de répondre aux problèmes liés à leur pérennité. Ce dernier aspect est d’un grand intérêt, car, malgré le fait que pour certains auteurs (Lassassi, M & Hammouda, N-E. (2009) l’objectif principal de l’entreprise familiale est la continuité générationnelle, les preuves disponibles viennent montrer que la survie du caractère familial en deuxième génération seulement atteint le tiers et en troisième moins du quart (Basco R.; Rodriguez M.J.P. (2009).
En pratique, bon nombre d’entreprises naissent associées à la capacité entrepreneuriale ou à l’esprit d’entreprise d’un fondateur et liées à une famille, ce qui semble leur conférer un certain avantage concurrentiel. Cependant, le problème se pose, car cet avantage s’érode avec le temps s’il n’est pas transféré aux générations suivantes. En ce sens, un élément essentiel pour expliquer cette réalité est l’interrelation entre la famille et l’entreprise, une interaction de nature complexe, en grande partie en raison de sa nature ambivalente, c’est-à-dire, d’une part, qu’elle est à l’origine du potentiel avantage concurrentiel des entreprises et, d’autre part, constitue l’un des facteurs pouvant compromettre la pérennité intergénérationnelle de ces entreprises.
Les résultats de certaines recherches dans ce domaine sont loin d’être concluants. À un extrême se trouveraient ceux qui soutiennent que l’interrelation entre l’entreprise et la famille ne peut pas survivre ou est vouée à disparaître (Anderson A.R.; Jack S.L.; Drakopoulou Dodd S. (2005) et, à l’opposé, les approches les plus récentes soulignent que la proximité et l’interrelation entre la dynamique de la famille et celle de l’entreprise finit par configurer un avantage concurrentiel associé à la gestion familiale avec des conséquences positives sur la pérennité de l’entreprise elle-même. Ce deuxième type d’approche est celui qui insiste sur l’utilisation du terme familiness pour recueillir la spécificité que l’interrelation entre les systèmes familial et entrepreneurial donne à ces entreprises.
Cette approche nous invite à reconsidérer deux faits. D’une part, nous ne sommes pas face à une réalité statique, centrée sur l’harmonisation des intérêts entre famille et entreprise, mais plutôt à un ensemble interdépendant qui sera viable à long terme s’il est capable de générer un objectif commun. D’autre part se pose la question de savoir si ladite interaction entre l’entreprise familiale confère certains avantages à cette dernière en termes de pérennité. En d’autres termes, l’adoption de ce point de vue permet, entre autres, de se focaliser sur la question de savoir où se situe l’avantage concurrentiel durable qui fondera l’entreprise familiale. L’éducation familiale paternaliste de l’entrepreneuriat a-t-elle un impact sur la performance continue de l’entreprise ? Cette éducation peut-elle être transmise à tous les héritiers, quel que soit le genre ?
Pearson, A.W., Carr, J.C., & Shaw, J.C. (2008) étudient divers facteurs pouvant être liés au comportement entrepreneurial dans les entreprises familiales. Les variables qu’ils considèrent comprennent l’âge et la durée de séjour du directeur général (ancienneté dans le poste) et le nombre de générations de la famille qui contrôlent la propriété et la gestion de l’entreprise. Bien que son hypothèse initiale était que l’ancienneté dans la position des dirigeants pouvait avoir un impact négatif sur l’entrepreneuriat, la recherche a conclu que de nombreuses entreprises familiales maintenaient un esprit entrepreneurial et innovant élevé, quel que soit l’âge ou l’ancienneté de leur fondateur.
L’entrepreneuriat et l’entreprise familiale sont directement et étroitement liés. Bien que pendant de nombreuses années les chercheurs aient considéré ces deux concepts comme des domaines d’étude indépendants, la recherche académique et populaire de la dernière décennie confirme que l’entreprise familiale, l’innovation et l’entrepreneuriat sont fortement corrélés et qu’aujourd’hui, il n’est pas possible de comprendre l’un sans les autres.
De tout cela, nous arrivons à notre problématique principale : « l’éducation familiale comme avantage concurrentiel stratégique dans l’entreprise familiale entrepreneuriale paternaliste ? ».
À travers cette problématique, notre objectif est de comprendre l’effet du genre dans trois domaines ou moments du processus de succession : la figure de représentativité du prédécesseur-fondateur et l’éducation familiale, le développement de l’engagement envers l’entreprise par le successeur et l’impact du genre sur cette succession.
Pour atteindre cet objectif, nous diviserons ce travail en deux parties. La première partie porte sur étude théorique à travers laquelle nous établissons un cadre théorique sur notre sujet, et donc les caractéristiques des entreprises familiales et les processus de succession. La seconde partie quant à elle porte sur une étude qualitative par le biais d’études de cas de quelques entreprises familiales.
Partie 1 : Cadre théorique
L’origine d’une entreprise familiale résulte d’une idée novatrice (entrepreneuriat) d’une personne (entrepreneur) qui travaille initialement de manière « dépendante » dans une entreprise, se développant en tant que « salarié », où s’acquièrent les premières expériences, observant indirectement les besoins du marché.
La communauté académique a parfois tendance à confondre le concept d’entreprise familiale avec celui de petite et moyenne entreprise, sans reconnaître qu’un grand nombre des plus grandes entreprises sont des entreprises familiales (Moundir, L. & Hammouda, N. (2009).
Basco R. et Rodriguez M.J.P. (2009) estiment qu’une définition précise des entreprises familiales est encore loin ; cependant, ils les caractérisent comme les entreprises dont le pouvoir de décision est familial, les responsabilités de gouvernement et de direction sont exercées par certains de ses membres et au moins certains membres de la deuxième génération sont intégrés à l’entreprise.
Bien qu’il n’existe pas de concept unifié d’entreprise familiale, il convient de faire une synthèse des apports les plus significatifs dans le cadre de la réflexion académique qui contribue à une interprétation et une connaissance appropriée de ce type d’organisation.
Figure 1 : L’entreprise familiale
Source : Lassassi, M & Hammouda, N-E. (2009).
Aussi, une entreprise familiale est considérée comme une unité économique dont la propriété est entre les mains d’une ou plusieurs familles, dont les membres sont impliqués de manière décisive dans l’administration et la direction de l’entreprise (Sihem Ben M-J. et 7 Mignon, S. (2016). Il existe donc une relation étroite entre la propriété et la gestion ou, en d’autres termes, entre la vie de l’entreprise et la vie de la famille. En ce sens, les valeurs suivantes sont considérées comme présentes dans l’entreprise familiale (Basco R. et Rodriguez M.J.P. (2009) :
- Un plus grand degré d’engagement et de dévouement à l’entreprise. L’homme d’affaires risque, en permanence, le patrimoine, le prestige et l’avenir de sa famille. Le successeur a besoin de succès et d’efforts extrêmes pour y parvenir ;
- Plus grand degré d’autofinancement et de réinvestissement des bénéfices pour financer la croissance future de l’entreprise. Cela implique également un contrôle plus rigoureux des dépenses ;
- Meilleure orientation vers le marché. Les entreprises familiales ont généralement leurs propres façons de faire, un savoir-faire commercial que leurs concurrents n’ont pas et qui se transmet aux générations suivantes, le perpétuant comme stratégie de gestion ;
- Une plus grande connexion avec les clients. L’engagement qui caractérise les entreprises familiales se manifeste généralement sous la forme d’une attention plus cordiale et attentive et d’une qualité de service supérieure, donnant lieu à un plus grand degré de confiance et de réputation parmi les clients ;
- Comportement plus enthousiaste des travailleurs. Généralement, le fondateur a une meilleure relation et se sent plus responsable envers ses travailleurs, qui l’ont aidé au début de l’entreprise, se traduisant par une bonne évaluation d’eux envers lui et par le sentiment qu’ils font partie d’une équipe ;
- Flexibilité compétitive et capacité d’ajustement dans les phases dépressives du cycle économique, avec des effets notables sur la stabilité de l’emploi.
Tableau 1 : Définitions de l’entreprise familiale dans la recherche francophone de 2000 à 2015
Définitions | Auteurs | Conclusions |
Propriété | Daumas (2002) ; Trébucq (2002) ; Germain (2006) | Les entreprises détenues par une famille (ou plusieurs familles) ou par un membre de la famille, en position d’actionnaire principal |
Management (contrôle direct) | Croutsche et Ganidis (2008, 2009) | Est familiale toute entreprise dont le contrôle de droit ou celui de fait est détenu par les membres d’une ou plusieurs familles |
Pouvoir d’influence | Arrègle et Mari (2010) ; Cadiou et Cadiou (2014) | « La différence essentielle qui distingue une entreprise familiale d’une non familiale tient à l’influence de la famille sur le comportement de l’entreprise » (Arrègle et Mari, 2010, p. 99) |
Propriété/Management (contrôle direct) | Lobet (2006) ; Poulain-Rehm (2006) ; Labardin et Robic (2008) | Le contrôle du capital est détenu à au moins 20 % par au moins un membre de la famille. Le dirigeant est membre de la famille. |
Propriété/Management/Pérennité | Mzid Ben Amar et Mezghani (2010) ; Hirigoyen (2014) | Capital contrôlé par la famille, impliqué dans la gestion de l’entreprise et volonté de pérenniser l’entreprise. Perspective sur le long-terme contribuant à assurer la stabilité et la pérennité de l’entreprise. La pérennité se définit quant à la façon dont les EF parviennent à construire sur la durée leur avantage concurrentiel. |
Propriété/Management/Pouvoir d’influence/Capital social | Blondel (2012) ; Coeurderoy et Lwango (2012, 2014) ; Lanoux (2015) | Concentration du pouvoir et de la propriété au sein de la famille. Les membres cherchent à maintenir des influences au sein de l’organisation et des liens sociaux. Le capital social est défini comme un réseau de relations. |
Anderson, R.C. et D.M. Reeb (2003) font référence au fait que l’entreprise familiale est considérée comme d’une grande importance dans l’économie d’un pays avec un système de marché libre, car elle représente un pourcentage élevé du nombre total d’entreprises qui y opèrent. De manière générale, les entreprises familiales sont généralement associées à des petites et moyennes entreprises peu professionnalisées ; mais sa principale caractéristique et ce qui définit l’essence de ce type d’organisation n’est pas la taille ni l’efficacité de la direction directive, mais le fait que la propriété et le contrôle de la direction sont entre les mains d’un ou plusieurs membres d’une même famille et qu’il est prévu que l’entreprise reste entre les mains de la famille.
Le modèle des trois cercles (Gersick, & al., (1997) est l’un des plus largement utilisés pour décrire les différentes situations actuelles et futures des entreprises familiales. Dans ce modèle, chaque cercle représente un groupe de personnes, avec des caractéristiques particulières par rapport à l’entreprise familiale, et les intersections des cercles, les groupes de personnes qui présentent deux ou trois des trois caractéristiques identifiées par le modèle.
Figure 2 : Le model des trois cercles de l’entreprise familiale
Source : Gersick, & al., (1997)
Dans les entreprises familiales, la famille constitue le principal talent humain, ce qui influence significativement leur performance. L’influence de la famille, soit par la propriété, soit par le travail dans l’entité, est ce qui détermine les potentialités et, à son tour, les faiblesses de ce type d’organisation (Anderson A.R.; Jack S.L.; Drakopoulou Dodd S. (2005).
La famille apporte à l’entreprise, non seulement ses valeurs, mais les comportements qui ont été utiles aux différents membres qui la composent. De même, elle influence à la fois positivement et négativement. L’influence de ces comportements dans la gestion de l’entreprise familiale s’effectue par ce qu’on appelle la culture familiale, qui ne sont rien d’autre que les valeurs spécifiques qui sont pratiquées à l’intérieur et à l’extérieur de la famille par chacun de ses différents membres (Moundir, L. & Hammouda, N. (2009).
Les entreprises familiales ont des caractéristiques communes : elles sont normalement dirigées par leurs propriétaires, elles ont tendance à souffrir de concentration et à générer des interférences de nature familiale dans la prise de décision ; cet aspect constitue un obstacle sérieux à une gestion financière et commerciale optimale ; les succès et les échecs de l’entreprise affectent la famille. Du fait de leur taille, majoritairement des PME, ces entreprises sont plus souples pour s’adapter aux changements brusques de leur environnement, mais elles ont souvent des difficultés à les anticiper, car elles ne suivent pas leurs évolutions et les informations nécessaires font défaut. Poulain-Rehm, T. (2006) considère l’entreprise familiale comme l’espèce commerciale du monde économique la plus agile et la plus capable de rivaliser dans le type de marché en mutation que nous connaissons aujourd’hui.
Les valeurs dans les entreprises familiales sont un facteur clé de la performance de ces organisations et parviennent à devenir un avantage concurrentiel qui peut être préservé dans le temps (Moundir, L. & Hammouda, N. (2009). Ceux qui décrivent le mieux à la fois la famille et la génération qui contrôle l’entreprise sont l’engagement, la responsabilité, la justice ou l’équité, la crédibilité, le respect de la loi et le travail acharné. Actuellement, il existe des intérêts conflictuels entre les objectifs de la famille et les objectifs de l’entreprise, les valeurs de l’entreprise familiale doivent être définies et partagées, de manière à ce qu’elles soient les piliers sur lesquels repose un système pérenne, qui profite aux deux parties (Sihem Ben M-J. et 7 Mignon, S. (2016).
Les principales différences habituellement mises en avant entre la culture de ce type d’organisation et celle des entreprises qui n’ont pas le caractère familial sont les suivantes :
- L’entreprise familiale a plus de parties intéressées et un plus grand nombre d’interrelations entre elles ;
- Les actionnaires ont tendance à avoir un engagement différent envers l’entreprise ;
- Les cycles d’évolution et de développement de l’entreprise familiale sont liés aux besoins changeants des membres de la famille qui la dirigent.
Une autre caractéristique qui ressort de ces entreprises est la culture, ou en d’autres termes, les valeurs, les attitudes et les croyances d’une famille qui dirige et contrôle principalement l’entreprise en question. Cette culture définit le fonctionnement interne que l’entreprise va adopter et de ce fait, de nombreux auteurs ont également tenté de l’étudier afin d’obtenir des résultats sur les problématiques spécifiques de l’entreprise familiale : « La culture familiale gouverne l’orientation stratégique de l’entreprise » (Berrada, A. et al. (2014).
L’importance des relations et des activités sociales dans la performance économique est maintenant largement acceptée, servant de promoteur et de facilitateur pour la génération et l’échange de transactions (sociales et économiques) entre les individus. Les universitaires ont génériquement appelé ce phénomène le capital social. De manière générale, les éléments du capital social (Larioui, L. & Alaoui M. (2016) se concentrent sur la confiance, la réciprocité et la coopération ; Cependant, en approfondissant la spécificité des entreprises familiales et fondamentalement dans leur gestion, ces éléments prennent un caractère managérial dont les processus sont soulignés du niveau stratégique au niveau opérationnel, associés aux objectifs prévus dans l’organisation, conçue sur une entreprise en activité et basée sur une information proactive par une prise de décision efficace.
Comme cité dans l’article d’Arrègle, J., Durand, R. & Véry, P. (2004), « Le capital social est l’ensemble des ressources que les individus peuvent obtenir par la connaissance d’autres individus, en faisant partie d’un réseau social avec eux, ou simplement en étant connu d’eux et ayant une bonne réputation ». Le capital social est considéré comme une ressource immatérielle qui permet aux personnes et aux groupes d’obtenir des avantages grâce à des relations sociales fondées sur la confiance, la réciprocité et la coopération.
Approfondir le concept de capital social familial nécessite d’approfondir chacune des dimensions qui le constituent. Dans ce contexte, les éléments du capital social considérés étaient : les relations de groupe et de réseau (interconnexion entre les membres de l’entreprise) et la réciprocité (Larioui, L. & Alaoui M. (2016) :
- Relations et réseaux de groupe : l’analyse de la relation des groupes et des réseaux dans l’entreprise familiale a porté sur le type de relation entre les groupes, en s’intéressant plus particulièrement à la sociabilité entre les membres de la famille et les employés, en tant que mécanisme de capital social pour la promotion au sein de l’entreprise. Dans la plupart des cas, l’évaluation de l’expérience professionnelle prédomine, en termes de recherche du bien-être et de la satisfaction des clients lors de leurs achats. Par conséquent, une relation employeur-employé claire est évidente, dans laquelle le degré de sociabilité entre les parties n’a pas d’influence décisive lors de la décision de promotion ou d’embauche de nouveau personnel. À cet égard, il est important de souligner que les entreprises familiales sont des entités dynamiques, et selon leur maturité, le nombre de personnes impliquées dans chaque domaine augmente et, avec cela, le degré de complexité en termes de leurs relations est accru. De cette manière, les besoins du personnel deviennent plus divergents et difficiles à gérer, ce qui fait que déterminer qui doit ou non occuper un poste est une tâche d’experts connaissant les domaines de l’entreprise ;
- Réciprocité : l’efficience et l’efficacité des employés se mesurent en fonction de la performance et du plein respect des activités confiées, ainsi que de la capacité et de la créativité dont les entreprises disposent. Au sein des entreprises familiales, les relations de communication, d’amélioration et de participation dans l’entreprise sont gérées directement depuis la direction.
Ainsi, dans les entreprises familiale, la notion de capital social fait référence aux comportements collectifs liés les uns aux autres, qui vont de la sociabilité (associativité) affichée dans les réseaux sociaux au pouvoir exprimé dans la capacité politique à mobiliser efficacement les ressources du groupe et le niveau d’organisation avec lequel le groupe se résout et se coordonne ses actions et activités. En ce sens, la coopération (travail en commun) et les relations familiales se distinguent.
Par ailleurs, d’autres auteurs comme Lwango, A. & Cœurderoy, R. (2011) mettent en évidence trois éléments essentiels du capital social des entreprises familiales, à savoir : les valeurs, la confiance, et les réseaux.
La famille est une institution qui contribue à façonner les attitudes et les comportements de ses membres et qui, par conséquent, a un effet évident sur la génération du capital social de l’entreprise familiale. Dans ces types d’entreprises, la famille et l’entreprise elle-même généralisent des visions partagées entre les individus qui les composent sur ce qui est prioritaire et les règles à respecter. Ces visions favorisent l’apparition de comportements coopératifs et d’actions collectives mutuellement bénéfiques (Arrègle, J., Durand, R. & Véry, P. (2004). Un aspect fondamental à prendre en compte est la façon dont l’institution familiale modifie ou altère les priorités des valeurs de l’entreprise. Le capital social est lié à la génération et au maintien d’un ensemble de valeurs partagées qui facilitent un mode d’action approprié. Ce contexte d’évaluation commun est souvent étroitement lié à l’histoire et à la culture de la famille et de l’entreprise (Pieper, M.T. & Klein, B.S. (2007).
La dimension structurelle du capital social fait référence aux réseaux de relations que possèdent les individus ou les unités sociales, telle que l’entreprise. À l’époque, lorsque l’on aborde la familalité sous l’angle de l’approche ressource et capacité, on fait déjà une première approximation du cadre des relations et des réseaux d’affaires comme ressource différentielle de nature procédurale dont dispose l’entreprise familiale. Désormais, le rôle des réseaux familiaux et professionnels est recentré dans le cadre de la théorie du capital social. Un réseau est constitué d’agents, qu’il s’agisse d’individus ou d’organisations, connectés par un lien qui leur permet d’échanger des ressources. Le but ultime d’un réseau est de faciliter la coordination et la coopération en réduisant l’incertitude et les coûts de transaction.
L’étude d’un réseau de relations conduit à identifier à la fois les membres et les ressources et liens qui le structurent (Arrègle, J., Durand, R. & Véry, P. (2004). Parallèlement à cela, deux caractéristiques sont particulièrement déterminantes : la centralité et la fermeture. D’un côté, qui occupe les positions centrales du réseau, de l’autre, ses limites, c’est-à-dire sa fermeture ou son ouverture sur l’extérieur. Même s’il s’agit d’une seule institution, l’entreprise familiale englobe en réalité deux éléments fondamentaux, la famille et l’entreprise, donc, en toute logique, le réseau familial et le réseau d’entreprise ou d’organisation coexisteront. Sans aucun doute, ces réseaux vont s’influencer mutuellement, ils sont constitutivement différents.
La centralité dans le réseau familial est généralement associée au fondateur et aux successeurs, cependant, dans certaines familles qui détiennent effectivement le pouvoir en vertu de leur pouvoir d’influence sur les membres de la famille, peut ne pas être celle qui est formellement en charge de l’entreprise. La fermeture est apparemment déterminée par l’appartenance ou non à la famille ou, plus précisément, au cercle familial des affaires. Cependant, la tendance générale est de considérer la famille au sens large, au-delà de la parenté stricte, c’est-à-dire tous ceux liés à la famille ou à l’entreprise avec lesquels des liens forts sont tissés.
L’expansion de l’activité d’une organisation suppose une augmentation de l’interdépendance entre les différents membres, avec pour conséquence une croissance exponentielle du nombre de relations d’agence, dans lesquelles un mandant doit faire confiance à un agent pour mener à bien une activité dans un contexte d’information à forte asymétrie. Dans un scénario comme celui-ci, l’amélioration de l’efficacité implique de résoudre ce type de problème : traiter les coûts de surveillance des agents de manière à ce qu’il soit possible de contrôler directement l’exécution des tâches ou « d’aligner » les incitations du mandant et des agents à travers des contrats de rémunération.
Cependant, la théorie de l’agence propose une solution partielle, dans la mesure où elle se concentre sur les relations hiérarchiques entre actionnaires et dirigeants, où l’alignement susmentionné est particulièrement efficace. Mais, simultanément, il ignore les liens entre les membres intermédiaires d’une organisation, pour lesquels l’alignement des intérêts peut être très complexe. En d’autres termes, le lien entre l’effort et l’évolution de la valeur des actions d’une entreprise ou de ses résultats est très ténu ou, du moins, difficile à quantifier. Cela rend la tentative de concilier les incitations trop coûteuse et inefficace. La surveillance, en revanche, peut être excessivement agressive, dans de nombreux cas impossible et tout aussi coûteuse. Malgré tout, la solution de la théorie de l’agence est incontestablement supérieure, car elle ne recourt pas à un mécanisme coercitif externe (Pieper, M.T. & Klein, B.S. (2007).
Si l’on applique ces notions de base au domaine du fonctionnement des entreprises, la confiance est une réduction de l’incertitude inhérente aux relations d’agence entre les individus et ce qui la définit est l’existence d’une mutualité ou d’un lien d’interdépendance des fonctions d’utilité entre les sujets. Ce lien encourage les comportements coopératifs et, dans ces circonstances, la surveillance ou le contrôle des comportements développés ou l’alignement des préférences proposé par la théorie de l’agence ne seraient pas nécessaires, puisque la relation sociale elle-même le génère. Pourtant, la confiance est un bien préférentiel ou un bien méritoire caractéristique de la cellule familiale. Si l’on prend cette hypothèse pour acquise, les entreprises familiales bénéficieraient d’un avantage de départ sur les autres entreprises. Cependant, toutes les formes de confiance ne se valent pas et la confiance personnelle n’est pas toujours bonne. D’où la nécessité d’analyser, d’une part, les différentes formes de confiance et, d’autre part, leur évolution conflictuelle liée à l’expansion de l’entreprise.
La compétitivité est un élément déterminant pour le développement d’une entreprise et, comme en témoignent les travaux qui y sont menés, elle est le résultat de l’interaction de divers facteurs, tant externes qu’internes, qui influent à leur tour sur les activités et la dynamique de l’entreprise. Dans le cas des entreprises familiales, l’élément familial est un facteur interne de la plus grande importance, comme l’ont démontré Very et Raytcheva (2001) en incorporant des facteurs d’incidence de la famille propriétaire.
Les entreprises doivent répondre à cinq forces concurrentielles : la menace des nouveaux entrants, le pouvoir des fournisseurs, les menaces des produits/services de substitution, le pouvoir des acheteurs et la rivalité entre les entreprises existantes (Porter, 1980). La position relative de l’entreprise au sein d’une industrie détermine si ses bénéfices sont supérieurs ou inférieurs à la moyenne de l’industrie ; la justification fondamentale d’être au-dessus de la moyenne de l’industrie.
Les deux types fondamentaux d’avantages concurrentiels, lorsqu’ils sont combinés à l’étendue des activités par lesquelles une entreprise cherche à les atteindre, conduisent à trois stratégies génériques pour atteindre des performances supérieures à la moyenne de l’industrie : maîtrise des coûts, différenciation et concentration ; La stratégie de focalisation comporte deux variantes, la focalisation sur les coûts et la focalisation sur la différenciation.
Le point de départ essentiel de cette théorie est que l’avantage concurrentiel d’une entreprise repose à la fois sur l’hétérogénéité des ressources disponibles et sur leur utilisation à sa manière propre ou unique (Poulain-Rehm (2006). Partant de cette prémisse, le but ultime de cette perspective est de comprendre comment les entreprises peuvent obtenir et maintenir leurs avantages concurrentiels non pas par des stratégies spécifiques, mais en disposant d’une ressource non imitable qui leur donne un avantage dans une certaine dimension lorsqu’il s’agit de créer de la valeur. Par définition, les stratégies sont imitables et, dans le meilleur des cas, elles sont sources d’avantages spécifiques ou limités à une courte période de temps.
Ainsi élevé, l’avantage concurrentiel durable d’une entreprise ne peut reposer sur quelque chose comme une stratégie ponctuelle, mais nécessite plutôt un support plus stable. Plus précisément, il doit résider dans une ressource différentielle, c’est-à-dire dans l’hétérogénéité. Traduit dans notre sphère, si les entreprises familiales maintiennent leur caractère familial, c’est parce qu’elles ont une particularité qui leur donne un avantage sur les entreprises non familiales. Il peut s’agir d’une forme de connaissance des opérations commerciales, d’une réputation à l’étranger, d’un mode de gestion particulier, etc. Notons que cette approche contraste avec la vision de Porter (1980), selon laquelle les entreprises sont constitutivement homogènes par rapport à leurs ressources et l’hétérogénéité est rapidement neutralisée, de sorte qu’elles ne divergeraient que dans les stratégies proposées.
Par ailleurs, Arrègle, Durand, Véry, P. (2004) stipulent que « L’approche théorique fondée sur le capital social semble ouvrir une voie riche pour analyser les sources de compétitivité propres aux entreprises familiale … le capital social des entreprises familiales est influencé par le capital social de la famille propriétaire. En d’autres termes l’approche par le capital social, couplée à l’utilisation de la perspective institutionnelle, contribue à expliquer les sources spécifiques de compétitivité propres à ces entreprises. ».
L’objectif stratégique pour toute entreprise est de construire un avantage concurrentiel durable, en ce sens, les entreprises familiales optent généralement pour une stratégie alliant leadership et différenciation ; cependant, un groupe important d’entreprises familiales adopte une stratégie consistant à s’installer dans une position médiane (Arrègle, Durand, Véry, P. (2004). Le choix d’une stratégie est lié aux objectifs de l’entreprise et à la perception que le PDG a de certains problèmes spécifiques de l’industrie.
Ainsi, la compétitivité de l’entreprise familiale par rapport aux non-familiaux peut être vue sous deux angles : propriété et gestion. Du point de vue de la propriété, ce qui est unique au sujet des entreprises familiales, c’est que les membres de la famille détiennent un pourcentage important des actifs ; du point de vue de la gestion, c’est que les membres de la famille occupent généralement le poste de PDG ou d’autres postes de direction.
Certaines caractéristiques de la compétitivité qui sont propres aux entreprises familiales sont qu’elles bénéficient de l’avantage de garder un caractère « entrepreneur » et de maintenir un sens aigu de la responsabilité sociale, d’une communication verbale et non verbale efficace, d’une identité partagée à travers une langue commune familière, d’une connaissance du métier acquise lors des premières interventions, et d’une forte culture organisationnelle qui contribue à son adaptation externe et son intégration interne. La famille fondatrice présente également certains avantages concurrentiels :
- La propriété familiale peut prolonger la courbe d’apprentissage de l’entreprise en matière de gestion et de marketing ;
- Les familles ont tendance à avoir des horizons d’investissement plus longs que les autres constituants, qui pourraient prendre des décisions à courte vue susceptibles d’augmenter les revenus actuels ou à court terme ;
- Les entreprises familiales cherchent aussi à investir plus efficacement, car les membres de la direction voient l’entreprise comme un actif à transmettre aux générations suivantes.
- La vision à long terme de la famille implique également un rôle vital pour la survie de l’entreprise par rapport aux autres entreprises. (Arrègle, Durand, Véry, P. (2004).
La famille est considérée comme le facteur de différenciation de ce type d’entreprise, où se posent des problèmes tels que les rivalités et les tensions dans l’environnement familial et dans le développement des activités commerciales. En d’autres termes, ce qui se passe dans la famille affecte directement l’entreprise en raison de l’absence de définition des rôles, des fonctions, des tâches et des responsabilités à travers un protocole familial qui précise les limites entre les deux institutions.
Les entreprises familiales sont confrontées à des pressions et à des forces susceptibles d’améliorer ou de retarder la performance stratégique. Par exemple, le désir de préserver la richesse socio-émotionnelle peut inciter les entreprises familiales à préférer prendre plus de risques financiers pour éviter le risque de perdre le contrôle organisationnel (Basu (2004).
De par sa nature d’investisseur patient à vocation de long terme, l’entreprise familiale est également un environnement favorable à l’incubation et au financement de nouvelles initiatives entrepreneuriales. Certains auteurs parlent même de l’environnement réceptif et hospitalier de l’entreprise familiale (Basco, Rodriguez (2009). Encourager le comportement entrepreneurial requiert une volonté de changement qui, on le sait, n’est pas une caractéristique spontanée dans la plupart des groupes sociaux. Faire en sorte que le changement, avec toutes les précautions nécessaires, soit un aspect assumé dans la conduite de l’entreprise familiale demande une mentalité prédisposée et, surtout, exige la preuve de sa nécessité.
Il se trouve, en effet, que l’enjeu supplémentaire de maintenir dans la durée un comportement entrepreneurial, de gérer correctement le binôme opportunité-risque pour créer de la valeur sur plusieurs générations, n’est pas un caprice ou une simple tentative d’imiter l’initiateur de la saga familiale. Il est prouvé que les entreprises entrepreneuriales obtiennent généralement de meilleurs résultats (Carr, Sequeira (2007), ainsi la recherche du bon point d’innovation et d’entrepreneuriat obéit à une logique strictement commerciale et à la vision partagée de la continuité d’activité familiale. De plus, et sauf dans quelques contextes exceptionnels, la dynamique même de marchés de plus en plus concurrentiels, dynamiques et mondiaux oblige l’entreprise familiale multigénérationnelle à maintenir un comportement innovant et un renouvellement soutenu de l’entreprise consistant en la recherche de nouvelles opportunités, l’investissement pour convertir dans les affaires et la volonté de se désinvestir dans les initiatives qui ne se concrétisent pas. Le changement générateur de valeur est une nécessité, et celui qui n’entreprend pas tôt ou tard disparaît.
Figure 3 : Modélisation des liens entre les concepts
Source : Fayolle, A. et Bégin, L. (2009)
La transmission de cet esprit entrepreneurial défini par Schumpeter comme un processus continu de réinvention fondé sur l’innovation, et qui est un aspect clé pour la survie de l’entreprise, n’est pas quelque chose de garanti au sein d’une famille, car elle dépend définitivement des personnages et des circonstances personnelles impliquées. Cependant, ce n’est pas non plus quelque chose qui devrait être improvisé ou simplement assumé. Le fait que l’entrepreneuriat ait du sens pour les plus jeunes membres d’une famille d’affaires aura beaucoup à voir avec la façon dont cette famille se perçoit, c’est-à-dire avec son identité et les valeurs transmises qui en plus de permettre l’équilibre entre les intérêts individuels et les objectifs communs doivent être dûment mis à jour et adaptés aux nouvelles réalités. Idéalement, la famille serait une école de l’initiative entrepreneuriale (Basco et Rodriguez (2009).
Il est reconnu qu’il existe des facteurs sociaux et culturels qui influencent la conformation de l’esprit entrepreneurial, d’autant plus qu’ils affectent davantage les valeurs individuelles de l’entrepreneur potentiel (Basu (2004). Plus précisément, il a été observé que le soutien familial et la coexistence dans un environnement où les parents sont travailleurs indépendants favorisent l’intérêt des enfants à participer à leur propre initiative entrepreneuriale et à créer de nouvelles entreprises (Basco et Rodriguez (2009). Le cas d’une entreprise familiale serait en ce sens paradigmatique, étant aussi important que la génération dirigeante transmette dûment la portée du projet familial, fuyant les modèles unipersonnels ou mythiques, que la génération émergente respecte et reconnaisse les acquis de ses prédécesseurs sans perdre sa propre initiative.
La relation parent-enfant qui remplace la relation mandant-mandataire lorsque l’entreprise est familiale modifie le modèle à travers lequel le père développe un comportement paternaliste ou excessivement protecteur envers son fils. Ce comportement peut se manifester, par exemple, en donnant à l’enfant une sécurité d’emploi, en le payant au-dessus de la productivité ou en le favorisant avec des cadeaux et/ou des privilèges. Pour expliquer ce comportement protecteur, on suppose que le père est altruiste et reconnaît expressément dans ses décisions les conséquences qu’elles peuvent avoir sur le bien-être de l’enfant.
Les membres de la famille ne profitent pas seulement de la famille ; ils s’attendent à des normes de conduite professionnelles chez tous les membres des générations montantes. On s’attend à ce que les générations montantes acquièrent des connaissances non pas en tant que cadres ou exploitants d’entreprise, mais en tant qu’intendants qui supervisent l’entreprise. Prenons, par exemple, une observation d’un chef d’entreprise.
Un leader paternaliste pense à la situation dans son ensemble et considère comment chaque décision affectera “la famille”. Les dirigeants paternels valorisent l’éducation et les compétences sociales et font souvent tout leur possible pour offrir aux employés des opportunités d’améliorer leurs compétences commerciales et interpersonnelles. Un avantage de ce style managérial, lorsqu’il est mené à bien, est que les employés peuvent travailler plus dur pour accomplir des tâches dans un laps de temps donné afin qu’ils puissent atteindre, et parfois même dépasser, leurs objectifs afin de plaire au chef parental et de faire honneur à la famille.
Une lacune du leadership paternaliste est la possibilité que la figure parentale perturbe par inadvertance la structure hiérarchique de la famille, en particulier en période de crise. Si un leader parental est perçu comme favorisant injustement certains membres par rapport à d’autres, la jalousie et le ressentiment peuvent empoisonner l’environnement de travail et le patriarche ou la matriarche n’aura plus la loyauté, la confiance et l’obéissance dont il a besoin pour être un leader efficace.
Basée sur les différences générationnelles entre fondateurs et successeurs, la relation ultérieure des changements stratégiques est positivement modérée par la formation internationale du successeur (Robic, Barbelivien et Antheaume (2014). La succession est fortement influencée par un haut niveau d’éducation, car les successeurs peuvent augmenter la valeur de l’entreprise (d’Andria, Bourgain, Le Loarne-Lemaire, & Gnan (2020). L’éducation à l’entrepreneuriat a un effet positif sur une transmission générationnelle harmonieuse, car elle est cruciale pour la survie des entreprises familiales, ainsi que l’expérience du travail d’un successeur dans une entreprise familiale et une formation de qualité (Robic, Barbelivien et Antheaume (2014). Les compétences cognitives du successeur constituent la compétence de base pour la mise en œuvre d’innovations durables dans l’entreprise familiale (d’Andria, Bourgain, Le Loarne-Lemaire, & Gnan (2020). Le succès de la succession ne dépend pas seulement des activités de création de savoir de socialisation et d’intériorisation.
Un aspect important est l’implication active du successeur dans le fonctionnement de l’entreprise. Cela contribue non seulement à l’expansion de la base de connaissances du successeur, mais aussi à la connaissance tacite et explicite de la société, ce qui déclenche une nouvelle spirale de connaissances (Sihem Ben et Mignon (2016). Toutes les recherches, menées partout dans le monde, mettent plus ou moins l’accent sur la nécessité de former le successeur à la préparation de la reprise d’une entreprise familiale. Les avis ne divergent que sur les modalités pédagogiques, leur forme ou encore le lieu d’exécution. Leur point commun, cependant, c’est que seul un suiveur bien préparé peut assurer la pérennité d’une entreprise familiale.
Le paternalisme signifie agir comme un parent, ou traiter une autre personne comme un enfant. En ce sens, le paternalisme est considéré comme agir pour le bien d’une autre personne sans son consentement, en tant que parent.
En ce sens, le paternalisme est considéré comme agir pour le bien d’une autre personne sans son consentement, comme le font les parents avec leurs enfants. Les paternalistes assument les décisions du reste des individus au nom desquels ils agissent (Moundir & Hammouda (2009).
Poulain-Rehm (2006), après avoir effectué une vaste revue de la littérature a défini le paternalisme comme un style qui allie discipline et autorité à la bienveillance paternelle et à l’intégrité morale exprimée dans un environnement personnalisé. Ainsi, Allouche J. et B. Amann (2002) soulignent que le paternalisme est une construction complexe et intéressante qui peut être comprise sous la relation leader-suiveur, et il existe différentes formes, styles et « techniques » de gestion des individus et des organisations. En ce sens, dans le contexte de l’organisation, le paternalisme traite les employés comme s’ils étaient des membres de la famille, se comportant ainsi de manière paternelle envers leurs subordonnés dans les relations interpersonnelles (Pellegrini & Scandura, 2008).
Le paternalisme prévaut dans les cultures où le collectivisme est encore valorisé (Poulain-Rehm, (2006), une des caractéristiques typiques des entreprises familiales. Dans ces cultures collectivistes, chaque membre se considère comme faisant partie d’un groupe « grande famille », laissant de côté le « moi » (e Basly, S. (2006). Dans les cultures collectivistes, il existe un grand sentiment d’appartenance familiale, ainsi que la loyauté et l’engagement de chacun des membres tant dans la vie familiale que professionnelle (Hofstede, 2001). Ainsi, les soins, le soutien et la protection fournis par les dirigeants paternalistes rendent les relations personnelles entre le dirigeant et les employés beaucoup plus étroites.
En liant l’entreprise familiale à la possibilité de transfert de leadership au sein de la famille, la nouvelle génération doit faire face au contexte organisationnel, qui est souvent caractérisé par des structures de gouvernance unipersonnelles dépendantes et des cultures organisationnelles centrées sur le propriétaire, car le processus de succession est largement contrôlé par le propriétaire (Moundir & Hammouda (2009).
Martini (2016) étudie que la propension des successeurs à prendre le contrôle de l’entreprise a une grande influence sur la satisfaction du propriétaire-dirigeant à l’égard du processus de succession, et dans le même sens, Balazs & Faguer (1991) suggèrent qu’il existe une relation positive entre la volonté du successeur d’assumer le contrôle du FB et le succès perçu du processus de succession.
Dans ce contexte, le leadership paternaliste bienveillant est associé à une préoccupation individualisée et holistique pour les subordonnés, leur bien-être personnel ou familial, de la part du leader et indique qu’il est un leader qui respecte ses subordonnés, prend soin d’eux, répond à leurs besoins individuels et fournit avec un soutien approprié. Un prédécesseur bienveillant cherche à établir des niveaux élevés de confiance, de soutien mutuel, de communication ouverte et bidirectionnelle et une volonté de reconnaître les réalisations. Un bon processus de succession nécessite une coopération entre le propriétaire et le successeur (e.g. Handler, 1994). Le développement de la confiance et du soutien mutuels entre les individus contribuera à la formation et au développement des successeurs (Poulain-Rehm, (2006).
La succession fait référence au transfert du pouvoir de décision et de propriété à la génération suivante, à la recherche de la continuité de l’entreprise entre les mains de la famille. Cela ne se fait généralement pas avec suffisamment de planification pour éviter les difficultés que cela entraîne, comme la résistance à la suppression du pouvoir, en particulier lorsque le dirigeant est à la fois propriétaire unique, fondateur et gestionnaire.
Les différents modes de transmission qui peuvent survenir dans les entreprises familiales ont été abordés dans la littérature. Les définitions faisant référence à la succession intrafamiliale incluent le transfert de leadership et de propriété d’une génération plus âgée à une plus jeune (Chabaud & Sammut (2014). D’autres définitions plus larges englobent la transition et le transfert de la responsabilité de la gestion de l’entreprise à une génération plus jeune de la famille ou à un membre extérieur ; tandis que la succession de propriété comprend la distribution d’actions ou d’autres mesures de propriété de l’entreprise (Fattoum & Alain (2008).
Figure 4 : Une représentation du processus de succession de l’entreprise familiale
Source : Salma F. & Fayolle, A (2008)
Selon Chabaud & Sammut (2014), les modèles pour comprendre le processus de succession des entreprises familiales partagent plusieurs points :
- Ils conceptualisent la relève comme un processus à long terme qui peut comprendre plusieurs étapes ou étapes ;
- Ils impliquent qu’il doit y avoir un désir de la part de la coalition dominante (un seul individu ou des individus qui ont la propriété et le contrôle de la gestion) de transmettre l’entreprise à d’autres, ainsi que la disponibilité d’un successeur potentiel pour reprendre l’entreprise ;
- Ils suggèrent que le processus est accentué par divers événements de prise de décision et culmine dans la transition du leadership/de la gestion et de la propriété d’une génération à l’autre ;
- Ils partent du principe que la réussite du processus de succession repose sur le maintien de la gestion de l’entreprise dans la famille.
Des recherches plus récentes telles que les travaux de Fattoum, S. & Alain (2008) suggèrent que la perspective de l’échange social – les êtres humains prennent des décisions sociales en fonction des coûts et des avantages perçus – est utile pour aborder la dynamique de la succession, compte tenu de sa nature multidimensionnelle et des multiples parties prenantes du processus. Ainsi, ils étudient les principales phases du processus de succession ainsi que les échanges qui se produisent au cours de chaque phase entre les parties intéressées, y compris les échanges entre titulaires et successeurs, dans les limites familiales et au-delà des frontières familiales.
Au sein de la famille, les membres féminins participent généralement au fonctionnement des organisations, influençant de l’extérieur ou de l’intérieur les décisions qui sont prises. C’est ainsi que les femmes ont accru leur participation aux postes occupés dans les entreprises familiales, au fil du temps, devenant des candidates formées lors d’un processus de succession. Ainsi, lorsqu’il s’agit de choisir qui sera le nouveau successeur de l’entreprise, il pourrait bien s’agir d’un fils, d’une fille, d’un frère, d’une sœur, d’un oncle, etc. ; entre autres caractéristiques qui peuvent influencer cette décision. Bayad et Barbot (2002) soulignent que le modèle de relève de l’entreprise familiale doit tenir compte des facteurs individuels (interpersonnels et de groupe), des aspects organisationnels-environnementaux et de ceux qui influent sur la planification de la relève.
Chabaud & Sammut (2014) ont développé un modèle théorique des facteurs liés au successeur influençant une succession réussie, mettant en évidence : la volonté du successeur de reprendre l’entreprise ; le niveau de préparation du successeur ; et la relation entre le propriétaire-dirigeant et le successeur.
Les auteurs proposent que des facteurs tels que les récompenses commerciales potentielles, la confiance dans les capacités et les intentions du successeur et l’alignement des besoins personnels constituent des antécédents qui influenceraient la volonté du successeur de prendre la relève, tandis que l’harmonie familiale est l’antécédent de la relation entre propriétaire-dirigeant et successeur.
Fattoum et Fayolle (2008) montrent que, si la qualité de la relation entre le leader et son successeur est la chose la plus importante, la réussite de la succession ne dépend pas seulement de la capacité de lâcher-prise du fondateur, mais aussi, et surtout de la capacité d’apprentissage du successeur. Tout aussi importante que la volonté d’un leader d’accepter sa succession est la volonté du nouveau leader de prendre en charge l’entreprise pour le succès de la relève. Des preuves empiriques suggèrent une relation positive entre le désir du successeur de reprendre l’entreprise et le succès du plan de relève (Bayad et Barbot (2002). La coïncidence entre les intérêts du successeur potentiel et ses opportunités dans l’entreprise familiale constitue un facteur important pour déterminer s’il restera ou non dans l’entreprise, constatant que, parmi les membres de la relève, ceux qui sont plus optimistes quant à la l’avenir de l’entreprise de s’engager davantage et détenir plus longtemps les parts de l’entreprise familiale, il existe donc une relation positive entre la capacité de l’entreprise familiale à générer de l’argent et la propension du successeur à participer à son développement (Cadieux, Hugron et Lorrain (2000).
Dans le même sens, Constantinidis, C. (2010) reconnait le sexe comme un facteur, mais seulement dans la mesure où il se reflète dans la qualité de la relation entre le fondateur et le successeur et comment cela peut affecter la nature du transfert tacite des connaissances. Les connaissances tacites (« savoir-faire », « savoir-faire », « savoir-faire ») sont intégrées dans les processus, la culture et les relations de l’organisation et ont été identifiées comme une ressource stratégique, de sorte que leur transfert du fondateur au successeur est une clé de la réussite de la transition.
Le grand risque d’un fondateur d’entreprise familiale est que l’effort dont l’entreprise a besoin lui fasse oublier que ses enfants sont plus importants que ses entreprises. Ne pas leur donner le temps dont ils ont besoin, ni démontrer, avec des faits tangibles, qu’il n’y a pas de conflit entre eux et l’entreprise familiale. Pour bien former ses successeurs, tant dans le stade de la préparation à distance que dans celui de la préparation immédiate, le prédécesseur, encore jeune en âge, doit posséder l’équilibre dans l’ordre des valeurs que la maturité accorde, ce qui, d’autre part, ne correspond pas à la vieillesse, mais au plein accomplissement de ses propres responsabilités, en l’occurrence celles du père engagé pour le bien de ses enfants, qui est sa formation humaine, convaincu qu’ainsi il réalisera aussi le bien de l’entreprise familiale, lorsqu’elle passe de la première à la deuxième génération, car, plus la relation entre le chef d’entreprise et son successeur est étroite, plus grandes sont les chances d’une succession effective.
Le terme genre peut être compris comme une relation qui est toujours ancrée dans une sphère sociale, avec des significations à la fois dans un sens universel et dans son sens individuel, c’est-à-dire qu’il existe des relations qui, bien qu’elles fassent partie d’un concept universel de genre, peut prendre des formes différentes selon les sociétés, les moments historiques, les groupes ethniques, les classes sociales, ainsi que dans les familles et les générations. Bref, c’est une construction symbolique dans un contexte culturel et social donné. Elle implique une prise en compte familiale de l’égalité des sexes et de l’équité entre les sexes en termes de femmes et d’hommes ; fils et filles (Pandea, A., Grzemny, D., Keen, E. (2019).
Actuellement, il y a un grand débat où les mesures de conciliation travail-famille sont remises en question comme des outils qui favorisent ou désavantagent les femmes dans l’insertion professionnelle, cependant, il convient de se demander si les politiques sur l’égalité sont bien dirigées, ou au contraire elles évoluent vers l’éloignement des femmes dans la lignée de la succession.
Les particularités des entreprises familiales, tant dans la propriété du capital social que dans les instances dirigeantes et dans les équipes directes, configurent un scénario propice à l’incorporation des femmes dans les tâches de gestion et de gouvernance entrepreneuriale et familiale.
Figure 5 : La nature genrée du choix du successeur dans l’entreprise familiale
Source : Fattoum, S. & Byrne, J. (2017).
Il existe une série de facteurs influents par rapport aux difficultés ou obstacles rencontrés par les femmes pour accéder à l’Entreprise Familiale, notamment à des postes de responsabilité, ou pour évoluer alors qu’elles occupent déjà certains postes. Parmi ces facteurs figurent les conflits de rôles, les relations avec les parents, les frères et sœurs et les autres membres de la famille et hors famille ; l’existence de discriminations et de stéréotypes sexistes ; luttes de pouvoir et d’autorité ; ou même leur propre niveau d’estime de soi et de confiance en soi. Les stéréotypes sont utilisés à de nombreuses reprises pour justifier les rôles sociaux et les attentes assignés à chaque sexe. Ces stéréotypes sont transposés à la sphère professionnelle et entrepreneuriale, et leur existence sert à expliquer l’occupation majoritaire des femmes dans certains secteurs et activités et à certains postes. De cette manière, les croyances, les stéréotypes et la tradition culturelle peuvent constituer l’un des obstacles les plus importants, et non le seul, qui entrave l’accès des femmes aux postes de responsabilité dans l’entreprise familiale, à être considérées comme des successeurs potentiels et à abandonner l’invisibilité et l’arrière-plan dont elles ont traditionnellement souffert.
Les études les plus récentes indiquent que la relève dans de nombreuses entreprises familiales se fait par la formation d’une équipe composée de frères et sœurs qui partagent la direction et la propriété de l’entreprise, bien que certains auteurs indiquent que le leadership efficace continue d’être assumé par un homme (Fattoum & Byrne (2017)).
Les successeurs familiaux sont plus fréquents si le propriétaire de l’entreprise familiale a un fils (Constantinidis (2010)). Bien que les postes de direction soient traditionnellement attribués aux descendants masculins et que la représentation des femmes aux postes de direction dans les entreprises familiales à travers le monde soit insuffisante, des recherches ont montré que les propriétaires préfèrent souvent une fille ou un fils cadet pour réussir (Giraud et Renard (2020). La littérature des auteurs qui traitent de la succession dans les entreprises familiales dans leurs recherches comporte de nombreuses divergences d’opinions ainsi que des successions ambiguës. Un groupe d’auteurs a découvert que le fils aîné avait repris l’entreprise et que les filles étaient immédiatement exclues du processus de transmission, tandis que d’autres écrivaient que les filles et les jeunes fils étaient les meilleurs suiveurs.
Dans nombre de ces études, des situations de discrimination à l’égard des femmes sont révélées, dans d’autres, des différences apparaissent entre les hommes et les femmes en termes de caractéristiques au niveau individuel et dans d’autres, les différents rôles acquis par les hommes et les femmes dans le monde sont analysés de l’entreprise, sans essayer de démontrer les différences entre les sexes.
Malgré la flexibilité de leur adaptation, les femmes ont fait face à de multiples obstacles, parmi lesquels la remise en cause de la division conventionnelle des rôles masculins dans la sphère professionnelle et des rôles féminins dans la sphère privée, qui peut influencer la performance professionnelle des femmes dans l’entreprise familiale (Giraud et Renard (2020).
Le parcours professionnel des femmes dans l’entreprise familiale et leur intérêt pour le leadership et la relève seront surtout déterminés par la socialisation positive qui s’opère durant l’enfance dans les valeurs d’entreprise, ainsi que la formation et l’expérience qu’elles accumulent durant ces premières années dans de l’entreprise (Constantinidis (2010).
La question du genre dans les instances dirigeantes des entreprises familiales est posée dans plusieurs études comme un élément organisationnel, c’est-à-dire comme un élément d’équilibre objectif dont la résolution correspond à anticiper les générations actuelles pour ouvrir la voie aux futures. La question de la discrimination sexuelle reste profondément enracinée dans la culture familiale et dans le processus éducatif ; qu’en raison des hiérarchies familiales, les jeunes fils et filles sont confrontés à de grands défis lorsqu’ils tentent de participer à l’entreprise familiale. Les filles du fondateur doivent résoudre, lors du processus de succession, des conflits tels que celui d’être souvent perçues dans leur environnement comme inaptes à exercer ce rôle dans l’entreprise, malgré une excellente formation professionnelle et/ou l’ambition d’être une femme d’affaires. (Hedi (2019)).
Le genre représente l’aspect social dans les relations entre hommes et femmes. Selon Remery, Matser, & Hans Flören (2014), les théories féministes ont tendance à s’accorder sur l’idée de la différence entre les hommes et les femmes, trouvant comme point commun dans de telles études l’association de la différence avec l’inégalité des sexes, c’est-à-dire la plupart des théories qu’elles partager la compréhension de la domination masculine dans le cadre d’arrangements sociaux, les hommes exerçant un pouvoir sur les femmes.
Au cours des dernières années, le nombre d’entreprises familiales détenues par des femmes a augmenté. En outre, l’entrepreneuriat féminin contribue au développement de l’emploi, à une productivité accrue et à l’innovation dans toutes les économies, ce qui représente une grande valeur ajoutée (Remery, Matser, & Hans Flören (2014). Cependant, les femmes (de la famille) sont souvent utilisées dans comme employées de complaisance, assumant des rôles qui varient à différents moments, selon les besoins de l’entreprise, et souvent sans aucune rémunération ; alors qu’elles exercent un triple travail : travailler dans l’entreprise familiale, faire le ménage et faire d’autres types de travaux pour aider la famille (Pandea, Grzemny, Keen (2019).
Par ailleurs, il faut noter que dans les entreprises familiales, certaines coutumes connaissent des évolutions en matière d’égalité hommes-femmes, puisque l’étude de Salma & Fayolle (2008) montre que les femmes prennent les rênes de l’entreprise, et, de plus en plus, elles sont considérées comme des entrepreneuses et restent à des postes de direction en raison à leur professionnalisme. Selon Remery, Matser, & Hans Flören (2014), les femmes ont un pourcentage de réussite plus élevé que les hommes dans la gestion d’entreprise.
Dans ce leadership, les femmes sont considérées comme un atout stratégique (Remery, Matser, & Hans Flören (2014). Les femmes doivent utiliser leur avantage concurrentiel et se positionner à la tête des structures organisationnelles, en étant flexibles et en créant des systèmes de travail alternatifs, cela leur permettra de continuer à occuper des postes de direction. Les réformes juridiques et sociales ont contribué à concilier travail et vie familiale pour les femmes, à reconnaître les droits des femmes, et cette intégration a été considérée comme une intervention active des femmes dans les entreprises familiales. Les femmes ont le talent de s’occuper de l’entreprise comme elles s’occupent de la maison et de la famille, en pensant à ce qui est le mieux pour chacun. Ce talent encourage, voire oblige, les hommes à discuter de leurs décisions et à écouter leurs épouses, sœurs, belles-sœurs et/ou mères, au-delà de leurs rôles informels (Giraud et Renard (2020).
Malgré les obstacles culturels évoqués (Pandea, Grzemny, Keen (2019) soulignent que la moyenne mondiale des femmes occupant des postes de direction est de 21 %. Les femmes managers assument plus ou moins les mêmes risques que les hommes managers.
L’influence des logiques patriarcales dans la famille a été notée par la tradition des études menées dans diverses disciplines comme l’anthropologie, la sociologie et l’histoire entre autres. Conformément à cela, Le Breton-Miller (2011) déclare que le patriarcat est une forme d’organisation sociale dans laquelle l’homme exerce l’autorité dans tous les domaines, assurant la transmission du pouvoir et de l’héritage par l’intermédiaire de l’homme. Il favorise un système social politico-historique basé sur la construction de hiérarchies. Dans cette définition, l’auteur révèle que le patriarcat est enclin à profiter aux hommes dans le maintien du pouvoir domestique et public.
Dans ce même sens, Handler et Kram (1988) soutiennent que l’héritage occidental a donné à l’homme une place de représentation de « Dieu le père » dans la famille, ce qui a eu un effet symbolique sur la subjectivité de ses membres. Le père protège, pourvoit, soigne, gouverne, soutient et subjugue. Par conséquent dans le patriarcat, il est important de reconnaître les changements sociaux qui sont le résultat de processus d’apprentissage de plusieurs années.
Le rôle du patriarcat fait référence aux hommes en position de pouvoir (en particulier, mais pas exclusivement, le père) à l’exclusion des femmes. Le patriarcat formel et informel, et son pouvoir associé, est exercé par le père (ou un autre dirigeant masculin) dans le contexte de l’entreprise familiale, mais ces modes de pouvoir ne sont pas définis ou décrits de manière narrative, mais sont pris pour acquis. Le patriarche assume généralement la prise de décision dans l’entreprise familiale, y compris le choix du successeur, avec certaines conséquences négatives sur l’harmonie familiale et la planification de la succession, ainsi que l’exclusion ou la réduction de la participation des femmes.
Plusieurs auteurs ont longtemps critiqué le critère de la primogéniture et soutiennent que le choix du successeur devrait être basé sur des critères de compétences et d’aptitudes, et non sur le sexe (Gersick K., Davis. J., McCollom, M.H. & Landsberg, I. (1997). D’autres études indiquent que la succession dans de nombreuses entreprises familiales se fait par la formation d’une équipe composée de frères et sœurs qui partagent la gestion et la propriété de l’entreprise, bien que certains auteurs indiquent que le leadership efficace continue d’être assumé par un homme (Carr et Sequeira (2007). Sur cette question de la primogéniture, Cadieux, Hugron et Lorrain (2000) affirment que, quel que soit son sexe, la situation est difficile pour le successeur, car des attentes élevées peuvent le rendre incertain quant à sa capacité à poursuivre l’héritage familial, voyant le père comme un géant inaccessible.
Partie II : Étude empirique
La succession dans les entreprises familiales est une véritable transformation dans laquelle la nouvelle génération doit reconstruire l’organisation selon ses directives et de nouvelles idées sur la façon dont une organisation doit être gérée. Ainsi, l’avenir de l’entreprise dépend du succès de la négociation lors du processus de succession.
L’objet de ce chapitre est de présenter et d’étayer la méthodologie pour établir la transmission et le rapport de genre dans l’entreprise familiale.
Bien que le travail soit basé sur des théories acceptées et reconnues, son application dans le contexte du genre est relativement nouvelle. Par conséquent, il est jugé pertinent de proposer une portée exploratoire et descriptive où l’étude de cas multiples est présentée comme la stratégie pour se concentrer sur la compréhension des dynamiques présentes dans les objectifs de recherche qui permettent des contributions à la connaissance du problème.
Puisque les études exploratoires servent à se familiariser avec des phénomènes relativement inconnus, à identifier des tendances, des domaines, des contextes et des situations d’intérêt, tout en permettant d’établir des priorités pour des recherches ultérieures, les méthodes utilisées tendent à être plus flexibles et larges. Par ailleurs, les études descriptives visent à préciser les propriétés pertinentes du phénomène étudié, à mesurer ou évaluer ses différents aspects, dimensions ou composantes, ainsi qu’à entrevoir d’éventuels liens entre concepts ou variables.
Ainsi, la recherche qualitative vise à identifier la nature profonde des réalités, sa structure dynamique, ce qui donne pleinement raison de son comportement et de ses manifestations ; ainsi, le qualitatif ne s’oppose pas au quantitatif, mais l’implique et l’intègre, surtout là où c’est pertinent.
Coutelle, P. (2005) précise que les différences entre les approches de recherche quantitative et qualitative sont liées au type d’intentionnalité et au type de réalité qu’elles entendent aborder. L’approche quantitative se concentre sur l’explication et la prédiction d’une réalité considérée dans ses aspects les plus universels et vue d’un point de vue externe, tandis que l’approche qualitative se concentre sur la compréhension d’une la réalité considérée sous ses aspects particuliers comme résultat d’un processus historique de construction et vue à partir de la logique et des sentiments de ses protagonistes (Paillé, P. (2006).
En ce sens, Degeorge, J. (2015) souligne que la recherche qualitative est utilisée en premier lieu pour découvrir et affiner des questions de recherche, pour lesquelles le chercheur commence par examiner le monde social et dans ce processus développe une théorie cohérente avec ce qui est observé. Le processus de recherche qualitative est flexible et se déplace entre les événements et leur interprétation, dans le but de “reconstruire” la réalité telle qu’observée par les acteurs d’un système social préalablement défini, il n’entend donc pas généraliser probabiliste les résultats à des populations plus larges.
L’approche qualitative nous permettra ainsi de nous plonger dans le processus de succession de l’entreprise familiale, à travers le point de vue des prédécesseurs-fondateurs et des successeurs eux-mêmes, permettant une meilleure compréhension de celui-ci et de son contexte.
L’étude de l’entreprise familiale reconnaît l’importance historique de ces entreprises sur la base de l’évolution vécue des changements sociaux et économiques et son importance dans la participation de la vie moderne. À travers l’analyse d’un ensemble d’éléments, on accède à la réponse à plusieurs questions qui se posent dans l’analyse de la relève dans les entreprises familiales. Les facteurs extrinsèques, les problématiques des entreprises familiales comme inspirant le besoin de recherche, la diffusion des connaissances, l’accompagnement scientifique, la reconnaissance sociale et la vision pluridisciplinaire, contribuent à la structuration et à l’intégration de l’étude.
Concernant la méthode de l’étude de cas, Eisenhardt, K.M., (1989) souligne sa pertinence en sciences sociales lorsque des questions de « comment » et de « pourquoi » sont posées, lorsque le chercheur n’a que peu ou pas de contrôle sur les événements, et lorsque l’attention est focalisée sur un phénomène actuel, dans son contexte réel, surtout lorsque les frontières entre le phénomène et le contexte ne sont pas clairement évidentes. Telle est la situation de cette étude, qui cherche à découvrir le lien profond entre l’éducation familiale paternaliste de l’entrepreneuriat, le genre et le phénomène de la succession et les implications pratiques de la gestion des femmes dans le domaine de l’entreprise familiale. L’utilisation d’entretiens semi-directifs, les visites effectuées dans les installations de l’entreprise et l’analyse d’informations secondaires vont permettre la triangulation des sources de données pour garantir la validité interne de l’étude et l’interprétation globale.
L’étude de cas sera utilisée comme stratégie méthodologique et comme techniques de collecte de données : entretien semi-directif et analyse d’informations secondaires. Pour cela, des entretiens semi-directifs seront entamés auprès de quelques représentants de chaque entreprise concernée.
La technique de collecte de données est l’entretien semi-directif. La technique de l’entretien semi-directif a été utilisée, dont la caractéristique essentielle est que les questions et leur séquence sont établies à l’avance, en posant les mêmes questions de base et dans le même ordre à toutes les personnes interrogées, augmentant ainsi la comparabilité des réponses, tout en offrir une certaine souplesse à l’enquêté pour l’introduction de nouveaux thèmes ou éléments qui viennent enrichir la collecte d’informations voire l’émergence d’autres indicateurs et catégories d’analyse.
L’entretien qualitatif est un processus d’interaction entre deux individus, à travers lequel des données sont générées. Chaque entretien est une situation unique, qui peut et doit être adaptée à chaque participant (Merriam, S.B. (2009). Le but de l’entretien n’est pas d’obtenir des réponses à des questions, mais plutôt de donner au participant la possibilité de reconstruire plutôt que de se souvenir de son expérience selon sa propre perception de ce qui est ou était important (Coutelle, P. (2005). Une batterie de vingt questions liées aux objectifs à atteindre a été sélectionnée, toutes basées sur une partie de la littérature existante et analysée (Eisenhardt, K.M., (1989).
Une étude multi-cas a été réalisée afin d’aborder la représentativité théorique, la variété, l’équilibre et le potentiel de découverte, suggérés par Merriam, S.B. (2009), et intégrant le critère de Eisenhardt, K.M., (1989) sur le nombre minimum de cas compris entre six et dix pour ce type d’étude. Dans ce contexte, la représentativité théorique implique l’homogénéité des cas du point de vue de l’entité étudiée, en l’occurrence l’entreprise familiale ; La variété signifie rechercher des échantillons de cas qui sont différents les uns des autres, par exemple, des secteurs ou des états de développement ; l’équilibrage implique la recherche d’échantillons de cas qui offrent une variété proportionnelle de situations différentes ; le potentiel de découverte implique de sélectionner des cas riches en données sur le phénomène étudié, ou dont les acteurs impliqués permettent une investigation approfondie ; enfin, un critère logique : la prise en compte des objectifs de recherche (Merriam, S.B. (2009).
En ce sens, la recherche est basée sur l’analyse des prédécesseurs et des successeurs liés à six entreprises familiales, sélectionnées selon différents critères :
- Les entreprises sont au stade de la fratrie ou du consortium cousin ;
- Les entreprises ont déjà connu au moins une succession ;
- Les entreprises appartiennent à des secteurs industriels et commerciaux différents ;
- Les entreprises ont un contrôle actionnarial de la famille ou, en cas de cession d’une partie de leurs actions, au moins un membre de la famille devait rester dans les organes décisionnels ;
- Les entreprises ont au moins un ou deux membres de la famille y travaillant à temps plein ;
- Les entreprises ont une taille plus ou moins grande.
Par ailleurs, afin de préserver la confidentialité, l’identification des cas d’étude a été réalisée à l’aide de codes alphanumériques où les lettres représentent les initiales de l’entreprise et les chiffres font référence à son ancienneté. Le tableau présenté ci-dessous montre la conformation de l’échantillon.
Tableau 2 : À propos des entreprises de cas
Entreprises | Taille | Secteur d’activité | Ancienneté | Nombre de Succession déjà effectué |
A20 | Grande | Production et commercialisation de produits alimentaires | 20 ans | 1 |
C3 | Grande | Commercialisation de produits alimentaires | 35 ans | 1 |
M30 | Moyenne | Commercialisation d’équipements industriels | 30 ans | 2 |
D30 | Moyenne | Entreprise de livraison | 30 ans | 1 |
X25 | Grande | Distribution de produits pharmaceutiques | 25 ans | 1 |
B50 | Moyenne | Production et vente d’articles en plastique | 50 ans | 1 |
Dans cette partie, nous entamerons une présentation et une discussion sur les résultats que nous avons obtenus auprès des six entreprises étudiées. Les résultats sont détaillés pour chacune des études de cas, chaque rapport a la même structure pour faciliter leur compréhension et ensuite pouvoir comparer les résultats obtenus :
- Entreprise « A20 »
A20 est une société anonyme dont la propriété est contrôlée par la société en nom collectif de quatre frères, le successeur étant l’actuel directeur général. Il est dirigé par la deuxième et la troisième génération de la famille, qui ont formé un groupe d’entreprises composé de plusieurs entreprises.
L’entreprise a connu une succession au moment de laquelle il y avait quatre candidats possibles, la sélection revenant au fils aîné, tandis que le deuxième fils continue à travailler dans l’entreprise. Le troisième fils est un professionnel extérieur et la quatrième fille travaille dans une autre société du groupe.
- Représentativité du prédécesseur
Le fondateur de la société A20 est décrit par l’interviewé (candidat à la succession de la troisième génération) comme un homme d’expérience, avec une vision d’entreprise, stratège, innovateur, avec l’ambition de faire un bon travail et offrir un bon service, une grande capacité de gestion des clients et d’innovation commerciale, pour lesquelles il est considéré comme un modèle au sein de la famille et de l’entreprise. Il apporte activement ses connaissances et ses opinions au conseil d’administration, en tant que symbole de toute la trajectoire parcourue depuis ses débuts jusqu’à la formation du consortium d’entreprises qu’il est aujourd’hui.
- Engagement du successeur
Le candidat à la succession est un professionnel universitaire, qui occupe un poste de responsabilité au sein de l’entreprise familiale. Le successeur s’est impliqué très tôt dans les activités et le développement des entreprises en étant un stagiaire au début. Selon lui, les principales composantes de son engagement se réfèrent, d’abord, à la partie émotionnelle, en termes d’identification qu’il ressent avec les buts et objectifs de l’entreprise et le développement d’un fort sentiment d’appartenance avec l’organisation, pour son implication depuis son enfance. Deuxièmement, la composante normative se manifeste dans la motivation du père à rejoindre l’entreprise, ce qui incite à la réalisation des attentes, à éprouver un sentiment de devoir envers la famille : « j’ai appris un peu de tout et ils m’ont permis de faire le stage…vous devez avoir des exigences si vous souhaitez accéder à un poste de direction ou compléter une maîtrise et cela, si vous répondez aux exigences qui y sont stipulées » (verbatim entretien chez A20).
- Planification de la succession
Lors de la seule succession intervenue dans la société A20, la composition familiale était de trois frères et une sœur, le fils aîné étant le successeur. L’entreprise a un protocole formel qui assure la représentation de la famille dans le plan d’actionnariat et dans le processus de succession, de sorte que tous les descendants de la troisième génération soient candidats. Le prochain transfert doit avoir lieu, pour lequel le protocole évalue l’aptitude, les études de maîtrise et la consanguinité du successeur.
Pour cette société, il n’y a pas eu de conflits de succession puisque les règles sont clairement établies dans le protocole familial, et notre interviewé précise même qu’il est indifférent que le successeur soit une femme ou un homme en précisant que : « Dans la famille, s’il y avait eu de l’intérêt, par exemple ma sœur qui est venue travailler ici et qui aurait été intéressée, oui… elle n’a jamais été intéressée, elle a travaillé dans une autre entreprise du groupe, mais pas dans celui-ci. » (Verbatim interviewé société A20). Cependant, il convient de noter la possibilité que sa sœur, étant la fille aînée de la troisième génération, ait été empêchée de participer à l’entreprise principale du groupe familial, ou n’ait pas été encouragée par son père, préférant céder la place à la fils et transfèrent leur intérêt à une autre des entreprises, dont la branche cosmétique) leur semble plus cohérente avec la construction socioculturelle du genre.
- Impact de l’éducation familiale sur l’avantage concurrentiel
L’un des grands dilemmes des entreprises familiales est, selon notre interviewé chez la société A20, qu’il doit y avoir une relation symbiotique et synergique entre la famille et l’entreprise pour qu’elle soit durable dans le temps ; puisque l’on attend de l’entreprise qu’elle génère de la valeur pour la famille et qu’elle ajoute de la valeur à l’entreprise de telle manière que la création de cette valeur est impossible sans l’implication de la famille. À cet égard, la gestion des connaissances est importante, car lors de la génération de valeur, un processus de création de connaissances est également généré, ce qui est intéressant pour atteindre la compétitivité de l’entreprise et en même temps pour garantir sa durabilité « Sans aucun doute, les entreprises familiales doivent relever les défis de la création de compétences dynamiques qui soutiennent la performance de l’entreprise » (Verbatim interviewé société A20).
Le tableau présenté ci-dessous résume la situation de la société A20 en termes de succession et les facteurs déterminants.
Tableau 3 : Résumé de l’interview mené auprès de la société A20
Points saillants | Observations |
L’âge de la retraite du prédécesseur | Non défini |
Plan de succession | Formellement établi |
Attributs requis du successeur | Implication précoce, stages et pratiques dans l’entreprise, aptitude à l’entreprise, profession libérale universitaire, études de master, exigences de consanguinité |
Droit d’aînesse du successeur | Oui |
Rôle des femmes dans l’entreprise | Famille propriétaire (actionnaire, ne travaille pas dans l’entreprise)Propriétaire salarié relatif (actionnaire, travaille dans l’entreprise)La première génération n’est pas intégrée dans l’entrepriseLes troisièmes et quatrièmes générations sont intégrées dans d’autres filiales |
Impact de l’éducation familiale sur l’avantage concurrentiel | Les entreprises familiales doivent relever les défis de la création de compétences pour assurer la performance de l’entreprise |
- Entreprise « C3 »
L’entreprise C3 qui œuvre dans la commercialisation de produits alimentaires est répartie entre le fondateur et ses quatre fils, dont l’un est le successeur et actuel directeur général de. L’entreprise est gérée par la deuxième génération de la famille. Celle-ci forme un groupe d’entreprises composé de plusieurs entreprises.
L’entreprise a déjà connu une succession et il y avait quatre candidats possibles, la sélection revenant au fils aîné, tandis que le deuxième fils continue à travailler dans l’entreprise, le troisième fils travaille dans une autre des sociétés du consortium et la quatrième fille est une jeune femme encore étudiante.
- Représentativité du prédécesseur
Selon notre interviewé chez l’entreprise C3, le prédécesseur est considéré comme un modèle au sein de la famille et de l’entreprise, une source d’inspiration : « Il est à la retraite, mais intégré au groupe d’entreprises, étant la figure qui maintient l’union familiale » (Verbatim interviewé entreprise C3). Un aspect qui ressort de la figure du fondateur est la responsabilité avec laquelle il a assumé son travail au sein de l’entreprise. C’est sa force de caractère qui a fait du prédécesseur un pilier à la fois de la famille et de l’entreprise.
- Engagement du successeur
Le successeur de l’entreprise C3 est un professionnel universitaire âgé de 44 ans, qui travaille comme directeur général, s’impliquant dans les activités de l’entreprise depuis son enfance, c’est pourquoi il a développé un haut niveau d’engagement envers l’entreprise familiale. La situation relatée des moments difficiles qu’ils ont vécus au début des opérations commerciales a constitué le scénario de leur préparation à prendre les rênes de l’entreprise dans un fort sentiment d’appartenance.
Notre interviewé avec l’interviewé nous a permis d’identifier des composantes émotionnelles dérivées du lien affectif avec son père et de l’identification aux buts et objectifs de l’entreprise, avec sa transformation et sa pérennité. Mais, surtout, une composante normative forte, une obligation morale au père et aux destinées de l’entreprise : « J’ai toujours aimé l’aider, j’ai toujours vu la figure de mon père qui travaillait dur. Ma conscience m’a fait prendre conscience que j’avais des vacances, je me suis levé plus tard et j’étais déjà allé travailler… Je suis resté ici et j’ai dit que je ne vais pas travailler ailleurs, je vais aider mon père. (Verbatim interviewé entreprise C3) ».
- Planification de la succession
Lors de la seule succession intervenue dans l’entreprise C3, la composition familiale était de deux frères et une sœur, le fils aîné étant le successeur. Pour la succession, l’entreprise a un protocole familial clairement établi concernant le régime d’actionnariat, mais informel concernant la succession, probablement parce qu’elle a toujours été considérée comme acquis que le fils aîné reprendrait l’entreprise, ce qui s’est passé sans aucun conflit. En effet, ce n’est que maintenant que la succession des frères parle de ce que serait le processus pour la troisième génération, puisque leurs enfants sont tous mineurs. En ce sens, l’interviewé affirme qu’il aimerait que ses enfants évoluent dans ce qu’ils aiment, acceptant à la fois le fait qu’ils puissent rester dans l’entreprise et qu’elle n’atteigne pas une troisième génération.
Concernant le rôle des femmes, aucune des femmes de la famille n’a jamais travaillé dans l’entreprise. Un aspect qui dans ce cas pourrait être cohérent avec le besoin de certains parents de “protéger” leurs filles et, en général, les femmes de la famille, raison pour laquelle ils ne les placent pas dans la situation d’avoir faire face aux problèmes que comporte la gestion de l’entreprise : « …au début, le travail était très physique, beaucoup d’efforts de tout, ce n’étaient pas les conditions que nous avons maintenant, je crois qu’aucun père ne va mettre une femme dans un endroit qui n’avait pas les adaptations nécessaires et qu’il y a beaucoup d’hommes… (Verbatim interviewé entreprise C3) ».
Lorsqu’o a demandé à notre interviewé s’il croyait que le sexe de son successeur aurait influencé son père, il a répondu : « Je pense que oui, connaissant mon père comme je le connais, oui, malgré le fait que mon père, étant enseignant, s’est aussi rendu compte de la capacité des femmes, mais c’était d’autres temps » (Verbatim interviewé entreprise C3).
- Impact de l’éducation familiale sur l’avantage concurrentiel
Selon notre interviewé chez l’entreprise C3, l’avantage concurrentiel des entreprises familiales repose principalement sur le caractère tacite des connaissances intégrées à leurs ressources, et surtout sur l’expérience et la compétence du fondateur ou du prédécesseur. Cela représente la principale source de compétences et de capacités dans l’organisation, ce qui peut faire perdre à l’entreprise une grande quantité de connaissances lorsqu’elle prend sa retraite. Par conséquent, la connaissance tacite du fondateur est l’atout stratégique qui doit être transféré et développé. Par conséquent, la connaissance est une source d’avantage concurrentiel dans l’entreprise familiale. Elle peut être considérée comme une forme de savoir familial idiosyncrasique qui rend la succession entre les générations au sein de l’Entreprise Familiale plus profitable, bénéfique ou profitable. Cependant, notre interviewé souligne qu’avoir des connaissances ne suffit pas pour être compétitif, mais il faut aussi avoir une gestion adéquate desdites connaissances pour mieux utiliser les ressources.
Tableau 4 : Résumé de l’interview mené auprès de l’entreprise C3
Points saillants | Observations |
L’âge de la retraite du prédécesseur | Non défini |
Plan de succession | Non défini |
Attributs requis du successeur | Non défini |
Droit d’aînesse du successeur | Oui |
Rôle des femmes dans l’entreprise | Propriétaire familial (actionnaire, ne travaille pas dans l’entreprise) |
Impact de l’éducation familiale sur l’avantage concurrentiel | La connaissance tacite du fondateur est l’atout stratégique qui doit être transféré et développé au sein de l’entreprise familiale. |
- M30
L’entreprise M30, en vertu d’un pacte d’actionnaires, accorde l’administration à la famille, essentiellement représentée par le père et ses trois fils. Il y a deux décennies, le plus jeune des frères est choisi comme directeur général de l’entreprise et, dans les années 2000, la famille cède la plupart de ses parts, laissant la place à la génération suivante pour occuper la direction générale. Ce cas illustre la situation dans laquelle, bien qu’il existe une association avec un groupe étranger, qui représente le principal actionnaire, l’administration est confiée à un membre de la famille.
- Représentativité du prédécesseur
En raison du fait que les trois frères de la deuxième génération avaient travaillé dans l’entreprise, ils ont exercé une influence notable sur le deuxième successeur, qui les identifie tous comme des prédécesseurs. Ainsi, les attributs généraux suivants ressortent : confiance, intelligence, dépendance au travail, bons administrateurs, capacité logique, volonté d’aider et la complémentarité des qualités qu’ils ont montrées à partir de leurs différentes positions dans l’entreprise, formant une brillante équipe d’hommes d’affaires et constituant un symbole pour ceux qui manifestent une profonde admiration.
Cette admiration se révèle dans le discours de l’interviewé et implique une volonté d’imiter la trajectoire réussie de ses prédécesseurs : « Mon père était comme mon oncle…, c’était plus clair, mais mon père était logique, mais mon oncle était plus pratique, ils se complétaient tous les deux, ils étaient 100% plus que moi » (Verbatim interviewé entreprise M30).
Le deuxième successeur de cette entreprise est un professionnel universitaire entamant un processus de préparation assez rigoureux dès l’âge de 18 ans. Pendant quatre ans, il a effectué des stages de six mois à un an dans tous les départements de l’entreprise, en partant du bas, en se familiarisant avec l’ensemble du processus industriel, en se préparant à diriger, tout en recevant le soutien de son père et de ses oncles, ce qui signifiait des promotions au sein de l’entreprise : « Le soutien a été fondamental, mon oncle… m’a soutenu et ce qui m’a le plus impressionné chez lui c’est que même si le problème était énorme pour lui c’était très simple, ce qu’il a fait était quelque chose d’incroyable, pour lui il n’y avait pas de problème difficile ». (Verbatim interviewé entreprise M30).
- Engagement du successeur
Les principales composantes de l’engagement du successeur pour l’entreprise M30 sont liées aux liens affectifs avec son père et ses oncles, l’identification aux buts et objectifs de l’entreprise et un haut sentiment d’appartenance dérivé de son implication dans tous les domaines de la production. Mais il y a aussi un engagement à la continuité lié à l’échec de sa propre entreprise qu’il avait précédemment lancée, de sorte qu’au moment où on lui a offert le poste dans l’entreprise, il n’avait pas de meilleure alternative.
- Planification de la succession
Comme indiqué ci-dessus, l’entreprise M30 a connu deux successions. Mais ceux-ci ont été très différents. Dans la première, survenue huit ans après la création de l’entreprise, le père et les trois fils décident que le mineur assumera la direction générale, en fonction de la disponibilité de chacun d’eux compte tenu de leurs différentes activités. En revanche, la deuxième succession a été un processus formel sans conflits puisque l’entreprise était au niveau d’un consortium cousin. Selon notre interviewé, le processus commence par la décision d’embaucher les descendants comme employés.
Concernant le rôle des femmes, aucune n’a encore travaillé dans l’entreprise. Cette situation est attribuée à diverses circonstances : manque d’intérêt, elles exercent d’autres professions, certaines ont leur propre entreprise ou sont mariées à des maris aisés.
- Impact de l’éducation familiale sur l’avantage concurrentiel
L’interviewé chez l’entreprise M30 explique que les entreprises familiales ont souvent leurs propres façons de faire les choses, un savoir-faire particulier que les concurrents n’ont pas. Ce type de connaissance a une forte composante tacite, qui se retrouve généralement chez une seule personne ou en très petit nombre. Bien que les idées et les connaissances se forment dans l’esprit des individus, les interactions joueront un rôle important dans le développement de la création des idées et connaissances : « les entreprises familiales jouent un rôle essentiel dans le développement des connaissances en raison de l’interaction constante entre les membres à travers leur vie commune dans la famille et dans l’entreprise et surtout pour la garantir le succès et la compétitivité de l’entreprise » (Verbatim interviewé entreprise M30).
Tableau 5 : Résumé de l’interview mené auprès de l’entreprise M30
Points saillants | Observations |
L’âge de la retraite du prédécesseur | Non établi |
Plan de succession | Formellement établi |
Attributs requis du successeur | Plusieurs années de préparation, stages et pratiques en entreprise, études professionnelles universitaires, master. |
Droit d’aînesse du successeur | Oui (pour la seconde succession) et non (pour la première succession) |
Rôle des femmes dans l’entreprise | Propriétaire familial (actionnaire, ne travaille pas dans l’entreprise) |
Impact de l’éducation familiale sur l’avantage concurrentiel | Les connaissances sont importantes pour le succès de l’entreprise familiale |
- D30
L’entreprise D30 est dirigée a connu une succession depuis sa création. À l’époque de laquelle il y avait quatre candidats possibles, tous professionnels universitaires diplômés à l’étranger. La sélection s’est portée sur le troisième fils, alors que tous les autres sont en dehors de l’entreprise familiale.
- Représentativité du prédécesseur
Le fondateur de l’entreprise D30 est décrit par l’interviewé – successeur – comme une personne qui favorise l’autonomie de ses enfants, leur liberté d’action, apporte un soutien à son entourage tant dans la famille que dans l’entreprise, en respectant leurs opinions. Il participe toujours au groupe d’entreprises, bien que délégant de nombreuses fonctions, étant la figure autour de laquelle se structure l’union familiale : « J’ai été en charge de toutes les entreprises pendant environ une décennie. Mon père est toujours là, mais depuis quelques années, il m’a déjà laissé les décisions, ce n’était pas du jour au lendemain, je lui ai dit ne me dis plus, c’était un processus. Si j’étais lui, je lui aurais laissé moins de liberté. (Verbatim interviewé entreprise D30).
- Engagement du successeur
Pour l’entreprise D30, le successeur est un professionnel universitaire âgé d’une cinquantaine d’années, qui travaille comme directeur général. Il était le seul des frères à commencer dans l’entreprise, bien qu’avec un certain manque de direction précise quant aux responsabilités qu’il devrait avoir.
Pour ce successeur, les principales composantes de l’engagement sont liées au lien affectif issu de la bonne relation père-fils, à l’aspect de continuité lié aux coûts que pourrait signifier l’abandon de l’entreprise, notamment en raison de l’investissement en temps porté et, dans le normatif, à la motivation du père pour son incorporation à l’entreprise, qui fonde un sentiment de devoir envers la famille, de satisfaction des attentes.
- Planification de la succession
Au moment de la seule succession survenue dans cette entreprise, la composition de la famille était de trois frères et une sœur, le troisième enfant étant le successeur, un processus où il n’y avait aucun conflit d’aucune sorte. En termes de succession, l’entreprise dispose d’un protocole familial signé par la fratrie, qui établit clairement la composition de l’actionnariat des associés et le processus de succession, dernier aspect dans lequel sont déterminés comme exigences : stages dans l’entreprise, respect du profil et des postes où ils accèdent, la réussite d’études post-universitaires et avoir un minimum de trois ans d’expériences. Ce protocole fait partie de la culture générale de l’entreprise et vise à donner l’opportunité de participer à tous les membres de la troisième génération.
Concernant le rôle des femmes, aucune des femmes n’a jamais travaillé dans l’entreprise. Dans le cas du seul successeur potentiel, il n’y avait aucun intérêt, la culture familiale n’est pas influencée par le sexe de la personne, mais par la capacité.
- Impact de l’éducation familiale sur l’avantage concurrentiel
Selon notre interviewé chez l’entreprise D30, si l’entreprise familiale souhaite réussir sur le marché actuel, elle doit être en mesure d’apprendre et d’appliquer ses connaissances en permanence, en réagissant rapidement aux changements et aux nouvelles opportunités du marché. L’une des clés de la survie est le transfert de connaissances entre les membres de la famille et les changements que les nouvelles générations doivent opérer pour s’adapter. Principalement parce que ce sont ses actifs incorporels qui créent de la valeur dans l’organisation.
Tableau 6 : Résumé de l’interview mené auprès de l’entreprise D30
Points saillants | Observations |
L’âge de la retraite du prédécesseur | Non établi |
Plan de succession | Formellement établi |
Attributs requis du successeur | Stages et stages en entreprise, expérience, professionnel universitaire, études de master |
Droit d’aînesse du successeur | Non |
Rôle des femmes dans l’entreprise | Propriétaire familial (actionnaire, ne travaille pas dans l’entreprise) |
Impact de l’éducation familiale sur l’avantage concurrentiel | La transmission des connaissances permet à l’entreprise familiale de réussir sur le marché. |
- X25
Pour l’entreprise X25, l’association est organisée en deux groupements, immobilier et commercial, où les conjoints participent en actions (séparément à un seul d’entre eux) et chacun des enfants, dans une proportion de 50% et 15%, respectivement.
L’entreprise a déjà connu une succession au moment de laquelle il y avait trois candidats possibles, le fils aîné étant sélectionné, tandis que le deuxième fils travaille dans la même entreprise et la troisième fille travaille dans une autre société du groupe. La décision de procéder à un processus formel de succession a été prise par le fondateur en raison de problèmes de santé. Dans ce contexte, il a organisé l’association, notamment dans la partie juridique, incluant les trois enfants comme associés, considérant que cet aspect les oblige à s’engager davantage dans l’entreprise. Le processus de succession s’est achevé avec la nomination du fils aîné au poste de président exécutif. Actuellement, les trois enfants participent à l’entreprise familiale.
- Représentativité du prédécesseur
Le fondateur de l’entreprise X25 se définit essentiellement comme une personne très travailleuse, bonne en administration des affaires et capable de déléguer des tâches à ses propres enfants et aux employés en général. Bien que le processus de succession ait été achevé il y a longtemps, il est pleinement le prédécesseur est pleinement actif au sein du consortium d’entreprises, bien qu’avec moins de fonctions, participant au conseil d’administration, à la planification stratégique des affaires et, plus précisément, est en charge de l’une des coordinations du centre de distribution. .
- Engagement du successeur
Le successeur de l’entreprise X25 est un professionnel universitaire, diplômé à l’étranger, titulaire d’une maîtrise, qui a occupé le poste de président exécutif pendant quatre ans. Le prédécesseur a toujours motivé tous ses enfants à se préparer à participer à l’entreprise familiale, à obtenir un diplôme universitaire lié à la branche des affaires, à développer le goût du travail, à étudier pour une maîtrise et à se former à l’étranger.
Compte tenu de ce degré d’interaction qu’ils ont maintenu, les enfants ont développé un fort engagement envers l’entreprise familiale, à la fois émotionnellement, s’identifiant aux buts et objectifs de l’entreprise, et normativement, se préparant à répondre aux demandes de leurs parents et à se conformer à ce qui est attendu d’eux.
- Planification de la succession
Lors de la seule succession survenue dans cette entreprise, la composition familiale était de deux frères et une sœur, le fils aîné étant le successeur. À travers le protocole familial, les modalités de l’actionnariat des associés ont été organisées, incluant une séparation patrimoniale en deux groupes de sociétés, ainsi que la préparation à la gestion du successeur, un processus formel qui n’a généré aucun conflit.
Concernant le rôle des femmes, la seule fille de la première génération est salariée-propriétaire (actionnaire, travaille dans l’entreprise), l’épouse du fondateur que sa fille ont occupé des postes dans le consortium d’entreprises : « il n’y a pas de préjugés ou de préférences envers les fils en ce qui concerne le choix d’un successeur » (Verbatim interviewé entreprise X25). Au contraire, les femmes de la famille sont préparées et que le processus de succession a été influencé par l’âge et non par le sexe.
- Impact de l’éducation familiale sur l’avantage concurrentiel
Pour l’interviewé chez l’entreprise X25, l’éducation familiale est cruciale pour l’entreprise familiale, car cela permet de constituer et de former une masse critique de successeurs potentiels afin d’assurer une position concurrentielle durable à la prochaine génération.
Tableau 7 : Résumé de l’interview mené auprès de l’entreprise X25
Points saillants | Observations |
L’âge de la retraite du prédécesseur | Non établi |
Plan de succession | Formellement établi |
Attributs requis du successeur | Préparation à la gestion, professionnel universitaire, études de master, études à l’étranger |
Droit d’aînesse du successeur | Oui |
Rôle des femmes dans l’entreprise | Propriétaire salarié membre de la famille (actionnaire, travaille dans l’entreprise) |
Impact de l’éducation familiale sur l’avantage concurrentiel | Permet d’assurer une position concurrentielle durable |
- B50
Dans l’entreprise B50, le fondateur et son épouse ont travaillé toute leur vie. Au fil du temps, un consortium de plusieurs entreprises s’est formé, en charge de chacun des trois enfants du couple. L’entreprise a eu une succession au moment de laquelle il y avait trois successeurs potentiels, la sélection tombant sur le troisième fils, tandis que les deux autres restent à la tête des autres entreprises du consortium.
- Représentativité du prédécesseur
Au sein de l’entreprise B50, le fondateur est décrit comme une personne extrêmement travailleuse, austère, capable de déléguer des fonctions à ses enfants et supportant les valeurs et l’union de la famille, pour lesquelles il est un modèle permanent pour le comportement des successeurs et, en général, la culture de l’entreprise. L’interviewé souligne également les débuts difficiles de l’entreprise, l’effort fourni par leurs parents, et l’impact sur l’éducation de leurs enfants : « Nous avons vu nos parents être là plusieurs fois 24 heures, se privant de beaucoup de choses pour faire grandir l’entreprise, nous avons traversé les bons et les mauvais moments…, en ces temps le plus difficile est de dire un enfant je ne peux pas te donner ça, je ne peux » (Verbatim interviewé entreprise B50).
- Engagement du successeur
Le successeur de l’entreprise B50 est un professionnel universitaire, diplômé à l’étranger, titulaire d’un master, occupant le poste de directeur général. Le fondateur a motivé tous ses enfants à se préparer à participer à l’entreprise familiale, en prenant l’expérience des périodes difficiles, des périodes de vaches maigres qu’ils ont vécues. Par conséquent, ils se sont impliqués tôt, ont fait des stages qui leur ont permis de connaître tous les aspects de l’entreprise, ont travaillé en vacances, ont obtenu des diplômes universitaires liés au domaine, se sont formés à l’étranger. En outre, selon notre interviewé au sein de cette entreprise : « il est jugé essentiel de préparer la troisième génération en tant que futurs entrepreneurs, ce qui, dans le cas particulier des descendants du successeur, signifie préparer les filles à diriger le consortium » (Verbatim interviewé entreprise B50).
Le discours du successeur révèle l’engagement qu’il a acquis avec l’entreprise, le lien affectif qu’il a tissé très tôt, s’identifiant à ses buts et objectifs et développant un fort sentiment d’appartenance. Cependant, la composante la plus forte est la composante normative, puisque la motivation constante du père ainsi que le désir d’aider la mère les ont incités à vouloir satisfaire ces demandes, se sentant obligés de se conformer pleinement à ce qui leur avait été inculqué : « Ils nous ont toujours inculqué d’aimer ce que nous faisons, pas la chose typique qu’on dit à beaucoup d’étudiants, il faut faire ce que l’on aime,… Donc, nous avons dû l’aimer depuis que nous sommes petits, depuis que je suis…Alors, il a fallu qu’on s’y attache. nous n’avions pas de vacances, nous devions aller travaille » (Verbatim interviewé entreprise B50).
- Planification de la succession
Lors de la seule succession survenue dans cette entreprise, la composition de la famille était de deux frères et une sœur, le troisième fils étant le successeur. Le processus de succession n’était pas prévu, mais une période de crise précipita les événements et comme le frère aîné (qui en théorie devait rejoindre l’entreprise principale) travaillait à l’extérieur, il incombait à l’autre fils de prendre les règnes. Ce processus n’a pas généré de conflits dans la famille.
Actuellement, des travaux sont en cours pour structurer un protocole formel pour le processus de succession afin qu’il n’y ait pas de problèmes avec la troisième génération et que l’avenir des différentes entreprises du consortium puisse être planifié de manière adéquate. Cependant, l’exigence d’avoir de l’expérience est déjà envisagée et que les beaux-parents n’entrent pas pour travailler dans l’entreprise ; de même, le conseil d’administration familial (composé des deux parents et des trois enfants) veille à faire prévaloir les intérêts de l’entreprise afin de prendre soin du patrimoine de l’ensemble du groupe.
Concernant le rôle des femmes, les deux femmes de la famille sont salariées-propriétaires (actionnaire, travaille dans l’entreprise), puisque tant l’épouse du fondateur que sa fille ont occupé des postes dans le consortium d’entreprises. La fille est dans l’administration de l’une des sociétés du consortium et est la mieux préparée sur le plan académique : « Ils nous ont induits dans l’entreprise…, je suis ingénieur industriel, mon frère est ingénieur en mécanique, ma sœur est ingénieur commerciale, elle a deux master. Elle a beaucoup étudié » (Verbatim interviewé entreprise B50).
Aucun préjugé ou préférence envers les fils n’est décelé dans le choix du successeur, mais la capacité doit primer sur le sexe et, selon le protocole qu’ils préparent, les descendants doivent gagner des emplois dans l’entreprise et participer à des activités restreintes.
- Impact de l’éducation familiale sur l’avantage concurrentiel
Pour noter interviewé chez l’entreprise B50, l’éducation à l’entreprise familiale commence naturellement et de manière assez informelle lorsque les parents emmènent leurs enfants au travail pour le plaisir ou par nécessité : « Les très jeunes membres de la prochaine génération ont l’occasion de voir l’enthousiasme des entrepreneurs ou la fierté générationnelle de la propriété sur les visages familiers de ceux qu’ils aiment, ce qui peut laisser une impression durable. L’impact de cette expérience peut être suffisamment puissant pour inspirer pendant des décennies » (Verbatim interviewé entreprise B50).
L’éducation familiale peut se poursuivre presque sans effort, mais certainement intentionnellement. Lorsque des histoires de famille sont racontées, cela pourrait rapporter d’énormes avantages concurrentiels : « les enfants qui connaissent leur histoire familiale montrent des niveaux plus élevés de bien-être émotionnel, ce qui le rend idéal pour la famille et pour l’entreprise » (Verbatim interviewé entreprise B50).
Tableau 8 : Résumé de l’interview mené auprès de l’entreprise B50
Points saillants | Observations |
L’âge de la retraite du prédécesseur | Non établi |
Plan de succession | En cours d’établissement |
Attributs requis du successeur | Être qualifié, avoir de l’expérience, une formation de dirigeant, connaître tous les aspects de l’entreprise, professionnel universitaire, étudier à l’étranger, études de master |
Droit d’aînesse du successeur | Non |
Rôle des femmes dans l’entreprise | Propriétaire salarié membre de la famille (actionnaire, travaille dans l’entreprise) |
Impact de l’éducation familiale sur l’avantage concurrentiel | Cela pourrait rapporter d’énormes avantages concurrentiels |
Dans l’analyse individuelle de chaque cas et dans les comparaisons inter-cas, quelques constatations peuvent être mises en évidence :
- La représentativité du prédécesseur-fondateur de la société conditionne la désignation du successeur ;
- La représentativité est développée à partir des attributs personnels et professionnels du prédécesseur-fondateur en tant que plus haute figure d’autorité.
En effet, la plupart des personnes interviewées estiment que le sexe n’influence pas la succession de l’entreprise familiale et seulement deux admettent une préférence pour les hommes ; deux ont mis l’accent sur la considération de la capacité du successeur plutôt que sur le genre, en pensant notamment à leurs propres fils et filles face à une future succession familiale ; et dans l’un des cas, l’attitude protectrice du père envers les filles a été ouvertement mise en évidence, dans le sens de leur “éviter” les problèmes dérivés des défis de l’entreprise.
Tableau 9 : Représentativité du prédécesseur dans l’entreprise familiale
Entreprise | Attributs |
A20 | Caractéristiques personnelles |
C3 | Caractéristiques managériales |
M30 | Culture |
D30 | Valeurs |
X25 | Histoire |
B50 | Activité exercée au sein de l’entreprise |
Cette représentativité perdure au-delà de la retraite ou de la disparition physique, puisqu’ils continuent d’être un symbole d’union, un héritage de travail, d’effort et de valeurs familiales qui doivent être préservés par les nouvelles générations.
Les entretiens ont mis en évidence le fait que la figure de représentativité est formée sur la base des attributs du prédécesseur, ces caractéristiques personnelles, managériales, culturelles et de valeur qui ont guidé la création de l’entreprise familiale, déterminant son histoire, faisant partie de ces attributs le rôle actuel du prédécesseur, c’est-à-dire les activités exercées au sein de l’entreprise ou le sens de sa figure dans sa continuité, qu’il soit actif ou retraité.
Tableau 10 : Les composants de l’engagement du successeur
Entreprise | Réponses |
A20 | Le lien affectif avec le prédécesseur |
C3 | La passion |
M30 | Sentiment d’appartenance à l’entreprise |
D30 | Engagement vis-à-vis de l’entreprise familiale |
X25 | Obligation |
B50 | Devoir envers la famille |
Le tableau ci-dessus montre les trois principales composantes de l’engagement du successeur dans l’entreprise familiale, selon l’esprit qui pousse l’individu à rejoindre l’entreprise familiale, à prendre les rênes :
- L’engagement émotionnel, défini comme le lien affectif qui peut s’exprimer comme une passion, une envie de rejoindre l’entreprise, de participer à son développement, par l’identification de l’individu à l’entreprise, ses buts et objectifs, ainsi que, par un sentiment d’appartenance à l’organisation ;
- Engagement à continuer, se référant à un sentiment de besoin plutôt qu’à un désir d’être dans l’entreprise, lié à la perception que l’individu n’a pas de meilleures options ou que le départ représentera un coût en temps et en investissement d’argent ou en avantages futurs ;
- L’engagement normatif, défini comme un sentiment d’obligation envers autrui, de réciprocité, résultat de l’intériorisation de normes ou de comportements appropriés, de la perception d’activités socialement acceptables, génératrices d’un sentiment de devoir envers la famille, ses traditions et leurs normes.
Dans les cas étudiés, les forces qui ont motivé les successeurs à rejoindre l’entreprise familiale sont principalement liées à la composante émotionnelle (lien affectif avec l’entreprise) et à la composante régulatrice (sentiment d’obligation, satisfaction des attentes). D’autre part, nous constatons que la préparation/formation du successeur est un élément indissociable de la génération de cet engagement, commencer tôt sous le parrainage du prédécesseur et, en outre, constitue une garantie future de satisfaction des exigences établies dans le protocole familial pour accéder à des postes au sein de l’entreprise.
- La désignation du successeur est influencée par le sexe des successeurs possibles ;
- La prise de décision est influencée par la composition familiale du prédécesseur ;
- La prise de décision est influencée par la primogéniture masculine ;
- La prise de décision est influencée par le rôle joué dans l’entreprise par les femmes du noyau familial.
Selon les entretiens, nous pouvons considérer que, en étroite association avec le développement de l’engagement, naît le désir de préparer le successeur à prendre les rênes de l’entreprise, ce qui inclut sa formation académique et l’accumulation d’expérience pour occuper des postes dans l’entreprise, généralement avec le soutien du prédécesseur et une implication précoce dans les différents domaines de l’entreprise. Évidemment, au fur et à mesure de la préparation, le degré de connaissance et d’expérience renforce leur attachement à l’entreprise familiale.
Tableau 11 : Planification et place du genre dans la succession
Entreprise | Réponses |
A20 | La composition de la famille et l’ordre de naissance |
C3 | La composition de la famille et le rôle du successeur au de l’entreprise |
M30 | La composition de la famille et le rôle de la femme |
D30 | La composition de la famille et l’influence du genre |
X25 | La composition de la famille et la place du successeur au sein de l’entreprise |
B50 | La composition de la famille et rôle joué au sein de l’entreprise |
La recherche porte sur l’influence du genre dans la désignation du successeur. Il s’agit donc de comprendre l’effet du genre dans trois domaines ou moments du processus de succession : la figure de représentativité du prédécesseur-fondateur, le développement de l’engagement envers l’entreprise par le successeur, et la planification du processus de succession lui-même. Le but est d’évaluer les facteurs poussant les fondateurs à choisir généralement le fils comme successeur et de comprendre la place de la fille dans l’ordre de succession.
Le tableau ci-dessus illustre les principaux facteurs qui peuvent influencer la planification de la relève, en particulier lors de l’évaluation de l’effet du sexe des successeurs potentiels sur la prise de décision. En premier lieu, la composition de la famille est associée, c’est-à-dire les caractéristiques du groupe familial en termes de nombre de fils et de filles, en faisant partie la primogéniture, c’est-à-dire l’ordre de naissance qui accorde traditionnellement des avantages aux héritiers mâles les plus âgés. Deuxièmement, le rôle des femmes est associé, le profil que les femmes de la famille jouent au sein de l’entreprise, l’influence du genre faisant partie de la définition de ce rôle, en même temps qu’elle pourrait être associée à la composition des fils et fille du groupe familial et la configuration du protocole familial, notamment en matière de succession. D’autre part, l’élaboration de ce protocole, en tant que schéma d’organisation de l’actionnariat et de la succession, fait partie intégrante du processus de planification, qui peut également être influencé par le sexe et, de plus, sa formulation est une source potentielle de conflit de succession.
Le prédécesseur, décide généralement si la succession va se faire de manière planifiée, ou de la manière dont la société est composée d’influences familiales, qui prennent parfois le premier-né comme candidat inné. Dans d’autres cas, il y a des conflits pour la succession et le protocole familial est mis en place pour résoudre les problèmes de genre et définir le rôle que jouent les femmes. Ces deux éléments sont associés au type d’engagement que le successeur a avec l’entreprise familiale et qui se remarquera lorsqu’il sera incité à réaliser la succession.
Cette partie décrit les particularités des cas étudiés, détermine les considérations pertinentes dans le processus de succession et établit les effets du genre dans le processus de succession des entreprises interrogées. Pour Remery, C., Matser, I., & Hans Flören, R. (2014), les femmes d’affaires sont similaires aux hommes d’affaires par certains facteurs démographiques de base, mais elles diffèrent largement dans d’autres dimensions personnelles. La principale raison de ces différences est que les femmes conçoivent leurs entreprises différemment des hommes, ce qui conduit à des approches et des résultats de fonctionnement différents.
Une partie de l’analyse des entretiens a centré l’effet du genre sur trois champs ou moments du processus de succession. La représentativité du prédécesseur-fondateur en tant que plus haute figure d’autorité dans l’entreprise familiale, ses attributs et ses valeurs ; développement de l’engagement envers l’entreprise par les successeurs potentiels ; et, la planification du processus de succession lui-même, à son tour influencé par la composition de la famille, la primogéniture et le rôle que les femmes de la famille jouent dans l’entreprise.
Les résultats obtenus à partir de l’analyse intra et inter cas nous permettent d’affirmer qu’il y a la figure du prédécesseur-fondateur, qui choisit l’option d’essayer de transmettre à ses descendants (succession intrafamiliale) le fruit d’une vie de travail, une fibre conservatrice orientée vers la continuité générationnelle qui, selon Constantinidis, C. (2010), est présente chez plus de la moitié des dirigeants d’entreprises familiales. Il s’agit du transfert de commandement à un membre de la famille qui prend le contrôle de l’entreprise familiale lorsque le propriétaire décide de prendre sa retraite. Notre étude montre que les prédécesseurs possèdent un ensemble de traits personnels (ambition, modèle, austère, responsable…) et de type business (travailleur acharné, administrateur, crée des équipes de confiance, délègue des fonctions, vision business…) qui leur ont permis de fonder, de consolider et de transmettre l’entreprise à leurs héritiers pour qui ils représentent un symbole qui maintient l’union familiale.
À cet égard, la prise de décision du prédécesseur-fondateur est basée sur une séquence logique de cognitions, un processus rationnel dans lequel il utilise les informations auxquelles il a accès, générant une somme de croyances envers un comportement particulier, dont l’évaluation et la priorisation rendent son intention de le réaliser plus ou moins probable. De plus, au cours de ce processus, la décision sera fortement influencée par leurs considérations sur la famille et l’entreprise, puisque les entreprises familiales peuvent tirer de la valeur à la fois du succès économique de l’entreprise ainsi que l’impact émotionnel lié à l’identité familiale, la pérennisation de l’héritage, la visibilité de l’entreprise ou encore le maintien des valeurs familiales à travers l’entreprise.
La prise en compte de la valeur non économique de l’entreprise familiale conduit à la dynamique familiale propre, à la disponibilité et à la volonté d’un successeur, à l’influence familiale et à l’engagement envers l’entreprise. Selon Fattoum, S. & Byrne, J. (2017), il doit y avoir une volonté de la part des propriétaires d’entreprise de transmettre l’entreprise à d’autres, ainsi que la disponibilité d’un successeur potentiel pour prendre la relève. De plus, du point de vue de l’échange social, les humains prennent des décisions en fonction des coûts et des avantages perçus. De tels calculs sont donc présents dans la dynamique de succession, compte tenu de sa nature multidimensionnelle et de ses multiples parties prenantes (Constantinidis, C. (2010).
Par ailleurs, nous constatons également que l’engagement du successeur, qui est considéré comme une force de motivation, pousse l’individu à poursuivre une certaine décision dans la durée ou la politique de l’entreprise familiale malgré les difficultés. L’analyse intra et inter-cas a montré que les composantes de cet engagement sont principalement liées à l’émotionnel et au normatif.
La littérature scientifique indique de multiples facteurs déterminants dans la sélection du successeur, tels que : le leadership, l’âge, l’éducation et la capacité à gérer judicieusement l’entreprise; les caractéristiques du successeur et du titulaire, les relations familiales et une vision commune ; la primogéniture (premier fils ou fille), les compétences et l’expérience en affaires et le respect des exigences familiales (Constantinidis, C. (2010). Par ailleurs, en ce qui concerne les facteurs liés au successeur, il est constaté que les récompenses potentielles de l’entreprise, la confiance dans les capacités et les intentions du successeur et l’alignement des besoins personnels, constituent les antécédents qui influenceraient la volonté du successeur d’assumer le contrôle, tandis que l’harmonie familiale est l’antécédent de la relation entre propriétaire et successeur, une interaction qui influence leur niveau de préparation (Fattoum, S. & Byrne, J. (2017).
Également, chez les cinq entreprises ayant fait l’objet de cette étude, les entreprises investissent du temps, des efforts et des ressources pour lier les successeurs à leurs intérêts spécifiques, mettant en évidence la préparation précoce menée par le prédécesseur comme mécanisme intégré de transmission tacite des connaissances dans les processus, la culture et les relations dans l’organisation. Suivant Pandea, A., Grzemny, D., Keen, E. (2019), on peut analyser le genre comme un facteur, dans la mesure où il se reflète dans la qualité de la relation entre le fondateur et le successeur et la manière dont cela peut affecter la nature du transfert de connaissances.
Sur la base de la littérature et des résultats de notre analyse qualitative, il est aussi constaté que c’est précisément au cours du processus de préparation que les relations de confiance entre le fondateur et le successeur se nouent et que les filles et les fils peuvent avoir des expériences de socialisation différentes quant à leur entrée dans le entreprise familiale et succession. Une socialisation spécifique au genre qui commence dans la famille qui est incluse dans le processus de socialisation de l’entreprise affecte clairement le transfert des connaissances. Autrement dit, c’est dans le cadre de la famille et de l’entreprise familiale que les filles développent progressivement des connaissances et des compétences, façonnent leur vision de l’entreprise et le rôle qu’elles peuvent y jouer. Dans ce contexte, trois positions peuvent se manifester :
- Une position proactive : elles perçoivent rapidement l’entreprise comme la leur et manifestent leur volonté d’y jouer un rôle actif ;
- Une position réactive : elles ne sont pas considérées comme des successeurs potentiels et ne préparent pas une éventuelle succession ;
- Une position évolutive : elles découvrent les possibilités et les opportunités lorsqu’elles se présentent au fur et à mesure qu’elles intègrent l’entreprise.
En d’autres termes, les motivations et l’engagement des filles – mais aussi leur positionnement en tant que managers – se construisent en relation avec leur environnement et leurs interactions avec les différents acteurs clés, issus de la famille et des parties intéressées.
Par exemple, chez la première entreprise étudiée, la fille aînée de la troisième génération pourrait se placer dans une vision réactive, se voyant inhibée à participer à l’entreprise principale du groupe familial et transférant son intérêt à une autre des entreprises, dont elle a la branche. Pour les deux dernières entreprises, les filles étaient proactives, et bien que dans les deux premiers cas, elles n’aient pas été désignées comme successeurs, elles occupent des postes importants dans d’autres sociétés du consortium.
Enfin, les cas étudiés montrent que l’influence du groupe familial dans la prise de décision correspond principalement à trois aspects :
- le droit d’aînesse (qui est à lui seul un mécanisme de sélection),
- l’âge des éventuels successeurs (lié aux compétences et à l’expérience de l’entreprise)
- le rôle des femmes dans l’entreprise.
Conclusion
Comme montré tout au long de ce travail, les entreprises familiales sont un moteur fondamental du développement d’un pays, malgré quoi elles constituent un objet d’étude peu abordé dans les différents aspects traités par la littérature scientifique. En ce sens, il y a très peu de réflexions sur la conceptualisation de l’entreprise familiale dans une perspective multidimensionnelle, en se concentrant sur les différences par rapport aux entreprises non familiales, ou sur le degré de coïncidence avec les définitions, les approches et les tendances théoriques actuelles. Il n’existe pas non plus d’études empiriques à grande échelle permettant une caractérisation plus précise de ce segment d’activité sur des sujets aussi pertinents que la planification de la succession, l’effet du genre dans la prise de décision concernant le successeur, les motivations derrière l’acte d’entreprendre ou les principaux éléments qui constituent la direction de l’entreprise familiale.
La réalisation de cette étude a permis de créer un espace où les dirigeants d’entreprises familiales pourraient exprimer explicitement et implicitement leurs expériences personnelles sur un phénomène essentiel pour le succès et la continuité de l’entreprise, en utilisant cet outil qui leur est inhérent – leur discours – leur permettant de formaliser les facteurs intrinsèques et extrinsèques qui ont entouré la création de l’entreprise, les attributs du prédécesseur-fondateur, ainsi que les principales caractéristiques du groupe familial, les éléments qui ont influencé la nomination du successeur et, en général , leur vision du rôle des femmes tout au long du développement de l’entreprise familiale. Cet espace de formalisation du discours quotidien par l’entretien et l’analyse des sources secondaires a produit une mine d’informations qui fait aujourd’hui partie de cette étude et répond en quelque sorte à une partie de nos attentes.
Cette recherche, dans une certaine mesure, visait aussi à combler le manque d’information existant concernant le processus de succession dans l’entreprise familiale, en particulier en ce qui concerne l’influence du sexe dans la décision concernant le successeur qui reprendra l’entreprise. Pour cela, nous nous sommes centrés sur trois ponts essentiels :
- En premier lieu, la description des facteurs individuels du prédécesseur-fondateur conditionnant le processus de succession dans l’entreprise familiale, aspect dont il existait déjà des indications théoriques quant à sa pertinence dans la formation d’un modèle de représentativité qui affecte la prise de décision sur le choix du successeur ;
- Deuxièmement, il nous a fallu catégoriser les motivations ou les composantes qui influencent l’engagement des successeurs potentiels dans l’entreprise familiale, c’est-à-dire les forces motrices de leur implication. La figure du prédécesseur façonne en quelque sorte le développement de l’engagement du successeur ;
- Les effets du genre dans la planification de la succession, en valorisant la composition de la famille, le droit d’aînesse et le rôle des femmes. Autrement dit, mettre en relation ces trois aspects de la dynamique familiale, profondément liés au climat de socialisation de la question du genre.
Sur le plan théorique, les résultats de notre étude retrouvent dans la figure du prédécesseur-fondateur la fibre conservatrice orientée vers la continuité générationnelle qui, selon Le Breton-Miller, I. (2011), est présente chez plus de la moitié des dirigeants d’entreprises familiales, et qui configure un fort désir de transmettre à ses descendants le fruit de toute sa vie professionnelle. La prise de décision est basée sur une séquence logique de cognitions, dans laquelle le fondateur utilise les informations auxquelles il a accès, générant un ensemble de croyances rationnelles vers le choix du successeur possible, comme le soutient la théorie du comportement planifié.
La prise en compte de la valeur non économique de l’entreprise familiale conduit à la dynamique familiale propre, à la disponibilité et à la volonté d’un successeur, à l’influence familiale et à l’engagement envers l’entreprise. Dans ce dernier aspect, les résultats rejoignent ceux d’auteurs importants (Pearson, A.W., Carr, J.C., & Shaw, J.C. (2008), concernant les composantes émotionnelles et normatives.
Il a été aussi déterminé que le profil administratif de l’entrepreneur/fondateur est nécessaire pour établir la possibilité d’une succession basée sur des études d’entreprises familiales aujourd’hui.
Les stratégies visualisées pour la mise en œuvre dans l’entreprise déterminent que l’autorité et le leadership de l’entreprise sont liés aux activités du fondateur de l’entreprise. Le soutien du fondateur de l’entreprise qui génère la direction et les conseils à ceux qui vont la diriger, dans cet aspect, il est important qu’une administration rigide et inflexible qui empêche la communication et la confiance ne soit pas utilisée. En d’autres termes, la succession représente l’un des aspects les plus importants dans les entreprises familiales, et que tous doivent affronter. À ces fins, les membres de la famille qui se sont déjà aventurés dans l’entreprise et connaissent le modèle conçu par son fondateur ont une plus grande possibilité de continuer avec l’entreprise.
Au-delà de la triangulation des données, la triangulation des méthodes constitue une source de connaissances dans cette recherche. La méthode multi-cas mobilisée avait l’avantage de permettre une double observation de l’objet d’étude : la première fois, à un niveau perceptif de la problématique de recherche, avec le fondement théorique des prémisses qui soutiennent les objectifs et, la seconde fois, dans une phase de terrain au cours de laquelle on se situe dans la réalité même du phénomène, là où se produit la falsification des propositions proposées.
D’autre part, l’application d’une méthode qualitative a permis d’approfondir des sujets inexplorés dans l’entreprise familiale qui auraient difficilement pu être expliqués avec un schéma quantitatif, tels que les détails du processus de formation du successeur, les liens étroits avec la figure du prédécesseur-fondateur, la transmission du savoir tacite et, enfin, son rapport avec l’effet du genre sur la sélection du successeur.
Bien que la recherche soit exploratoire, la sélection multi-cas accompagnée d’une analyse qualitative rigoureuse nous a permis d’arriver à des conclusions assez explicites, comme suit :
- Les facteurs individuels du prédécesseur-fondateur conditionnant le processus de succession dans l’entreprise familiale, mettant en évidence à la fois des qualités personnelles ainsi que des traits liés au monde de l’entreprise. Ces attributs ont marqué le développement de la famille et de l’entreprise familiale, influençant la décision sur le choix du successeur, une influence qui perdure au-delà de la retraite ou de la disparition physique, puisqu’ils continuent de représenter un symbole d’union, un héritage qui doit être préservé par les nouvelles générations ;
- Les facteurs qui constituent les forces de motivation qui génèrent l’engagement des successeurs à rejoindre l’entreprise familiale ont été identifiés. Cet engagement se superpose à la préparation/formation du successeur, qui constitue à son tour l’étape où s’établissent des relations de confiance entre le prédécesseur et le successeur, prélude à leur nomination effective lors du transfert générationnel ;
- Les effets du genre dans la planification de la succession ont été expliqués, valorisant la composition de la famille, le droit d’aînesse et le rôle des femmes, à travers une proposition théorique qui établit le lien profond entre la dynamique familiale/entreprise et le climat de socialisation de la question du genre, constatant que le genre est un facteur, dans la mesure où il reflète la qualité de la relation entre le prédécesseur et le successeur, affectant le transfert des connaissances.
Références bibliographiques
- Anderson A.R.; Jack S.L.; Drakopoulou Dodd S. (2005). « The role of family members in entrepreneurial networks: beyond the boundaries of the family firm », Family Business Review, vol. 18, no. 2, p. 135-154.
- Anderson, R.C. et D.M. Reeb 2003 Founding-Family Ownership and Firm Performance : Evidence from the S&P 500, Journal of Finance, 58 (3) : 1301- 1329.
- Arrègle, J., Durand, R. & Véry, P. (2004). Origines du capital social et avantages concurrentiels des firmes familiales. M@n@gement, 7, 13-36. https://doi.org/10.3917/mana.072.0013
- Basco R.; Rodriguez M.J.P. (2009). « Studying the family enterprise holistically: evidence for integrated family and business systems », Family business Review, vol. 22, p. 82, no. 1, p. 82-95.
- Basu A. (2004). « Entrepreneurial aspirations among family business owners: An analysis of ethnic business owners in the UK », International Journal of Entrepreneurial Behaviour & Research, vol. 10, no. 1/ 2, p. 12-33
- Bayad M. et Barbot M.-C. (2002), Proposition d’un modèle de succession dans les PME familiales : étude de cas exploratoire de la relation père-fille, 6e congrès international francophone sur la PME, octobre, HEC-Montréal.
- Degeorge, J. (2015). Méthodologie qualitative et processus : deux frontières de la recherche en entrepreneuriat. Revue de l’Entrepreneuriat, 14, 7-13. https://doi.org/10.3917/entre.141.0007
- Cadieux L., Hugron P. et Lorrain J. (2000), La succession dans les entreprises familiales : une étude de cas exploratoire faite auprès de quatre PME manufacturières fondées et dirigées par des femmes, 5e congrès international francophone sur la PME, octobre, Lille.
- Constantinidis, C. (2010). Entreprise familiale et genre. Les enjeux de la succession pour les filles. Revue française de gestion. 36. 10.3166/rfg.200.143-159.
- Carr J.C.; Sequeira J.M. (2007). « Prior family business exposure as intergenerational influence and entrepreneurial intent: a theory of planned behavior approach », Journal of Business Research, vol. 60, no. 10, p. 1090-1098.
- Chabaud, D. & Sammut, S. (2014). Entrepreneuriat et entreprises familiales, de la proximité à un champ de recherche spécifique. Revue de l’Entrepreneuriat, 13, 7-10. https://doi.org/10.3917/entre.133.0007
- Coutelle, P. (2005). Introduction aux méthodes qualitatives en sciences de gestion. Cours du CEFAG. Séminaires d’études qualitatives
- d’Andria, A., Bourgain, M., Le Loarne-Lemaire, S. & Gnan, L. (2020). La parentalité en entrepreneuriat : une dimension oubliée ?. Revue de l’Entrepreneuriat, 19, 13-21. https://doi.org/10.3917/entre1.193.0013
- Eisenhardt, K.M., (1989), Building theories from case study research, Academy of Management Review, vol. 14, n°4, p. 532-550.
- Fattoum, S. & Byrne, J. (2017). L’influence du genre dans le choix du successeur en entreprise familiale. Revue de l’Entrepreneuriat, 16, 229-254. https://doi.org/10.3917/entre.163.0229
- Fattoum, S. & Alain,. (2008). L’impact de la relation prédécesseur/successeur sur le déroulement du processus de succession dans les entreprises familiales. La Revue Des Sciences De Gestion, Direction Et Gestion. 230. 105-113. 10.1051/larsg:2008025.
- Fayolle, A. et Bégin, L. (2009). Entrepreneuriat Familial : Croisement de deux champs ou nouveau champ issu d’un double croisement ? Management international. Volume 14, numéro 1, automne 2009, p. 11–23
- Gersick K., Davis. J., McCollom, M.H. & Landsberg, I. (1997). Generation to generation: Life cycles of the family business. Boston, Harvard Business School Press
- Giraud, O. et Renard, L. (2020). Reconnaître le travail des femmes dans l’entreprise familiale en France et en Allemagne : décalage des temporalités et des motifs. ffhal-02887513f
- Handler W. C. Et Kram K. E. (1988), “Succession in Family Firms : The Problem of Resistance”, Family Business Review, Vol. 4, No. 1, p. 361-381.
- Hedi Y. (2019). La succession dans les entreprises familiales : le rôle des compétences sociales du successeur. Gestion et management. Université Panthéon-Sorbonne – Paris I, 2019. Français. ffNNT : 2019PA01E047ff. fftel-03651238f
- Hirigoyen, G. et Basly, S. (2019). The 2008 financial and economic crisis and the family business sale intention. Journal of Small Business and Enterprise Development, 26. DOI: 10.1108/JSBED-04-2018-0115
- Larioui, L. & Alaoui M. (2016). Gouvernance et Capital Social des PME familiales : Une Analyse Théorique.
- Lassassi, M & Hammouda, N-E. (2009). La main d’œuvre familiale : quelle utilisation en algérie ?. les cahiers du cread. N°89. 97-122.
- Le Breton-Miller, I. (2011). Les facteurs clés de la réussite des successions au sein des entreprises familiales. Gestion, 36, 25-34. https://doi.org/10.3917/riges.361.0025
- Merriam, S.B. (2009), Qualitative research: A guide to design and implementation. San Francisco, CA: John Wiley & Sons
- Moundir, L. & Hammouda, N. (2009). La main d’œuvre familiale : quelle utilisation en algérie ?. les cahiers du cread. N°89. 97-122.
- Pandea, A., Grzemny, D., Keen, E. (2019). Questions de genre : Manuel pour aborder la violence fondée sur le genre affectant les jeunes. Conseil de l’Europe. https://doi.org/10.3917/coe.pande.2019.01
- Pearson, A.W., Carr, J.C., & Shaw, J.C. (2008). Toward a theory of familiness: A social capital perspective. Entrepreneurship Theory and Practice, 32(6), 949–969.
- Paillé, P. (2006). La méthodologie qualitative: Postures de recherche et travail de terrain. Armand Colin. https://doi.org/10.3917/arco.paill.2006.01
- Poulain-Rehm, T. (2006). Qu’est-ce qu’une entreprise familiale ? Réflexions théoriques et prescriptions empiriques. http://dx.doi.org/10.1051/larsg:2006029. 10.1051/larsg:2006029.
- Remery, C., Matser, I., & Hans Flören, R. (2014). Successors in Dutch family businesses: gender differences. Journal of Family Business Management, 4 n°1, p. 79–91.
- Robic P., Barbelivien D., Antheaume N. (2014), « La fabrique de l’entrepreneur familial. Comment des héritiers deviennent entrepreneurs et reprennent la direction d’une entreprise familiale », Revue de l’entrepreneuriat, 13(3), 25-50.
- Salma F. & Fayolle, A (2008). L’impact de la relation prédécesseur/successeur sur le déroulement du processus de succession dans les entreprises familiales. La Revue Des Sciences De Gestion, Direction Et Gestion. 230. 105-113. 10.1051/larsg:2008025.
- Sihem Ben M-J. et 7 Mignon, S. (2016). L’ambidextrie des entreprises familiales : comment concilier orientation entrepreneuriale et stratégie de pérennité ?. Finance Contrôle Stratégie [En ligne], mis en ligne le 31 mars 2016, consulté le 22 octobre 2022. URL : http://journals.openedition.org/fcs/1755 ; DOI : https://doi.org/10.4000/fcs.1755
- Very, P. et Raytcheva S. (2001). Influence of Family Structure on the Management of Family Firms : An Investigation of Succession Issues, 17th EGOS Colloquium, Lyon, 5-7 Juillet.