cet exemple de thèse de doctorat en sciences de Gestion vise à vous donner un aperçu des attentes académiques relatives à la rédaction de ce type de thèse pour être validée par votre directeur de thèse.
Sommaire
Chapitre I : – Caractéristique du secteur bancaire en Afrique subsaharienne 1
I. Le contexte démo-économique africain 3
II. Le niveau de bancarisation de la population Africaine 7
III. Les spécificités du modèle bancaire africain 12
III- 1. Les banques de détail africaines 16
2. La question de concurrence 18
3. Efficience des institutions financières 20
4. Le cas de l’Afrique subsaharienne, notamment l’Afrique de l’Ouest (Zone UEMOA) 22
IV-1. La transformation numérique du secteur financier 26
IV-2. La digitalisation des services bancaires 28
IV-3. L’arrivée des Fintechs 30
V. Les OTM et le Mobile Money /Banking 33
I. Dimensionnement du concept de collaborativité 42
I-1. Le concept de collaboration 43
I-2. Les dimensions de la collaboration 44
II-2. Le nouveau modèle de l’open innovation 53
II-3. Les limites de l’innovation fermée 57
II-4. Les modalités pratiques de l’innovation ouverte 60
II-5. Attrait de l’open innovation dans le secteur bancaire 67
1) Avantages des nouvelles technologies dans la satisfaction de la clientèle 68
2) Évolution du secteur bancaire à l’ère du numérique 72
3) La question de désintermédiation 75
III. La notion de coopétition 80
III- 1. Origine de la coopétition 80
III- 2. Définition et typologie 82
III- 3. Coopétition : la capacité à coopérer avec ses concurrents 87
1) Les avantages de la coopétition 90
2) Les risques liés à la coopétition 92
a. Le paradigme de la compétition 93
b. L’arrivée d’un paradigme coopératif 94
3) Le management de la coopétition 97
4) Les sources de tension dans la coopétition 103
a. Les types de tensions qui peuvent se produire au niveau inter-organisationnel 106
b. Les types de tension au niveau intra-organisationnel 108
III- 4. Les risques et les enjeux de la coopétition dans le secteur bancaire africain 109
1) Des caractéristiques non conformes à l’adoption de l’open innovation 112
2) Tensions entre les partenaires et transfert de propriété intellectuelle 117
4) Une possibilité de développement malgré les risques encourus 119
IV. La théorie des écosystèmes 124
IV-1. La théorie des écosystèmes 124
IV-3. Écosystème d’entreprise en perspective 130
1) L’établissement d’un écosystème d’affaires 132
2) L’écosystème d’affaires, comme une forme organisationnelle distincte 132
3) La place des entreprises pivot 138
IV-4. Puissance de la théorie des écosystèmes 139
IV-5. L’écosystème d’innovation 140
1) Le rôle fondamental joué par les plates-formes technologiques 140
2) Le relationnel dans l’écosystème d’innovation 143
a. Le marketing relationnel dans les écosystèmes d’affaires 144
b. La question d’équilibre des forces 145
IV-6. Ecosystème financier entre les banques et les fintechs 146
Chapitre I : Désign de la recherche et Posture épistémologique 151
I. Une épistémologie interprétation avec un raisonnement Abductif 154
II. Critère de validité de la recherche 159
III- 1. Conception du guide d’entretien 165
III- 3. Grille d’analyse et d’interprétation 169
Chapitre II : La perception de la collaborativité par les acteurs 171
I. Présentation des entreprises et des personnes interviewées 171
I-1. Les fintechs et les OTM 171
II. Les différentes dimensions de la collaborativité : le jeu de chaque acteur 183
II-1. L’évaluation de la bancarisation de la population africaine par les OTM et Fintechs 183
1) Les jeux de chaque acteur en termes de collaborativité 190
a. Position des OTM et fintechs 191
IV. Les attentes respectives 224
V. Les relations entre les acteurs 236
1. Approche par classe d’acteurs 240
2. Approche inter classe (Liens et relation pour opérer la possibilité de collaborativité) 243
I. Quel business model à l’ère du numérique? 245
I-1. Des institutions bancaires qui commencent à se tourner vers le numérique 246
I-1. Les défis qui doivent être surmontés par les banques pour intégrer le numérique 250
2. Manque d’infrastructures 253
3. Coûts élevés de la digitalisation 254
4. Les caractéristiques des OTM et des fintechs 259
II. Du Mobile Money vers le Mobile Banking 265
II-1. Une population qui se tourne davantage vers le Mobile money 266
II-2. Les impacts du Mobile Money sur la population africaine 269
II-3. Les modes de collaboration qui doivent être mis en place 273
II-4. Les solutions possibles 275
a. Développer le mobile Banking en impliquant chaque acteur 281
a. Les rôles à jouer par les fintechs et les OTM 284
b. Les rôles à jouer par les banques 287
d. Mettre en place des services accessibles et rapides aux consommateurs analphabètes 296
e. Faire du big data un allier incontournable 299
f. Faire appel au modèle du Balanced Scorecard pour conduire le changement 300
g. Comprendre et anticiper les enjeux à venir 304
3. Les avantages pouvant être apportés par la coopération 306
2. Les apports managériaux 319
Introduction
Dans le monde entrepreneurial, le numérique est devenu inéluctable et actuellement aucune entreprise ne peut échapper à son influence. Au sein des pays qui ne disposent pas d’infrastructures, le numérique donne la possibilité d’acquérir des gains générationnels prépondérants, dépassant les restrictions qu’ont infligé jusqu’à maintenant ces défauts structurels. Au sein des pays les plus avancés, en Europe, aux États-Unis ou en Asie, il permet à la clientèle d’être de plus en plus engagée tel un véritable acteur de sa propre relation à l’argent ; il est placé au cœur des préoccupations des institutions bancaires et autres établissements financiers. L’institution bancaire est alors devenue connectée (multicanal e-commerce, applications mobiles, tablettes, paiement intégré, etc.), adroite (exploitation des données pour la banque, monétisation des données client, identité numérique, développement de la transversalité entre les différentes branches, etc.), flexible (nouveaux moyens de paiement, bring your own device, dématérialisation, cloud) et sociale (image de marque, crowdfunding, médias sociaux, économie sociale).
Ces dernières décennies, les innovations incessantes des TIC ont beaucoup impacté le processus des activités bancaires. Vaste base de données, moyen de paiement électronique, réseaux de télécommunications ouverts, centre d’appel, etc., toutes ces technologies n’ont pas seulement renouvelé, mais aussi amélioré la relation banque-client, les activités bancaires sans oublier les prestations financières. Grâce à elles, des opportunités commerciales et stratégiques ont été créées. La réduction de différents coûts comme le coût des transactions et le coût des infrastructures figure parmi les avantages les plus évidents de l’utilisation d’Internet dans les métiers bancaires. De plus, il ne faut pas oublier que l’offre proposée par les banques en ligne s’adapte facilement à la clientèle et répond à toutes ses attentes. Dans les activités de courtage, cette nouvelle technique permet d’atteindre une nouvelle gamme de clientèle. L’influence des technologies de l’information et de la communication ainsi que des différents réseaux de communication dans le domaine bancaire a commencé à se développer dans les années 70. Dans le domaine bancaire, ces nouvelles technologies ont déjà engendré deux grandes évolutions. La première a été marquée par l’apparition de nouveaux supports logistiques dans le cadre du traitement interne des informations ainsi que dans les relations au sein de la profession. La seconde quant à elle se rapporte au fait que les nouvelles technologies sont devenues le moyen le plus rapide pour accéder à tous types d’informations et aux marchés tout en étant un moyen de création de marchés électroniques globaux. Les nouvelles technologies marquent également la modernisation des bourses de valeurs.
De leur côté, les banques de détail se sont également appropriées des nouvelles technologies sur différents domaines de leurs activités, expérience client, processus opérationnels, développement des organisations et de fonctionnement à l’intérieur de l’entreprise bancaire, business model, etc. Ainsi, l’organisation et les modes de fonctionnement des banques de détail se modifient et impactent leurs métiers : activités, environnement ainsi que sur ses principales compétences. D’après Michel Serres, « la révolution numérique en cours aura des effets au moins aussi considérables qu’en leur temps l’invention de l’écriture puis celle de l’imprimerie » ; les notions de temps et d’espace en sont complètement modifiées et les manières d’accéder, à la connaissance, fortement métamorphosées. De leur côté, les banques de détail se sont également appropriées des nouvelles technologies sur différents domaines de leurs activités, expérience client, processus opérationnels, développement des organisations et de fonctionnement à l’intérieur de l’entreprise bancaire, business model, etc. Ainsi, l’organisation et les modes de fonctionnement des banques de détail se modifient et impactent leurs métiers : activités, environnement ainsi que sur ses principales compétences. D’après Michel Serres, « la révolution numérique en cours aura des effets au moins aussi considérables qu’en leur temps l’invention de l’écriture puis celle de l’imprimerie » ; les notions de temps et d’espace en sont complètement modifiées et les manières d’accéder, à la connaissance, fortement métamorphosées.
Ensuite, l’arrivée de nouveaux acteurs – notamment les opérateurs télécoms et les fintech – et l’évolution des modèles économiques (basés sur le big data et les agents plutôt que sur les institutions, etc.) posent des défis et des risques sans précédent pour le secteur privé et les décideurs politiques. Les sociétés Fintech devaient à l’origine changer ou même remplacer le modèle bancaire traditionnel. La pression pour réduire les coûts des services des institutions financières existantes est en effet élevée (Forum économique mondial, 2017). Cependant, la coopération entre les banques et les sociétés fintech est souvent la norme, plutôt que l’exception, car les sociétés fintech appellent les banques à développer leurs activités, tandis que les banques acquièrent des sociétés fintech trois à quatre fois moins que les coûts internes (Kelly, Ferenzy et McGrath, 2017).
Pour commencer ce travail, il nous semble judicieux de présenter les intérêts managériaux et académiques en rapport avec notre recherche. Par la suite, nous présenterons les principaux objectifs de la recherche, le positionnement épistémologique ainsi que notre terrain de recherche. Notre introduction se terminera par la définition de notre problématique et la présentation de notre plan.
- Intérêts managériaux de la recherche
De manière plus générale, notre recherche présente plusieurs intérêts en ce sens que les comportements de consommation ont évolué sous l’effet des nouvelles technologies (Roux, 2015) et les banques traditionnelles font désormais face à l’arrivée des FinTech proposant des modèles disruptifs (De Vauplane, 2014), tout cela dans un contexte de durcissement de la réglementation prudentielle (Ory, Jaeger et De Serres, 2012). Ces évolutions ont bien évidemment des répercussions sur les stratégies de croissance et de collaboration au sein de l’écosystème financier ouest-africain.
En conséquence, tous les institutions financières, les fintechs et les opérateurs de téléphonie mobile (OTM) se penchent depuis peu de temps, sur les modèles de coopération et de compétition capables de leur permettre de garder, chacun, leur avantage concurrentiel respectif et, dans un souci de RSE (responsabilité sociétale des entreprises), d’améliorer l’inclusion financière en vue de répondre aux objectifs 8, 9 et 10 des ODD (Objectifs de développement durable). C’est à ce titre que notre approche se révèle intéressante aussi bien pour les acteurs économiques que pour institutions étatiques dans la mesure où une partie de nos travaux se concentre sur la dimension institutionnelle des relations partenariales bancaires, à comprendre l’intérêt ou non des acteurs à coopérer. Nous nous demandons ainsi en arrière-plan si la mutualisation des compétences peut être considérée encore aujourd’hui comme une ressource stratégique (Barney, 1991) afin de permettre aux institutions financières à accroître leur part de marché, renforcer leur positionnement et leurs avantages concurrentiels et améliorer l’inclusion financière.
Par ailleurs, si certains travaux récents mobilisent les théories de la collaboration et des écosystèmes pour étudier les relations entre les banques et les fintechs en Europe (Moussavou, 2020), ou plus généralement pour interroger les effets de l’Open Banking (…), peu de recherches se fondant sur ces théories ne se sont encore réellement penchés sur cette collaborativité entre les acteurs bancaires, les fintechs et les OTM dans le contexte africain et plus particulièrement ouest-africain, d’où l’intérêt à nos yeux de pallier ce manque en nous concentrant sur cet écosystème financier ouest africain. Nous allons donc contribuer à l’enrichissement ces concepts car même si la science est universelle, il n’en demeure pas moins que les réalités sont locales.
Enfin, nous contribuons à l’enrichissement du concept d’ubiquité, relativement émergent en Sciences de Gestion. Cette approche tend à complexifier l’identification des parties prenantes (Freeman, 1984) puisqu’elle est construite sur l’hypothèse qu’un même partenaire est potentiellement amené à revêtir plusieurs fonctions.
- Intérêts académiques de la recherche
Du point de vue académique, nous constatons que même si les partenariats entre les banques traditionnelles et les FinTechs existent déjà presque un peu partout dans le monde, notamment en Europe et aux Etats-Unis, il n’y a encore que très peu de recherches portant sur le sujet pour ce qui est du cas de l’Afrique. C’est notamment pour cette raison que nous avons choisi d’étudier le cas de l’Afrique, notamment l’Afrique subsaharienne. Notre objectif étant d’enrichir un peu plus les concepts à travers notre projet de recherche, en nous intéressons particulièrement à l’Afrique de l’Ouest.
Les différentes caractéristiques des banques africaines nous serviront de base pour les différentes modalités de développement de stratégies de partenariats avec les FinTechs. En effet, le rôle des FinTechs et des banques dans l’inclusion financière dépend de plusieurs facteurs, notamment des réglementations régissant le secteur financier et les opérateurs de télécommunications. L’environnement du marché est également important en termes d’infrastructures, de distribution urbaine-rurale, d’alphabétisation et de pauvreté, et de pénétration des technologies mobiles. Enfin, la politique gouvernementale est un autre facteur. Le cas éthiopien peut être utilisé pour illustrer l’interaction de ces trois facteurs, ainsi que des considérations pour étendre l’inclusion financière au bas de la pyramide. L’appétit des Africains pour la banque Mobile s’est développé parallèlement à l’explosion de la technologie de la téléphonie Mobile. Les entreprises de téléphonie Mobile ont relevé le défi, mais ont dû gérer des zones géographiques très éloignées et inaccessibles. Des stratégies d’inclusion financière ont été élaborées par le système financier sophistiqué en Afrique du Sud, qui a affecté la demande de services d’argent Mobile non financée par des banques. M-Pesa est le produit de service d’argent Mobile qui connaît la croissance la plus réussie et la plus rapide. Il a déjà fourni de nombreuses innovations dans les produits et services d’argent Mobile. La rigidité de la réglementation a affecté l’adoption des services d’argent Mobile sur certains marchés africains, mais les réseaux de communication Mobile en général ont introduit des produits innovants pour étendre les services bancaires Mobiles aux zones rurales éloignées. L’expansion rapide du marché des services monétaires Mobiles stimule l’activité entrepreneuriale, crée de l’emploi et constitue un contributeur majeur aux recettes de l’État là où les politiques économiques libérales du marché le permettent.
Par rapport à cette stratégie partenariale, nous nous baserons sur trois concepts fondamentaux : l’open innovation, la coopétition et la proximité digitale. Outre le fait qu’il soit règlementé, le secteur financier est aussi soumis à plusieurs contraintes prescrites par les autorités financières. Dans de telles conditions, il n’est pas facile d’innover. Néanmoins, pour diverses raisons, ces obstacles n’ont pas pu freiner l’innovation financière. Avec l’innovation, les banques peuvent non seulement booster leurs profits tout en réduisant les différents coûts (recherche, transaction, marketing), elles peuvent aussi faire face à la concurrence et minimiser les différents risques de l’intermédiation financière. Au fur et à mesure que le marché du Mobile Money se développe au sein d’un pays, il devient automatiquement plus important d’instaurer une forme de concurrence adéquate entre les acteurs plutôt que d’encourager l’investissement afin de promouvoir plus efficacement l’inclusion financière, notamment en ajustant les conditions de concurrence entre les banques et les Fintechs ou encore en développant des stratégies de partenariats.
Dans un contexte marqué par l’interconnexion de différents éléments comme les services, les systèmes et les personnes, l’inclusion financière doit obligatoirement passer par des solutions interconnectées et innovantes. Par ailleurs, un équilibre approprié doit être trouvé entre l’exploitation des différentes opportunités offertes par les FinTechs et les banques traditionnelles, d’où notre intérêt de développer le concept de coopétition. La confiance, les capacités financières, les lois et réglementations, la conformité et l’interopérabilité sont des questions clés. Par conséquent, les régulateurs doivent encourager la technologie tout en maintenant sa neutralité. Le principe de neutralité technologique est que les réglementations conçues pour assurer la protection des consommateurs et la stabilité financière se limitent à décrire les résultats attendus, et les acteurs du marché utilisent la technologie la plus appropriée pour atteindre ce résultat. Les mêmes principes réglementaires devraient s’appliquer à tous les types de participants au marché, et les régulateurs devraient éviter d’utiliser la réglementation comme moyen d’orienter les marchés vers des structures spécifiques. En termes d’inclusion financière, certains produits peuvent sembler petits, mais limiter les utilisateurs finaux à des systèmes de paiement obsolètes et localisés les a empêchés de bénéficier de l’innovation.
Par ailleurs, l’innovation et la coopétition n’arriveront pas à elles seules à garantir la réussite d’une stratégie partenariale. La proximité, physique et digitale, est un élément essentiel de ce partenariat. Les points de distribution ne sont pas toujours suffisants et l’acceptation de la population cible est parfois faible. Les banques ont mis du temps à travailler avec les opérateurs de télécommunications pour développer des services et des produits plus inclusifs. En conséquence, la question se pose de savoir si la couverture doit être définie sur la base des critères du point d’accès, ou doit-elle être définie en fonction de l’utilisation réelle du service par le client (épargne, crédit ou assurance). Les préoccupations concernant les risques financiers, l’adoption de services financiers numériques au bas de la pyramide et les mesures réglementaires pour protéger les droits des utilisateurs finaux peuvent renforcer la confiance dans les services financiers numériques. Une biométrie médiocre peut résoudre de nombreux défis posés par des mécanismes d’identification peu fiables, et les empreintes digitales peuvent être utilisées comme référence pour évaluer la solvabilité des emprunteurs. La proximité digitale, sera quant à elle une manière d’être plus proche des clients en utilisation les outils digitaux. Mais cette relation de proximité avec le client ne doit pas remettre en question les limites de la vie privée et de la confidentialité.
- Objectifs de la recherche
Les intérêts managériaux et académiques de notre recherche engendrent plusieurs questionnements auxquels nous devons répondre pour mener à bien notre projet. D’un point de vu managérial, notre objectif est de comprendre et de faire un état des lieux des spécificités des banques africaines, du niveau de bancarisation de la population et des opportunités offertes par les Fintechs et les OTM. En effet, nous constatons que les services innovants proposés par les OTM et les FinTechs peuvent compléter les opérations bancaires, mais ils peuvent également les concurrencer ou les détruire. Par conséquent, les banques s’inquiètent des avantages que peuvent avoir les institutions non bancaires sur leurs opérations. Par ailleurs, les FinTechs et les OTM se plaignent également des obstacles que les banques créent dans leurs interactions avec les clients. Ainsi, plusieurs questions se posent : Les caractéristiques des banques africaines permettraient-elles de mettre en place une telle stratégie de développement ? Comment les acteurs peuvent collaborer pour permettre l’inclusion financière ? Quels sont les modèles de collaboration ? Quels sont les avantages et les inconvénients de la collaborativité ?
Sur le plan académique, il s’agit mobiliser trois théories : l’open innovation, la coopétition et la théorie des écosystèmes en rapport avec les spécificités de chaque acteur impliqué. Dans ce contexte, notre objectif est de confronter ces trois théorises à la réalité du terrain. A travers cet objectif académique, nous tenterons de répondre aux questions suivantes : comment les acteurs perçoivent-ils la collaborativité ? Existe-t-il des écarts de perceptions entre ces parties prenantes ? Le caractère ubiquiste de certains acteurs peut-il avoir une influence sur leur manière de coopérer ? Qu’attendent-ils de cette collaborativité dans les années à venir ? Peut-on identifier des modèles de collaboration propres à l’environnement ouest-africain ?
La réponse à ces différentes questions nous permettra de mettre en évidence la meilleure forme de collaboration possible entre ces acteurs. Notre objectif académique est alors de confronter ces théories à la réalité africaine en vue de les enrichir.
Par ailleurs, il nous semble important de noter que n’avons pas la prétention ni l’objectif de proposer un modèle de collaboration révolutionnaire entre les banques, les fintechs et les OTM. Il s’agit pour nous, d’observer, de décrire et de comprendre comment s’expriment la collaborativité entre ces différents acteurs au sein de l’environnement ouest-africain afin d’identifier des éléments ou des tendances qui puissent nourrir la réflexion des décideurs quant à la conception de nouveaux business model stratégiques. Il nous faudra donc réaliser un état des lieux des relations de collaborativité entre les partenaires impliqués dans l’écosystème financier ouest-africain dans un contexte d’amélioration de l’inclusion financière.
De nombreuses interrogations, qu’elles soient théoriques ou plus pratiques, vont nous guider dans l’élaboration de notre problématique et la définition d’une question de recherche centrale. Avant d’aborder ce sujet, il convient toutefois de donner quelques précisions sur le positionnement épistémologique de notre travail doctoral.
- Positionnement épistémologique de la recherche
L’épistémologie peut être définie comme « une activité réflexive qui porte sur la manière dont les connaissances sont produites et justifiées » (Thietart et al., 2014, p.15) ou encore comme « l’étude de la constitution des connaissances valables » (Piaget, 1967, p.6), ce questionnement visant à « clarifier la conception de la connaissance sur laquelle le travail de recherche reposera et la valeur attendue des connaissances qui seront élaborées » (Avenier et Gavard-Perret, 2008, p.8).
Tout travail de recherche implique dès lors de s’inscrire dans un paradigme épistémologique. De ce paradigme vont dépendre la démarche de recherche et le type de connaissances produites. Pour notre part, nous optons pour un positionnement épistémologique interprétativiste en ceci que nous cherchons à comprendre l’expérience vécue par les acteurs dans une perspective descriptive au sein d’une réalité alors largement subjective. Nous cherchons ainsi à nous représenter de la manière la plus fidèle possible la façon dont les acteurs financiers, les fintechs et les OTM, perçoivent et vivent les différentes modalités de la collaboration.
En parallèle, notre démarche est abductive dans la mesure où la recherche alterne questionnements théoriques et étude empirique dans une optique résolument exploratoire. Les différents types de données sont confrontés par le biais d’un design de triangulation.
- Le terrain de recherche
L’objectif de notre recherche est d’explorer les formes de collaboration entre les banques, les OTM et les fintechs en vue d’une massification à l’aune de l’Open banking induite par la digitalisation du secteur financier.
Notre thèse examinera plus spécifiquement les attentes, les avantages concurrentiels ainsi que la valeur perçue de la collaboration par les différents acteurs du secteur de la finance dans le contexte africain et la zone UEMOA. Pour atteindre notre objectif, nous avons retenu d’interviewer les deux opérateurs de téléphonie mobiles que sont MOOV et MTN ; ensuite nous avons identifié les banques (au nombre de 8) qui ont des projets de collaboration avec les Fintechs et les Opérateurs de téléphonie parmi lesquelles nous avons choisi cinq et enfin nous avons interviewé toutes les Fintech réellement actives sur le marché (7 au total).
Notre guide d’entretien est articulé autour de cinq thématiques que nous utiliserons ultérieurement comme cadre d’analyse. Les thèmes que nous avons retenus en fonction de l’objet et des objectifs de notre recherche sont les suivants :
- Impact de la réglementation bancaire sur la collaboration entre les banques, les OTM et les Fintechs
- Les impacts de la collaboration entre banques, OTM et Fintechs sur l’inclusion financière
- Les opportunités et les défis des banques, des OTM et des Fintechs africaines dans ce contexte de mutation digitale
- Les avantages concurrentiels des banques, des OTM et des Fintechs dans un environnement de transformation numérique
- La valeur perçue de la collaboration entre les banques, les OTM et les Fintechs.
Ce sont donc ces thèmes qui seront abordés avec les répondants qui constitueront notre échantillon. Comme nous le conseille Wacheux (1996) nous avons cherché à développer notre capacité d’écoute et à faire preuve de souplesse et d’adaptation afin de réaliser notre étude.
- Problématique et question de recherche
Comme le souligne Koenig (2006), un projet de recherche consiste à passer d’une intention générale à des éléments de réponse. Le cheminement entre ces deux étapes peut néanmoins s’avérer tortueux dans la mesure où le début d’une recherche est souvent délicat à appréhender et consiste généralement en une question volontairement large et donc un peu floue qu’il s’agit de préciser par des allers et retours entre théorie et terrain. De cette manière
« la formulation de l’objet de recherche se fait et se défait, se précise par tâtonnements, se stabilise progressivement et aboutit à ce que l’on dénomme classiquement une « question de recherche » » (Gavard-Perret et al., 2012, p.65).
Il convient donc de bien distinguer l’objet de recherche de la question de recherche. L’objet de recherche est en somme la réponse à la question « qu’est-ce que je cherche ? » (Thietart et al., 2014, p.48), réflexion que nous connaissons plus classiquement sous le terme de problématique (Quivy et Campenhoudt, 1995). La question de recherche est quant à elle simplement la formulation plus précise de la question générale que l’on se pose au tout début de la recherche. La problématique est donc bien plus large puisqu’elle englobe à la fois tant les questions soulevées que les moyens de réponse et représente donc le canevas de la démonstration.
Dans notre cas, la question générale soulevée au début de notre recherche doctorale est la suivante :
« Comment s’expriment les relations de collaborativité entre les institutions financières, les fintechs et les OTM dans l’écosystème financier ouest-africain ? »
De cette question de départ, nous commençons par étudier la littérature académique sur les écosystèmes d’affaires, leurs spécificités dans l’industrie financière, et les défis rencontrés par ces acteurs dans les relations de collaboration aujourd’hui. La complémentarité entre théorie et terrain nous amène alors à envisager une approche par les théories des écosystèmes et celle de la collaboration.
En découle une problématique que nous formulons comme suit :
Aboutir à l’amélioration de l’inclusion financière par la collaborativité entre les acteurs financiers, les fintechs et les OTM dans le contexte financier ouest-africain.
Nous déduisons du cadre théorique qu’il n’existe pas une mais des relations de collaborativité qui vont conduire à la mise en place de différents business model stratégiques en fonction des spécificités culturelle, démographique et institutionnelle.
Notre question de recherche est alors définie de la manière suivante :
« Quels sont les modalités de la collaborativité entre les acteurs financiers, les fintechs et les OTM dans l’écosystème financier ouest-africain? »
En d’autres termes on peut reformuler la question de recherche de la manière suivante : quel modèle coopératif ou collaboratif pour instaurer une imbrication d’offres permettant de créer une compétence Mobile Banking ? La formulation de notre problématique de recherche implique donc d’opérer en deux étapes construites autour de questions intermédiaires en vue de répondre à la question de recherche principale (figure 1).
Figure 1 : Problématisation de notre travail de recherche
Notre problématique est par ailleurs articulée autour de trois notions centrales, donnant lieu à nombre de travaux théoriques et empiriques dans la littérature, qu’il nous semble pertinent de définir et circonscrire dès maintenant afin de donner au lecteur une bonne vision d’ensemble de l’objet de recherche.
En premier lieu, il est bon de rappeler que nous travaillons sur le milieu financier ouest-africain. Le système financier en Afrique peut être subdivisé en plusieurs zones avec des spécificités propres à chacune des zones. Nous aurons dans le désordre la zone de l’Afrique du nord, celle de l’Afrique du sud, celle de l’Afrique de l’Est et celle de l’Afrique de l’Ouest.
Les institutions financières, les fintechs et les OTM sont donc imbriqués dans un écosystème financier UEMOA (Union Économique et Monétaire Ouest-Africain), donnant lieu à de multiples interactions entre les acteurs animés par des projets stratégiques spécifiques à cette zone monétaire et économique. Pour autant, ces derniers ne partagent pas forcément les mêmes attentes, ni la même vision des choses, ce qui tend à complexifier les rapports de force entre les acteurs, d’autant plus que ces organisations ont de plus en plus tendance à glisser vers les domaines d’activités des uns et des autres.
Ce qui nous amène à préciser la notion de collaborativité. En effet, la première question qui nous vient à l’esprit est : la collaborativité entre qui et qui ? Nous nous concentrons ici sur la mise en commun des compétences entre les différents acteurs. Nous verrons que ces relations de collaborativité peuvent revêtir plusieurs formes compte tenu des contingences de la zone UEMOA mais aussi des mutations organisationnelles touchant le secteur bancaire dans sa globalité en rapport avec la transformation numérique.
Nos travaux nous amènent finalement à défendre la thèse selon laquelle la collaborativité, certes difficile mais nécessaire entre les institutions financières, les fintechs et les OTM, dans la zone UEMOA, pourrait permettre d’espérer l’amélioration de l’inclusion financière.
- Proposition de recherche
Dans le cadre de ce travail, nous avons développer deux propositions de recherche qui nous servirons de base dans toutes les analyses qui seront effectuées.
Proposition 1 : Les Fintechs et les OTM peuvent être des sources de développement et de compétitivité pour les banques traditionnelles africaines
Les bouleversements technologiques redéfinissent la manière dont les banques exercent leurs activités. Les entreprises innovantes comme les Fintech (ou start-ups) sont entrées dans l’espace bancaire et peuvent offrir aux banques traditionnelles subsahariennes des solutions technologiques qui incluent des plateformes transactionnelles moins chères, des offres de produits et de services innovants ainsi que des canaux de distribution plus pratiques.
Travailler avec les fintechs peut permettre aux banques traditionnelles d’utiliser leurs plateformes technologiques et offrir ainsi des solutions technologiques moins chères, plus efficaces et innovantes à leurs clients et à elles-mêmes, qu’il s’agisse de produits, de processus ou de réglementation. Si les banques ne sont pas en mesure d’exploiter les technologies financières en interne, l’alternative logique est de s’associer aux entreprises Fintech, car elles deviennent de plus en plus compétitives tout en étant une réelle menace pour le modèle bancaire traditionnel.
Également, les FinTechs peuvent changer l’industrie financière en Afrique subsaharienne en augmentant la concurrence et l’efficacité. D’autant plus que la concurrence bancaire en Afrique est faible par rapport à d’autres régions du monde.
Proposition 2 : La collaborativité entre les banques, les fintechs et les OTM optimiserait l’inclusion financière en Afrique subsaharienne malgré les risques encourus
Les FinTechs représentent une force concurrentielle perturbatrice qui jouera un rôle majeur dans le façonnement de la structure du secteur financier africain. La FinTech affecte principalement la structure du marché en apportant de nouvelles technologies qui réduisent les coûts des services financiers, créent des opportunités d’accès au marché pour les nouveaux entrants (non bancaires), élargissent l’accès à de nouveaux segments du marché et aux clients, et affectent la compétitivité des opérateurs historiques existants. Ces changements peuvent potentiellement créer d’importants gains d’efficacité dans une industrie qui n’a pas connu de changements technologiques et de structure de marché majeurs au cours de ces dernières décennies.
L’application de ces nouvelles technologies dans le secteur bancaire de l’Afrique subsaharienne peut offrir un important potentiel de transformation et d’inclusion financière. Bien qu’il soit difficile de fournir un ensemble complet de changements susceptibles de se produire, ces nouvelles technologies peuvent contribuer à réduire les inefficacités existantes du marché, et donc à optimiser l’inclusion financière. Ensemble, ces développements technologiques offrent des moyens de réduire les coûts de l’information, d’accroître la transparence, ainsi que de permettre une plus grande confiance et une meilleure exécution des contrats. Les nouvelles technologies entraîneront également une gamme de risques qui devront être atténués. En Afrique subsaharienne, l’instauration d’une véritable culture de l’innovation et de l’esprit d’entreprise aidera le pays à trouver de nouveaux moyens de relever nombre de ses défis économiques et sociaux. Pour ce faire, il sera vital pour les start-ups et les entreprises établies de comprendre comment la collaboration numérique au sein d’écosystèmes plus larges peut stimuler l’innovation, soutenir l’esprit d’entreprise et favoriser la croissance économique et la création d’emplois.
Par ailleurs, la coopération concurrentielle permet aux entreprises de réaliser des économies d’échelle et de gamme1. Les avantages de la couverture, non seulement au sens géographique, mais aussi en termes d’expansion du marché, sont également de plus en plus identifiés. La coopétition réduit les coûts opérationnels, entre autres, en réduisant le risque de fonctionnement. Les relations coopétitives contribuent à la création de valeurs, au développement dynamique des entreprises et à l’augmentation de la valeur des coopétiteurs. Souvent, les relations coopétitives sont de nature défensive; en plus de renforcer la position des entreprises concernées sur le marché, les relations augmentent les barrières à l’entrée pour les entités hors système. On peut alors souligner que la coopétition génère des bénéfices dans les dimensions marchande, financière, managériale et technologique.
- Plan de recherche
Le plan mis en œuvre pour problématiser notre travail et répondre à la question de recherche est articulé autour de deux parties constituées de cinq chapitres au total. La première partie est ainsi l’occasion de poser les bases théoriques de notre travail après avoir caractériser le secteur financier ouest-africain.
Figure 2 : Plan de recherche
Parti 1 : État des lieux de la collaboration entre les institutions financières, les Fintechs et les OTM en vue d’aboutir à l’amélioration de l’inclusion financière.
Dans cette première partie, notre objectif est premièrement de comprendre les caractéristiques du secteur bancaire en Afrique Subsaharienne. Dans un premier chapitre, nous nous intéresserons dans un premier temps au contexte démo-économique africain pour évaluer ses possibilités de développement dans le domaine du numérique. Ensuite, nous nous pencherons sur le niveau de bancarisation de la population africaine pour évaluer la portée de notre projet de recherche. Nous entamerons par la suite les spécificités du modèle bancaire africain pour avoir une idée sur les stratégies à mettre en place en termes de collaboration et d’optimisation de l’inclusion financière de la population. Enfin, nous présenterons la définition et les spécificités des FinTechs et des OTM. Notre second objectif est de trouver la meilleure forme de collaboration possible entre les banques traditionnelles africaines, les FinTechs et les OTM. Pour cela, nous commencerons par une proposition de recherche qui va nous mener par la suite au dimensionnement du concept de collaborativité. Cette collaborativité sera ensuite analysée sur la base de trois concepts théoriques qui sont : l’open innovation, la coopétition et la théorie des écosystèmes avec en filigrane la proximité digitale.
Figure 3 : Rappel du plan de la recherche (partie 1)
Chapitre I : – Caractéristique du secteur bancaire en Afrique subsaharienne
Ce premier chapitre a pour objectif de nous aider à cerner le contexte de recherche. Pour ce faire, nous définissons le contexte et présentons les différents acteurs en jeu. Les éléments à aborder sont présentés ci-suit :
Les secteurs bancaires africains ont connu des réformes importantes au cours des trois dernières décennies, après une longue période de sous-performance. Les réformes récentes ont entraîné la libéralisation des taux d’intérêt et des marchés du crédit. Par exemple, les contrôles des taux d’intérêt, en particulier au Nigéria, au Ghana et en Côte d’Ivoire, et les prêts ciblés en générale, ont été remplacés par des opérations d’open market. Un autre domaine de développement dans chaque sous-région est la privatisation importante des banques d’État, principalement au Togo, au Bénin, en Côte d’Ivoire, au Burkina Faso et au Niger, afin de réduire au minimum les inefficacités. En outre, en ouvrant les marchés bancaires, la croissance des banques étrangères a été très élevée récemment, en particulier dans les sous-régions d’Afrique de l’Est et de l’Ouest. En outre, face à l’intégration régionale accrue et aux progrès de la technologie de l’information, les opérations bancaires transfrontalières ont enregistré une nette tendance à la hausse, en particulier dans la sous-région de l’Afrique de l’Ouest, permettre aux clients d’opérer leurs comptes en dehors de leur pays d’origine. Ces développements ont des implications pour la concurrence du secteur bancaire.
Ce premier chapitre nous permet d’avoir une vue d’ensemble sur le secteur financier africain au sein d’un environnement de plus en plus concurrentiel et complexe et qui est aussi marqué par un important problème d’inclusion financière.
L’arrivée de plus en plus massive des Fintechs et des OTM dans le domaine des services financiers nous pousse à analyser leurs effets et leurs impacts sur les activités des banques traditionnelles. Nous nous intéresserons ainsi aux solutions proposées par ces deux acteurs pour évaluer la possibilité de mise en place d’une certaine forme de collaboration entre eux et les banques traditionnelles africaines.
Actuellement, l’Afrique abrite une population relativement jeune. Les résidents âgés de moins de 15 ans représentent 41 % de la population totale, alors que la moyenne mondiale est estimée à 25 %. Selon les estimations de l’UNICEF, d’ici environ 7 ans, presque la moitié des naissances au niveau mondial se produiront en Afrique. Il faut tout de même noter que le changement démographique a des évolutions différentes dans les différentes régions du continent. Par exemple, l’Afrique australe a un taux de fécondité plus faible, avec 2,5 enfants par femme ayant atteint l’âge de procréer. Il y a ensuite l’Afrique méditerranéenne avec un taux de fécondité de 3,2 et l’Afrique subsaharienne avec un taux de 5 à 6.
Une période de transition démographique s’est ouverte pour la croissance économique. En fait, la population active âgée de 15 à 64 ans croît plus rapidement que la croissance des enfants et des personnes âgées entre 0 et 14 ans. La jeune génération aime particulièrement la vie numérique, un atout sur lequel l’Afrique doit s’appuyer pour stimuler son développement. Le continent africain pourrait prendre le relais de la Chine dans les années 1970 et 2000, et bénéficier à son tour de ce que les économistes appellent le dividende démographique, …
Aujourd’hui, la technologie numérique fournit aux entreprises les outils dont elles ont besoin pour atteindre l’excellence opérationnelle : mobiliser les employés, se rapprocher de l’écosystème, promouvoir l’innovation et tous les défis qui peuvent être résolus. En Afrique, il est de plus en plus évident que les défis à relever pour atteindre le niveau des pays émergents sont énormes et doivent d’abord être traités par un bon développement numérique. La technologie numérique offre aux pays africains la possibilité de rattraper leur retard par rapport au reste du monde. Mais il faut encore savoir saisir cette rare opportunité à travers la prise en compte des points suivants 2:
- Tirer parti de la révolution du paiement mobile pour inspirer l’industrie et créer de nouveaux services.
- Dématérialiser les procédures administratives pour accroître l’efficacité et lutter contre la corruption.
- Moderniser le secteur agricole grâce à la technologie numérique.
- Vulgariser la technologie numérique dans les systèmes éducatifs pour introduire l’innovation chez les jeunes
- Créer de la valeur en transformant numériquement les entreprises grâce à l’agilité, la gestion des risques et le changement.
L’ère numérique est en train de révolutionner l’Afrique et exige des décideurs africains d’accorder une confiance élevée quant à leur avenir en termes de digitalisation. Pour cela, il est important pour eux de 3:
- Placer l’innovation technologique au centre de leur orientation stratégique. Ainsi, il est plus qu’important de faire confiance en la capacité des ressources humaines, et leur fournir les connaissances et les compétences nécessaires pour qu’ils puissent contribuer rapidement et efficacement au développement économique du continent. Ainsi, les entreprises africaines doivent prendre des mesures positives ;
- Avoir des moyens pour évaluer les risques technologiques et améliorer la détection, le suivi et la réaction face à la gestion des risques ;
- Élaborer des stratégies pour contrôler le pilote les procédures d’alerte et de surveillance face à tous les problèmes liés à la cyber sécurité ;
- Concevoir et déployer des plans directeurs pour assurer une bonne gestion de la qualité des données et des performances des systèmes déployés ;
- Maîtriser les techniques de pré-inscription obsolètes.
L’Afrique reste un continent prometteur et une destination pour toutes les compétences cognitives visant à explorer le domaine des TIC.
La non-bancarisation peut être définie comme une situation dans laquelle les consommateurs potentiels n’ont pas accès aux services financiers de base comme les comptes bancaires, les comptes chèques ou encore les comptes d’épargnes, et sont par conséquent incapables d’obtenir du crédit à des taux d’intérêt normaux (Geach 2007, Caskey 2002, Carbo, et al., 2007 ; Panigyrakis Et al., 2002 ; Anderson (2006). Selon des études menées par McKinsey Quarterly (2010a-2010b), 2,5 milliards d’adultes, au niveau mondial, ne sont pas encore bancarisés, cela équivaut à plus de moitié de la population mondiale soit 53 %. Dans cette proportion, 63 % appartiennent aux pays en développement. Malheureusement l’Afrique a un record de 80 % de personnes non-bancarisées.
Graphique 1 : État de la non-bancarisation dans le monde
Source: McKinsey Quarterly (2010a, 2010 b)
D’après Kempson et al. (1999), il existe bon nombre de facteurs qui peuvent expliquer l’exclusion financière de la population des pays en voie de développement : accès difficile (distance de la banque, fermeture, etc.), conditions d’obtention d’un compte bancaire, coûts des services de base et les objectifs de commercialisation. Également, il y a le fait que les banques favorisent certains consommateurs et l’auto-exclusion. Certains auteurs comme Carbo et al. (2007) ont également expliqué que les femmes, les personnes âgées, les jeunes, les personnes moins instruites, les chômeurs et certaines minorités ethniques sont plus susceptibles d’être exclus du système bancaire que d’autres. Ces mêmes facteurs viennent également expliquer l’exclusion bancaire dans les pays développés et les pays moins développés.
Dans les pays en développement, les raisons du faible taux de bancarisation sont les mêmes : niveaux de revenus, notamment pour couvrir les frais de tenue de compte bancaire, accès difficile aux banques et aux comptes bancaires (McKinsey Quarterly 2010a, De Sousa 2010), l’intimidation du public envers les banques et leurs services, manque d’éducation, orientation discriminatoire, etc.( McKinsey Quarterly 2010a, De Sousa 2010, Lyons et al.2010), produits et services inadaptés à une gestion à court terme, l’éloignement, etc. Ainsi, les barrières bancaires dans les pays développés et en développement sont généralement les mêmes. Mais quand il s’agit du marché des personnes non-bancarisées, les banques doivent avoir certaines aspirations à l’inclusion financière.
Tableau 1 : Les facteurs de la non- bancarisation dans le monde (comparaison entre pays développés et pays en développement)
Afin d’inclure les individus non-bancarisés dans le système financier, autrement dit, pour transformer les non-utilisateurs en utilisateurs de services financiers, plusieurs moyens peuvent être mis en œuvre : la flexibilité des établissements financiers vis-à-vis des revenus de la population (Kempson et al., 1999), et des frais de services (Kempson et al. (1999), la simplification des procédures et de l’utilisation des services (McKinsey Quarterly 2010a, De Sousa 2010, Kempson et al.1999), l’optimisation de la proximité (Kempson et al., Doyle et al., 1998, McKinsey Quarterly 2010a), etc.
En général, en Afrique subsaharienne, la profondeur et la complexité du secteur financier restent faibles, même compte tenu des niveaux de revenu par habitant. Le secteur financier est généralement petit, sous-développé et il est principalement dominé par un secteur bancaire très concentré. En raison du faible niveau de développement des marchés boursiers et obligataires, les établissements financiers assurent un rôle d’intermédiaire et sont considérés comme la principale source de capitaux externes des entreprises.
Par ailleurs, force est également de constater que les cadres réglementaires ne sont pas toujours conformes aux meilleures pratiques au niveau international, et parfois même instables, ce qui peut créer de l’incertitude pour la communauté bancaire et surtout pour les investisseurs internationaux. En outre, la banque centrale pourrait être affectée par des pressions politiques, qui affecteront la mise en œuvre de la politique monétaire et des mesures prudentielles.
Tableau 2 : Indicateurs de solidité financière relatifs à certains marchés bancaires d’Afrique subsaharienne
Source : Banque européenne d’investissement, « Le secteur bancaire en Afrique subsaharienne Évolutions récentes et inclusion financière numérique », 2016, p.13
Dans la plupart des cas, les banques ont résisté à l’impact de la crise financière internationale en raison des possibilités limitées d’intégration sur les marchés financiers mondiaux, des risques limités de liens financiers directs et de la forte dépendance à l’égard des dépôts nationaux. Les niveaux de capital sont encore confortables et les banques ont généralement une bonne liquidité et une bonne rentabilité. Cependant, les prêts non performants sur plusieurs marchés en Afrique subsaharienne ont atteint des niveaux assez élevés en 2016. Il existe un certain niveau de contraste entre le nombre restreint de secteurs bancaires qui est relativement développés et une proportion élevée de secteurs bancaires peu profonds. Seuls quelques pays d’Afrique subsaharienne disposent d’un secteur financier d’envergure mondiale. Bien que la profondeur financière de presque tous les pays de la région ait augmenté au cours des quinze dernières années, le secteur bancaire en Afrique subsaharienne a connu une croissance importante. Selon le Fonds monétaire international (2016a), l’augmentation de la profondeur financière de plusieurs pays d’Afrique subsaharienne a pris du retard.4
Malgré des progrès importants, les problèmes de gouvernance, de réglementation et de surveillance continuent d’entraver le développement de plusieurs secteurs bancaires dans la région. Par conséquent, depuis le déclenchement de la crise financière, les banques internationales ont commencé à réduire ou à interrompre partiellement leurs plans d’expansion sur les marchés d’Afrique subsaharienne (Beck et al., Ibid.), en raison de la prudence de la presse et des réglementations de conformité, imposées par les autorités réglementaires nationales.
Au cours des dix dernières années, les systèmes bancaires traditionnels des années 80 et 90 se sont convertis en services numériques. Bon nombre de banques africaines ont investi massivement dans l’infrastructure bancaire, et plus particulièrement dans les services bancaires en ligne. La mise en place d’infrastructures numériques permet aux banques nationales, non seulement, d’augmenter rapidement leur clientèle, mais aussi de concurrencer les grandes institutions étrangères tout en améliorant leur rentabilité grâce à la réduction des coûts d’exploitation.
Plus particulièrement en Afrique de l’Est, le développement rapide des réseaux de communication mobiles et la popularité des dispositifs mobiles dans les zones rurales ont permis d’ouvrir la voie à l’innovation technologique dans le secteur bancaire, remettant en question les pratiques habituelles. Au lieu d’installer des distributeurs automatiques de billets nécessitant des entretiens réguliers, etc., les banques élaborent désormais des projets pionniers en coopération avec des entreprises de télécommunications.
Tableau 3 : L’innovation dans le secteur bancaire en Afrique
Source : Bureau de l’économiste en chef AEB Volume 6 Numéro 5, 2015, p.5
Les services bancaires mobiles ont plus de succès en Afrique de l’Est, en particulier au Kenya. La société kenyane Safaricom, disposent actuellement de plus de 40 000 agents dans le pays pour servir 17 millions de clients5. Comme le montre le tableau que nous présentons ci-dessus, l’Afrique de l’Est est en tête dans le domaine des services bancaires mobiles.
Par ailleurs, force est de constater que l’Afrique a moins investi dans l’innovation bancaire par rapport à d’autres pays. Contrairement aux pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE. En conséquence, seulement 4 % de la population active en Afrique subsaharienne utilise des méthodes de paiement électronique (3 % en Afrique du Nord) et 6 % en Amérique latine et dans les Caraïbes.
Le système bancaire africain profite également du développement de plus en plus croissant du nombre de banques étrangères dans le continent, en particulier des banques panafricaines, comme Ecobank et African Banks, dont les activités s’étendent dans d’autres pays : la première est présente dans 36 pays africains et second dans 14 pays. Dans les années 90, le continent africain a été marqué par de nombreuses réformes et fusions bancaires en raison de l’arrivée des banques étrangères. Ce phénomène a eu comme conséquence d’accroitre la pression concurrentielle dans le secteur tout en poussant les acteurs du secteur à se tourner vers l’utilisation de technologies financières, notamment les techniques de bonne gouvernance et l’innovation.
Plusieurs faits mettent en évidence le fait que l’arrivée des banques étrangères a permis de favoriser le financement des PME (Clarke et al., 2005). Cependant, les banques étrangères entrent sur le marché en entrainant une forme de concurrence déloyale, car elles ont tendance à dominer le secteur bancaire de manière disproportionné, plus particulièrement en ce qui concerne les actifs et les filiales. Les banques étrangères, avec la possibilité d’obtenir des informations précises sur les clients, peuvent être amenées à faire appel à des méthodes anticoncurrentielles, par exemple dans les choix d’emprunteurs (Detragiache, Gupta et Tressel, 2008).
Tableau 4 : Les principaux groupes bancaires africains
Source : Jeune Afrique, 2012
Dans ce contexte hautement concurrentiel, les acteurs de l’industrie bancaire mettent en œuvre des stratégies identiques dans l’objectif d’attirer de nouveaux clients et de diversifier les activités. Ils se basent sur la force de leurs agences de plus en plus nombreuses pour assurer, non seulement le développement de leurs activités, mais également pour accroitre le taux de bancarisation de la population. En plus de cela, les services bancaires sont de plus en plus modernes, notamment avec la monnaie électronique, la banque en ligne ou la banque mobile.
Désormais, force est de constater que les banques africaines sont mieux organisées et font preuve d’innovation. Mais il faut aussi noter que la banque centrale joue également un rôle essentiel dans le développement du secteur bancaire. Le premier rôle majeur est la mise en place d’un organisme de régulation indépendant qui applique des règles régissant les banques de détail. Les règles se basent sur les normes bancaires internationales.
Le succès des banques travaillant dans un environnement marqué par une forte concurrence dépend dans une large mesure de la gestion des coûts et de l’utilisation efficace des ressources. Bien que les innovations dans la fourniture de services par le biais de systèmes électroniques sont généralement destinées à optimiser les normes d’efficacité, il n’y a pas encore de facteurs exactement admis comme venant renforcer l’efficacité bancaire (Berger et Mester (1997); Altunbas et Molyneux (2001). Il est le plus souvent admis que le secteur bancaire est marqué par bon nombre d’inefficacités et que les banques considérées comme dans les normes proposent souvent des coûts exorbitants, alors qu’elles bénéficient de grands avantages concurrentiels étant donné que les autres banques sont hors-normes et peu efficaces (Spong et Sullivan 2007).
Équation 1 : Panorama du secteur bancaire en Afrique
Source : Thorsten Beck, « Évolution du secteur bancaire africain : nouveaux acteurs, nouveaux modèles ? », La revue de proparco, 2017, p.16
Le secteur financier de l’Afrique Subsaharienne, est le moins développé à l’échelle mondiale. En fait, en dehors de l’Afrique du Sud, la taille de son secteur bancaire est près de dix fois inférieure à celle de la dixième banque allemande. Même en tenant compte des écarts en termes de produit intérieur brut (PIB), le secteur financier africain est toujours à la traîne, et le taux de pénétration n’est que de 30 %, soit doublement inférieur à la moyenne des autres pays en développement6. Cette situation a poussé les IFD ou institutions financières de développement à investir davantage au niveau du système financier africain. Le niveau d’investissement dans le secteur est évalué à plus de la moitié de ces engagements d’investissement total en Afrique subsaharienne. Les derniers changements dans le paysage bancaire ont poussé les IFD à restructurer leur stratégie, non seulement au bénéfice de banques nationales, mais également à celui de banques internationales.
Par ailleurs, les services financiers numériques contribuent au développement financier et à l’inclusion financière en Afrique subsaharienne. La diffusion rapide des systèmes tels que M-Pesa au Kenya et dans d’autres pays d’Afrique subsaharienne a contribué à réduire les coûts et à faciliter les transactions personnelles, tout en contribuant à l’essor des services d’intermédiation financière. Avec moins de liquidités pour les transactions, plus d’agents économiques sont en mesure d’envoyer et de surveiller les signaux des marchés financiers, contribuant ainsi au développement financier. L’environnement de la politique monétaire s’améliore en conséquence.
L’Afrique de l’Ouest reste la deuxième région la plus dynamique d’Afrique subsaharienne après l’Afrique de l’Est, avec un taux d’expansion d’un peu plus de 4% en 2015 contre près de 6% en 2014. Le taux de croissance du PIB a donc été supérieur à la moyenne par rapport au reste du continent (3% en 2015 et 3,4% en 2014).7
L’activité du système bancaire de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) reste positive, marquée en 2014 par une croissance des ressources et une augmentation des actifs bancaires, dont une hausse de 15% des crédits à la clientèle8. Par ailleurs, les évolutions du cadre juridique et le renforcement de la supervision bancaire demandés par la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) contribueront à constituer la base d’un système moderne, adapté aux nouveaux défis auxquels la région est confrontée.
Les défis de l’inclusion financière en Afrique de l’Ouest restent d’une importance vitale étant donné que leurs taux de pénétration bancaire sont parmi les plus bas au monde, en particulier dans la zone monétaire du franc CFA. Actuellement, la promotion des services numérisés – pour transférer, retirer et déposer de l’argent et faire des demandes de prêt – dans ces zones à fort taux de pénétration mobile est l’initiative clé pour améliorer l’accès aux services bancaires. Il faut cependant noter que le cadre réglementaire est plus favorable en Afrique de l’Ouest.
La FinTech est un sujet émergent dans le monde des affaires. Selon KPMG (2016), les investissements mondiaux dans les entreprises FinTech ont atteint 24,7 milliards de dollars américains sur 1076 transactions. D’une manière générale, la FinTech peut être défini comme un sujet interdisciplinaire qui allie finance, management de la Technologie et Management de l’Innovation. Mais pour mieux comprendre le phénomène des FinTechs, il nous semble judicieux de commencer par la digitalisation du secteur financier, car c’est à travers cette digitalisation que les FinTechs sont apparues.
La manière dont les banques opèrent changera radicalement au cours de la prochaine décennie à mesure que la technologie et les préférences changeantes des consommateurs redéfiniront la manière dont elles mènent leurs activités, les solutions qu’elles proposent et la manière dont les interactions se produisent. Les avancées technologiques telles que l’intelligence artificielle (IA), la biométrie et la robotique sont en passe de devenir la norme et de remettre en question la pensée conventionnelle sur la manière d’interagir et d’offrir les services bancaires. Une ère complètement nouvelle dans le secteur bancaire est donc apparue après la crise financière mondiale de 2008. La manière dont les banques capitalisent sur ces nouvelles opportunités sera capitale, en particulier si elles veulent survivre à l’environnement concurrentiel de demain.
Bien que la technologie ait commencé à être intégrée dans les services bancaires durant ces dernières années, cela se limitait uniquement à l’automatisation des opérations de back-office. Cependant, cette transformation a considérablement remis en question le modèle traditionnel des banques, car les ventes et, en particulier, l’environnement en contact avec les clients a radicalement changé. Cela est motivé par le désir des clients de rechercher des « expériences » et d’utiliser la technologie lorsqu’ils traitent avec leurs fournisseurs de services, dont les banques. La technologie a donc révolutionné le fonctionnement de l’économie moderne à un rythme exponentiel. La vitesse des percées et des perturbations technologiques actuelles est sans précédent et ne fait pas de discrimination. La technologie est omniprésente et évidente que ce soit en termes de production, de gestion et de gouvernance ; ne pas en faire partie, c’est ne pas faire partie de la société. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication et l’arrivée des entreprises innovantes ont révolutionné l’environnement des banques et les ont conduit à redéfinir leurs offres et la façon dont elles communiquent. L’orientation stratégique que les banques adopteront au cours des prochaines années sera donc importante pour garantir leur pertinence et leur compétitivité.
Internet a connu une évolution considérable à tel point qu’il impacte presque tous les secteurs d’activités, que ce soit commerciales ou industrielles. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication deviennent actuellement de véritables moyens incontournables au développement de presque toutes les activités, y compris celles des banques. Elles ont eu comme premier effet d’influencer le comportement des professionnels ainsi que le mode de fonctionnement des entreprises. Ces dernières décennies, les innovations incessantes des TIC ont beaucoup impacté le processus des activités bancaires. Vaste base de données, moyen de paiement électronique, réseaux de télécommunications ouverts, centre d’appel, etc., toutes ces technologies n’ont pas seulement renouvelé, mais aussi amélioré la relation banques-clients, les activités bancaires sans oublier les prestations financières.
À cause de la prépondérance accrue occupée par l’information dans tous les secteurs d’activités, les TIC se présentent actuellement, dans les pays développés et émergents, tels des moyens d’accompagnement dans le but de formaliser des stratégies de développement (à l’échelle nationale comme à l’échelle locale). Effectivement, l’information constitue aujourd’hui une ressource stratégique. En ce sens, est-ce que cette intégration des TIC serait adaptée pour les pays pauvres comme elle l’était pour les pays développés et émergents ?9 L’adoption et l’usage des nouvelles technologies numériques se présentent actuellement comme l’un des plus grands défis que les entreprises doivent gérer. Aucun département ou organisation ne peut échapper à la digitalisation, car c’est l’habitude même des consommateurs qui a changé. Le potentiel de la technologie numérique dépasse souvent celui des produits, des processus métier, des canaux de vente ou des chaînes d’approvisionnement – des modèles commerciaux complets sont en train d’être redéfinis et fréquemment modifiés.10
Ce grand changement oblige les institutions bancaires et financières à s’adapter aux nouvelles technologies. Ainsi, elles peuvent non seulement préserver, mais aussi accroître leur fonds de commerce. Ces modifications incitent la Commission bancaire à se pencher encore plus sur les évolutions technologiques. Il faut savoir que ces évolutions ne sont pas seulement avantageuses pour la clientèle, mais aussi pour les intermédiaires financiers. Néanmoins, elles peuvent être aussi porteuses d’incertitudes pour ces derniers. Avantageuses, certes, mais ce qu’il faudrait savoir c’est qu’elles représentent aussi des risques, que ce soit au niveau financiers, juridiques ou opérationnels.11
Par ailleurs, le fort développement technologique a favorisé l’émergence de nouvelles entreprises innovantes sur le marché financier : les entreprises Fintechs connu également sous le nom de start-up. Le taux de croissance des Fintechs a été phénoménal durant ces dix dernières années. Pour les quatre années précédant, le financement des start-up Fintech a augmenté de 41% avec des investissements de plus 40 milliards de dollars12. Face à cet évènement, aux menaces et aux perturbations engendrées par les entreprises innovantes, les banques réalisent des investissements substantiels dans la transformation numérique et les opportunités résident dans l’impact potentiel qu’elle a sur la réduction des coûts13.
Outre le fait qu’il soit règlementé, le secteur financier est aussi soumis à plusieurs contraintes prescrites par les autorités financières. Dans de telles conditions, il n’est pas facile d’innover. Néanmoins, pour diverses raisons, ces obstacles n’ont pas pu freiner l’innovation financière. Avec l’innovation, les banques peuvent, non seulement booster leurs profits tout en réduisant les différents coûts (recherche, transaction, marketing), elles peuvent aussi faire face à la concurrence et minimiser les différents risques de l’intermédiation financière.
Le processus de déréglementation des années 80 a joué un rôle majeur dans cette innovation financière. L’importance des marchés financiers et le recul de l’activité bancaire à l’ancienne ont poussé les banques vers une innovation qui leur permet d’atteindre leur principal objectif : demeurer un acteur financier incontournable. Selon Sobreira en 2004 : « les développements technologiques, notamment en matière de télécommunication et d’informatique, ont également contribué à l’essor de l’innovation financière, ce qui a profondément transformé l’activité de l’intermédiation financière »14.
Dans le domaine bancaire, le terme « nouvelles technologies » englobe toutes les technologies qui permettent au client d’une banque ou d’une quelconque institution financière d’effectuer des opérations à distance. Le fait est que l’opération se fasse de manière quasi-instantanée et la rende différente des opérations qui se fassent par courrier ou en agence. Parmi ces nouvelles technologies utilisées par les institutions financières, on retrouve les centres d’appels, mais aussi les sites de tchat. Tous deux proposent des discussions directes avec des chargés de clientèle. À part ceux-là, il y en a d’autres qui sont totalement automatisées (demande de solde via un Smartphone, etc.). À l’heure actuelle, la nouvelle technologie associée à l’évolution d’internet a largement dépassé les logiciels bancaires. Il suffit juste que le Smartphone ou la télévision aient accès à internet et le tour est joué. Toutes opérations financières et bancaires peuvent se faire à distance. L’influence des nouvelles technologies de l’information et de la communication ainsi que des différents réseaux de communication dans le domaine bancaire a commencé à se développer dans les années 70.
Dans le domaine bancaire, ces nouvelles technologies ont déjà engendré deux grandes évolutions. La première a été marquée par l’apparition de nouveaux supports logistiques dans le cadre du traitement interne des informations ainsi que dans les relations au sein de la profession. La seconde quant à elle se rapporte au fait que les nouvelles technologies sont devenues le moyen le plus rapide pour accéder à tous types d’informations et aux marchés tout en étant un moyen de création de marchés électroniques globaux. Les nouvelles technologies marquent également la modernisation des bourses de valeurs.
Actuellement, les nouvelles technologies sont utilisées comme des supports à l’action commerciale, notamment au niveau des agences, et comme de nouveaux circuits de vente à distance.
Pour certaines banques, la digitalisation des services se fait en partenariat avec des entreprises innovantes. Le modèle économique de l’écosystème numérique se caractérise par une forte croissance des ventes et des bénéfices tirés par un environnement innovant et rentable tout en remettant en question la viabilité des modèles d’exploitation traditionnels adoptés par les banques. Une étude menée par PwC en 2017 a révélé qu’environ 82% des prestataires de services financiers s’attendent à accroître leurs partenariats avec les entreprises innovantes d’ici les prochaines années. L’avantage tant pour les deux parties est donc réciproque : la banque s’associe à une entreprise qui fournit des solutions bancaires nettement moins chères et plus, et les Fintechs en profite en réalisant un revenu pour offrir le service, tout en accédant simultanément à une large base de clients sur lesquels tester leurs innovations. Les Fintechs ont donc révolutionné les terrains de jeu dans lesquels opèrent non seulement les banques, mais aussi les institutions financières en général.
Par ailleurs, alors que l’espace de la technologie financière se développe, les innovateurs cherchent à améliorer les éléments de la chaîne de valeur des services financiers bien au-delà de l’argent mobile. Les start-ups, les acteurs établis et les banques centrales sont en train de faire des découvertes pour concevoir, tester et reconcevoir de nouveaux produits, services et réglementations. Ce processus s’appuie sur la coalescence des nouvelles technologies.15
Les bouleversements technologiques redéfinissent la manière dont les banques exercent leurs activités. Les entreprises Fintech (ou start-ups) sont entrées dans l’espace bancaire et offrent aux banques et autres institutions financières des solutions technologiques qui comprennent des plateformes transactionnelles moins coûteuses, des offres de produits et services innovants ainsi que des canaux de distribution plus pratiques. Par conséquent, les perturbations n’entraîneront pas nécessairement la disparition des banques elles-mêmes, mais plutôt celle de leur offre de produits et des personnes qui les fournissent.
D’une manière générale, une Fintech fait référence à l’utilisation de la technologie dans la fourniture de services financiers et a comme effet de bouleverser les modèles de certaines banques traditionnelles16. La notion de perturbation est intégrée dans des applications technologiques, notamment l’intelligence artificielle (IA), la banque d’algorithmes, la biométrie, le big data, le cloud computing et les crypto-monnaies qui améliorent la fourniture de produits et services bancaires17.
La principale menace pour les banques traditionnelles est double. Premièrement, l’entrée de ce que l’on appelle des néobanques offre aux consommateurs une présence uniquement numérique sans réseaux d’agences encombrants et coûteux18. Deuxièmement, les entreprises Fintech qui proposent des solutions bancaires moins chères, plus innovantes et plus pratiques peuvent accaparer une plus grande part du marché19. Ainsi, là où la première menace de capter la part de marché détenue par les banques traditionnelles, le second exploite les inefficacités opérationnelles des banques traditionnelles. Par exemple pour les banques traditionnelles africaines, elles sont exposées à ces deux types de menace. Le lancement de deux néobanques, Bank Zero et TymeDigital, ainsi que l’expansion de Discovery Health et de Post Bank dans les activités bancaires perturbent la domination traditionnelle des banques de détail africaines20.
D’après tout ce qui précède, il est évident que les Fintechs, dans son essence même, sont omniprésentes dans tous les sens du terme et constitue une menace définitive pour les banques traditionnelles. Cela est principalement dû à la capacité des entreprises Fintechs à utiliser, de manière innovante, la technologie pour trouver des solutions alternatives aux besoins des clients bancaires. Toutefois, bien que l’information devienne de plus en plus omniprésente, les banques «possèdent» toujours la relation banque-client et, avec elle, l’essentiel des informations sur leurs clients. C’est notamment pour cette raison que nous allons dans le chapitre suivant parlé de la coopétition pour voir les types de partenariats possibles entre les banques et les fintechs afin que chaque partie puisse se développer sans risquer de disparaitre.
Les paiements Mobiles (m-paiements) sont des transactions financières effectuées à l’aide d’un appareil Mobile tel qu’un téléphone Mobile. Les services bancaires Mobiles (m-banking) incluent les paiements Mobiles, mais impliquent l’accès, par un appareil Mobile, à une gamme plus large de services bancaires, tels que les produits d’épargne ou de transaction basés sur un compte offerts par les banques. Les paiements Mobiles et les services bancaires Mobiles sont eux-mêmes des sous-ensembles des domaines plus larges des paiements électroniques et des services bancaires électroniques.
Les économies à croissance rapide avec des services bancaires formels limités connaissent une exclusion financière et une réduction des transactions plus importantes, mais la technologie Mobile offre des transferts d’argent rapides et peu coûteux et facilite les transactions. La propagation rapide des téléphones Mobiles signifie que le nombre d’utilisateurs Mobiles peut déjà dépasser le nombre de personnes en banque dans de nombreux pays à faible revenu. Les téléphones Mobiles peuvent également offrir un canal de communication pour initier et exécuter des transactions financières en ligne. Ce canal peut non seulement réduire le coût des transactions financières pour le fournisseur et le client, mais également permettre aux nouveaux entrants dans le secteur financier à la création de nouvelles relations pour la distribution de services. Ces changements laissent entrevoir une accélération de l’accès aux services financiers grâce à l’infrastructure Mobile.
Les études menées par DFID (2006) et de FinMark Trust (2007) mettent en évidence le fait que l’impact des services bancaires mobiles varie d’un pays à l’autre. Dans les pays développés, le modèle se présente principalement comme un canal supplémentaire dans la distribution des services financiers mobiles (MFS) et un accès supplémentaire aux comptes bancaires au-delà des canaux traditionnels. Dans certains pays en développement, la M-Banking est généralement le seul canal disponible et aux personnes sans compte bancaire la possibilité de bénéficier de services bancaires via les communications mobiles.
Le rapport établit une distinction entre les modèles additifs et transformatifs de la banque Mobile.
- Les modèles additifs sont ceux dans lesquels le téléphone Mobile est simplement un autre canal vers un compte bancaire existant.
- Les modèles transformationnels sont ceux dans lesquels le produit financier lié à l’utilisation du téléphone est destiné aux personnes non bancarisées, qui sont en grande partie des personnes à faible revenu
La banque Mobile a le potentiel d’être transformatrice pour de nombreuses raisons :
- Premièrement, il y a le fait qu’elle utilise l’infrastructure de communication Mobile existante pouvant atteindre des personnes non bancarisées.
- Ensuite, le fait que la banque Mobile est instaurée par de nouveaux acteurs, tels que les opérateurs télécoms, avec des marchés cibles différents des banques traditionnelles.
- Elle peut exploiter le pouvoir des nouveaux réseaux de distribution pour les transactions en espèces, au-delà des réseaux marchands conventionnels comme les points de vente ou de distributeurs automatiques de billets.
- Si l’offre est compétitive, elle peut être moins chère que les services bancaires classiques. La capacité de la banque Mobile à transformer le système bancaire Mobile dépend en grande partie de la capacité de l’environnement.
Les modèles émergents de banque Mobile peuvent être classés en quatre catégories, en fonction des différents rôles joués par les parties concernées : la banque, la société de télécommunication et, dans certains cas, un fournisseur de produits tiers. Les modèles varient d’un modèle dans lequel une banque ajoute un canal Mobile à sa gamme de produits existante, via des modèles hybrides dans lesquels un opérateur téléphonique peut apporter une marque, un ensemble de produits et/ou un système de distribution différent à un produit bancaire, à un opérateur dominé par les opérateurs télécoms dans lequel la société de télécommunication est elle-même responsable des dépôts effectués.
Les approches en matière de réglementation de la monnaie électronique varient considérablement, allant de la renonciation à la négligence, dans la mesure où le montant maximal du paiement ou du solde est faible, de la limitation de l’émission de monnaie électronique aux seules banques (Afrique du Sud) à la création d’un cadre habilitant permettant aux entités spécialisées dans l’émission de monnaie électronique de s’enregistrer sous un cadre de surveillance approprié (UE).
En Afrique subsaharienne, un certain nombre de banques ont introduit des produits de banque Mobile ainsi qu’une variété de modèles. La plupart sont toutefois à un stade précoce. La plupart des offres à ce jour ont été additives. Dans les pays où la clientèle de la banque de détail est suffisamment importante, tels que le Kenya (notamment de Coop Bank), le Nigéria (via GloMobile), l’Afrique du Sud (les quatre grandes banques) et le Zimbabwe (Kingdom Bank et Econet), les banques ont ajouté des solutions Mobiles les offres sont juste des canaux supplémentaires pour leurs produits existants. Bien qu’il n’existe pas encore de chiffres précis au niveau continental, il est peu probable qu’il y ait plus d’un million d’utilisateurs de services bancaires Mobiles. Il existe également des modèles émergents dans certains pays africains qui, bien qu’à un stade précoce, ont au moins le potentiel de transformation ou sont en mesure de le faire 21:
Figure 4 : Le modèle économique des services de paiement mobile
Source : Banque européenne d’investissement, « Le secteur bancaire en Afrique subsaharienne : Évolutions récentes et inclusion financière numérique », 2016, p.53
Au Kenya, le modèle économique de base comme présenté par la figure ci-dessus a connu un grand succès. Depuis la création de M-Pesa au cours de l’année 2007, le nombre de détaillants a largement augmenté, 400 en 2007 pour arriver à 132 000 en 2015. Également, le nombre de clients n’a cessé d’augmenter et de manière exceptionnelle. Ils étaient de 21 000 en 2007 pour arriver à 26 millions en 2015. Cette importante augmentation du nombre de détaillants et de clients s’accompagne automatiquement d’une augmentation des opérations.
Graphique 2 : Évolution du nombre de détaillants et de clients
Source : Statistiques nationales relatives aux paiements, Banque centrale du Kenya
Le succès de la finance mobile est dû premièrement aux paiements, mais surtout par le fait que ces services ont permis de mettre en place les opérations d’intermédiation. Également, Safaricom avec une importante part de marché (70 %) domine le marché. C’est notamment pour cette raison qu’il est difficile de reproduire l’expérience du Kenya dans d’autres pays africains dont le marché n’est pas dominé par les entreprises comme Safaricom.
La croissance exponentielle des paiements mobiles a su octroyer les mesures nécessaires pour que des solutions innovantes émergent pour optimiser la coopération entre différentes institutions. L’une des premières innovations qui a suivi les services de paiement mobile a été l’introduction de services de paiement de factures et de paiements groupés qui ont donné aux banques la possibilité de faire appel à la technologie mobile afin de rendre plus facile le paiement et le remboursement des prêts. Il y avait ensuite les services permettant aux clients de retirer de l’argent auprès des DAB (distributeur automatique de banque) sans avoir besoin d’une carte de retrait. Grâce à cette innovation, les clients de M-Pesa, par exemple, ont la possibilité de retirer des fonds auprès d’un réseau de détaillants de services d’argent mobile disposant d’un guichet automatique. De nombreux autres services de paiement mobile innovants ont par la suite été introduits, par exemple le paiement de factures d’eau potable via M-Pesa, ou encore le paiement de primes d’assurance, etc. Ce qui attire le plus l’attention, c’est la coopération entre les opérateurs mobiles et les banques. Ce système a permis de créer les services d’envoi de fonds, puis d’épargne et même des services de prêt. Tout cela a commencé au cours de l’année 2010 sous la forme d’un accord de coopération entre certaines banques et Safaricom.
Cependant, au cours de l’année 2012, cette coopération a pris fin en raison de différences de répartition des bénéfices entre les partenaires. Mais quelque temps après, M-Kesho a trouvé une autre solution, résultant d’une collaboration entre CBA et Safaricom, ce qui a donné naissance au service M-Shwari.
Il existe des facteurs sociaux et personnels qui influencent l’utilisation des technologies par les individus. Au niveau social, les plus importants sont les facteurs économiques, culturels et institutionnels qui attirent l’attention de bon nombre de chercheurs. Par conséquent, les facteurs et variables économiques tels que le PIB par habitant, l’inflation et l’inégalité des revenus sont également considérés comme ayant un impact sur l’adoption des technologies22.
Certains auteurs comme Bagchi et al. (2003) estiment également que la culture constitue un facteur d’acceptation des nouvelles technologies. Selon Robey et al. (1990), notre interprétation est grandement fonction de notre culture. Selon l’étude menée par CGAP (2009), la population des pays émergents est moins exposée aux nouvelles technologies, donc elle est moins ordonnée à les adopter. Le Mobey Forum (2008) pense également la même chose, car selon lui, les consommateurs potentiels seront mieux en mesure d’adopter les nouvelles technologies lorsqu’ils toucheront les consommateurs des pays développés.
Enfin, Bagchi et al. (2003) démontrent l’existence d’un facteur institutionnel dans l’acceptation d’une nouvelle technologie. Ainsi, le niveau de corruption, la réglementation propre à un pays, le système juridique, ont tous des effets sur l’acceptation d’une nouvelle technologie par un individu. Les facteurs personnels n’ont pas moins d’influence sur l’utilisation des technologies.
Selon l’étude de Mobey Forum (2008), les facteurs d’ordre émotionnel, psychologique et irrationnels qui caractérisent les individus sont cruciaux pour l’acceptation ou la non-acceptation d’une nouvelle technologie. Suoranta et al. (2005) insistent sur la rationalité de l’individu et expliquent l’adoption d’une nouvelle technologie en calculant les avantages et les coûts d’utilisation pour chaque consommateur potentiel. Les facteurs cognitifs sont également pris en compte et considérés comme importants pour l’acceptation de la technologie (Carlsson et al. 2006).
Tableau 5 : Les critères d’adoption d’une nouvelle technologie
Les spécificités du modèle bancaire africain et le développement de plus en plus important des FinTechs et des OTM sur le marché des services financiers africains nous poussent à nous interroger sur les modalités de collaboration de ces deux acteurs avec les banques traditionnelles. C’est pour cela que dans le chapitre suivant, nous développerons les principales théories nécessaires pour servir de base à cette possibilité de collaboration.
Chapitre II : Les modalités de la collaboration entre les OTM, les Fintechs et les banques traditionnelles
Ce second chapitre consiste à poser les bases théoriques à proprement parler. Nous définissons ce qu’est un écosystème et nous abordons les théories de la collaboration à travers la Coopétition et l’Open Innovation.
Pour conduire nos réflexions, ce travail de recherche propose d’une part d’entrevoir comme cadre d’analyse les concepts de coopération et compétition à travers les théories de l’Open Innovation (Chesbrough, 2003) et de coopétition (Gnyawali et Park, 2006 ; Le Roy et al., 2003) et d’autre part le concept d’écosystème d’affaires, à travers la théorie (J. Moore, Koening, D. Teece). Les perceptions des acteurs bancaires, des OTM et des fintechs seront ainsi examinées à partir de ces trois concepts afin de comprendre comment les stratégies peuvent être orientées dans cet environnement en transformation. Dans le cadre de la collaboration entre les OTM, les FinTechs et les banques traditionnelles, nous avons choisi d’étudier la notion de coopétition car ces trois acteurs sont premièrement des concurrents entre eux et que l’évolution du marché les poussent à travailler en partenariat.
Les relations coopératives et coopétitives ont le potentiel de collusion, mais l’existence d’une collusion réelle doit être déterminée par référence à l’impact sur le consommateur. Là où les entreprises coopèrent, même dans le cadre d’une relation coopétitive, et que le consommateur est pénalisé, il y a collusion. Cependant, lorsque les entreprises coopèrent non seulement pour leur bénéfice mutuel mais aussi pour le bien du consommateur, la relation n’est pas collusoire. Dans ce cas, la collaboration «coopétitive» a produit une situation «gagnant-gagnant-gagnant».
Par ailleurs, il faut également noter qu’en entreprenant ensemble la concurrence et la coopération, la nature de la relation (ou de l’alliance) est très complexe et oblige les entreprises à adopter des rôles conflictuels. Cela peut conduire à des tensions au sein des entreprises et au conflit des rôles des employés qui doivent être gérés en conséquence (Bengtsson et Kock 2003; Dowling et al. 1996). La tension surgit dans de nombreux domaines, mais un domaine particulièrement important est le partage des connaissances et l’apprentissage interorganisations, pour lequel la tension peut en fait affecter la dynamique de l’alliance d’apprentissage.
La collaboration, qui se distingue de la coopération, de la coordination et de l’activité collective, est définie comme un effort continu et conjoint visant à élaborer un «espace commun des problèmes» de représentations partagées du problème à résoudre Bititci, U., Martinez, V., Albores, P., Parung, J. (2004).
Le mot collaboration est utilisé de manière interchangeable et indistinctement avec d’autres termes tels que coopération et alliances. La collaboration peut avoir lieu au niveau d’individus ou d’institutions. En général, la collaboration entre organisations est définie comme une relation réciproque et bien établie pour atteindre des objectifs communs, tandis que la collaboration entre individus est généralement définie comme un processus de création partagée, où les individus interagissent pour créer et partager des connaissances qu’aucun d’entre eux ne possédait auparavant ou aurait pu se développer. Quel que soit le niveau auquel elle est menée, il est clair que la collaboration est un processus basé sur le partage des connaissances ainsi que sur la réalisation d’objectifs communs.
Conceptuellement, les cinq dimensions clés de la collaboration émergent du corpus croissant de recherches sur la collaboration (Bricogne, M., Rivest, L., Troussier, N., Eynard, B., 2014), et des littératures précurseurs sur les relations interorganisations et comportement organisationnel Sandra Cheriti (2011). Ces dimensions soutiennent fortement une vision intégrative de la collaboration en tant que processus ” par lequel les parties qui voient différents aspects d’un problème peuvent explorer de manière constructive leurs différences et rechercher des solutions qui vont au-delà de leurs propres limites. vision de ce qui est possible.
Le processus de collaboration implique cinq dimensions, à savoir la gouvernance et l’administration (structurelle), l’autonomie organisationnelle, la mutualité et la confiance (sociale) Alcouffe, C. (2001).
- La question de gouvernance
Les entreprises qui cherchent à collaborer doivent comprendre comment prendre ensemble des décisions sur les règles qui régiront leur comportement et leurs relations. La collaboration implique la création de structures qui permettent aux participants de faire des choix sur la façon de résoudre les problèmes d’action collective auxquels ils sont confrontés en développant des ensembles de règles de travail sur qui est habilité à prendre des décisions, quelles actions sont autorisées ou limitées, quelles informations doivent être fournies, et comment les coûts et les avantages doivent être répartis.
Dans ce contexte, la structure s’avère être un élément important de la collaboration et doit permettre de mettre en place des règles pour déterminer les acteurs autorisés à prendre des décisions, les actions autorisées dans le cadre de la collaboration, la quantité d’informations nécessaires et la façon dont les coûts et les avantages sont répartis entre les parties concernées Achelhi, H., P. Truchot, et al. (2006). Selon Ben-Mahmoud Jouini, S. and R. Calvi (2004), la gouvernance fournit aux parties impliquées dans la collaboration est une structure qui leur permet de mieux travailler ensemble et de bénéficier de la collaboration.
Pour arriver à ce type d’équilibre, les entreprises concerner doivent comprendre la responsabilité partagée qui accompagne cette forme de gouvernance lorsqu’ils s’engagent dans une collaboration.
- L’administration
La collaboration n’est pas une entreprise auto-administrée. Les organisations collaborent parce qu’elles ont l’intention d’atteindre des objectifs particuliers. Pour cela, une forme de structure administrative doit exister. Ces structures administratives diffèrent conceptuellement de celles de la gouvernance parce que l’accent est moins mis sur l’offre institutionnelle que sur la mise en œuvre et la gestion.
Selon Alcouffe, C. (2001), la collaboration ne s’administre pas par elle-même, il est nécessaire que les systèmes et les structures administratives passent de la gouvernance à l’action. L’auteur fournit certains facteurs liés à l’administration, comme la planification et le suivi de l’effort de collaboration. Il inclut en outre la clarification des rôles en tant qu’élément important de la collaboration. Selon Blumberg, B. F. (2001), la capacité administrative n’est pas suffisante pour une collaboration fructueuse, et pour faire avancer les choses, il faut également trouver un équilibre entre l’administration et la capacité sociale pour établir des relations au sein de la collaboration.
- L’autonomie organisationnelle
Une dimension déterminante de la collaboration qui saisit à la fois le dynamisme potentiel et la frustration implicite dans les efforts de collaboration est la réalité que les partenaires partagent une double identité : ils conservent leurs propres identités distinctes et leur autorité organisationnelle distincte d’une identité collaborative. Cette réalité crée une tension intrinsèque entre l’intérêt personnel de l’organisation : accomplir des missions organisationnelles individuelles et maintenir une identité distincte des intérêts collaboratifs et collectifs, atteindre les objectifs de collaboration et maintenir la responsabilité envers les partenaires de collaboration et leurs parties prenantes Alcouffe, C. (2001).
En ce qui concerne les relations inter-organisationnelles, et plus particulièrement en ce qui concerne le pouvoir, Jeremy Ringard. (2011) déclare que la théorie de la dépendance aux ressources devient centrale. La théorie de la dépendance vis-à-vis des ressources soutient que l’entreprise n’est pas autonome pour répondre aux demandes du marché. En outre, la théorie de la dépendance des ressources montre qu’une organisation est interdépendante d’autres organisations dans son environnement. Par conséquent, on pourrait soutenir que le pouvoir pourrait être obtenu grâce à des transactions avec des acteurs de l’environnement extérieur Blumberg, B. F. (2001).
- La mutualité
La mutualité a ses racines dans l’interdépendance. Les entreprises qui collaborent doivent faire l’expérience d’une interdépendance mutuellement bénéfique basée soit sur des intérêts divergents soit sur un intérêt partagé – généralement basé sur l’homogénéité ou une appréciation et une passion pour un problème qui va au-delà de la mission d’une organisation individuelle Alcouffe, C. (2001). Cependant, les intérêts doivent tendre vers un objectif commun. Les avantages mutuels sont également soutenus par Jeremy Ringard. (2011) en tant qu’élément fondamental d’une collaboration réussie. En outre, en ce qui concerne les relations à long terme, Jeremy Ringard. (2011 p. 1) déclare que « […] les normes de mutualité présument que les deux parties reconnaissent la valeur continue du maintien de la relation afin de récolter des gains partagés ». Ainsi, l’auteur fait valoir que la mutualité est vitale dans les relations commerciales à long terme.
- La confiance
La réciprocité et la confiance sont étroitement liées conceptuellement. Dans le cadre d’une collaboration, les organisations participantes affichent généralement une mentalité de « je veux si tu veux » basée sur les degrés perçus des obligations réciproques que chacune aura envers les autres. Les partenaires peuvent être disposés à supporter des coûts disproportionnés au début parce qu’ils s’attendent à ce que leurs partenaires égalisent la répartition des coûts et des avantages au fil du temps par sens du devoir. Cette réciprocité concomitante, contingente et fragile, peut cependant évoluer au fil du temps à mesure que les perceptions de l’obligation évoluent vers des mœurs sociales moins fragiles qui forment la base de l’interaction sociale et de l’échange réciproque dans la collaboration Alcouffe, C. (2001).
La collaboration entre deux ou trois entreprises s’inscrit dans le domaine de la stratégie de développement externe. Dans un contexte de développement numérique, cette orientation externe s’apparente davantage à la question d’open innovation à travers laquelle une entreprise fait appel à des innovations externes pour mieux se positionner sur son marché. Le chapitre qui suit vas nous permettre de comprendre de manière plus approfondie ce qu’est l’open innovation et les avantages qu’elle procure dans une logique de collaboration.
L’influence des nouvelles technologies de l’information et de la communication ainsi que des différents réseaux de communication dans le domaine bancaire a commencé à se développer dans les années 70. Dans le domaine bancaire, ces nouvelles technologies ont déjà engendré deux grandes évolutions. La première a été marquée par l’apparition de nouveaux supports logistiques dans le cadre du traitement interne des informations ainsi que dans les relations au sein de la profession.
La seconde quant à elle se rapporte au fait que les nouvelles technologies sont devenues le moyen le plus rapide pour accéder à tous types d’informations et aux marchés tout en étant un moyen de création de marchés électroniques globaux. Les nouvelles technologies marquent également la modernisation des bourses de valeurs.
Actuellement, les nouvelles technologies sont utilisées comme des supports à l’action commerciale, notamment au niveau des agences, et comme de nouveaux circuits de vente à distance.
Ces dernières décennies, les banques se sont convergées de plus en plus vers l’open innovation. Cette innovation dite « ouverte » est un modèle basé sur des approches partenariales. Dans l’innovation ouverte, les sociétés peuvent non seulement faire appel à de nouveaux acteurs : outside in, mais ils peuvent aussi utiliser leurs idées pour innover d’autres partenaires : inside out.
En 2009 par exemple, l’entreprise Natixis a mis en place un laboratoire de gestion de cash afin de développer des applications qui permettent de mieux satisfaire les besoins des clients. Cette démarche a pour second objectif l’intégration des professionnels qui ne font pas partie de l’équipe de trésorerie de Natixis. En 2011, une banque en ligne italienne, WeBank, a procédé à une nouvelle expérimentation, l’objectif étant de mettre au point avec l’aide d’internautes une nouvelle application bancaire pour iPad.
Pour sa part, BNP Paribas a décidé de travailler avec une filiale d’Orange pour mettre en place un service de transfert d’argent via Smartphone. C’est en 2008 que la première offre commerciale a été lancée en Côte d’Ivoire. Un an après le lancement du produit, un premier test s’est aussi fait au Sénégal.
Pour des raisons publicitaires, la majorité des procédés d’innovation ouverte entamée par des banques sont souvent en relation aux activités bancaires de détail. Toutefois, l’open innovation ne se limite pas seulement aux banques commerciales. Elle concerne aussi les banques d’investissement, les banques de dépôt, mais encore les banques d’affaires. L’association des différentes transactions bancaires avec le déploiement des banques universelles qui font toutes sortes d’activités (financières/ bancaires) s’avère parfois très difficile. L’open innovation passe par une collaboration avec les clients ainsi que les entreprises qui ne font pas d’activité bancaire.
Même si le fait de recourir à l’open innovation se limite seulement dans le secteur financier, la prolifération récente des apprentissages bancaires conduit à se questionner sur les probables conséquences de cette approche23.
- Quels avantages peut-on attendre d’un tel processus d’innovation, aussi bien pour la banque que pour ses clients ?
- Quel est le rôle joué par l’open innovation face à la mutation de l’environnement de l’industrie financière ?
- Quels sont les risques liés à la mise en place de l’innovation ouverte étant donné les spécificités du secteur bancaire ?
- Du fermée à ouverte
L’innovation est-elle morte ? À peine, comme le ponctuent les progrès récents dans les sciences de la vie, y compris les percées révolutionnaires en génomique et le clonage. Alors pourquoi la R & D interne n’est-elle plus l’actif stratégique qu’il était ? La réponse réside dans un changement fondamental dans la manière dont les entreprises génèrent de nouvelles idées et les mettent sur le marché. Dans l’ancien modèle d’innovation fermée, les entreprises adhéraient à la philosophie suivante : pour réussir, une innovation nécessite un contrôle. En d’autres termes, les entreprises doivent générer leurs propres idées qu’elles développeraient, fabriqueraient, commercialiseraient, distribueraient et entretiendraient elles-mêmes. Cette approche appelle à l’autosuffisance : si on veut que quelque chose soit fait correctement, il faut le faire soi-même.
Pendant des années, la logique de l’innovation fermée a été considérée tacitement comme allant de soi pour la « bonne façon » de mettre de nouvelles idées sur le marché et dans le succès des entreprises, tout en respectant certaines règles implicites. Ils ont investi plus lourdement dans la R & D interne que leurs concurrents et ont embauché les meilleurs et les plus brillants (pour récolter les fruits des personnes les plus intelligentes du secteur). Grâce à ces investissements, ils ont pu découvrir le meilleur et le plus grand nombre d’idées, ce qui leur a permis d’être les premiers sur le marché. Cela leur a ensuite permis de récolter la plupart des bénéfices, ce qu’ils ont protégé en contrôlant de manière agressive leur propriété intellectuelle afin d’empêcher leurs concurrents de l’exploiter. Ils pourraient ensuite réinvestir les bénéfices dans davantage de R & D, ce qui a ensuite conduit à de nouvelles découvertes révolutionnaires, créant ainsi un cycle vertueux d’innovation.
Pendant presque tout le XXe siècle, le modèle a fonctionné – et cela a bien fonctionné. Grâce à lui, Thomas Edison a pu inventer un certain nombre de dispositifs de référence, notamment le phonographe et l’ampoule électrique, qui ont ouvert la voie à la création du célèbre Global Research Center de General Electric à Niskayuna, dans l’État de New York. Dans l’industrie chimique, des sociétés telles que DuPont, ont créé des laboratoires de recherche centraux pour identifier et commercialiser une variété étonnante de nouveaux produits, tels que les fibres synthétiques nylon, kevlar et lycra. Les chercheurs des Bell Labs ont découvert des phénomènes physiques étonnants et les ont exploitées pour créer une multitude de produits révolutionnaires, notamment des transistors et des lasers.
Vers la fin du XXe siècle, cependant, un certain nombre de facteurs ont contribué à saper les fondements de l’innovation fermée aux États-Unis. Le principal facteur parmi ces facteurs est peut-être l’augmentation spectaculaire du nombre et de la mobilité des travailleurs du savoir, qui rend de plus en plus difficile pour les entreprises de maîtriser leurs idées et leur expertise. Un autre facteur important a été la disponibilité croissante de capital-risque privé, qui a permis de financer de nouvelles entreprises et leurs efforts pour commercialiser les idées qui se sont répandues en dehors des silos des laboratoires de recherche des entreprises. De tels facteurs ont bouleversé le cercle vertueux qui a soutenu l’innovation fermée. Maintenant, lorsque des percées surviennent, les scientifiques et les ingénieurs qui les ont fabriqués ont une option extérieure qui leur manquait auparavant.
Si une entreprise qui a financé une découverte ne la poursuit pas à temps, les personnes impliquées pourraient la poursuivre elles-mêmes – dans une startup financée par du capital-risque. Si cette entreprise naissante devait réussir, elle pourrait obtenir un financement supplémentaire au moyen d’une offre d’achat d’actions ou être acquise à un prix attractif. Dans les deux cas, le démarrage réussi ne réinvestira généralement pas dans de nouvelles découvertes fondamentales. Au lieu de cela, à l’instar de Cisco, il chercherait à l’extérieur une autre technologie à commercialiser. Ainsi, le cercle vertueux de l’innovation a été brisé : la société qui avait initialement financé une percée n’a pas tiré profit de l’investissement et celle qui en a récolté les bénéfices n’a pas réinvesti ses produits pour financer la prochaine génération de découvertes. Dans ce nouveau modèle d’innovation ouverte, les entreprises commercialisent des idées externes (aussi bien qu’internes) en déployant à l’extérieur.
Dans le nouveau modèle d’innovation ouverte, une entreprise commercialise à la fois ses propres idées et les innovations d’autres entreprises et cherche des moyens de commercialiser ses idées internes en déployant des solutions en dehors de ses activités actuelles. Il faut noter que la frontière entre l’entreprise et son environnement est poreuse (représentée par une ligne en pointillé), ce qui permet aux innovations de se déplacer plus facilement entre les deux.
Figure 5 : L’open innovation
Source: Chesbrough, H.W. and Kardon Crowther, A. (2016) Beyond high tech: early adopters of open innovation in other industries. R&D Management,36, 229–236
Tableau 6 : Différence entre open innovation et closed innovation
Closed innovation | Open innovation |
Les personnes intelligentes dans notre domaine travaillent pour nous. | Toutes les personnes intelligentes ne travaillent pas pour nous, nous devons donc trouver et puiser dans les connaissances et l’expertise d’individus brillants ne faisant pas partie de notre entreprise. |
Pour profiter de la R & D, nous devons découvrir, développer et expédier nous-mêmes. | La R&D externe peut créer une valeur significative ; R&D interne est nécessaire pour réclamer une partie de la valeur |
Si nous le découvrons nous-mêmes, nous le commercialiserons d’abord. | Nous n’avons pas besoin de lancer la recherche pour en tirer profit. |
Si nous sommes les premiers à commercialiser une innovation, nous gagnerons. | Construire un meilleur modèle d’affaires est préférable à une première mise sur le marché. |
Si nous créons les meilleures idées de l’industrie, nous gagnerons | Si nous exploitons au mieux les idées internes et externes, nous gagnerons. |
Nous devrions contrôler notre propriété intellectuelle afin que nos concurrents ne profitent pas de nos idées. | Nous devrions tirer profit de l’utilisation de notre propriété intellectuelle par d’autres personnes, et nous devrions en acheter une dès qu’elle fait progresser notre propre modèle commercial. |
Source: Chesbrough, H.W. and Kardon Crowther, A. (2016) Beyond high tech: early adopters of open innovation in other industries. R&D Management,36, 229–236
Les innovations ont émergé de sources improbables. En effet, le lieu d’innovation dans ces industries a migré au-delà des limites des laboratoires centraux de R & D des plus grandes entreprises et se situe désormais entre diverses startups, universités, consortiums de recherche et autres organisations extérieures. Cette tendance va bien au-delà de la haute technologie : d’autres secteurs tels que l’automobile, les soins de santé, la banque, l’assurance et les produits de consommation courante se sont également tournés vers l’innovation ouverte. En guise d’exemple, on peut citer Procter & Gamble. Ce géant des produits de consommation possédant une longue et fière tradition de science interne derrière ses nombreuses marques leaders. P & G a récemment changé son approche de l’innovation en étendant sa R & D interne au monde extérieur avec le slogan « Connect & Develop ».
La société a créé le poste de directeur de l’innovation externe et s’est fixée pour objectif de s’approvisionner à 50 % en innovations. Cette approche est très éloignée du syndrome «pas inventé ici», ou NIH, qui touche de nombreuses grandes organisations industrielles performantes. Récemment, P & G a remporté un énorme succès avec la SpinBrush, une brosse à dents électrique fonctionnant avec des piles et qui se vend 5 $. L’idée du produit, qui est rapidement devenu la brosse à dents la plus vendue aux États-Unis, n’est pas venue des laboratoires de P & G, mais de quatre entrepreneurs à Cleveland. P & G tente également de faire sortir ses propres innovations. La société a adopté une politique stipulant que toute idée émanant de ses laboratoires sera proposée à des entreprises extérieures, même concurrentes, si une entreprise interne ne l’utilise pas dans les trois ans à venir. L’objectif est d’empêcher que des projets prometteurs ne perdent l’élan et s’engouffrer dans l’organisation.
Par opposition à l’innovation ouverte, Chesbrough (2003) propose une définition de l’innovation fermée comme suit : « J’appelle l’ancien paradigme Innovation fermée. C’est un point de vue qui dit qu’une innovation réussie nécessite un contrôle. Les entreprises doivent générer leurs propres idées puis les développer, les construire, les commercialiser, les distribuer, les entretenir, les financer et les soutenir seules. Ce paradigme conseille aux entreprises d’être fortement autonomes, car on ne peut pas être sûr de la qualité, de la disponibilité et de la capacité des idées des autres: “Si vous voulez que quelque chose soit bien fait, vous devez le faire vous-même” […] Pour la plupart du XXe siècle, ce paradigme a fonctionné, et bien travaillé »24. Selon l’auteur, l’innovation fermée a été efficace pendant la majeure partie du 20e siècle. Cependant, cette approche innovante rencontre deux grandes limites. Bill Joy, le co-fondateur de Sun Microsystems, a clarifié cela d’une manière très simple. Il a expliqué : « Peu importe qui vous êtes, la plupart des personnes les plus intelligentes travaillent pour les autres ». En d’autres termes, peu importe la taille, la capacité et la santé financière, les investissements en termes de R&D, le nombre et la compétence des chercheurs, etc., dans tous les cas, les entreprises ne représentent encore qu’une petite partie des recherches menées à l’échelle mondiale. Dans ce contexte, les plus grandes inventions du futur ne seront probablement pas produites au sein d’une seule et même entreprise. De plus, le fait de se replier sur soi, de refuser les collaborations ou encore de refuser de voir ce que font les autres peut empêcher une entreprise à se développer et à innover correctement.
La seconde limite de l’innovation fermée porte sur les avantages qu’elle procure. Ces avantages portent essentiellement sur deux points importants : la division du travail et la spécialisation25. Il arrive souvent que lorsqu’une entreprise cherche à mettre en œuvre un projet d’innovation, elle n’est pas toujours la mieux placée pour promouvoir son invention. En général, ce sont d’autres entreprises qui ont la capacité de créer de la valeur à travers l’innovation recherchée. Cela s’explique par le fait que les autres entreprises disposent des moyens complémentaires nécessaires à l’optimisation de la valeur de l’innovation. Dans ce contexte, si l’entreprise s’entête à développer par elle-même ses produits en interne et à refuser de collaborer avec d’autres entreprises, elle risque de passer à côté de la véritable création de valeur et être contreproductive. C’est pour cela qu’il est parfois nécessaire qu’une entreprise cède ses innovations à des partenaires externes ou encore décide de collaborer avec eux lorsqu’il s’agit de mettre en place des projets innovants.
Avec l’innovation fermée, l’entreprise risque de se perdre et leurs stratégies peuvent se retourner contre elle même et contre ses clients. Cela est surtout possible dans le secteur des réseaux de télécommunication et des réseaux internet, car plus le nombre d’utilisateurs augmente, plus l’innovation est difficile à maitriser.
Les limites de l’innovation fermée ont mené Chesbrough H. (considéré comme le premier prescripteur de l’innovation ouverte) vers une nouvelle forme d’innovation. D’après lui : « Le paradigme de l’Open Innovation peut être compris comme l’antithèse du modèle d’intégration verticale traditionnel où les activités de recherche et développement internes conduisent à des produits développés en interne qui sont ensuite distribués par l’entreprise […] L’Open Innovation est l’utilisation d’entrées et de sorties de connaissances pour accélérer l’innovation interne et élargir les marchés pour l’utilisation externe de l’innovation. L’innovation ouverte est un paradigme qui suppose que les entreprises peuvent et doivent utiliser des idées externes ainsi que des idées internes et des voies internes et externes vers le marché, alors qu’elles cherchent à faire progresser leur technologie »26.
Comparée à l’innovation fermée, l’innovation ouverte ouvre les frontières de l’entreprise et les rendent perméables. Dans ce contexte, plusieurs connaissances circulent entre l’entreprise et son environnement externe. Ces flux peuvent circuler de l’entreprise vers l’extérieur, ou de l’extérieur vers l’entreprise, et permet de distinguer les deux aspects de l’innovation ouverte.
Figure 6 : Mécanismes de l’innovation ouverte
Source : Pénin et al. (2011) inspiré de Weelwright et Clark (1992) et Chesbrough (2003)
Dans les modèles dits d’innovation fermée, les entreprises s’appuient essentiellement sur des compétences internes et des moyens internes pour trouver des idées et développer des projets d’innovation (Almirall E. and Casadesus-Masanell R. (2010). La mobilité de la main-d’œuvre qualifiée, la présence de plus en plus croissante du capital-risque, l’émergence des start-ups et le rôle de la recherche universitaire et ses liens avec l’industrie font partie des plus grands facteurs qui ont conduit au paradigme de l’open innovation.
Contrairement à l’innovation fermée, l’innovation ouverte est très large et propose différentes modalités de développement. Dès qu’une entreprise ne contrôle plus par elle seule l’ensemble de ses processus d’innovation, alors là on parle d’innovation ouverte. Il est donc nécessaire de trier ce concept et de classer les différents modes d’innovation ouverte. Comme mentionné plus haut, il existe deux dimensions de l’innovation ouverte : l’outside-in et l’inside-out.
Dans les pratiques les plus anciennes, l’innovation ouverte avaient comme objectif de mettre en place des alliances plus ou moins formelles avec des partenaires externes (co-conception, consortium de recherche, co-entreprise), à faire appel à des clusters industriels ou encore à acquérir des entreprises ou des licences d’exploitation. Dans des cas plus rares, les entreprises optaient pour la création de start-up ou encore elles acceptaient d’accorder des licences d’exploitation et de brevet. Actuellement, les pratiques d’innovation ouverte (IO 2.0) permettent de mobiliser la foule pour intégrer des connaissances externes (crowdsourcing) ou, à l’inverse, d’utiliser des places de marché en ligne pour céder des technologies. Également, les entreprises peuvent mobiliser des communautés de savoir afin de résoudre les problèmes plus rapidement.
- Outside-in
L’Open Innovation a été premièrement considérée comme la nécessité d’ouvrir le processus d’innovation en dehors des frontières d’une entreprise. Le principe est que la mobilité interne des connaissances ne permet pas de conserver tous les meilleurs talents et connaissances pertinentes au sein d’une entreprise ; les entreprises doivent chercher de nouvelles voies et des opportunités d’innovation à l’extérieur. Depuis, le concept d’open innovation a été associé à différents concepts appartenant à différents contextes, de l’open source à la co-création d’utilisateurs; de l’innovation centrée sur l’utilisateur à l’intégration client et de l’innovation distribuée.
L’outside-in en innovation ouverte consiste à ouvrir les portes des processus d’innovation à différents types d’intrants et de collaborations externes. C’est cet aspect de l’innovation ouverte qui a reçu la plus grande attention, que ce soit dans le domaine des recherches universitaires ou dans les pratiques au sein des industries. Le passage de l’innovation ouverte de l’intérieur vers l’extérieur (inside-out) exige que les entreprises permettent aux idées inutilisées et sous-utilisées de sortir pour que d’autres les utilisent dans leurs entreprises et leurs modèles commerciaux.
Par ailleurs, il est important de noter que les facteurs qui ont poussé l’adoption de l’innovation ouverte ont amené les entreprises à mettre en place des processus externes bien avant les processus internes. Cependant, toutes les entreprises ne les ont pas adopté au cours de la même période ; en fait, la pression du marché a contraint les acteurs de la haute technologie à développer l’ouverture avant d’autres acteurs. Les industries de l’électronique et des télécommunications ont été pionnières dans ce domaine, avant même la diffusion théorique du paradigme de Chesbrough H. En outre, d’autres auteurs comme Mortara et Minshall (2011) ont proposé un cadre conceptuel dans lequel où ils classent les entreprises innovantes en termes de mise en œuvre de l’Open Innovation 27:
- Les adoptants conscients de l’open innovation : ce sont les entreprises qui ont adopté principalement des processus externes dans l’objectif d’accéder à des opportunités et à des capacités externes, et dans une perspective d’exploration technologique externe. Dans ce cas de figure, la mise en œuvre de l’open innovation se base généralement sur la diffusion du modèle au sein de l’organisation et cela dans une logique d’ouverture externe de l’innovation ;
- Les adoptants ad hoc de l’open innovation : ce sont les entreprises qui ont adopté le processus oustide-in à la suite d’une imposition de réduction des coûts par le marché. Avec cette approche il n’y a pas de plan stratégique pour la mise en œuvre du modèle. Les industries telles que l’aérospatiale et la défense dépendant des financements publics sont celles qui sont les plus concernées par ce modèle, et lorsque la diminution des coûts s’impose, les entreprises doivent trouver un nouveau moyen de rendre rentable et profitable la R&D ;
- Les précurseurs de l’open innovation : ce sont les entreprises qui ont adopté l’open innovation en raison de la forte concurrence du marché et les coûts des processus d’innovation. Ces caractéristiques du marché favorisent le développement de business models basé sur des processus couplés d’innovation dont l’objectif est de créer des synergies à travers l’intégration de technologies internes et externes ;
- Les communautés de pratiquants de l’open innovation : ce sont les entreprises qui ont une expérience antérieure en termes d’innovation ouverte dirigée par des partenariats de R&D, et qui tentent plus tard d’aligner la direction pour promouvoir une culture d’ouverture aux plus hauts niveaux.
Le cadre conceptuel proposé par Mortara et Minshall concernant la mise en œuvre de l’innovation ouverte peut s’intégrer au schéma organisationnel proposé par Chiaroni et al. (2011). Ces auteurs ont développé trois étapes d’évolution par rapport à l’innovation ouverte des entreprises : déblocage, mouvement et institutionnalisation28.
- L’étape de déblocage : c’est le moment où l’entreprise décide d’adopter une approche d’open innovation. L’étape de déblocage semble se rapprocher des « adoptants conscients de l’open innovation » proposé dans le cadre conceptuel de Chesbrough H. Dans cette étape, les entreprises acceptent le changement organisationnel et se préparent à une nouvelle façon d’atteindre l’innovation. Dans ce contexte, l’ouverture est déjà un objectif plutôt qu’un résultat.
- L’étape de mouvement : cette étape est marquée par un décalage dans le temps pendant et durant lequel les entreprises investissent dans de nouvelles routines et dans des projets destinés à enrichir leur gestion des connaissances. Dans cette étape, la disposition et la durée des relations, ainsi que le partenariat, dépendent des objectifs, des besoins et de la dimension de l’entreprise.
- L’étape d’institutionnalisation : dans cette dernière étape, le réseau dispose d’une structure stable et développe des partenariats avec d’autres sources d’innovation. Lorsqu’elles se situent dans cette étape, les entreprises ont des routines et des processus adaptés à leurs besoins et l’open innovation est atteint.
Sur la base de ses différents points, nous pouvons dire que la culture de l’innovation ouverte peut s’aligner sur la gestion axée sur le marché étant donné que de nombreux points de contact ont émergé entre ces deux courants de recherche. Dans ce contexte, l’entreprise fait valoir l’avantage concurrentiel lorsqu’elle est capable de se concentrer sur son marché, vis-à-vis des clients et de la concurrence, et d’éviter d’être exclusivement axée sur la technologie. Une entreprise axée sur le marché doit établir une configuration organisationnelle basée sur une orientation stratégique sur le marché, la cohérence des éléments et la flexibilité. Ainsi, les réseaux de l’innovation ouverte reposent sur deux types de processus, qui peuvent être assimilés aux capacités de gestion axées sur le marché : extérieur-intérieur et intérieur-extérieur29. Autrement dit, les entreprises peuvent réussir à intégrer leurs propres ressources internes à celles offertes par d’autres acteurs appartenant à la chaîne d’approvisionnements tels que les clients ou les fournisseurs, en étendant le lieu d’innovation au-delà des frontières organisationnelles.
Avec le concept d’outside-in, les entreprises sont considérées comme les destinataires des flux qui se composent de technologies, d’informations et d’idées. En fait, les chercheurs comme Chiaroni, D., Chiesa, V., & Frattini, F (2011) ont suggéré une séparation entre le lieu de création de connaissances et le lieu d’innovation. Le premier est placé à l’intérieur de l’entreprise, par exemple une nouvelle idée venant d’un client, ou une technologie de base d’une université. La mobilisation des connaissances dépend ainsi de la capacité d’intégration entre les connaissances externes et internes.
- Inside-out
Bien que les processus outside-in soient largement étudiés par la littérature portant sur l’open innovation, le concept d’inside-out, pour exploiter les efforts de R&D, n’est pas aussi bien étudié dans les recherches universitaires. Pourtant, si une entreprise souhaite adopter le paradigme de l’innovation ouverte, elle doit maitriser et mobiliser les deux typologies de processus de l’innovation. Certains auteurs comme Le Masson P., Weil B. et Hatchuel A. considèrent que le plus haut niveau d’ouverture ne peut être atteint que lorsque les entreprises mettent en œuvre le processus couplé : outside-in et inside-out. Le processus couplé se base sur la co-création avec d’autres partenaires à travers des alliances, des coopérations, des joint-ventures, etc.
Les processus d’inside-out sont particulièrement complexes étant donné qu’ils impliquent plusieurs problèmes d’appropriation et de gestion de la propriété intellectuelle. En effet, en adoptant ce type d’innovation, les entreprises craignent l’impossibilité de tirer des bénéfices suffisants de l’exposition de son innovation. D’autant plus que dans un contexte d’innovation-imitation, il est possible qu’un concurrent soit mieux positionné et plus à même d’en tirer plus de bénéfices30. De plus, lorsqu’une entreprise opère sur des marchés mondiaux, protéger une innovation devient capital. En fait, les brevets ne peuvent pas sauvegarder l’innovation de procédé, et également pour l’innovation de produit, les coûts de maintien de leur validité et la preuve de leur violation sont élevés. En matière d’innovation, la gestion de l’imitation représente un impératif pour les entreprises qui sont en concurrence sur les marchés internationaux, où dans de nombreux secteurs, il y a une crise accélérée des anciennes formes d’organisation industrielle.31
Actuellement, la plupart des innovations sont axées sur la technologie, et ont pour objectif de renforcer la position stratégique des entreprises. Dans ce contexte, il s’agit d’assurer des accords de licence réciproque à travers lesquels les entreprises échangent mutuellement des brevets et des connaissances. Par le biais du transfert de technologie, les entreprises ont la possibilité d’accroître leur capacité à pratiquer l’innovation ouverte, à la fois dans les processus d’outside-in et d’inside-out, avec une compression de la courbe d’apprentissage de l’entreprise. Les deux autres objectifs sont strictement liés à la capacité d’attirer des partenaires plus nombreux et de meilleure qualité.32
Par ailleurs, il est important de noter que plusieurs variables environnementales peuvent influencer le résultat des processus inside-out33. Si les entreprises sont dans un environnement statique, elles peuvent obtenir de forts avantages en protégeant une innovation par un brevet et en la gardant dans leurs limites, mais dans un contexte d’obsolescence technologique, les possibilités de saisir la valeur de ce comportement sont marginales. Dans les industries dynamiques, l’innovation ouverte se présente comme la meilleure option pour éviter la perte de valeur dramatique d’une nouvelle technologie, et la possibilité d’obtenir un meilleur retour sur les efforts de R&D, uniquement avec une utilisation interne. En conséquence, les processus sortants augmentent lorsque la pression technologique est au plus haut niveau. Mais aussi dans ces situations, les entreprises doivent être protégées du risque de vendre les innovations de l’entreprise, car vendre une technologie est plus dangereux que vendre un produit.
Les transactions technologiques s’effectuent plus simplement lorsque les entreprises font confiance à une solide protection de la propriété intellectuelle, le brevet. En fait, la protection par brevet améliore les processus d’inside-out, car elle représente une incitation positive à tirer parti des avantages du transfert de technologie. Une solution moins invasive consiste à établir un contrat de conseil en R&D avec un partenaire, dans lequel une innovation reste isolée dans les frontières organisationnelles de l’entreprise initiatrice. Au lieu de cela, dans l’octroi de licences, les entreprises perdent leur contrôle sur l’innovation pour un rendement pécuniaire dans un monde axé sur les actifs technologiques.
D’après l’étude de l’OCDE en 2008, c’est de la spécificité de l’environnement technologique des organisations et des structures industrielles que dépend l’attrait de l’open innovation. Selon une étude qui s’inspire de Malerba et Orsenigo (1993), il existe quatre facteurs qui régissent les possibilités d’open innovation :
- Les conditions d’opportunitéqui représentent la complexité ou la facilité avec laquelle une organisation peut innover, de façon progressive ou radicale ;
- Les conditions d’appropriabilité qui évoquent le niveau de protection de l’avantage qui découle de l’innovation ;
- Les conditions de cumulativité des connaissances concernant le point auquel les présentes innovations servent de base pour les futures innovations ;
- Et enfin le degréde pluridisciplinarité du savoir.
Ces éléments définissent le régime technologique et décident du choix stratégique des sociétés innovantes, Malerba, Orsenigo, 1993 ; Malerba, Orsenigo, 1995. Il existe un autre facteur décisif qui s’ajoute aux quatre autres pour l’étude des opportunités d’open innovation, incluant l’élément concerné par l’innovation34 :
- Innovation de procédé : nouvelle méthode de distribution,
- Innovation de matières premières ou innovation organisationnelle
- Innovation de produit : développement d’un nouveau produit,
- Innovation de marché : nouveaux marchés.
De nos jours, le numérique se caractérise par une résonnance toute particulière, notamment au niveau du secteur bancaire. Comme toutes les autres entreprises, les banques sont également concernées par la transformation digitale, notamment en raison de l’importance stratégique de son Système d’information. Par ailleurs, leurs interactions avec les différents acteurs concernés, y compris les clients, ont également transformé leur structure interne.
Le recours aux nouveaux canaux d’accès qui sont mis à la disposition des clients se présente à la fois comme une réponse face aux pressions exercées par la concurrence ainsi qu’à la volonté de proposer de nouveaux services aux clients. Grâce à cela, les clients ont également la possibilité de profiter de la multiplicité des canaux d’accès pour effectuer des opérations de banque à distance.
L’ère du Web 3.0 est marquée par l’entrée dans l’exploitation économique de l’internet. En effet, si la seconde révolution du Web a permis d’aduler l’égo des internautes par le biais des différents outils à l’exemple des blogs et des plateformes de réseaux sociaux, cette troisième révolution se concentre sur toute la puissance du « moi ». Progressivement, les consommateurs ont commencé à prendre l’habitude de considérer que le web puisse répondre à leurs besoins et non l’inverse et par conséquent, cherchent de plus en plus qu’on leur réponde de façon personnalisée. Ainsi, les consommateurs sont de moins en moins enclins à s’adapter à des procédures qui leur sont imposées, par exemple le fait de remplir des formulaires, de plus, l’absence d’offre personnalisée leur demande beaucoup plus d’effort.
Cette troisième génération du web est également marquée par une autre révolution qui est la Mobilité. C’est à partir de l’année 2000 que les téléphones GSM ont commencé à apparaitre sur le marché et dix ans après, ils sont devenus indispensables pour presque la totalité des citoyens. Le développement grandissant des appareils Mobiles connectés a totalement transformé la société, notamment en ce qui concerne l’accès aux loisirs, l’accès à la connaissance et surtout qu’actuellement, tout peut être dématérialisés : texte, son, image. Ainsi, en l’espace de quelques années, les objets connectés, particulièrement les téléphones portables et les tablettes ont pris une place importante dans le quotidien de chacun et ont également la capacité de remplacer les ordinateurs d’une certaine manière.
Par ailleurs, il faut noter que l’utilisation des différents canaux de communication par les clients peut perturber la cohérence du système d’information et peut engendrer des effets indésirables pouvant limiter l’efficacité de ces évolutions. Le schéma présenté ci-après donne un aperçu de l’utilisation des technologies de l’information et de la communication dans les activités bancaires et leur degré d’accessibilité des informations vis-à-vis des clients.
Figure 7 : Cadre conceptuel proposé par G. P. Huber
Source: Selon Huber, G.P., (1990), « A theory of the effectsofadvanced information technology on organizationnal design, intelligence and decisionmaking » – Academy of Management Review, p.47-71
À travers les TIC, les clients augmentent petit à petit leurs besoins et optent pour de nouvelles formes de comportements. Un comportement client, assez proche de la « selfcarisation », apparaisse également : le consommateur devient alors « consomm’acteur ».
Avec les nouvelles technologies numériques et les objets connectés, les consommateurs peuvent en quelques secondes seulement comparer, lire des avis, et passer d’un site ou d’une application Mobile à l’autre, trouver un service plus complet, une interface. Dans ces conditions, s’assurer de la fidélité d’un client devient complexe. Les entreprises doivent désormais repenser leur modèle opérationnel afin qu’il soit complètement orienté vers la satisfaction et la connaissance client, notamment par l’instauration et le maintien d’un lien direct et personnalisé permanent. Également, pour s’assurer d’une meilleure cohérence dans l’ensemble des entités de l’entreprise, il est impérativement indispensable de repenser la structure organisationnelle, les processus métiers, la chaîne de valeur et, ainsi que les technologies mises en œuvre de l’entreprise.
En se positionnant au sein d’un contexte rétrospectif historique, les activités bancaires se sont depuis longtemps développées sur l’acceptation du risque, notamment le non-remboursement des crédits octroyés ainsi que des intérêts y afférents. De ce fait, les activités bancaires sont considérées comme des activités intrinsèquement porteuses de risques et généralement, ces risques constituent l’essence même du métier des banquiers.
Ainsi, la transformation numérique englobe non seulement les services et, mais également différentes solutions qui aident les entreprises à structurer et à optimiser les interactions avec les clients par le biais des divers canaux numériques. Aucune entreprise, quelle que soit sa taille ou sa performance sur le marché ne peut ignorer ce phénomène de transformation numérique.
Afin d’évaluer efficacement la performance des institutions financières, bon nombre d’auteurs se basent sur la part de marché en la considérant comme un indicateur de performance. Par exemple, Mamoghli et Mabrouk (2010) ont démontré que le développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication a donné aux banques la possibilité de renforcer la fidélité de ses clients et surtout d’attirer de nouveaux clients. Ainsi, elles peuvent optimiser leur position sur le marché en occupant une part de marché de plus en plus importante. Mais qui dit nouveau client, dit nouveau marché et donc risques différents et divers.
L’expansion significative des groupes bancaires d’Afrique subsaharienne s’est accompagnée du développement rapide des innovations financières, notamment les services bancaires mobiles, en particulier avec M-Pesa en Afrique de l’Est. Elle s’est également accompagnée d’évolutions réglementaires : dans de nombreux pays, les régulateurs ont obligé les banques à augmenter régulièrement leurs exigences minimales en termes de fonds propres. Il y a par exemple le Nigéria, où les réformes bancaires ont favorisé le développement régional des banques locales.
Les services financiers numériques ont contribué au développement du secteur financier et à l’inclusion financière en Afrique subsaharienne. La rapidité des diffusions de systèmes tels que M-Pesa au Kenya et dans d’autres pays d’Afrique subsaharienne a permis de faire diminuer les coûts de transaction tout en facilitant les transactions personnelles et en favorisant la montée en puissance des services d’intermédiation financière. À mesure que la taille des transactions diminue, un plus grand nombre d’entités économiques peuvent envoyer des signaux au marché et les suivre, ce qui permet de favoriser le développement de l’industrie financière. En conséquence, l’environnement de la politique monétaire s’améliore.
L’Afrique subsaharienne est un pionnier des services bancaires mobiles. Dans les zones rurales, il n’y a pas d’intermédiaires bancaires traditionnels, surtout dans les zones à faible densité de population, et leurs coûts de service sont généralement élevés. La baisse des coûts de transaction, l’augmentation des capacités d’innovation et la forte croissance du nombre d’utilisateurs mobiles ont contribué à l’essor récent des services bancaires mobiles dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne. En 2014 par exemple, la proportion de personnes disposant de comptes bancaires mobiles a atteint 11 % en Afrique subsaharienne, le ratio le plus élevé au monde.35
Graphique 3 : Nombre d’abonnés à la téléphonie mobile sur la période 1999-2014
Source : Banque européenne d’investissement, « Le secteur bancaire en Afrique subsaharienne Évolutions récentes et inclusion financière numérique », 2016
Le nombre de personnes ayant accès aux services financiers en Afrique subsaharienne a régulièrement augmenté durant ces dernières années (FMI, 2016a). Aujourd’hui, le développement des systèmes de paiement mobile a facilité l’intégration d’une grande partie de la population dans le système financier, en particulier en Afrique de l’Est. La réduction du coût des services donne à la population plus de revenus disponibles, et même s’ils opèrent dans l’économie informelle, ils ont maintenant des solutions fiables pour garder leur argent. Le développement des coopératives d’épargne et de crédit a aussi permis d’améliorer l’inclusion financière. Les succès de l’Afrique de l’Est fournissent de bonnes pratiques qui peuvent être utilisées dans d’autres pays de la région. Une leçon importante tirée de l’expérience de l’Afrique de l’Est est la nécessité d’avoir un environnement réglementaire flexible et favorable, prenant en compte les défis qui doivent être soulevés.
Graphique 4 : Pays d’Afrique subsaharienne : inclusion financière
Source : Finmark Trust, enquête Finscope.2016, p.13
Dans les pays industrialisés, le modèle économique des intermédiaires financiers permet aux banques de collecter des fonds pour la revente. Mais les plus importants sont l’innovation financière (Sahut et Lantz, 2011) et l’avènement de la titrisation du crédit. En effet, le modèle traditionnel reposant sur le concept de « buy and hold » des banques traditionnelles et destiné à leur permettre de conserver leurs crédits en portefeuille a cédé la place au modèle économique « Originate-to-distribute » consistant à revendre les crédits sur les marchés.
C’est de cette manière qu’est né le concept de désintermédiation bancaire dans la littérature des années 1980 (Sahut, 2003). Biacabe et al. (2004) ont été les premiers à tenter de mesurer cette désintermédiation et ont proposé plusieurs définitions. Pour certains, la désintermédiation consiste à remplacer les produits de financement et d’investissement (prêts et dépôts) fournis par les banques par des titres cotés sur les marchés financiers. Avec l’innovation des produits financiers, la croissance de la titrisation et la commercialisation du crédit par la banque sur le marché financier, cette forme de désintermédiation par “produit” a été largement encouragée.
Mais la désintermédiation peut également se définir de manière différente. Les déficits qui se produisaient auparavant par le biais de relations indirectes entre les banques et le processus de financement avec les agents non financiers sont désormais réalisés à travers des relations directes entre les agents. Cette forme non intermédiaire, plutôt qu’un produit qui remplace les banques, va changer son rôle d’intermédiaire. Par conséquent, l’innovation financière a bien participé au phénomène de désintermédiation en proposant de nouveaux produits, et cette innovation semble se poursuivre, notamment avec le développement fulgurant de diverses technologies financières.
En Afrique, la différence de perception quant à l’émergence des Fintechs ainsi que de la banque mobile peut s’expliquer par le fait que son système financier n’est pas identique à ceux du reste du monde, et cela, à plusieurs égards. Dans le continent africain, la désintermédiation est affectée premièrement par l’importante existence d’activités informelles. Asongu (2015) a souligné le rôle de l’intermédiation financière informelle dans la perturbation du système financier. Cet auteur estime que les indicateurs traditionnels de l’intermédiation financière ne parviennent plus à évaluer de manières précises et efficaces les conditions économiques et financières de l’Afrique. Par conséquent, le secteur financier informel doit être inclus dans le système financier du FMI. Pourtant, force et de constater qu’il n’est pas facile d’étudier l’essor des téléphones mobiles et des services bancaires mobiles et leur impact sur les instruments bancaires traditionnels ou encore sur les instruments de politique monétaire sans la prise en compte de ce côté informel du système financier africain.
En outre, il ne faut pas ignorer qu’en termes de développement, le secteur financier africain se trouve également loin derrière les pays industrialisés. Si l’on mentionne le cadre réglementaire bancaire international de Bâle, les pays africains sont sur la phase de la mise en place de Bâle1. Toutefois, à partir de 80, bon nombre de pays africains ont entrepris des réformes majeures dans le secteur financier. La mise en place de ces réformes a été principalement commanditée par le Fonds monétaire international et la Banque mondiale. L’objectif étant d’alléger l’intégration des nouveaux acteurs dans le système financier.
Par ailleurs, même avec la crise de 2008, les banques traditionnelles africaines continuent de bénéficier de la confiance des clients en termes de sécurité et de liquidité. En effet, les banques traditionnelles se présentent toujours pour la population africaine comme un lieu sûr et où l’argent est conservé de manière sécurisée. Malgré la popularité de certaines plateformes et équipements comme Google, Apple ou Facebook, les particuliers hésitent toujours à faire confiance aux entreprises technologiques quant à la gestion de leur argent. Dans les pays développés, les banques traditionnelles disposent en général d’importantes infrastructures ainsi que de plusieurs agences et les Fintechs se présentent juste comme des alternatives digitales face à ces infrastructures. Ce qui n’est pas forcément le cas dans le continent africain par la seule raison que la majorité de la population active n’est pas encore bancarisée (65 % des adultes)36 et cela, pour de nombreuses raisons 37:
- L’infrastructure est faiblement développée comparée à d’autres pays. Par exemple, le nombre de distributeurs automatiques de billets et le nombre de banques servant plus de 100 000 adultes est très faible ;
- Le pourcentage d’adultes qui ont un compte bancaire se situe en dessous de la moyenne mondiale ;
- Les banques ne sont présentes que dans les grandes villes, et par conséquent le financement formel ne peut pas couvrir les populations rurales.
Tableau 7 : Accès aux services bancaires dans le monde
La première raison de la faible bancarisation en Afrique subsaharienne est qu’il n’y a pas suffisamment de fonds à déposer, et la deuxième raison est le problème de proximité. Une situation qui explique le succès de la banque mobile dans le continent.
Nous avons vu que l’open innovation peut permettre aux banques africaines de se développer et d’étendre leur marché en incluant les personnes non bancarisées. Toutefois lorsqu’il s’agit d’entrer en partenariat avec des entreprises concurrentes, c’est-à-dire les FinTechs et les OTM qui proposent des services financiers identiques mais plus innovants, le partenariat se tourne davantage vers une logique de coopétition. C’est sur ce sujet que nous nous focaliserons dans le chapitre suivant.
Dans la littérature de gestion, le comportement hybride comprenant la compétition et la coopération est appelé coopétition. Alors, certains auteurs, comme Le Roy, Frédéric & Sanou, Famara (2014), ont souligné l’importance croissante de la coopétition pour les dynamiques inter-entreprises. Toutefois, les recherches scientifiques sur la question ne sont pas allées beaucoup plus loin que la dénomination (Bengtsson, Maria; kock Sören, (2000). Par conséquent, si d’une part, les faiblesses des approches conventionnelles sont bien connues, d’autre part, la coopétition est un thème sous-recherché qui réclame encore une attention croissante. À la lumière de ses fondements théoriques limités, seule une approche exploratoire est possible.
Le terme coopétition a été inventé par Ray Noorda, fondateur et premier PDG de Novell, et introduit dans la recherche stratégique par Brandenburger et Stuart (1996) et Brandenburger et Nalebuff (1996). Ce terme a été créé dans l’objectif d’élucider l’interaction stratégique entre « coopétiteurs ». Selon Dagnino, et al. (2007), le mot coopétiteur est utilisé à la place de l’expression « fournisseurs, clients et complémentarité » (c’est-à-dire les fabricants de biens complémentaires aux biens produits par l’entreprise). Cette idée suggère que le mot et la notion de coopétition ne sont qu’un simple substitut aux « parties prenantes ».
Figure 8 : Les stratégies de coopétition dans l’environnement concurrentiel des organisations
Source : Saphia Richou (2017). Coopétition en action. Dunod, stratégie d’entreprise. P.10
Le concept de coopétition a été initié dans le cadre des travaux menés en théorie des jeux38. Dans le jargon de la théorie des jeux, il s’agissait de scénarios « gagnant-perdant ». Néanmoins, au milieu des années 90, il est devenu évident que le scénario traditionnel devenait obsolète et que la coopération entre entreprises concurrentes pouvait produire un scénario « gagnant-gagnant ». Le principe était qu’en introduisant la compétition entre les groupes dans la théorie des jeux, il est possible d’induire une coopération au sein des groupes (c’est-à-dire une coopétition). Pourtant, la coopétition n’est qu’une autre forme de collusion pour certains. Ahmed, P.K., et M. Rafiq. (1992) par exemple, considèrent la coopétition comme un « truquage du marché », qui est une réponse interventionniste pour protéger les intérêts des entreprises pendant les périodes de conditions commerciales difficiles. Cependant, d’autres auteurs, comme Albert, S. (1999), soulignent que tous les cas de coopétition ne constituent pas nécessairement une collusion anticoncurrentielle.
Contrairement aux cadres théoriques mentionnés plus haut, qui mettaient en opposition la coopération et la compétition, d’autres auteurs comme Lado et al. (1997) participent significativement à la mise en place d’un nouveau cadre théorique, en prenant en considération le fait que le concept de compétition et de coopération sont des dimensions indépendantes. Dans ce contexte, une entreprise a le choix entre quatre types de stratégies comme celles présentées dans le tableau ci-dessous. Elle peut prendre une position agressive vis-à-vis de ses concurrents et éviter ainsi d’entrer en coopération avec eux. À l’inverse, l’entreprise peut prendre la décision de ne pas adopter un comportement agressif vis-à-vis de ses concurrents et de coopérer avec eux. Par ailleurs, l’entreprise peut également choisir de ne pas être ni agressive ni coopérative, ce qui revient à choisir une stratégie de coexistence. Enfin, l’entreprise peut adopter une stratégie agressive vis-à-vis de ses concurrents, tout en coopérant fortement avec eux.
Tableau 8 : Stratégies vis-à-vis des concurrents
Le premier article académique portant sur la coopétition a été publié par Dowling et al. (1996). Toutefois n’a été que très rarement cité et n’a pas su donner naissance à un courant de recherche. Les premiers travaux académiques portant sur la notion de coopétition et qui seront par la suite repris par plusieurs auteurs sont ceux publiés par Bengtsson et Kock (1999, 2000). Ces chercheurs universitaires ont démontré qu’une entreprise qui se conforme à une stratégie de coopétition peut profiter de deux types d’avantages : des avantages se rapportant à la compétition et des avantages se rapportant à la coopération39. Dans ce contexte, la coopération donna à l’entreprise la possibilité d’avoir accès à de nouvelles ressources, à de nouvelles compétences et connaissances qui lui sont nécessaires, voire indispensables, pour se développer40. En complément, la compétition stimule l’entreprise en la poussant à donner le meilleur d’elle-même, à dépasser le partenaire-concurrent, en introduisant de nouvelles combinaisons productives, en innovant ou en améliorant leurs produit-services, etc.
La coopétition peut se définir comme la coopération et la concurrence simultanées entre entreprises concurrentes. La coopétition fait partie des relations inter-organisationnelles les plus coûteuses41. Cela résulte de la contradiction de la logique selon laquelle la coopétition est basée sur la confiance et le conflit. Dans la coopétition, la confiance est perçue à travers trois dimensions : le calcul (confiance basée sur le calcul), la compréhension (confiance basée sur la connaissance) et l’implication personnelle (confiance basée sur l’identification)42. Par ailleurs, il est possible que ces dimensions changent avec le développement des relations coopétitives. Dans ce contexte, ce sont la confiance et la communauté d’intérêts qui constituent la base d’une coopération efficace. Ainsi, la tendance au contact et aux concessions mutuelles augmente. D’autre part, la rivalité est le résultat de la concurrence pour des ressources hétérogènes limitées.43 La coopération entre concurrents ne signifie pas qu’elle affaiblit leur rivalité. Cela ne fait qu’accroître les effets des relations concurrentielles. Dans ce contexte, le niveau de confiance entre les collaborateurs détermine l’orientation de la rentabilité de l’entreprise.
Le comportement coopétitif est le plus souvent analysé dans le contexte des relations entre entreprises. Des recherches antérieures ont montré l’apparition de flux simultanés de coopération et de concurrence au niveau intra-organisationnel, en particulier dans les sociétés transnationales44 et les réseaux, ainsi que dans la dimension sociale entre les individus45. La coopétition peut également être distinguée horizontalement (au sein d’un même secteur) et verticalement (au sein de la chaîne de valeur).
Figure 9 : Le réseau de valeur
Source : Julien Granata, (2014). Qu’est-ce que la coopétition? Pearson France, p.10
À travers ce réseau de valeurs, nous pouvons distinguer deux formes d’organisation : les compétiteurs et les complémentaires46.
- Les compétiteurs sont des entreprises concurrentes qui mènent des activités ayant comme effet de dévaluer le produit de l’entreprise vis-à-vis des clients ;
- Les complémentaires sont des entreprises concurrentes qui mènent des activités ayant comme effet de valoriser le produit de l’entreprise vis-à-vis des clients.
Avec ces deux types d’organisation, la coopétition se forme à travers l’interaction simultanée de deux formes de relations : des relations de compétition et des relations de coopération. C’est la simultanéité de ces deux relations qui font le succès des entreprises concernées.
Les relations coopétitives entre entreprises sont généralement considérées à travers le prisme des avantages et des coûts généraux. Cependant, l’analyse de la coopération entre concurrents dans les différents domaines de la chaîne de valeur permettra de distinguer l’éventail des avantages et des coûts associés à la coopétition. La durée de la relation est également importante. La coopération compétitive se caractérise par la dynamique diversifiée des relations. Ainsi, il est important d’explorer le lien entre la durée des relations de coopération dans des domaines particuliers ainsi que la taille et la portée des avantages et des coûts associés à ces relations.47
Par ailleurs, il est important de noter que toutes les relations coopétitives ne sont pas forcément identiques, car elles ont chacune leurs propres particularités. Cependant, certains auteurs (Ancarani, Fabio, et Michele Costabile. (2010) mettent l’accent sur une typologie des relations coopétitives sur la base d’un équilibre compétitif / coopératif. Ces auteurs suggèrent que là où il y a plus de coopération que de concurrence, la relation coopérative est dominante; là où la coopération et la concurrence sont à peu près identiques, la relation est une « relation d’égalité » ; et là où il y a plus de concurrence que de coopération, la relation est concurrentielle dominante. Une autre typologie des relations coopétitives, également développée par Bagshaw, Mike, et Caroline Bagshaw (2001), est basée sur la structure de la relation. Deux entreprises qui coopèrent et se font concurrence seraient toutes les deux impliquées dans une relation de « coopétition réciproque ».
Une troisième typologie est proposée par Belderbos, René, Martin Carree, et Boris Lokshin (2012). Lorsqu’une relation inter-entreprise appartient à la catégorie « acheteur-vendeur en concurrence directe », les entreprises concernées sont en concurrence directe dans certains aspects de leurs opérations. Dans le même temps, l’une ou les deux entreprises peuvent également fournir à l’autre un produit (ou service) qui, en pratique, prend souvent la forme de composants. Si une relation inter-entreprise est classée comme étant « acheteur-vendeur en concurrence indirecte », l’une ou les deux entreprises peuvent fournir à l’autre un produit (ou service), mais les entreprises sont également impliquées dans une concurrence qui n’est pas directement liée à leurs produits et services. Dans ce contexte, la relation peut mener à des poursuites judiciaires. La dernière catégorie de relations interentreprises est celle des « partenaires en compétition ». Les relations interentreprises seraient incluses dans cette catégorie si les entreprises étaient impliquées dans une coentreprise, un consortium de recherche ou un accord de licence.
Les entreprises, qui traditionnellement sont concurrentes, coopèrent de plus en plus pour obtenir un avantage concurrentiel. Les avantages spécifiques de la coopération sont plusieurs : la valeur ajoutée, des contacts, une plus grande productivité et une meilleure qualité, l’accès aux matières premières et une réduction des risques. En fin de compte, de telles alliances visent à améliorer les bénéfices des organisations concernées, mais il est important de noter qu’elles devraient également conduire à de meilleurs produits et services pour le consommateur.
Il faut savoir que lorsqu’il y a une relation de coopétition entre deux entreprises et lorsque celles-ci entrent en concurrence, cela peut être avantageux non seulement pour les entreprises, mais aussi pour les consommateurs. En effet, en étant en coopétition, les entreprises peuvent mettre en commun leurs activités de recherche et de développement pour obtenir les récompenses du développement de nouveaux produits tout en ayant la possibilité de proposer aux clients des produits qu’elles ne pourraient pas apporter individuellement ou ne pourraient pas apporter au même prix. En conséquence, il semble raisonnable de supposer que les intérêts tant des entreprises que des clients sont mieux servis par un équilibre coopétitif de concurrence et de coopération. Les relations coopératives et coopétitives ont le potentiel de collusion, mais l’existence d’une collusion réelle doit être déterminée par référence à l’impact sur le consommateur. Lorsque deux entreprises coopèrent et que les besoins des consommateurs ne sont pas pris en compte, il y a collusion. Cependant, là où les entreprises coopèrent non seulement pour leur bénéfice mutuel, mais aussi pour le bien du consommateur, la relation n’est pas collusoire. Dans ce cas, la collaboration « coopétitive » produit une situation «gagnant-gagnant-gagnant».
Figure 10 : Les types d’alliances stratégiques
Source : Volery. T.,Mensik.S.,(1998). «Th e Role of Trustin Creating Effectiveness Alliances : A managers Perspective », Journal of Business Ethics, Vol.17,No.9/10, p.990
Les différentes relations coopétitives qu’une entreprise peut développer peuvent être utilement envisagées au regard de la « valeur nette ». Selon Ancarani, Fabio, et Michele Costabile. (2010), toutes les relations coopétitives peuvent être modélisées pour déterminer la période durant laquelle une entreprise peut tirer de la valeur qui, ensemble, représente son avantage concurrentiel. Ainsi, les « fournisseurs » d’une entreprise fournissent des biens ou des services qui sont utilisés comme intrants pour fournir des biens ou des services en sortie « client ». Lorsque le client obtient des biens et services d’un autre fournisseur, au profit de la première entreprise, l’autre fournisseur est considéré comme un « complément ». Cependant, lorsque les biens et services fournis par un autre fournisseur diminuent la valeur des biens et services de la première entreprise, le fournisseur est alors considéré comme un « concurrent ».
À travers une concurrence et une coopération simultanées, la nature de la relation peut être complexe et peut obliger les entreprises concernées à adopter des rôles contradictoires. Cela conduit souvent à des tensions au sein des entreprises et à des conflits de rôles chez les employés qui doivent être gérés en conséquence. La tension surgit dans de nombreux domaines, mais un domaine particulièrement important est le partage des connaissances et l’apprentissage inter organisationnels, pour lesquels la tension peut en fait affecter la dynamique de l’alliance d’apprentissage. Dans la gestion de la tension concurrentielle / coopérative, Faems, D., et al. (2004) préconisent des alliances stratégiques combinant des avantages distincts pour capitaliser sur les nouvelles opportunités commerciales et qui découlent de la croissance du commerce Internet. Pratiquement, bien que l’intégration de ressources et de capacités fermes pour créer un avantage concurrentiel soit bien documentée dans la littérature sur la gestion stratégique, il est tout à fait possible que la relation fonctionne à l’envers.
L’intérêt accru porté sur les relations coopétitives résulte principalement de la complexité de l’environnement, se traduisant principalement par le développement du phénomène d’hyper concurrence, les processus de globalisation des secteurs et l’avancement technologique, la convergence technologique et les coûts de R&D.48 Dans les situations où l’un de ces trois phénomènes apparaît, les conditions dans lesquelles les entreprises opèrent seront suffisantes pour créer des relations coopétitives. Compte tenu des spécificités des secteurs technologiquement avancés, dans la très grande majorité des cas, le phénomène de susceptibilité à la mondialisation et à l’hyper-concurrence se produira en même temps.
L’analyse des avantages de la coopétition s’inspire non seulement des fondements théoriques, mais aussi des expériences de coopération et des alliances stratégiques (en particulier horizontales)49. La décision de coopération et de concurrence simultanées avec un concurrent est l’une des décisions les plus difficiles auxquelles les dirigeants du monde des affaires moderne sont confrontés. La plupart d’entre eux choisissent ce type de relation en raison des avantages significatifs pouvant être tirés de la coopétition50. D’autres auteurs (Le Roy, F.; Sanou, F.H. (2014) traitent même la coopétition comme une stratégie avec un énorme potentiel de développement pour les entreprises. Compte tenu de la complexité croissante de l’environnement, dans de nombreux cas, la coopétition devient la seule chance de survie et de développement durable de l’entreprise. En d’autres termes, la coopétition semble être la seule solution.
Les entreprises déclarent leur volonté de créer des relations coopétitives pour obtenir des ressources complémentaires, en particulier des ressources non tangibles ou qui ne sont pas disponibles autrement. Des effets de synergie se produisent entre des ressources complémentaires, ce qui rend ces ressources plus précieuses et plus difficiles à imiter pour les autres concurrents51. Luo, Y. (2005).considère même les ressources complémentaires dont disposent les parties comme une condition préalable au succès des relations coopétitives. La coopétition stimule également l’innovation des partenaires et le développement de la technologie.52 Conformément au concept basé sur les ressources, les entreprises ont la volonté de créer des relations coopétitives afin de créer conjointement des actifs immatériels, y compris la capacité de transférer et d’utiliser leurs connaissances, leur coopération et leurs compétences pour accroître l’efficacité de l’organisation. L’échange de connaissances et d’expériences aide également à pénétrer de nouveaux marchés (en particulier ceux qui présentent un risque d’investissement accru) grâce, entre autres, à la réduction des barrières à l’entrée, ainsi qu’à la création de nouveaux produits.
Bien que la coopétition présente de nombreux avantages, certains risques doivent être pris en compte par les entreprises concernées. Plusieurs publications consacrées à ces relations les qualifiaient sous le terme : « coucher avec l’ennemi ». En effet, la nature compétitive des relations coopétitives donne lieu à l’apparition de comportements opportunistes dans le système. Ce type de comportement est plus important que dans le cas des alliances formées avec des organisations non compétitives et d’autres liens de nature hybrides. Un comportement contraire à l’éthique se produit lorsque les entreprises enfreignent les règles du « jeu » du marché. Un faible niveau de confiance devient alors une opportunité de traiter les relations coopétitives en termes de temporalité.53 Les entreprises souhaitent vivement atteindre leurs objectifs dans les plus brefs délais et, une fois les objectifs atteints, elles perdent la volonté de coopérer davantage.
Ces trente dernières années ont été marquées par l’évolution conséquente de la mondialisation engendrant d’importante menace concurrentielle venant de nouveaux acteurs. Pourtant, l’affrontement continu avec la concurrence rend vulnérable la position des entreprises sur le marché. La plupart s’enferment même dans une sphère compétitive destructrice, et même en créant un nouveau marché, la marge de manœuvre reste faible, surtout pour les entreprises qui sont vulnérables financièrement. Ainsi, la durabilité de l’avantage concurrentiel est automatiquement remise en question. Par ailleurs, pour certains auteurs, notamment D’Aveni (1995), une entreprise qui manque d’initiative est plus susceptible d’entrer en faillite. Autrement dit, perturber ses concurrents à travers des actions et des ripostes est la meilleure stratégie plutôt que de faire appel à une forme de coopération. Il s’agit donc de se montrer agressif vis-à-vis des concurrents pour ne leur donner aucune chance de gagner. Dans ce contexte, les entreprises se lancent généralement dans des guerres de prix qui viennent détruire leur valeur ou encore dans la mise en marché de nouvelles générations de produits. Si pour D’Aveni, l’avantage concurrentiel s’obtient par la destruction des concurrents, Porter quant à lui considère que le plus important est la création et le maintien des avantages concurrentiels. C’est notamment pour toutes ces raisons que certaines entreprises se tournent vers la coopétition pour survivre. Pourtant, la littérature en management stratégique a souvent occulté ce concept et le considère comme risqué.
Dans plusieurs études, comme celles de Coy, P. (2006), Cygler, J.; Sroka, W. (2017), d’Ancarani, Fabio, et Michele Costabile. (2010), etc., la coopétition est décrite comme une relation entre deux ou plusieurs entreprises qui œuvrent sur un continuum entre la coopération totale ou la concurrence totale, plutôt que comme des entreprises qui peuvent coopérer dans certaines activités et se faire concurrence dans d’autres. La plupart de ces études reposent sur le paradigme coopératif traditionnel, qui met l’accent sur une structure gagnant-gagnant même si elles reconnaissent que les interdépendances concurrentielles découlent également de structures d’intérêts divergentes. Le paradigme coopératif fait référence au fait que les individus ou les entreprises recherchent des avantages de collaboration pour lesquels la force et le succès d’un acteur donné dépendent de la force et du succès des autres acteurs. Dans cette optique, la partie compétitive de la coopétition est implicitement une chose négative qui doit être réduite ou équilibrée pour rendre possibles les résultats positifs de la coopétition. La vision de la coopération au sein des entreprises et entre les individus apparaît donc comme intrinsèquement négative dans de nombreuses études.
Figure 11 : La stratégie de l’excellence prospective ou le dépassement des clivages entre concurrence et coopération par une vision collective à long terme et partagée
Source : Saphia Richou (2017). Coopétition en action. Dunod, stratégie d’entreprise, p.16
Si d’un point de vue général, la coopération a comme effet d’engendrer de nouveaux concurrents, elle peut alors intensifier la rivalité entre les entreprises concernées. Il est même possible que le partenaire d’aujourd’hui devient un important concurrent dans le futur lorsqu’il aura obtenu un plus grand avantage concurrentiel à travers la coopération. Les travaux menés par Porter insistent sur l’analyse collective sans prêter attention à l’avantage concurrentiel qui peut être obtenu collectivement à travers la coopération. Toutefois dans la pratique, force est de constater que les entreprises sont capables d’évoluer avec d’autres dans une logique de coopération. Plusieurs travaux et recherches ont été menés sur les alliances stratégiques des entreprises dont celui mené par Ham-mel, doz et Prahalad54. Ces auteurs soulignent le fait que la coopération avec des entreprises concurrentes peuvent engendrer une nouvelle forme de rivalité. Même si nombreux auteurs prônent l’affrontement comme seule source d’avantages concurrentiels, d’autres considèrent que la coopération est la base de la compétitivité. C’est notamment de ce point de vue que sont nés les fondements de la notion de coopération inter-organisationnelle.
La coopération est nécessaire à la fois sur l’individu et au niveau de l’organisation pour reconnaître que les interdépendances tant concurrentielles que coopératives peuvent influencer les actions. En outre, il faut reconnaître que la combinaison des dépendances concurrentielles et coopératives peut être avantageuse pour les interactions et les résultats. Un tel raisonnement est au cœur de la coopétition. La tension dynamique inhérente à la relation de coopération ne peut se développer que lorsque les acteurs sont impliqués simultanément dans les deux parties d’une interaction.
La tâche la plus importante pour le développement d’un nouveau paradigme sur la coopétition est, selon Saphia Richou (2017), d’obtenir et de suivre une définition plus claire. L’accent mis sur la coopétition et la concurrence entre les acteurs, mais divisée entre les activités, facilite analytiquement l’interaction coopérative et compétitive dans une relation de coopétition et permet de comprendre la manière dont l’interaction entre ces activités donne lieu à des tensions. Une telle approche reconnaît la nature dynamique de la coopétition et sa portée particulière à plusieurs niveaux.
La coopétition est une relation double et paradoxale, combinant simultanément la collaboration pour créer de la valeur et la concurrence pour s’approprier une part plus importante de la valeur créée conjointement Julien Granata, (2014). Ainsi, le paradoxe généré par la simultanéité de la concurrence et de la coopération représente l’essence même du concept de coopération. L’idée de combiner collaboration et concurrence au lieu de les opposer est nouvelle dans la littérature. La théorie économique considère que la collaboration est synonyme de collusion et n’est pas bonne pour le bien-être des parties concernées. Donc, une concurrence efficace implique l’absence de collaboration entre concurrents. À l’inverse, la coopétition considère que la collaboration entre concurrents pourrait être bonne pour le consommateur si et seulement si cette collaboration ne signifie pas la fin de la concurrence. La collaboration entre concurrents est préférable à la concurrence pure tant que les concurrents continuent à se faire concurrence.
Une stratégie d’alliance définit et communique les objectifs et les domaines des relations extérieures d’une entreprise. Il a été constaté qu’une stratégie d’alliance améliore le succès des accords interentreprises (Gnyawali, D.R.; Park, B.-J.R. (2009). La stratégie permet de mieux orienter l’accord vers des objectifs déterminés et de les communiquer aux cadres et au personnel travaillant dans le cadre de la coopération. Elle peut améliorer l’effort en décomposant les objectifs en tâches interentreprises. Donc, une stratégie d’alliance communiquée verticalement et horizontalement permet de mieux comprendre les objectifs et les activités de la coopétition. Une stratégie d’alliance est importante pour les coopétitions qui présentent des risques élevés d’opportunisme, de malentendu et de mauvaise répartition entre les concurrents qui collaborent. Dans ce contexte, les entreprises utilisant une stratégie d’alliance trouveront qu’il sera plus facile de sélectionner des partenaires de manière ciblée et de configurer la structure de la coopération pour plus d’efficacité.
Tableau 9 : Le management de la coopétition en quatre figures possibles
Source : Saphia Richou (2017). Coopétition en action. Dunod, stratégie d’entreprise, p.18
En combinant simultanément deux comportements opposés (collaboration et concurrence), la coopétition peut être comprise comme une stratégie paradoxale (Lado, A. A., N. G. Boyd, et S. C. Hanlon. (1997). D’autant plus que la combinaison de comportements de collaboration et de compétition contribue à l’émergence de tensions à différents niveaux : inter-organisationnel, intra-organisationnel et inter-individuel. Les tensions entre coopération et concurrence sont dues au conflit entre la génération de bénéfices partagés et la capture de bénéfices privés Le Roy, Frédéric & Sanou, Famara. (2014).
Tableau 10 : Niveaux de coopétition, facteurs, processus et résultats
Niveau de coopétition | Eléments conducteurs | Processus |
Individuel | Traits culturels Objectifs individuels Morale et valeurs individuelles Personnalité | Dans la coopération, les individus s’efforcent d’amener les autres à être efficaces, à se faire confiance et à compter les uns sur les autres, ce qui conduit à des perspectives et des intérêts communs. Dans la compétition, les individus s’interfèrent activement les uns des autres et le manque de confiance limite l’échange d’informations et de ressources. Un équilibre dynamique entre coopération et concurrence est toutefois possible. |
Organisation | Objectifs départementaux Valeurs organisationnelles Structures des tâches Procédures d’équipe | En coopération, les systèmes organisationnels s’accordent sur le fait que la réalisation des objectifs aide les équipes et les services à réussir ensemble, et les systèmes sont conçus pour l’interdépendance et le partage des ressources. La concurrence facilite les processus visant à retenir les informations et les idées entre les départements et les sous-unités dans la poursuite de leurs propres objectifs et à entraver la progression des autres. Les organisations doivent trouver un équilibre entre les incitations à coopérer et à se faire concurrence afin de garantir à la fois la communication et l’efficacité. |
Inter organisationnel | Partage et acquisition de ressources Réduction des avantages des conditions structurelles d’un concurrent | Orientés vers la coopération, les processus de décision sont accommodants et visent à la résolution mutuelle des problèmes, où les membres de l’organisation sont attentifs et sensibles aux intérêts de l’autre. La concurrence implique un comportement moins équitable, plus partial et moins honnête, ce qui fait que les membres de la dyade s’efforcent de satisfaire leurs propres intérêts. Une relation de coopération fructueuse nécessite un équilibre des pouvoirs, mais peut être difficile à maintenir sur de longues périodes. |
Réseau | Promotion des intérêts communs et mise en commun des ressources pour des objectifs communs Structure et position du réseau Changements sociaux, culturels et réglementaires Avancées technologiques et complexité | Dans la coopération, la dépendance est basée sur la confiance. En cas de concurrence, la dépendance est liée à la force et à la position du réseau d’un acteur. Les conflits sont peu nombreux dans la coopération, mais ils surviennent fréquemment dans la compétition. Il existe également des normes claires en matière de coopération. En cas de concurrence, il existe des normes invisibles et une distance entre les acteurs. Il est difficile d’équilibrer la coopération pour que toutes les parties en tirent profit, en raison de la grande complexité de la situation. |
Source : Cygler, J.; Sroka, W. (2017). Coopetition disadvantages: The case of the high tech companies. Eng. Econ. p.30
La coopetition combine les ressources d’entreprises qui sont en concurrence et collaborent en même temps sur un même marché. Cette stratégie a ainsi comme effet d’améliorer l’accès aux ressources et aux marchés, en particulier à la connaissance et à l’apprentissage (Saphia Richou (2017). La coopétition peut réduire les coûts et améliorer le partage des risques, notamment dans la R&D field (Raza-Ullah, Tatbeeq, Maria Bengtsson, et Sören Kock. (2014). La coopétition est censée apporter des avantages plus importants et réciproques à chaque entreprise impliquée dans la relation. Toutefois, la coopétition comporte plusieurs risques. En général, l’entreprise initiatrice est confrontée à des risques d’opportunisme, de fuite de connaissances externes, de course à l’apprentissage, de malentendu, de mauvaise allocation des ressources, d’intentions stratégiques et de partenaires inefficaces (Pellegrin-Boucher E., Le Roy F., Gurau C. (2018).
Le Roy, Frédéric, Anne-Sophie Fernandez et Paul Chiambaretto (2018) suggèrent que lorsque des entreprises concurrentes se réunissent dans le cadre d’une coopération, il peut y avoir plusieurs contradictions : intérêts économiques divergents, différences de stratégies et d’approches et différences d’identités. Bien que des objectifs communs rassemblent des partenaires, ils peuvent avoir des motivations économiques différentes derrière cette relation. Les partenaires peuvent avoir des modèles mentaux différents concernant l’avenir de l’industrie, ce qui les prédispose à des stratégies et à des investissements différents. La différence d’identité est liée à la perception qu’ont les partenaires d’eux-mêmes, qui sont distincts les uns des autres. Généralement, les dualités sont des forces non spécifiques aux partenaires qui existent au sein d’un ensemble unifié et qui découlent de l’engagement d’activités de nature opposée. Nemeh, A.et Yami, S. (2016) ont défini trois dualités critiques dans les relations de coopétition : création de valeur contre appropriation de valeur, séparation contre intégration et rapprochement contre lien.
- La création de valeur par rapport à l’appropriation de la valeur est le sujet le plus fréquemment abordé dans la littérature sur la ccopétition. La distribution de la valeur créée devient critique, car les partenaires ont les mêmes objectifs concurrentiels. Un aspect connexe de cette dualité est le besoin simultané de partager les connaissances pour la création de valeur commune et de protéger les compétences et les ressources essentielles afin de réaliser davantage de bénéfices ;
- La séparation par rapport à l’intégration concerne le traitement de situations incompatibles. Les entreprises peuvent chercher à séparer, dans le temps ou dans l’espace, les activités de coopération et de concurrence ou à développer une perspective plus intégrative en les conciliant. Et même si la séparation existe, l’intégration est toujours nécessaire pour relier les différentes parties entre elles ;
- Jeter des ponts plutôt que de créer des liens signifie essentiellement de travailler en étroite collaboration avec un partenaire concurrent afin de créer de la valeur, mais sans devenir trop proche ni trop vulnérable. Un certain niveau de liaison est nécessaire pour créer mutuellement de la valeur, mais si la liaison devient trop dominante, elle risque d’être surdimensionnée.
Les contradictions et les dualités sont des caractéristiques importantes du paradoxe qui créent des tensions, nécessitant des stratégies pour y répondre (Pellegrin-Boucher E., Le Roy F., Gurau C. (2018). Un paradoxe décrit la manière dont deux entreprises interagissent avec des logiques contradictoires, où la tension est la conséquence de cette interaction et qui est vécue à différents niveaux. Le Roy, Frédéric & Sanou, Famara (2014) ont théorisé que la tension résulte de l’évaluation cognitive du paradoxe. La tension consiste à maintenir simultanément des émotions positives et négatives, ce que l’on appelle « l’ambivalence émotionnelle ». Dans les relations de coopétition, les émotions positives résultent d’une évaluation de l’intérêt collectif, et suscitent donc des sentiments de confiance. En revanche, les émotions négatives résultent d’une évaluation de l’intérêt personnel qui font ressortir des sentiments de doute, d’avidité pour avoir une plus grande part de la valeur créée, de méfiance pour retenir des informations clés, et de peur du comportement opportuniste de l’autre.
La littérature suggère que la gestion du paradoxe nécessite le développement de capacités adaptées aux tensions (Pellegrin-Boucher E., Le Roy F., Gurau C. (2018). Geraudel, M.; Salvetat, D. (2014) ont suggéré que les entreprises compétitives peuvent faire face à une situation paradoxale en développant un ensemble de capacités, et ont défini la “capacité de gestion des paradoxes”, qui fait référence à la capacité d’une entreprise à percevoir et à analyser les questions et les défis clés dans les relations entre entreprises.
Certains auteurs (Peng, Tzu-Ju Ann, et Mike Bourne (2009) ont souligné la nécessité de gérer les tensions issues de la coopération. La plupart des recherches existantes sur la tension dans la coopération se concentrent sur les types de tension potentiels tels que les rôles, la connaissance, le pouvoir, la dépendance et l’opportunisme, qui se produisent à différents niveaux. La gestion des tensions à différents niveaux des organisations semble essentielle pour que les entreprises comprennent quel type d’approche est nécessaire pour traiter chaque niveau de tension. Dans ce contexte, Fernandez, A.-S.; Le Roy, F. (2014) ont proposé de distinguer trois niveaux de tensions de coopération : inter organisationnel, intra organisationnel et interindividuel.
Tableau 11 : Les sources de tension dans la coopétition
Difficulté à intégrer la coopération et la concurrence | Individuel |
Source : Fernandez, A.-S.; Le Roy, F. (2014)
Dans les relations de coopétition, les entreprises luttent non seulement contre le dilemme du travail en commun et de la création de valeur, mais également de la tentation d’être opportunistes et de s’approprier d’une plus grande part de cette valeur commune. Une tension apparaît lorsqu’une ou les deux parties tentent de s’approprier la valeur créée précédemment. Une forme de tension dans les relations de coopétition concerne les rôles Ancarani, Fabio, et Michele Costabile. (2010). Cela provient généralement de la tension entre l’orientation coopérative et compétitive impliquant des personnes ayant des opinions différentes quant à l’apparition et à l’appropriation de nouvelles responsabilités.
Un autre type de tension dans les relations de coopétition est dû aux risques de confidentialité et aux risques d’imitation technologique (Cygler, J.; Sroka, W. (2017). En effet, même si les partenaires mettent en commun leurs ressources stratégiques pour atteindre leurs objectifs, ils doivent protéger leurs compétences de base, car ils restent des concurrents. Ainsi, la protection des connaissances peut rendre tendue une relation commerciale, surtout lorsque celle-ci est peu compétitive, car elles constituent une source d’avantages concurrentiels. Il faut tout de même noter que l’aspect coopératif du partage des connaissances est lié à l’utilisation collective des connaissances partagées pour poursuivre des intérêts communs.
L’aspect concurrentiel, quant à lui, fait référence à l’utilisation des connaissances partagées afin d’obtenir des gains privés en tentant de surpasser les partenaires (Cygler, J.; Sroka, W. (2017). Ici, l’un des principaux objectifs est d’absorber autant de connaissances que possible ; mais pour atteindre les objectifs communs, il faut partager les connaissances et mettre en place des mécanismes de protection appropriés. Dans ce contexte, le dilemme entre ce qu’il faut partager et ce qu’il faut protéger a un impact sur la dynamique de la coopétition et constitue une source de tension majeure entre les partenaires. Ainsi, ils doivent continuellement décider des informations à partager et à protéger pour assurer le succès de la collaboration. Les connaissances partagées peuvent être utilisées dans des scénarios compétitifs futurs et entrainées des risques d’opportunisme croissant (Coy, P. Sleeping with the enemy. (2006). Des tensions peuvent également survenir en cas de différence de stratégies et d’objectifs pour les deux parties concernées (Cygler, J.; Sroka, W. (2017). En effet, les partenaires pourraient avoir des priorités stratégiques différentes dans le cadre de la coopétition et ces différences pourraient entraîner des désaccords sur l’allocation des ressources. En outre, les partenaires peuvent avoir des intentions stratégiques différentes et des priorités cachées, comme imiter le savoir-faire de l’autre partie par exemple.
Par ailleurs, il faut noter que le partage des ressources et des activités peut également créer une situation opportuniste où l’on renonce à ses propres intérêts pour exploiter ceux d’une partie plus faible (Faems, D. et al. 2004). Toutefois, tout comportement opportuniste peut impliquer des connaissances et un marché, provoquer des tensions, des confrontations et une importante perte de confiance. Mais la coopétition ne signifie pas forcément que les intérêts privés des entreprises perdent de leur importance et qu’elles passent d’un comportement axé sur leur intérêt personnel à un comportement axé sur l’intérêt collectif (Fernandez et al., 2014).
Selon des auteurs comme Geraudel, M.; Salvetat, D. (2014), le pouvoir et la dépendance sont également des sources de conflit dans une relation de coopétition. Ils expliquent qu’une des parties peut utiliser son pouvoir (technique, politique, financier, etc.) pour forcer l’autre partie à agir contrairement à son intérêt. En outre, le pouvoir et la dépendance peuvent être fonction de la taille des entreprises, car une petite entreprise peut devenir dépendante d’une plus grande, plus puissante et disposant de plus de ressources. Un déséquilibre dans le pouvoir et la dépendance peut donc engendrer des tensions dans les relations de coopération (Cygler, J.; Sroka, W. (2017).
Il y a en général deux sources principales de tensions de coopération au niveau intra-organisationnel : au niveau des unités opérationnelles et au niveau des employés (Cygler, J.; Sroka, W. (2017). Au niveau des unités opérationnelles, les cadres impliqués dans des activités internes entrent en concurrence avec leurs collègues impliqués dans des activités de coopération en termes d’allocation de ressources. La deuxième source de tension concerne les employés impliqués dans des activités avec des concurrents. Les salariés d’entreprises en concurrence depuis longtemps auraient des difficultés à se percevoir comme des partenaires (Gnyawali & Park, 2011).
Dans le secteur bancaire actuel, force est de constater que la numérisation change la donne. Elle brouille les frontières entre les secteurs industriels, abaisse les barrières à l’entrée et crée des ponts. Alors que de nouveaux partenariats composés d’acteurs de différents secteurs industriels commencent à se former autour du client pour offrir non seulement des produits, mais aussi des solutions et des “expériences”, l’innovation pose les bases qui permettront aux entreprises de prospérer à l’ère du numérique et de créer des économies dynamiques et compétitives. Les partenariats entre divers acteurs d’un écosystème mondial peuvent aider les entreprises à exploiter le pouvoir des entrepreneurs et des innovateurs pour introduire de nouvelles idées dans leurs activités, et les start-ups à tirer parti des forces des acteurs plus importants pour mettre plus rapidement de nouvelles solutions sur le marché. Dans un pays où les perspectives économiques sont incertaines, les technologies numériques offrent une plateforme de collaboration qui peut accroître la portée et l’impact de l’innovation dans les entreprises et dans l’ensemble de l’économie.
L’indice de collaboration numérique d’Accenture montre que la collaboration numérique peut apporter une augmentation de 1,5 billion de dollars à la production économique mondiale55. En Afrique subsaharienne, elle pourrait contribuer à augmenter le PIB de près de 12 milliards de dollars, élevant ainsi le PIB actuel de plus de 3 %. Le ralentissement de la croissance économique de l’Afrique subsaharienne depuis 2012 met en évidence des contraintes structurelles majeures. Le taux de chômage dépasse les 25 % et le chômage des jeunes atteint presque 50 %. Les relations de travail et la prestation de services restent un défi, la pénurie de compétences freine la croissance intérieure, et l’insuffisance de l’approvisionnement en électricité et la faiblesse générale de la confiance des entreprises freinent les investissements du secteur privé56.
Par ailleurs, en ce qui concerne le secteur financier, il faut dire que c’est un domaine très réglementé avec plusieurs contraintes et dans lequel l’innovation est assez difficile à mettre en place. Toutefois, force est de constater que malgré les contraintes réglementaires, bon nombre d’innovations financières ont quant même pu être mises en place. Cela étant, car les innovations donnent aux banques la possibilité d’accroitre leur profit à travers la diminution des coûts de transaction, de communication, etc. et surtout de faire face à la concurrence surtout face à la prolifération des Fintechs. Les innovations financières ont été propulsées particulièrement par les nouvelles technologies de l’information et de la communication.
Depuis ces dix dernières années, les banques ont de plus en plus fait appel à l’open innovation ou innovation ouverte. Comme indiqué précédemment, l’open innovation se base généralement sur des logiques partenariales. Une technique qui a été premièrement développée par des entreprises non-financières57. Dans le cadre de l’open innovation, les entreprises développent des partenariats avec d’autres acteurs soit pour mettre en place un processus d’innovation en son sein (outside-in) soit pour partager leurs idées avec des partenaires extérieurs (inside-out). Pour le cas de l’outside-in, il y a par exemple le cas de BNP Paribas qui a développé un partenariat avec le groupe Orange pour pouvoir proposer un nouveau service de paiement et de transfert d’argent via les téléphones mobiles. La majorité des techniques d’open innovation mises en place par les institutions financières concernent principalement les activités des banques de détail, même si elles peuvent s’étendre aux autres types de banques : banques commerciales et banque d’investissement.
Par ailleurs, selon Meriem Haouat Asli (2003), il est très rare que les banques collaborent entre elles en termes d’open d’innovation. Dans la plupart des cas, l’innovation ouverte s’opère à travers une logique de coopération avec les clients ou avec des acteurs qui ne sont pas dans le domaine bancaire. Si les banques sont réticentes à mettre en place une relation de coopétition, c’est pour se protéger des risques de perte de contrôle sur la relation avec leurs clients.58 D’autant plus que bien avant les innovations financières, les banques s’exposent déjà aux risques systémiques, notamment l’incertitude liée aux remboursements des dépôts. Une situation qui rend les banques particulièrement vulnérables surtout en cas d’asymétries d’information. C’est de ces différentes particularités que les banques sont strictement réglementées. Pourtant, les banques sont confrontées à un environnement très changeant leur poussant à se consolider davantage. Le dernier grand changement se rapporte à l’arrivée des nouvelles technologies de l’information et de la communication qui, non seulement, a touché le domaine professionnel, mais également et surtout les habitudes et les comportements des consommateurs. Tous ces changements poussent les banques à s’ouvrir petit à petit aux idées nouvelles venant de l’extérieur et à ne plus se refermer sur elles-mêmes.
En outre, bien que l’innovation ouverte commence à se répandre dans le secteur financier des pays développés, et que de plus en plus de recherches se focalisent sur le sujet, ce n’est pas encore le cas pour le secteur bancaire africain qui commence juste à comprendre les enjeux de l’écosystème de l’open innovation. Depuis des années, et plus particulièrement à partir des années 1980, plusieurs pays africains ont mis en œuvre des réformes du secteur financier. Dans une large mesure, ces réformes visaient à restructurer et à privatiser les banques contrôlées par l’État dans le cadre des politiques d’ajustement structurel (PAS) du FMI et de la Banque mondiale, mais elles ont été accompagnées de politiques auxiliaires qui ont assoupli les restrictions à l’entrée et à la sortie, les contrôles des intérêts et des capitaux, ainsi que la révision des cadres de surveillance et de réglementation du secteur bancaire.
Selon les études de l’OCDE en 2008, l’attrait à l’open innovation et son adoption sont fonction des particularités et de l’environnement technologique des entreprises et du pays dans lequel elles sont présentes. Ainsi, plusieurs facteurs (quatre) peuvent conditionner la mise en place de l’open innovation au sein de l’entreprise 59:
- Les conditions d’opportunité : ce premier facteur se rapporte à la capacité ou à l’incapacité d’une entreprise à innover, qu’il s’agisse d’innovation incrémentale ou d’innovation de rupture ;
- Les conditions d’appropriabilité : ce second facteur reflète le niveau de protection et de maitrise des avantages obtenus à travers l’innovation ;
- Les conditions de cumulativité : d’après (Cohen, Levin, 1989), ce troisième facteur est lié à la capacité des innovations actuelles à servir de base aux futures innovations ;
- Les compétences de l’entreprise sur différentes disciplines : ce quatrième facteur se rapporte aux connaissances et au savoir-faire dont dispose l’entreprise dans la mise en œuvre et la transmission de l’innovation.
Ces différents facteurs orientent les actions stratégiques des entreprises qui souhaitent innover, plus particulièrement les entreprises non bancaires. Selon Schumpeter, le caractère hybride des innovations financières rend difficile l’adoption de l’innovation. En effet, la majorité des innovations entamées dans les banques sont issues d’innovations de marché et d’innovations de procédés, conduisant à des innovations de produit. Cette situation amène les banques à envisager des innovations ouvertes en faisant appel à des partenariats. L’objectif étant principalement d’être informées de tous les changements qui se produisent dans environnement externe et pouvant les affecter directement ou indirectement : évolution des habitudes des clients, changements dans le fonctionnement du marché financier, progrès technologiques et informatiques, etc.
Que ce soit dans les banques africaines ou dans les banques des pays développés, les innovations entamées sont souvent des innovations incrémentales à travers lesquels les institutions peuvent opter pour une transformation radicale en fonction de l’évolution de l’environnement60. C’est par exemple le cas lors de l’adoption des équipements informatiques. L’adoption de ces équipements a conduit les institutions financières à diffuser l’innovation dans les différents services. Cette diffusion d’innovation technologique pouvait mener à des innovations de produits conduisant les banques à chercher des partenariats.
Figure 12 : L’innovation ouverte dans le secteur bancaire
Source : Fasnacht (2009a)
Selon ce modèle proposé par Fasnacht (2009a), les banques considèrent l’open innovation à la fois comme une source d’avantages concurrentiels et un grand défi. L’innovation ouverte remplace les approches d’innovation de première étape qui se concentrent sur des objectifs étroits et sont menées par des entreprises et des incubateurs par une forme de collaboration plus ouverte et plus équitable impliquant de multiples partenaires. Toutefois, les entreprises en Afrique subsaharienne, grandes et petites, ne font que commencer à faire leurs premiers pas dans cette voie. La collaboration – à l’intérieur et à l’extérieur des “quatre murs” d’une entreprise – accélère l’innovation, qui est un moteur de croissance pour les entreprises et les économies. Aujourd’hui, des industries entières sont en concurrence avec une nouvelle ligue d’innovateurs numériques qui passent rapidement de l’idéation au déploiement. Les start-ups et les grandes entreprises reconnaissent qu’elles ont beaucoup à gagner d’une collaboration plus étroite : les grandes entreprises ressentent une pression pour innover et devenir plus entreprenantes.
Cette situation a entraîné le développement rapide de nouveaux écosystèmes de partenaires issus d’industries et de régions géographiques disparates, qui travaillent ensemble pour fournir des solutions innovantes qui répondent aux besoins des consommateurs numériques. Toutefois, les entreprises d’Afrique subsaharienne ne participent pas encore à l’innovation à ce niveau. Pour ce faire, elles doivent s’aligner sur les éléments essentiels d’une collaboration plus numérique, comme l’adoption des meilleures pratiques pour s’engager avec un nouvel écosystème de partenaires. Cela créera les bases qui leur permettront de faire un bond en avant dans l’innovation ouverte à l’avenir.
Le type de collaboration qui réunit différents types d’entreprises ayant des cultures et des structures organisationnelles différentes n’est pas toujours facile. Pour les grandes entreprises, le défi est aggravé par un manque de clarté en ce qui concerne les objectifs fondamentaux et la stratégie de collaboration. Les grandes entreprises ne savent pas non plus comment intégrer leurs anciens systèmes et leurs recherches cloisonnées dans une économie collaborative. De même, les entrepreneurs ne savent souvent pas comment se mettre en rapport avec les grandes entreprises et présenter leurs propositions.
La majorité des pays du G20 devancent l’Afrique subsaharienne dans ces deux domaines. L’Afrique subsaharienne fait ses premiers pas dans cette voie. Les grandes entreprises en Afrique subsaharienne ont lancé des projets d’entreprise et des programmes d’incubation ou d’accélération, mais ces initiatives n’en sont encore qu’à leurs débuts, les entreprises expérimentant pour découvrir ce qui fonctionne sur le marché local. À l’heure actuelle, l’innovation conjointe est rare, tout comme la collaboration au sein d’un écosystème plus large d’acteurs qui se concentrent moins sur des objectifs spécifiques et davantage sur la génération, l’expérimentation et l’apprentissage continus d’idées.
Toutefois, en matière de technologie et d’innovation, il faut dire que l’Afrique continue de s’améliorer et, dans certains cas, a fait un bond en avant, notamment dans le domaine des services bancaires mobiles. Toutefois, le continent est à la traîne derrière l’OCDE et l’Amérique latine et les Caraïbes en ce qui concerne d’autres dimensions de l’innovation bancaire, telles que les paiements électroniques.
Pour ce qui est le cas de l’Afrique subsaharienne, c’est un continent qui fait face à d’importants problèmes d’une part et un grand potentiel d’autre part. Il reste de grands défis à relever pour poursuivre son développement vers la transformation numérique et les innovations financières. La pauvreté est omniprésente, le développement humain est faible et la croissance n’est pas inclusive. La région est confrontée à un énorme déficit d’infrastructures, tandis que le climat d’investissement et l’environnement réglementaire sont relativement pauvres. La gouvernance et les capacités institutionnelles présentent encore des faiblesses conséquentes.
La croissance soutenue en Afrique subsaharienne a conduit en partie à un approfondissement financier, tandis que le développement du secteur financier joue également un rôle de soutien important dans le processus de croissance. Pourtant, les systèmes financiers et bancaires de l’Afrique subsaharienne restent sous-développés. Les systèmes bancaires de la région sont très concentrés et généralement inefficaces en matière d’innovation financière ; elles se caractérisent par leur petite taille et leur faible niveau stratégique, et la concurrence est encore limitée.
En termes d’innovation ouverte, il est important de prendre en compte le transfert de propriété intellectuelle. En effet, dans leurs efforts de développer de nouvelles technologies, les entreprises s’appuient de plus en plus sur des connaissances externes pour compléter leur base de connaissances interne. En conséquence, un élément important de « l’innovation ouverte » est l’utilisation d’entrées et de sorties intentionnelles de connaissances pour accélérer l’innovation interne61. Malgré la croissance importante des collaborations en matière de R&D et de l’innovation ouverte, de nombreuses questions importantes restent encore inexplorées – en raison également de la complexité de ces efforts de collaboration et de la nature des ressources et des connaissances sous-jacentes. Par exemple, bien qu’il existe un paradoxe inhérent causé par la tension naturelle entre le partage et la protection des connaissances, peu d’attention a été accordée à la manière dont les entreprises concernées peuvent protéger leurs compétences technologiques tout en collaborant avec d’autres organisations et à la manière dont les entreprises créent et captent de la valeur à une époque d’innovation ouverte où les organisations innovantes sont fortement dépendantes les unes des autres62.
Dans ce contexte, le champ de tension du partage et de la protection des connaissances fait référence aux forces, et à leurs interdépendances, qui affectent l’étendue et la méthode avec laquelle les connaissances sont partagées et protégées lorsque deux ou plusieurs organisations s’engagent dans un projet d’innovation collaborative. Les accords de collaboration en général et le partage des connaissances en particulier ont été explorés à partir de diverses perspectives théoriques comme celles de Bogers, M. (2010) ou encore de Chesbrough, H.W. (2006). Dans une perspective basée sur les ressources, les collaborations peuvent être utilisées pour exploiter les complémentarités de connaissances et d’expériences. Par conséquent, les motivations de la collaboration et de la sélection des partenaires sont en général l’exploitation de la complémentarité des ressources et les économies d’échelle, l’obtention de nouveaux marchés à faible coût, la gestion des coûts et des risques, la collusion tacite, le renforcement des capacités et l’apprentissage.
- Risques de transfert d’informations confidentielles et d’imitation technologique et des risques réglementaires
Les avantages d’un partenariat avec des Fintechs sont une réalité tant du point de vue de la génération de revenus que de la réduction des coûts63. Toutefois, la principale préoccupation est que le fait de travailler avec les Fintechs oblige les banques traditionnelles à gérer soigneusement les défis opérationnels, réglementaires et économiques. La menace qui pèse sur les modèles d’exploitation traditionnels des banques africaines est grave et peut entraîner des effets néfastes sur la stabilité systémique, la protection des consommateurs et la concurrence sur le marché64. Ainsi, bien que les banques africaines, à travers la coopétition avec les Fintechs, puissent proposer des solutions innovantes axées sur la technologie, certains auteurs comme Sullivan (2017) estiment qu’il faut commencer par se développer en interne plutôt que de s’associer immédiatement avec des entreprises innovantes. L’une des principales raisons à cela est le fait que les banques conventionnelles sont fortement réglementées et ne peuvent pas changer facilement ; elles n’ont pas les mêmes agilités que les Fintechs65.
Du point de vue réglementaire, d’autres préoccupations sont également à prendre en compte. En effet, avec l’augmentation du nombre de Fintechs sur le marché financier, l’environnement réglementaire risque de changer substantiellement. Actuellement, il n’y a pas encore de cadre réglementaire formel régissant les Fintechs qui s’associent avec des banques traditionnelles africaines, ce qui soulève des implications de risque systémique, d’autant plus que plusieurs pays l’ont reconnu66. Le FMI, par exemple, reconnaît l’importance de surveiller les Fintechs afin d’identifier les risques émergents et la manière dont l’environnement réglementaire devrait les modifier et s’y adapter (FMI, 2018). Pour ce dernier, la question n’est pas de savoir si des partenariats auront lieu ou non, mais plutôt quand et sous quelle forme ils se produiront. Il existe des preuves suggérant que, bien que l’absence de partenariat puisse freiner le développement des banques traditionnelles, certains auteurs67, reconnaissent que si cela a lui, il doit être fait avec prudence dans l’intérêt de la stabilité financière africaine68.
Un bon système de paiement est indispensable pour réduire les coûts des échanges de biens et de services dans l’économie, mais la promotion de l’inclusion et du développement financier implique d’aller au-delà des paiements. Il existe en Afrique une large demande pour de nombreux autres services financiers peu développés, comme la fourniture de plusieurs types de services de crédit, les paiements transfrontaliers, diverses formes de produits d’investissement et les services d’assurance. Les entreprises FinTechs tirent parti de leur expérience et de leur large base de clients pour fournir d’autres services financiers aux consommateurs. Avec une large base de clients et une plateforme technologique mature, certains fournisseurs de paiement mobile peuvent fournir efficacement de nouveaux services financiers. En effet actuellement, des formes avancées de FinTechs, centrées sur les prêts plutôt que sur les paiements, commencent à se développer dans toute l’Afrique subsaharienne alors que la microfinance a toujours dominé en tant que source alternative de financement. Ces dernières années, les FinTechs ont facilité la croissance de plusieurs types de financement participatif et de prêts entre particuliers. Comme pour les paiements mobiles, l’Afrique de l’Est est en tête de la région dans l’utilisation de ces sources de financement alternatives comme nous le présente la figure ci-dessous.
Figure 13 : Répartition régionale de la finance alternative en Afrique subsaharienne
Source : Andresen (2017)
Les menaces des Fintech sur le marché financier ont amené certaines banques africaines à envisager des partenariats formels avec elles, ce qui n’était initialement pas l’option privilégiée étant donné la complexité de tel projet69. Cependant, bien que les banques aient réalisé que les Fintech pouvaient éroder et menacer le marché bancaire, elles ont la capacité de développer ensemble des produits innovants pour mieux satisfaire les clients70. De plus, si les Fintechs sont agiles et innovantes, les banques disposent de grands réseaux de distribution, d’une fidélité à la marque et de la confiance des consommateurs. De l’approfondissement financier au développement économique, il est plus qu’évident que les FinTechs sont en train de devenir un catalyseur technologique dans le continent africain. Elles contribuent, non seulement à améliorer l’inclusion financière, mais elles se présentent aussi comme des catalyseurs d’innovations.
Ainsi, bien que les différents risques ci-dessus confirment la complexité pour les banques traditionnelles de travailler avec les Fintechs, il y a aussi des avantages qui sont plus ou moins évidents. Étant donné que le secteur bancaire est l’un des plus développés au monde, il fonctionne dans un environnement caractérisé par des déséquilibres socio-économiques, notamment des niveaux élevés de chômage, de pauvreté et d’inégalité des revenus. C’est notamment le cas pour le secteur bancaire africain. D’autre part, les banques africaines ont une responsabilité sociale implicite d’agir en tant que facteurs de réduction des déséquilibres socio-économiques. Par conséquent, bien que les Fintech, sous ses différentes formes, offrent la possibilité de répondre à ces problèmes de déséquilibres, les banques africaines ont, dans une certaine mesure, pris du retard par rapport aux autres pays en matière de partenariat. Mais une question nécessite d’être soulevée : si les fintechs arrivent à résoudre les problèmes de déséquilibre du secteur financier africain, est-ce que les banques traditionnelles seront-elles capables de conserver cette évolution : que ce soit en termes d’adaptation technologique ou de développement socio-économique ? La réponse à cette question peut permettre aux banques de mettre en place une stratégie de développement et de partenariat adaptée avec les fintechs.
L’association des services financiers aux nouvelles technologies ne date pas d’hier. La première référence remonte dans les années 1970 et faisait référence à la technologie financière, combinant expertise bancaire et techniques modernes des sciences de gestion et de l’informatique71. Les entreprises Fintech fournissent au secteur bancaire des écosystèmes financiers numériques capables de collecter de grandes quantités de données et de réaliser des économies d’échelle et une participation multipartite72. Ce faisant, certaines banques ont réalisé ces dernières années, non seulement l’importance de ces écosystèmes, mais aussi la nécessité de s’engager et de s’associer avec ces entreprises73.
Dans les chapitres précédents, nous avons vu l’importance de l’open innovation et de la coopétition entre les banques traditionnelles, les Fintechs et les OTM. Toutefois, bien que ces deux notions semblent suffire pour soutenir l’idée d’un partenariat entre ces trois acteurs, nous constatons qu’un troisième élément expliquant les bases même de la coopétition dans le développement de services innovants nécessite d’être mobilisé : l’écosystème d’affaires.
Alors que l’activité économique passe d’agents économiques autonomes à interconnectés formant une économie de réseau telle qu’elle est aujourd’hui, la recherche sur la stratégie d’entreprise évolue ou comprend plus de dimensions pour mieux comprendre l’interaction continue et le comportement des organisations interconnectées. En effet, force est de constater que le paradigme d’entreprises atomistes et qui sont en concurrence les unes contre les autres dans un marché impersonnel devient de moins en moins adéquat dans un monde où les entreprises sont intégrées dans des réseaux de relations sociales, professionnelles et d’échange avec d’autres acteurs économiques.
Actuellement, l’environnement des affaires n’est plus considéré comme sans visage, atomistique et au-delà de l’influence de l’organisation, comme le suppose la doctrine actuelle de gestion stratégique (BEN LETAIFA S., RABEAU Y (2012), car l’évolution rapide de la technologie, l’ère de l’information et le niveau accru de mondialisation modifient considérablement le paysage concurrentiel, c’est-à-dire la nature et le rythme de la concurrence entre les entreprises. Ces différents changements influencent significativement la nature de la recherche en gestion stratégique et nécessite la prise en compte de multiples paradigmes théoriques qui fournissent un équilibre entre les explications internes et externes des relations complexes dans le nouveau paysage concurrentiel. CORNELISSEN J.P. (2005) souligne que, dans l’économie de réseau, la compétitivité de l’entreprise ne dépend plus seulement de sa compétence interne, mais aussi et surtout de sa capacité à interagir avec son environnement. Le fait de ne pas établir et maintenir cette compétence externe limitera la flexibilité stratégique de l’entreprise à ses ressources internes.
Ainsi, compte tenu du rythme croissant des marchés actuels et de la complexité des technologies qui nécessitent des réseaux d’acteurs interconnectés, les entreprises devraient être en mesure d’utiliser efficacement leurs relations avec leurs clients, partenaires ou concurrents. Cela ne peut être obtenu qu’en comprenant ces modèles commerciaux interconnectés et en comprenant les facteurs et les mécanismes qui régissent ces réseaux. Alors que la recherche stratégique passe des explications individualistes et atomistiques à des compréhensions plus relationnelles, contextuelles et systémiques, l’étude de la gestion stratégique dans une perspective de réseau est devenue un enjeu majeur DAIDJ N (2011).
Dans les études de réseau, il y a eu des discussions sur le statut ontologique des organisations de réseau (Ben Haj Youssef, A et J. Ouziel. 2002). Une discussion similaire peut s’appliquer aux écosystèmes d’entreprise: «L’écosystème d’entreprise est-il une métaphore d’un réseau d’entreprise ou une description d’une forme organisationnelle plus grande qu’un réseau d’entreprise?»
Moore (1993; 1996a) considère un écosystème d’affaires comme une perspective permettant de comprendre le fonctionnement d’une communauté économique. Il appelle une communauté économique un écosystème d’affaires et suggère que ce terme remplace le terme industrie. Moore commence par définir un écosystème d’entreprise comme un objet et, sur la base de cet objet, développe le cadre stratégique approprié pour analyser l’élaboration de la stratégie. un écosystème d’entreprise tel que proposé par Moore comprend plus que le réseau (ou l’entreprise étendue dans la terminologie de Moore).
Tableau 12 : Quelques définitions de l’écosystème d’affaires selon différents auteurs
L’écosystème d’affaires est contrôlé par un mandant qui délègue à ses mandants certaines contributions complémentaires pour réaliser l’activité stratégique. Cela correspond au réseau centralisé de KOENIG, G. (2012), où le centre stratégique réunit autour de lui un petit nombre de partenaires importants, défini comme le système de ressources qu’une entreprise centrale peut mobiliser, concevoir, contrôler et animer pour proposer une offre compétitive à ses clients. La prééminence de cette entreprise centrale tient à son accès privilégié à une ou plusieurs ressources clés. Le terme système est utilisé pour mettre en évidence le fait qu’une partie des ressources mobilisées n’appartient pas à l’entreprise centrale mais aux partenaires qui ont été enrôlés.
Les développeurs d’écosystèmes d’entreprises ont un rôle important, ils ne veulent pas dépendre uniquement du changement, mais apportent le plus d’aide possible à l’expérimentation économique LOILIER, T., MALHERBE, M. (2012). Ainsi, de ces points de vue, le but des stratèges des écosystèmes d’affaires est de manipuler de manière prévisible les règles d’assemblage des écosystèmes. KOENIG, G. (2012), propose un cycle d’apprentissage dirigé pour anticiper ce qui est impliqué dans un nouvel écosystème commercial émergent. Le cycle d’apprentissage dirigé est un moyen accéléré d’expérimenter la création de valeur économique consistant en: de nouvelles idées, des actions et des expérimentations, en réalisant de la valeur pour les clients et les investisseurs, et enfin, en reflétant ce qui a été créé. Ainsi, il s’agit d’un moyen accéléré de comprendre les possibilités de création de valeur au sein de l’écosystème à travers des ensembles de relations mutuelles et auto-renforçantes afin de réaliser d’éventuelles règles d’assemblage de l’écosystème. L’auteur conclut dans son article de recherche sur les actifs intellectuels dans les écosystèmes commerciaux qu’une clé pour soutenir un écosystème commercial est d’investir de manière significative dans les relations commerciales.
Figure 14 : Constitution et développement d’un écosystème d’affaires
Source : Estelle P.B & Gaël G. (2004)
Selon Amel AttouretThierryBurger-Helmchen (20104) et leur proposition de structure d’écosystème d’entreprise, une clé de voûte peut créer un nouvel écosystème d’entreprise, par exemple, grâce à des plateformes, des processus et des actifs puissants partagés au sein de l’écosystème. La clé de voûte systématise la création de valeur dans un grand réseau en créant des leviers opérationnels, qui sont une série d’actifs pouvant être mis à l’échelle et partagés par un large réseau de partenaires commerciaux. La création efficace d’un levier d’exploitation permet à une clé de voûte de générer suffisamment de valeur à partager au sein de l’écosystème afin de maintenir la santé de l’écosystème dans son ensemble.
Dans son livre, KOENIG, G. (2012), explique l’idée de base de la perspective de l’écosystème commercial dans l’élaboration de stratégies. Il s’agit d’un guide simple permettant aux entreprises de comprendre le système économique qui évolue autour d’elles et de trouver des moyens d’y contribuer. Il souligne que dans une économie en constante évolution, ce qu’une entreprise fait n’est pas aussi important que la manière dont ses capacités sont liées à ce que font les autres. L’élaboration de stratégies implique d’avoir une conscience de la situation dans son ensemble et de trouver des moyens d’y jouer un rôle.
Il est suggéré par KOENIG, G. (2012) que la perspective de l’écosystème d’affaires étend la gestion stratégique traditionnelle et les approches de réseau dans le sens où une entreprise ne doit pas être considérée comme membre d’un seul secteur, mais comme faisant partie d’un écosystème commercial qui traverse une variété d’industries.
Tableau 13 : Élargissement de la portée de la gestion stratégique
Source : (Moore, 1996a)
Une manière très concrète d’établir un nouvel écosystème d’entreprise est de commencer par un ensemble d’options stratégiques. Un article de recherche de MILES,R.E.,MILES,G.et SNOW,C.C.(2006) suggère un ensemble d’options stratégiques dans une perspective commerciale et technologique pour réussir à devenir un nouveau leader de plate-forme. Les actions commerciales à prendre en compte sont un problème essentiel pour de nombreux acteurs du secteur, créant et préservant les incitations des compléments à contribuer et à innover, en protégeant les principales sources de revenus et de bénéfices et en maintenant des coûts de basculement élevés vers des plates-formes concurrentes.
Mettre en place un écosystème métier, c’est en effet préciser les options stratégiques et les mettre en action. De plus, la mise en œuvre de la stratégie et surtout son affinement se poursuit pendant toute la durée de vie de l’écosystème d’affaire. Il est possible de diviser les options stratégiques en un ensemble d’options stratégiques de base, d’options stratégiques pour la promesse de l’écosystème et d’options stratégiques pour la gestion de l’écosystème.
Malgré l’existence de plusieurs éléments qui soulignent les limites se référençant à la biologie, il s’avère très intéressant de procéder à une comparaison entre les écosystèmes d’affaires avec les d’autres organisations comme le cluster. Cette comparaison a permis d’identifier les spécificités ainsi que les similitudes entre les deux. La plupart du temps, les écosystèmes sont perçus comme réseaux (OCDE, 2008). De nombreux travaux de recherche comme celui de Peltoniemi (2004) a proposé trois modèles comprenant écosystèmes, clusters et value networks. Le chercheur a procédé à la comparaison de ces derniers en se basant sur cinq critères : contrôle, concept d’industrie, transmission et management de connaissances, relations coopétitives et dimension géographique.
Tableau 14 : Réseau de valeur et écosystème
- La dimension géographique
La dimension géographique figure parmi les meilleurs arguments, mis en avant de façon systématique pour apporter des éclaircissements concernant la spécificité des écosystèmes. En effet, les écosystèmes s’affranchissent de la notion de territoire. Selon Gueguen, « un écosystème d’affaires s’apparenterait à un cluster « a-territorialisé », sans la dimension de concentration géographique » (2008, p. 4). Pour mettre en place un réseau, concentrer différentes activités sur un seul emplacement n’est pas une condition sinequanone. Les travaux de recherche de Largier et al. (2008) concernant les clusters mondiaux mettent en avant de nouvelles acceptions du concept de cluster : une acception économique accompagnée par un aspect sectoriel, une acception relationnelle « qui s’appuie sur la mise en réseau des acteurs, la proximité géographique est alors très variable » (p. 13) et une acception territoriale. Ces mêmes auteurs insistent sur le fait qu’il ne faut pas enfermer « le cluster dans ses limites régionales : les entreprises acquièrent et continueront d’acquérir certaines compétences scientifiques et technologiques rares ou complémentaires à l’échelle mondiale, autrement dit à l’extérieur de la région » (Largier et al., 2008, p. 135).
- L’émergence de relations coopétitives
De nombreux auteurs considèrent l’écosystème comme étant l’unique mode d’organisation se basant sur la coopétition. Parmi ces derniers, on peut citer Moore (1993) qui affirme que le phénomène de coopétition est indissociable des écosystèmes. Il existe également plusieurs articles du XXIème siècle qui mettent l’accent sur cette spécificité (Gueguen et Isckia, 2009 ; Pellegrin- Boucher et Gueguen, 2005). « Les logiques de coopération et de compétition sont ancrées dans la «culture» des écosystèmes d’affaires et constituent l’une de ses dynamiques fondatrices » (Pellegrin-Boucher et Geguen, 2004, p. 14). Plusieurs travaux de recherche (Bagshaw et Bagshaw, 2001 ; Dagnino et Padula, 2007 ; Dowling et al., 1996 ; Gnyawali et Madhavan, 2001 ; Gulati, 1998 ; Gulati et al., 2000 ; Hakansson et Ford, 2002 ; Lado et al., 1997 ; Nalebuff et Brandenburger, 1996) concernant l’essor de la coopétition, une situation durant laquelle de nombreuses entreprises coopèrent et se rivalisent entre elles (Bengtsson et Kock, 2003), ne font aucune mention de l’écosystème (Daidj, 2010a). Le cluster veut donc se servir des avantages, mais aussi des vertus de la collaboration et de concurrence entre les entreprises (Raines, 2001). Ce genre de situation est également présent dans les relations qu’entretiennent les acteurs appartenant à un même cluster. En effet, cela permet de stimuler le processus d’innovation.
- Le concept d’industrie
La disparition de la notion de filière et celle de l’industrie figure parmi les arguments les plus avancés pour donner une description claire et précise aux écosystèmes. De nombreux auteurs comme Moore (1996) pense que faire une analyse sur la base des industries est totalement inutile à cause de l’évolution des technologies de l’information et de la communication. Les frontières qui séparent les industries deviennent alors floues, voire inexistantes. Le terme écosystème d’affaires vient même remplacer celui de l’industrie (Moore, 1996 ; Moore et Curry, 1996).
Actuellement, les exemples en matière d’écosystèmes sont de plus en plus nombreux et la plupart du temps, ils se réfèrent soit au secteur de l’informatique, soit à celui de la téléphonie mobile (Gueguen, 2008). Gueguen et Torrès (2004) ont ainsi mené une étude portant sur l’écosystème des deux systèmes d’exploitation : Linux et Windows. Selon ces auteurs, les deux systèmes d’exploitation correspondent « deux écosystèmes d’affaires frontalement concurrents car substituables bien que fortement différents dans leurs organisations (Stanley, 1999 ; Torrès-Blay, 2000). En effet, les deux systèmes d’exploitation sont censés satisfaire un même type de besoin : la coordination entre les différentes applications logicielles et le matériel informatique permettant de faire fonctionner un ordinateur. Il s’agit d’écosystèmes d’affaires car dans les deux cas, cela va concerner un rassemblement d’entreprises et d’acteurs provenant de secteurs d’activités différents, liés de façon formelle ou non et qui ont tous intérêt à promouvoir leurs standards technologiques respectifs » (Gueguen et Torrès, 2004, p. 235).
- Le management et le transfert de connaissances
Durant le processus d’innovation, le partage des connaissances joue un rôle déterminant. En effet, il faut qu’il y ait de l’interaction entre tous les acteurs pour que le processus d’innovation en question puisse se mettre en œuvre. Cependant, ce n’est guère un caractère spécifique aux écosystèmes. Dans les clusters, le transfert d’informations et de connaissances, qu’il soit formel ou non sont facilités. Cela favorise la vulgarisation des innovations.
Le transfert des informations et des connaissances est indissociable du processus de l’innovation. Même si l’innovation et les écosystèmes sont étroitement liés dans certaines littératures, il faut quand même essayer de savoir s’il s’agit de processus incrémentaux ou d’une innovation radicale au cas où les enjeux sont différents pour les acteurs. Cela leur permettra de prendre une décision sur les stratégies à adopter. Ce questionnement fait également référencement aux différences entre les stades concurrentiel et pré-concurrentiel, évoquées dans les années 80 pour les clusters, mais aussi pour de nombreuses formes de coopération concernant le R&D (Hacklisch, 1987). Plusieurs comportements considérés comme coopératifs émergent durant les phases « amont » et d’autres ressemblant à la rivalité naissent à mesure que l’on se rapproche du marché. Ainsi, on peut passer d’une simple coopération entre différents acteurs durant la première phase à un nombre infime d’acteurs à la phase finale.
- Le contrôle
La notion de contrôle n’a jamais été présentée de façon plus explicite. Dans les écosystèmes, le contrôle ne s’est jamais centralisé malgré le fait qu’il y ait un leader au sein de l’organisation. En effet, le leader a pour tâche de diriger et de coordonner les activités des entreprises du système. Il n’est donc pas question d’exercer un contrôle ou toutes formes d’autorité, quelles qu’elles soient. Comme énoncés avec les réseaux, les relations ne sont pas forcément présentes au sein d’un mode coercitif et hiérarchisé, elles peuvent se trouver aussi au centre du système. Ce qui ramène aux critères mentionnés précédemment. De plus, aucune entité ne contrôle les clusters puisque ce sont des systèmes de relations sociales, mais aussi économiques entre des partenaires très innovants.
Selon Iansiti et Levien (2004), il existe quatre catégories d’acteurs dans un écosystème : niche players ou acteurs de niche, hub landlords ou centres d’affaires, dominators ou dominateurs et enfin les keystones ou les entreprises pivot. Contrairement aux dominators, les keystones ne se battent pas pour avoir le contrôle de l’ensemble du réseau, ils cherchent plutôt à acquérir des positions sur quelques axes stratégiques.
Les entreprises pivot jouent un rôle majeur puisque c’est sur elles que reposent l’écosystème d’affaires. Ces firmes pivot ont une grande influence sur le bon déroulement du processus de co-évolution. L’évolution de ces entreprises conditionne en effet l’évolution des autres entreprises comprises dans l’écosystème. Selon Ronteau (2009, p. 201), « elles permettent, par leur vision et leurs capacités relationnelles, de mettre sur pied un nouveau réseau de valeur [et elles] captent une part importante de cette même valeur (value dominators au sens de Iansiti et Levien, 2004). »
Est-il possible de mettre en évidence l’existence des entreprises pivot dans une autre forme organisationnelle en réseau? La réponse à cette question est plutôt positive puisqu’on peut se rendre compte de l’existence de ces entreprises dans les clusters. Une étude menée sur les clusters américains datant de 2008 (Alcimed, 2008) met en exergue l’importance des deux leaders, des moteurs pour toute la filière industrielle : technologie pour Microsoft et aéronautique pour Boeing. De même, l’arrivée de nouveaux acteurs devenus des leaders ont permis à plusieurs clusters d’évoluer, de gravir des échelons par rapport à leur position initiale. Dans le rapport figure le cas de la Silicon Valley qui « loin d’être figée sur sa thématique d’origine, a su évoluer au gré des cycles d’innovations (suite à l’implosion des dotcoms) pour attirer des chercheurs de renommée internationale et des entreprises leaders. Après l’électronique, l’informatique et l’Internet, les biotechnologies et les nanotechnologies, la « Silicon Valley Version 5.0 » s’engage vers les technologies propres, nouveau pivot de sa stratégie » (Alcimed, 2008, p. 18).
L’écosystème tire sa racine de la théorie des réseaux. Gummesson (2008) stipule que la puissance de la théorie des réseaux fait référence à sa double fonction. En premier, c’est à la fois une technique de représentation et une théorie destinée à expliquer des phénomènes relationnels. Cependant, on peut définir l’écosystème comme étant une grande structure qui rassemble tous les réseaux existants en une seule ou plusieurs industries. Comme vision alternative, on peut donc proposer la métaphore biologique. Cette dernière permet l’intégration de la complexité, mais surtout facilite l’alignement avec toutes sortes de mutations, qu’elles soient écologiques, socio-économiques ou encore politiques, des changements qui conditionnent le marketing relationnel et tout le monde des affaires.
Avec ses postulats ontologiques, l’écosystème peut augmenter la performance du marketing relationnel. C’est en effet une philosophie et une grande structure que toutes les organisations veulent avoir. Toutefois, le marketing relationnel ne peut se matérialiser tant que les systèmes d’échange mis en place n’offrent pas une perspective de collaboration, plus de confiance, des échanges sociaux, plus d’engagements, etc. Les deux auteurs, Allaire et Firsirotu (2003) insistent sur le fait qu’il doit y avoir de la cohérence entre les individus, la structure ainsi que la culture pour qu’une organisation puisse avancer dans la bonne direction. Le marketing relationnel ne pourra donc intégrer la stratégie de l’entreprise sauf s’il se met en harmonie avec la culture relationnelle, qui elle aussi doit se mettre en harmonie avec la mentalité des individus et avec la structure organisationnelle. La philosophie relationnelle doit donc voir ses reflets dans les structures des acteurs socio-économiques qui font parties de l’écosystème.
Généralement, les firmes pivot se servent des stratégies de plate-forme pour pouvoir bénéficier des apports d’autres acteurs appartenant au réseau. Effectivement, le plus novateur des aspects de l’écosystème est indissociable de la notion de plate-forme. Plusieurs industries se soumettent à cette logique de plate-forme (Daidj et Isckia, 2009). Iansiti et Levien (2004) l’illustrent comme suit: “Whether we are talking about payment methods or about software, keystone strategies demand the efficient sharing of value within a dispersed ecosystem of organizations. The mechanism for this sharing is usually embodied in platforms such as Wal-Mart’s Retail Link, TSMC’s design tools and libraries, Li& Fung’s supply chain system, or Microsoft’s.NET”. Toutes entreprises disposant de ce genre de plates-formes sont considérés comme des acteurs clés puisqu’elles favorisent non seulement la création de valeur, elles assurent également la coordination des acteurs.
Selon de nombreux auteurs, une plate-forme se compose de logiciels ou de modules physiques, reliés par des interfaces (Gawer et Cusumano, 2002 ; Gawer et Cusumano, 2008 ; Baldwin et Clark, 2000). Les plates-formes jouent un rôle majeur puisqu’elles donnent accès aux ressources. De la nature de ces plates-formes, qu’elle soit fermée ou ouverte, dépend la création de valeur au sein de l’écosystème. Pour la nature ouverte des plates-formes, la conception se base sur une utilisation de standards, à la fois public et ouvert, qui facilitent l’interaction ainsi que complémentarité entre deux ou plusieurs plates-formes différentes. Pour la seconde nature, la conception repose sur une utilisation d’outils spécifiques, qui limitent, voire, interdisent la compatibilité entre deux ou plusieurs plates-formes. En guise d’exemple, on peut citer les cas de l’écosystème mobile qui oppose le système d’exploitation mobile Android de Google à celui d’Apple (iOS).
Figure 15 : Evolution des formes d’organisation en réseau : du cluster à l’écosystème
Source : DAIDJ N. (2011).
C’est uniquement à travers ces plates-formes que l’on peut mener une analyse de la mutation des formes d’organisation jusqu’à l’apparition des écosystèmes. La figure ci-dessus montre très bien que la place des plates-formes se trouve au centre des clusters et de l’écosystème (cf. figure 1). Le cas de RIM, Research in Motion, cluster crée en 1984, regroupant plusieurs acteurs publics et privés témoigne de l’évolution des formes réticulaires (Carayannopoulos, 2007 ; Lyer et Davenport, 2008). Constitué dans les années 50, Research in motion est un cluster de Waterloo. Le développement de la plate-forme du géant de la téléphonie américain BlackBerry a permis à ce cluster TIC de Waterloo de rassembler plusieurs acteurs apprtenant à différentes secteurs.
Les pratiques d’innovation, dites ouvertes, se sont développées de manière progressive avant l’émergence de nouvelles stratégies considérées comme « coopétitives », notamment pour les opérateurs dans les années 2000. De ce fait, si le concept de plate-forme ramène à d’autres éléments plus techniques, il est à noter que ce concept intègre aussi une autre dimension fondamentale, la dimension relationnelle. “In general becoming a platform leader requires a compelling vision of the future as well as the ability to create a vibrant ecosystem by evangelizing a business model that works both for the platform-leader wannabe and potential partners”. (Gawer et Cusunamo, 2008, p. 35). Toutes les pratiques relationnelles adoptées par les entreprises pivot avec ses partenaires se retrouvent donc au sein de l’écosystème.
Pour les relations de type dyadiques, la perspective des réseaux publics et ouverts est perçue comme une toile de fond. Certains auteurs qui se sont penchés sur le sujet du relationnel dans l’écosystème d’innovation s’alignent sur l’idée que c’est une perspective écosystémique. Dans ses travaux de recherche, Gummesson (2008) pense qu’il est nécessaire d’intégrer une nouvelle vision systémique permettant de rassembler les intérêts de tout le réseau d’acteurs. De nombreux facteurs justifient cette perspective. Parmi ces derniers, on peut citer l’application des TIC, l’instabilité des industries et la globalisation des marchés (Payne, Ballantyne et Christopher, 2005). Cette idée de poursuivre les intérêts découle en effet de la théorie des parties prenantes. L’inexistence de définitions plus concises pour la théorie, mais aussi pour « les parties prenantes » (Polonsky et al., 2003, p. 351), permet l’émergence de nouvelles perspectives (Payne, Ballantyne et Christopher, 2005). La première perspective cherche à améliorer la performance corporative tandis que la seconde cherche à prioriser le bien-être social et minimiser les risques liés au processus d’échange. Outre le fait qu’elles soient opposées, ces deux perspectives issues de la théorie des parties prenantes sont aussi irréconciliables. Cependant, grâce au marketing relationnel qui prône une relation gagnant-gagnant pour les deux parties, les deux perspectives citées précédemment peuvent quand même se rencontrer (Payne, Ballantyne et Christopher, 2005). Le marketing relationnel possède en effet de nombreuses capacités, notamment celle d’opter pour une approche balancée du concept client ou celui des parties prenantes.
Le relationnel avec la coopétition résultant de l’innovation ouverte est la dernière étape qu’il faut entreprendre dans le marketing relationnel. Or, peu nombreuses sont les études menées concernant la littérature marketing. La plupart des travaux de recherche en management se sont en effet penchés sur ce phénomène et évoquent une certaine « mort de la compétition» (Moore, 1996). Ce n’est pas la mort de la compétition proprement dit, mais plus la mort de la compétition traditionnelle au profit de deux choses : compétition et coopération, autrement dit, la coopétition. Une nouvelle forme de marketing relationnel avec le concurrent prend donc forme. Une firme évoluant dans le contexte actuel, dans le monde d’aujourd’hui, un monde considéré comme réseauté, doit posséder des écosystèmes pour concurrencer d’autres écosystèmes possédant les mêmes produits et services qu’elle propose. De même, pour d’autres produits et autres services, la firme en question peut avoir d’autres écosystèmes, autrement dit d’autres collaborateurs, qui sont des concurrents directs dans d’autres secteurs. Pour ces autres produits, l’écosystème risque donc de rivaliser avec d’autres écosystèmes.
La coopétition et l’écostratégie figurent parmi les paradigmes décrivant de façon plus concise la logique coopérative stratégique similaire. Ces deux paradigmes mettent en avant un contexte dans lequel la coopération se trouve dans une situation de compétition. Pour pouvoir distinguer l’écostratégie de la coopétition, il faut axer les recherches dans le niveau d’application des stratégies respectives. L’écostratégie se réfère à une stratégie macroscopique basée sur l’équilibre des forces, une stratégie dite écosystémique et la coopétition se focalise plus sur les relations microscopiques qu’entretiennent les compétiteurs. L’écostratégie résulte donc de nombreuses relations dyadiques, qu’elles soient non coopétitives ou coopétitives dans un écosystème.
L’écostratégie qui vient de l’association de deux mots : écologie et stratégie se focalise sur l’équilibre des forces. Selon Jolm Nash, détenteur de Prix Nobel, l’équilibre ne serait atteint sauf si les joueurs, acteurs d’un marché donné agissent de façon optimale et qu’ils pensent que les autres acteurs puissent prendre les meilleures décisions (Chakravorti, 2004). Cet équilibre résulte des comportements de toutes les parties prenantes de l’écosystème. L’écostratégie, stratégie macroscopique de l’écosystème est la somme de toutes les stratégies que les acteurs déploient dans certaines situations. En effet, les nombreuses situations, qu’elles soient de coopétition ou non dans l’écosystème ramènent toujours à un équilibre d’écostratégie. La figure 2 ci-dessous montre qu’il existe plusieurs relations coopétitives au sein d’un écosystème (de CU2 à C n-lIn) et elles ont pour rôle de relier les entreprises entre elles (de El à En). Autrement dit, c’est l’ensemble de toutes les relations qui constitue l’écostratégie. Comme un tissu organique, l’écosystème subsiste grâce aux interactions de l’écosystème, de l’entreprise élargie et celle du cœur de métier et son évolution dépend entièrement de la dynamique de tous les membres. Les relations gagnant-gagnant pourront donc perdurer du moment que les coopétiteurs valorisent les normes éthiques de l’écosystème. Malgré le coût élevé des défis de management et celui de la complexité, les réseaux doivent toujours fonctionner comme un indispensable écosystème dans lequel on éjecte toutes formes d’opportunités. Le terme écostratégie considérant l’écologie comme stratégie désigne également la stratégie globale de l’écosystème (Iansiti et Levien, 2004).
Figure 16 : Écostratégie et coopétition : deux niveaux d’application
Source : Iansiti et Levien, (2004)
La FinTech englobe non seulement la transformation technologique de la finance grâce aux services financiers numériques, mais aussi la numérisation et la datafication des marchés financiers mondiaux, l’émergence de nouvelles start-up FinTech dans le monde et, plus récemment, l’émergence de plates-formes technologiques géantes. La FinTech n’est pas un phénomène passager car elle a le potentiel de transformer les marchés, conduisant à une contestabilité et une concurrence accrue avec les principaux acteurs du marché.
Dans le même temps, on prend de plus en plus conscience de l’importance des capacités réglementaires pour le développement des écosystèmes FinTech. Par exemple, pour réglementer les déploiements innovants sur les marchés, certains pays africains comme le Kenya ou la Tanzanie, mettent en œuvre des approches réglementaires proportionnées et adoptent une méthodologie « tester et apprendre »74. Ces approches peuvent être les précurseurs du « bac à sable réglementaire » pour les FinTech.
- Le potentiel des fintechs dans l’inclusion financière
Les pays du monde entier accordent de plus en plus d’attention à la transformation numérique des services financiers. Certains pays favorisent l’inclusion financière, tandis que d’autres répondent à la demande croissante du public pour des services financiers plus diversifiés et une meilleure expérience. Les startups technologiques comprennent les entreprises actives dans le secteur des technologies financières, qui fournissent des produits et services financiers avec les technologies de l’information et de la communication (TIC). La Fintech reconstruit les modèles commerciaux traditionnels des entreprises grâce à des logiciels et algorithmes innovants, des chaînes de valeur basées sur des plates-formes informatiques interactives, l’intelligence artificielle et le big data.
L’inclusion financière est vitale pour améliorer les moyens de subsistance des pauvres et des défavorisés. Fournir aux gens un accès aux services financiers, tels que les paiements, l’épargne, l’assurance et le crédit, peut les aider à gérer leurs obligations financières et à bâtir un meilleur avenir, tout en soutenant la croissance économique générale, le développement et la réduction de la pauvreté75.
Il existe différentes applications pouvant être offertes par les technologies FinTech susceptibles de faire progresser l’inclusion financière, notamment :
- Avec l’aide de diverses technologies, les paiements peuvent être plus transparents, plus efficaces et les transactions plus sécurisées ;
- Une notation de crédit innovante et une plus grande segmentation et développement des produits grâce à l’utilisation de Big Data ;
- Utilisation de solutions d’identité numérique pour rendre le processus d’intégration et la vérification des transactions du client plus rapides et plus efficaces ;
- Amélioration du respect des normes mondiales de stabilité et d’intégrité financières et amélioration de l’efficacité de la supervision nationale ;
- Améliorer l’efficacité opérationnelle en adoptant la technologie du cloud computing dans le secteur financier.
Le parapluie FinTech couvre les services financiers numériques allant de l’argent mobile au financement participatif, aux envois de fonds transfrontaliers et aux processus numériques. À mesure qu’un marché intérieur mûrit, les entreprises de technologie financière espèrent de plus en plus se développer à l’échelle régionale ou internationale. Cependant, lorsqu’elles pénètrent sur de nouveaux marchés, les entreprises de technologie financière peuvent avoir des difficultés à s’adapter aux nouvelles réglementations gouvernementales et aux différentes dynamiques de marché.
La FinTech a le potentiel de dégrouper les fonctions de base du secteur bancaire tout en apportant un nouveau paradigme dans lequel la technologie de l’information est le moteur de l’innovation dans le secteur financier. La FinTech est présentée comme une innovation révolutionnaire capable de secouer les marchés financiers traditionnels, étant viable pour discuter de divers modèles commerciaux et types d’investissement FinTech.
Ce système d’intégration des fintechs dans l’écosystème bancaire peut être schématisé comme suit :
Dans ce contexte, la plate-forme numérique représente le nœud de pont (interface) qui peut connecter la technologie financière, la banque et les clients dans l’écosystème des intermédiations financières. La théorie multi-réseaux peut être utilisée pour expliquer l’écosystème à l’aide d’intelligence artificielle qui représentent une recherche interdisciplinaire de pointe.
Parti 2 : Analyse de la perception des modalités de la collaborativité par les acteurs : Banques, Finishs, OTM
Chapitre I : Désign de la recherche et Posture épistémologique
La première partie de notre travail nous a permis de présenter un tableau des faits, de mobiliser les théories que nous pensons utiles à la réalisation de notre recherche, de comprendre les enjeux d’une collaboration entre les différents acteurs financiers, de mesurer combien il est important à ces différents acteurs d’améliorer l’inclusion financière de cette partie de l’Afrique. La seconde partie de la thèse est quant à elle majoritairement consacrée à l’étude qualitative des perceptions des acteurs sur l’inclusion financière et la qualité des relations qui sont établies et devraient s’établir entre ces différents acteurs en vue de remettre le client au centre de la chaîne des valeurs de toutes leurs décisions.
Il s’agit donc à présent de nous assurer de la validité de nos travaux en justifiant nos choix afin de donner du crédit à la démarche de recherche, qu’ils soient relatifs au positionnement épistémologique retenu ou encore au design de recherche mobilisé. Comme le soulignent en effet Thietart et al. (2014, p.3), « afin de rendre légitimes et visibles des travaux souvent confidentiels, afin de trouver un juste milieu entre les extrêmes d’une recherche tournée vers elle-même et celle plus pratique, mais de portée réduite, seuls des travaux caractérisés par un effortvéritabledepoursuitedelapertinence,del’importanceetdelarigueurpeuventfairela différence ». La rédaction d’une thèse est par ailleurs un exercice exigeant, obligeant le doctorant à acquérir de nombreux savoir-faire, qui ont aussi bien trait « à la capacité à synthétiser une littérature volumineuse, parfois contradictoire, à formuler un objet de recherche pertinent et cohérent, à collecter et à traiter des données de manière rigoureuse, et à écrire d’une façon claire et précise » (Gavard-Perret et al., 2012, p.5), d’où l’intérêt d’expliquer notre cheminement intellectuel auprès du lecteur afin de rendre ce dernier aussi intelligible que reproductible.
Ces lignes visent à expliciter le positionnement épistémologique retenu, ici en l’occurrence l’interprétativisme, puisque nous nous inscrivons dans une approche largement compréhensive de la manière dont les acteurs interprètent la réalité étudiée, à savoir comment la collaboration entre les différents acteurs financiers pourrait améliorer l’inclusion financière au Bénin.
Dans le cadre des Sciences de Gestion, il est usuel que les chercheurs inscrivent leurs travaux dans l’un des trois paradigmes suivants : le positivisme, le constructivisme et l’interprétativisme (tableau 13). L’approche épistémologique retenue par le chercheur conditionne dès lors tant la méthode de recherche à mobiliser que la construction de l’objet de recherche lui-même (Maurand-Valet, 2010).
Tableau 15 : Les trois principaux paradigmes épistémologiques et leurs caractéristiques
Source : Maurand-Valet (2010), à partir des travaux de Girod-Séville et Perret (1999)
Il est à noter qu’il n’est pas toujours évident de s’inscrire dans l’un ou l’autre de ces trois paradigmes, d’autant plus qu’il est de plus en plus admis et habituel aujourd’hui de se situer à la croisée de plusieurs courants épistémologiques afin de mener à bien une recherche en Sciences de Gestion. Plusieurs paradigmes alternatifs ont d’ailleurs fait leur apparition afin de se libérer de la rigidité des apparentes cloisons délimitant les trois courants traditionnels : les paradigmes dits post-positivistes sont ainsi constitués par le réalisme scientifique et le réalisme critique, tandis que les paradigmes post-constructivistes ont pour leur part principalement trait au constructivisme pragmatique et au constructivisme au sens de Guba et Lincoln (1989, 1998).
Compte tenu du caractère exploratoire du contexte africain et particulièrement celui de l’Afrique subsaharienne, les méthodes de recherche qualitatives semblent être les plus adaptées pour mener les travaux de recherche sur les problématiques de management et de stratégie.
Étant donné les spécificités de l’Afrique subsaharienne et compte tenu du fait que les modèles de référence développés à l’international pourraient ne pas s’appliquer ou ne s’appliquer que partiellement à nos réalités managériales et culturelles, nous nous devons de mettre en évidence comment la méthodologie de recherche qualitative pourrait servir la qualité des travaux de recherche en gestion dans cette partie du monde.
Les méthodes quantitatives sont des méthodes de recherche généralement associées au positionnement positiviste et au mode de raisonnement hypothético-déductif. Elles utilisent un certain nombre d’outils d’analyse mathématiques et statistiques dans le but de décrire, expliquer et prédire des phénomènes. Selon Hlady Rispal (2002), le principe des méthodes quantitatives est celui de la construction, la reconstruction ou la réfutation de théorie.
L’expression « méthodes qualitatives », quant à elle, couvre un ensemble de « techniques interprétatives qui cherchent à décrire, décoder, traduire et généralement percer le sens et non la fréquence de certains phénomènes » (Coutelle, 2005). En sciences de gestion, l’analyse qualitative est vue comme « une démarche discursive de reformulation, d’explicitation ou de théorisation d’un témoignage, d’une expérience ou d’un phénomène » (Coutelle, 2005).
Un grand débat existe au sujet de la nature académique, des contributions, des mérites et des limites entre recherches quantitatives et qualitatives (Denzin & Lincoln 2005 ; Yin 1994). Les méthodes de recherche quantitatives sont souvent considérées comme synonyme de sciences naturelles ou « sciences dures », tandis que les méthodes de recherche qualitative ont été le plus souvent réservées aux « sciences douces » ou sciences sociales (Denzin & Lincoln 2005). Beaucoup de scientifiques affirment que la recherche quantitative est supérieure, car elle recourt aux statistiques, à l’expérimentation et aux enquêtes qui semblent fournir plus de rigueur scientifique et d’objectivité et par conséquent fournir plus d’apports théoriques (Guba & Lincoln 1994).
En revanche, la recherche qualitative est un terme générique qui recouvre une variété de méthodes qui sont utilisée dans de nombreuses disciplines (Guba & Lincoln 1994). Elle est multidimensionnelle et elle est utilisée pour étudier les phénomènes dans leur cadre naturel avec l’utilisation des entretiens, analyse d’archives, observations et enquêtes dans l’optique d’interpréter les phénomènes en termes de sens fournis par les acteurs (Denzin & Lincoln 2005 ; Guba & Lincoln 1994). Elle décrit et explique les modes de relations et de données sous forme de mots et pas nécessairement sous formes de chiffres ce qui en fait, une démarche plus subjective par rapport aux études quantitatives. Elle permet au chercheur d’établir des thèmes, des modèles et des catégories de données basées sur la compréhension et l’interprétation du chercheur (Miles & Huberman 1994).
L’utilisation de plusieurs méthodes, matériaux empiriques, perspectives et participants dans une seule étude permet au chercheur de développer la rigueur, la richesse et la triangulation pour n’importe quelle enquête (Denzin & Lincoln 2005). Par conséquent, la recherche qualitative offre une vue globale et holistique, menant à la compréhension des phénomènes et elle est de ce fait adaptée dans les cas de construction de théories inductives (Perry 1998).
Hlady Rispal (2002) distingue deux logiques dans la recherche qualitative : déductive et inductive. La logique qualitative déductive vise à approuver ou réfuter un modèle théorique en le confrontant aux données tirées d’un échantillon alors que la logique qualitative inductive vise la construction d’une théorie à partir de d’observations et d’études de l’objet de la recherche et des pratiques des acteurs (Sahraoui Bentaleb 2011). Nous sommes concernés par cette seconde logique dans le cadre de notre travail de recherche en ce sens que nous partons des observations et de l’étude des pratiques des acteurs bancaires et des Fintech pour savoir comment la collaboration entre ces deux acteurs pourrait améliorer la bancarisation en Afrique subsaharienne. Nous ne cherchons pas dans le cadre de notre recherche à approuver et/ou réfuter un modèle théorique donné. Nous sommes dans une démarche d’interprétation d’une réalité subjective à la lumière de quelques théories que nous avons mobilisées et sur la base de données qualitatives recueillies avec l’aide d’entretiens, d’étude de cas et de données presses.
Dans le domaine des Sciences de Gestion, les chercheurs en management utilisent néanmoins souvent une troisième voie nommée « adduction » (Blaug, 1982) ou plus récemment « abduction » (Eco, 1990). En s’appuyant sur les travaux de Blaug (1982), Koenig (1993, p.7) propose ainsi la définition suivante : « L’abduction est l’opération qui, n’appartenant pas à la logique, permet d’échapper à la perception chaotique que l’on a du monde réel par un essai de conjecture sur les relations qu’entretiennent effectivement les choses […]. L’abduction consiste à tirer de l’observation des conjectures qu’il convient ensuite de tester et de discuter. »
Thietart et al. (2014) reconnaissent eux la complémentarité scientifique entre les différentes démarches tout en précisant que le résultat issu d’une démarche inductive ou abductive n’est pas une démonstration dans la mesure où les propositions émergeant de l’analyse ne sont pas aussi certaines que celles élaborées lors d’un raisonnement déductif : « elles sont alors considérées comme des inférences non démonstratives ou inférences incertaines » (2014, p.82).
Faire de la recherche qualitative est une façon de regarder la réalité sociale. Plutôt que de chercher les bonnes réponses, la recherche qualitative se préoccupe également de la formulation des bonnes questions.
La collecte de données qualitatives prend de nombreuses formes, mais les entretiens et l’observation sont parmi les plus utilisées, peu importe la tradition théorique du chercheur.
Le tableau 14 compare les méthodes de recherche et leur utilisation.
Tableau 16 : Comparaison des différentes stratégies de recherche
Stratégie | Forme de la question de recherche | Contrôle sur des événements comportementaux | Focus sur les événements contemporains |
Expérimentation | Comment, Pourquoi | Oui | Oui |
Enquête | Qui, Quoi, Où, Combien | Non | Oui |
Analyse des Archives | Qui, Quoi, Où, Combien | Non | Oui/ Non |
Étude historique | Comment, Pourquoi | Non | Non |
Étude de cas | Comment, Pourquoi | Non | Oui |
Source : (Yin 1994, p. 6)
En nous référant à présent aux travaux de Mbengue et Vandangeon-Derumez (1999), il est désormais possible de nous situer épistémologiquement parlant selon le statut que nous accordons aux données (figure 18), statut étant déterminé par la nature de la réalité dans le sens où celle-ci « peut être considérée comme ayant une essence propre donc comme objective et déterminée par des lois naturelles, ou au contraire comme un construit résultant de l’expérience d’acteurs sociaux ». Nous nous positionnons quant à nous entre ces deux extrêmes en admettant une réalité multiple tout en postulant que la connaissance est issue des représentations des acteurs et non uniquement de l’expérience au monde du seul chercheur, ce qui nous éloigne dans le même temps d’une démarche purement constructiviste.
Figure 17 : Le statut accordé aux données
Source : adapté de Mbengue et Vandangeon-Derumez (1999)
Évaluer l’intégrité et la rigueur de la recherche revient à expliciter les forces et les faiblesses de la stratégie de recherche et à la rendre transparente. C’est également un moyen de transmettre au lecteur les aspirations du travail de recherche. Néanmoins, alors qu’il est communément admis que toute recherche se doit d’être évaluée au regard de certains critères, le choix des critères à retenir pour cette évaluation n’est toujours pas fixé (Willig, 2001 ; Finlay, 2003) et « la question de la qualité des critères… est … loin d’être résolue et une critique plus approfondie est nécessaire » (Guba et Lincoln, 1994 : p. 114). C’est tout particulièrement le cas de la recherche qualitative où les critères d’évaluation de la qualité des recherches restent encore une question épineuse (Drucker-Godard et al., 2007).
Yin (1984) considère qu’il existe un nombre de standards requis pour assurer la qualité d’une recherche qualitative qui se rapporte aux critères de (1) fiabilité de la recherche, (2) de validité du construit ou objectivité, (3) de validité interne et (4) de validité externe de la recherche. (1) Le critère de fiabilité se réfère aux résultats produits par le biais de la recherche. Il s’agit ici de s’assurer que ces mêmes résultats peuvent être atteints si la recherche est reproduite par d’autres sujets ou à un autre moment. (2) La validité du construit, quant à elle, fait référence à la méthodologie adoptée par le chercheur et qui se doit de correspondre à la problématique de recherche initialement posée. Il faut alors que l’ensemble des méthodes choisies et des outils mobilisés permettent une opérationnalisation pertinente des concepts étudiés. (3) La validité interne de la recherche est assurée en évitant trois biais qui sont reliés au contexte de la recherche, au recueil des données et à l’échantillon. Ces biais peuvent être évités en réduisant la durée de l’étude, en variant l’échantillon étudié et en respectant la confidentialité du travail (Drucker-Godar et al., 2003). (4) Les possibilités de généralisation de l’étude conditionnent la validité externe de la recherche. La généralisation doit se rendre possible d’un échantillon à une population et d’un contexte à d’autres contextes similaires. D’autres chercheurs (Drucker-Godar et al., 2003) rajoutent un cinquième critère pour s’assurer de la fiabilité et la validité de l’instrument de mesure. Ce critère se rapporte principalement aux données recueillies et à la qualité du codage de ce matériel empirique brut pour voir dans quelles mesures ces données permettent d’apporter une meilleure compréhension de l’objet étudié.
Toutefois, d’autres travaux classent ces critères comme étant propres à une recherche positiviste et complètement inappropriés aux fondements d’une recherche interprétative (Pozzebon, 2003) du fait que « les termes validité et fiabilité considèrent que la réalité est objective et est indépendante de la réalité sociale…et ne sont donc pas utilisés dans les travaux interprétatifs et critiques. » (Myers, 2009, p. 78). De ce fait et par opposition aux quatre critères positivistes de Yin (1984), Lincoln et Guba (1985) ont introduit des critères liés à la crédibilité, la transférabilité, la sûreté « Dependability » et la conformité « Confirmability » de la recherche comme moyen d’évaluation de la rigueur de la recherche interprétative. Ces critères d’évaluation ont été largement mobilisés par les travaux interprétatifs (Mckay et Marshall, 2000 ; Finlay, 2003).
Ces critères de rigueur méthodologique ont comme corollaire des stratégies mises en œuvre par le chercheur pendant la collecte et l’analyse des données comme l’observation du phénomène en situation réelle, description détaillée de la méthodologie adoptée, alternation des méthodes de collecte et d’analyse des données, présentation riche du contexte et de l’échantillon, le recours à un journal de bord, la triangulation…. Ces diverses stratégies permettent de construire une interprétation profonde et détaillée du phénomène étudié. Nous rappelons ici que dans le cadre de notre travail, nous avons pris le parti d’une recherche interprétativiste basé sur des entretiens semi-directifs, triangulés avec des données secondaires (presse, documents, web…) comme stratégie de recherche et nous évaluons donc la qualité de notre recherche au regard des critères de Lincoln et Guba (1985). Le tableau ci-dessous synthétise les fondements de chacun de ces critères ainsi que leur application sur notre cas de recherche.
Tableau 17 : Évaluation de la qualité de notre recherche suivant les critères de Lincoln et Guba (1985)
Critères de Yin (1984) (Positiviste) | Critères de Lincoln et Guba (1985) | Objectifs | Techniques utilisées dans notre recherche |
Validité interne de la recherche | Crédibilité de la recherche | S’assurer de l’intégrité des résultats | Triangulation des méthodes de collecte de données (entretiens semi-directifs, données Web, Presse) Transcription fidèle des entretiens |
Validité externe de la recherche | Transférabilité de la recherche | Généralisation de l’étude | Triangulation des différents acteurs financiers Exposition du contexte de l’étude, de la méthode d’échantillonnage et des caractéristiques des échantillons |
Fiabilité de la recherche | Sûreté ou « Dependability » | Transférabilité et reproductibilité des résultats | Détails sur la méthodologie de recherche choisie ainsi que les méthodes de recueil et d’analyse des données |
Objectivité ou validité du construit | Conformité « confirmability » | Intégrité des interprétations du chercheur | Multi-angulation (triangulation des acteurs impliqués, triangulation des méthodes de collecte de données, triangulations des répondants). |
Le critère de crédibilité est parallèle à celui de la validité interne et cherche à s’assurer de l’intégrité des résultats. La recherche est considérée comme étant crédible à partir du moment où les représentations des participants convergent avec celles que le chercheur leur a attribué (Mckay et Marshall, 2000 ; Schwandt, 2001). Quelques techniques peuvent être alors utilisées pour renforcer la crédibilité d’une investigation comme par exemple la vérification des données par les participants ou les collègues, l’observation ou encore l’audit (Lincoln, 1995). Dans notre cas, certaines mesures ont été entreprises pour s’assurer de la crédibilité de notre recherche. Nous avons adopté une triangulation des sources de données (entretiens semi-directifs, documents, presse, web) et puis nous nous sommes assurés de la transcription fidèle de toutes les données. Le deuxième critère, la transférabilité, est le critère qui peut être défini comme la généralisation de l’étude.
Selon Marshall et Rossman (1989), le recours à une triangulation utilisant différents acteurs financiers et diverses méthodes de collecte de données renforce la transférabilité des résultats. Au-delà de la stratégie de triangulation adoptée, nous avons également soigneusement présenté le contexte de notre étude (le niveau de l’inclusion financière, le parc de mobiles détenus, les Fintechs et les OTM) ainsi que les modalités de l’échantillonnage et les caractéristiques de l’échantillon en termes de la qualité des différents acteurs et de leurs CSP respectives.
Le critère de la sûreté qui correspond à la fiabilité chez les positivistes requière un processus de recherche claire, logique et traçable (Schwandt, 2001). Il s’agit ici d’être le plus précis possible sur le raisonnement et la démarche suivie par le chercheur (la posture épistémologique, le guide d’entretien utilisé, la grille d’analyse…) afin que la transférabilité ou la reproductibilité des résultats soit rendue possible. En d’autres termes, il s’agit de pouvoir retracer le raisonnement intellectuel qui a conduit aux interprétations et aux conclusions du projet de recherche (Gavard-Perret et al., 2008 p. 266). Dans le cas de notre étude, nous avons expliqué la méthodologie de recherche suivie ainsi que les méthodes de recueil et d’analyse des données. En annexes nous avons fourni un nombre de documents (guide d’entretien, transcription des entretiens, autres données primaires et secondaires) que nous espérons être utiles pour une éventuelle réplication de cette recherche. Enfin, le dernier critère est celui de la conformité et qui est comparable à celui de l’objectivité ou validité du construit. Ce critère vise à s’assurer que les interprétations du chercheur dans les résultats produits sont cohérentes avec le sens des données collectées. Les techniques de triangulation sont un moyen efficace pour garantir la conformité des résultats avec le matériau empirique (Finlay, 2003). Nous pouvons alors considérer que ce dernier critère a été respecté du fait que nous avons entrepris une multi-angulation (triangulation des acteurs impliqués, triangulation des méthodes de collecte de données, triangulations des répondants).
Notre partie analyse s’appuie sur une condensation des données par une analyse de contenu. Cette condensation des données selon Huberman et Miles (1996), renvoie à un processus de sélection, centration, simplification et de transformation des données brutes qui ressortent des retranscriptions des entretiens. Cette forme d’analyse consiste à trier, distinguer, rejeter et organiser les données de telle sorte que le chercheur puisse établir des conclusions ainsi que de les éprouver. L’analyse de contenu comprend deux formes : l’analyse thématique (registre sémantique) et l’analyse lexicale (registre linguistique) (Bardin, 2002). Le niveau de catégorisation peut ainsi porter d’une part sur l’aspect sémantique et prendra en compte derrière la surface des mots et des phrases, les unités de signification de base ou thèmes ; et d’autre part sur l’aspect lexical et prendra en compte les mots ou unités linguistiques sécables. Pour Bardin (1998), l’analyse de contenu peut être une analyse des « signifiés » (e.g., analyse thématique) et une analyse des « signifiants » (e.g., analyse lexicale) (Bardin, 1998).
D’après Blanchet et Gotman (1992), l’analyse de contenu permet l’aménagement d’un texte dans le but d’engendrer un effet d’intelligibilité et d’accéder à une interprétation. Parmi les différentes techniques existantes dont les principales sont l’analyse “entretien par entretien” et l’analyse “thématique”, nous avons retenu une analyse thématique des données. L’analyse thématique utilise des procédures systématiques et objectives de description du contenu des messages permettant l’inférence de connaissances (Bardin, 1977). Cette technique convient mieux à nos objectifs d’étude dans la mesure où elle facilite la comparaison de différents entretiens. L’analyse des données consiste à défaire en quelque sorte la singularité du discours, en découpant transversalement l’ensemble du corpus dont “l’unité d’analyse est le thème représentant un fragment de discours” (Blanchet et Gotman, 1992). Ce mode de découpage est stable d’un entretien à l’autre. Ce principe de stabilité dans l’analyse apparaît fondamental dans la mise en œuvre de notre ensemble d’entretiens dans les différentes structures.
S’il est vrai que le cadre conceptuel et les questions de recherche conditionnent fortement le niveau d’orchestration, il n’en demeure pas moins que le chercheur garde une certaine liberté de choix selon sa perception de la recherche à accomplir (Huberman et Miles, 1991).
Le caractère exploratoire de notre recherche nous amène à adopter une orchestration à la fois occasionnelle et universelle selon Huberman et Miles (1991).
Avant la présentation des résultats, nous allons préciser quelques éléments sur la manière dont cette étude a été préparée puis traitée. Nous allons donc montrer comment nous avons procédé pour constituer notre échantillon. Tout en nous intéressant à la conception du guide d’entretien, nous mettrons un focus sur le profil des répondants et au mode de traitement des données.
La collecte de données s’est déroulée du début du mois de fevrier à la fin du mois de mai 2020.
En adoptant une approche qualitative, nous avons opté pour l’utilisation d’entretiens semi-directifs. L’entretien semi-directif qu’on peut également appeler « centré » (Merton et al., 1990) est basé sur un guide d’entretien qui est complété au fil des entretiens. Cette forme d’entretien permet à l’interviewé de disposer de davantage de liberté que dans un entretien purement directif. Il n’en reste pas moins que l’interviewé soit un minimum cadré. Le chercheur quant à lui fera preuve de prudence dans son travail d’analyse car les informations récoltées ne permettent pas toujours un traitement statistique approfondi et doivent être soumises à un important travail de relecture et d’interprétation.
La conception d’un guide d’entretien, s’avère donc indispensable à la réalisation de cette étude. Ce guide d’entretien présente les thèmes qui doivent être abordés au fil de l’entretien. La constitution des thèmes (5 ou 6 au total) suppose donc que le chercheur a connaissance au moins en partie du type d’informations qu’il souhaite récolter. L’objectif consiste alors à introduire chaque thème par une question d’ordre générale qui incitera l’interviewé à aller en profondeur (Demers, 2002).
Le guide d’entretien ne doit pas être confondu à un questionnaire ouvert car les thèmes ne doivent pas être nécessairement introduits dans un ordre séquentiel pré-établi mais selon leur degré de proximité avec les thèmes abordés par l’interviewé, une fois qu’il a terminé son discours à ce propos.
Afin de renforcer la validité de notre recherche en vérifiant la cohérence entre les données recueillies, nous nous sommes assurés de bien rapporter les situations telles qu’elles ont été décrites par l’ensemble des répondants en procédant à des recoupements d’une information fournie par une source auprès d’une seconde source au sens de Baumard et al (1999, p 246). Cette méthode appelée méthode de triangulation par Wacheux (1996), peut croiser plus de deux sources.$
Le recours à l’entretien semi-directif a pour objectif l’exploration en profondeur d’un univers. On recherche la richesse du contenu, sa profondeur, sa qualité et sa diversité. On travaille donc avec des échantillons de taille réduite qui n’ont aucun objectif de représentativité au sens statistique du terme, mais qui répondent à des critères de pertinence de la structure de population étudiée compte tenu du problème spécifique d’étude. La facilité d’accès au terrain nous a amené à choisir le Bénin comme terrain d’étude. Mais il y a une seconde raison qui nous a poussé à ce choix. C’est la position stratégique qu’occupe ce pays dans tous les échanges commerciaux entre tous les pays ouest-africains de la zone UEMOA. La troisième raison est la volonté affichée du gouvernement de ce pays à en faire un Hub technologique pour toute l’Afrique de l’ouest et enfin le caractère spécifique des liens qu’entretient ce pays avec la première puissance africaine qu’est le Nigéria.
Nous avons préféré constituer un échantillon ce qui veut dire que nous avons fait l’option de procéder par la méthode d’échantillonnage raisonnée. Nous avons retenu d’interviewer les deux opérateurs de téléphonie mobiles que sont MOOV et MTN ; ensuite nous avons identifié les banques (au nombre de 8) qui ont des projets de collaboration avec les Fintechs et les Opérateurs de téléphonie parmi lesquelles nous avons choisi cinq et enfin nous avons interviewé toutes les Fintech réellement actives sur le marché. Par ailleurs, concernant les opérateurs de téléphonie, on ne peut faire mieux, car ils sont que deux à être présents et à exercer sur le territoire. Pour les banques, nous avons questionné celles qui ont des projets de digitalisation et de collaboration bien établis. En ce qui concerne les Fintech, nous en avons interviewer 7 au total, mais lors de nos investigations, on s’est rendu compte qu’au bout du cinquième interview les mêmes réponses par rapport aux thèmes abordés, revenaient inlassablement.
Même si certains auteurs comme Wacheux (1996, p 54) préconisent que les entretiens soient réalisés « à l’extérieur du lieu de travail (…) car tous les éléments rappelant aux sujets le monde du travail perturbent la situation », nous avions décidé de réaliser les entretiens in situ en déportant directement vers nos différents répondants. Mais les mesures liées à la pandémie du COVID-19 nous ont contraint à réaliser nos entretiens par Skype ou WhatsApp.
La présentation des données est un format spatial qui expose systématiquement les informations (Huberman et Miles, 1991). En reconnaissant que le texte narratif est extrêmement difficile à manier, il nous revient donc de nous doter d’une combinaison organisée d’informations qui rende compréhensibles les phénomènes étudiés et permette ainsi de mener à des conclusions fondées et d’agir par la suite.
Huberman et Miles, (1991) stipule que l’utilisation d’un format de présentation est de ce fait essentielle afin de parvenir à une « analyse qualitative valable ». Ils recommandent donc de se doter de tableaux, matrices, graphiques ou diagrammes pour organiser les informations de façon méthodique et assurer une rigueur suffisante à l’analyse. La multiplicité des entretiens impose en effet une standardisation des outils de manière à ce que l’on puisse rapprocher les résultats.
Nous avons donc choisi d’utiliser des grilles d’analyses. Blanchet et Gotman, (1992), précisent qu’une grille d’analyse représente un outil explicatif, visant la production de résultats, à la différence d’un guide d’entretien qui est un outil d’exploration, visant la production de données. Dans la littérature, les auteurs indiquent que pour construire une telle grille il convient de procéder dans un premier temps à une lecture “flottante” (à différencier d’une analyse) des entretiens afin de laisser émerger des impressions et des orientations comme le recommande Bardin (1977). Cette lecture a pour but la prise de connaissance du corpus (Blanchet et Gotman, 1992). Dans un deuxième temps, selon eux, il est nécessaire de réaliser une lecture vigilante et répétée du document afin de recenser les thèmes liés à la recherche. A ce titre, nous pouvons suivre Wacheux, (1996), qui conseille de prendre en compte les concepts mobilisés, leur contextualisation sur le terrain et le sens donné par les acteurs à leurs actes. Ainsi donc, les thèmes identifiés constituent une grille d’analyse stable de tous les entretiens. C’est de cette façon que nous avons donc procédé.
Chapitre II : La perception de la collaborativité par les acteurs
Comme préciser lors de notre processus d’échantillonnage, nous avons préféré regrouper dans un tableau l’ensemble des répondants avec leurs caractéristiques distinctes. Afin de rendre anonymes nos répondants, nous remplacerons leurs identités par les initiales de leurs noms et prénoms.
Tableau 18 : Profil des répondants
Nom | Entreprise | Profession |
B I A | Coris Bank | DSI |
H J G | United Bank for Africa (UBA) | DSI |
F G | Orabank | DSI |
A E | Bank of Africa (BOA) | DSI |
G C | Banque Atlantique (BPC)/ Association des Professionnels de la Finance Digitale (APFD) | Directrice Clientèle Privée/ Présidente APFD |
S S | MTN | Directeur Mobile Money/Banking |
F U | MOOV (ETISALAT) | Directeur Mobile Money/Banking |
B M | Digital World Technologies (Fintech) | Gérant Fintech |
A D D | PayPlus Africa (Fintech) | Gérant Fintech |
A S | Bénin Fintech Group (Fintech) | Gérant Fintech |
A A | SIF Group (Fintech) | Gérant Fintech |
K G | Open SI (Fintech) | Gérant Fintech |
T B | Fedapay Nautilus Technologie | Gérant Fintech |
A E | Semoa Group | Gérant Fintech |
Tableau 19 : Présentation des personnes interviewées au sein des banques et des OTM
Nom | Entreprises | Profession | Parcours |
A A | SIF GROUPE | PDG de SIF GROUPE | Études dans le secteur bancaire Quelques expériences professionnelles dans le secteur bancaire Créateur de la société SIF Groupe Certification en monnaie digitale |
B T | FEDAPAY (Bénin) | Gérant d’entreprise | Formation d’ingénieur en informatique et réseau |
E A | Fintech SEMOA (Togo et en France) | Dirigeant fondateur | |
D A | PAYPLUS AFRICA | Dirigeant chez Payplus Africa | Développeur d’applications |
A S | Bénin Fintech Group | DG de Bénin Fintech groupe | Postier Formation sur la gestion des réseaux d’argent mobile Formation sur la gestion des produits digitaux DG de Bénin Fintech groupe |
F U | MOOV (ETISALAT) | Directeur Mobile Money / Banking | Responsable développement produit et service Responsable ”segment jeune” Responsable segment Mass Market |
K G | Open SI (Fintech) | Créateur et Gérant | Ingénieur en génie logiciel et système d’informations Création d’OPENSI en 2014 |
S S | MTN | Directeur Mobile Money/Banking | |
B M | Digital World Technologies (Fintech) | Gérant Fintech | Ingénieur en génie électronique Quinze ans d’expérience dans les banques DSI de groupes bancaires |
Tableau 20 : Objectifs des OTM et des fintechs
Nom | Entreprises | Objectifs |
A A | SIF GROUPE | Optimisation de l’inclusion financière de la population africaine Éducation financière |
B T | FEDAPAY | |
A E | Fintech SEMOA | Apporter une solution connexe à la fameuse problématique de la bancarisation |
A D | PAYPLUS AFRICA | Faciliter l’e-commerce |
A S | Bénin Fintech Group | Optimiser la digitalisation des services financiers au Bénin |
SIF GROUPE une entreprise qui s’intéresse à l’inclusion financière et à la promotion des banques digitales. Son principal objectif est alors l’optimisation de l’inclusion financière de la population africaine. Cet objectif est renforcé par l’éduction financière qu’elle fournisse.
Tableau 21 : Services proposés
Entreprises | Services et applications proposées |
Start-up à Togo | Mobile Banking pour un paiement de masse des salaires WhatsApp in team pour les banques Cash-pay pour les commerçants/ marchands Digital corner pour les commerçants/ marchands |
SIF GROUPE | Éducation financière Partenariat avec les banques et tous les acteurs financiers en termes de prospection |
FEDAPAY | |
Fintech SEMOA | Paiement de masse sur Mobile money Une plateforme « WhatsApp Banking » Une plateforme pour l’encaissement marchand Plateforme Cash Pay |
PAYPLUS AFRICA | Payplus : un système de contournement pour automatiser la consommation des paiements en utilisant les cartes SIM marchands des utilisateurs. |
Bénin Fintech Group | Digitalisation de la tontine |
MOOV (ETISALAT) | Mobile Money |
Open SI (Fintech) | Digitalisation E-santé « bon médical » Plate-forme de paiement et d’agrégation |
Pour la première start-up que nous avons interrogé, elle propose à ces clients quatre types de services à travers des applications :
- Mobile Banking : à travers le service de mobile Banking, la start-up travaille en collaboration avec les opérateurs de téléphonie mobile. L’objectif étant d’apporter une solution connexe à la bancarisation de la population africaine. Les clients cibles pour ce service sont essentiellement ceux du Togo
- WhatsApp in team : le WhatsApp in team est une application qu’elle propose aux banques afin de leur permettre permet de proposer à leurs clients des services de Mobile Money à travers l’application WhatsApp. Les clients cibles sont ceux du Maroc.
- Cash-pay : le cash pay est un service destiné aux commerçants/marchands afin de leur permettre d’effectuer des opérations de cashing sur une même plateforme au lieu de mobiliser de la trésorerie avec différentes plateformes.
- Digital corne : comme le cash-pay ce service proposé par la start-up est également destiné aux commerçants/marchands. Elle permet également aux clients cibles de faire des opérations de cashing sur une même plateforme.
Pour ces différents services, la start-up envisage un marché potentiel de 800 000 individus, c’est-à-dire les 80% des personnes qui utilisent les appareils mobiles connectés au Togo.
SIF GROUPE, la deuxième fintech que nous avons approchée propose des services se rapportant à l’éducation financière afin de promouvoir l’inclusion financière en Afrique : « Très tôt, au départ, Sif groupe s’intéressait à l’accompagnement des particuliers notamment dans la mobilisation des financements auprès des institutions bancaires en les accompagnant, en les conseillant et les assistant. On avait commencé par tout ce qui est gestion des finances personnelles et progressivement, on a commencé à avancer. Je crois qu’aujourd’hui on a quand même touché le maximum de personnes à travers les activités que nous menons »76. L’objectif de l’entreprise à travers cette éducation est double : économique et sociale. L’objectif social étant d’aider la population à comprendre et à maitriser les concepts, les services qui leur sont proposés et tout ce qui va avec ces services-là en termes de gestion de risques, de réclamation, etc.
SIF groupe travaille également avec les banques et autres services financiers en les aidant à avoir accès à une cible mieux préparée pour utiliser les services financiers : « Je crois qu’aujourd’hui les acteurs du secteur bancaire et financier s’intéresse vraiment à cette activité parce qu’ils ont compris qu’on ne peut pas atteindre l’inclusion financière, rechercher par tout le monde, sans passer par une éducation financière »77.
La quatrième fintech que nous avons approchée, Fintech SEMOA, propose quatre types de services :
- Paiement de masse sur Mobile money : ce type de service donne aux salariés la possibilité de recevoir leur salaire via le Mobile Money ;
- La plateforme « WhatsApp Banking » est destinée aux banques et leur permet de proposer leurs services via l’application de messagerie WhatsApp ;
- Une plateforme pour l’encaissement marchand : cette plateforme est essentiellement destinée aux marchands traditionnels ;
- Une plateforme Cash Pay : une plateforme qui permet aux marchands de faire des opérations de cash in cash out de vente de service type Canal + ou ce genre de choses au sein d’une seule et même plateforme.
La cinquième fintech que nous avons approchée est « Payplus Africa ». Cette dernière propose aux clients un système de contournement afin d’automatiser la consommation des paiements en utilisant les cartes SIM marchands des utilisateurs. Il s’agit donc d’un portefeuille électronique à travers lequel les clients peuvent faire des demandes de crédit pour payer une plateforme de vente par exemple. Ensuite, le montant du crédit envoyé est débité automatiquement sur la carte SIM marchand du client. Actuellement, les services proposés par Payplus Africa ont évolué grâce aux confiances des opérateurs et a pu se développer au niveau international : Bénin, Côte-d’Ivoire et Burkina Faso. La start-up travail avec orange dans le cadre de son développement.
La sixième fintech que nous avons approchée, Bénin Fintech Group, offre des services de digitalisation de la tontine au Bénin.
Open SI, la septième fintech que nous avons approchée, a commencé par la digitalisation des tontines, puis des offres de services financiers, de l’e-santé et des services de paiement et d’agrégation en ligne. Ces derniers, fonctionnant comme des cartes bancaires, sont mis à la disposition des marchands à travers des applications leur permettant d’effectuer des paiements à distance.
Tableau 22 : À propos des personnes interrogées
Nom | Entreprises | Profession | Parcours |
A E | DSI BOA | Responsable du département Monétique et transfert rapide | Ingénieur en informatique et en système d’information Formation dans le domaine de la profession bancaire Certification en expert en finance digitale à Londres |
A I B | Coris Bank | DSI | Formation en gestion comptable / finance / gestion de projet. Formation en finance digitale actuellement. Etudes dans le domaine du secteur bancaire : monétique (service digital) |
H J G | UBA BANK | Informaticien | Informaticien de formation Certificat sur le Digital Money |
G C | Banque Atlantique | Directrice de la banque de détails à La banque Atlantique Bénin | 21 ans d’expérience bancaire Chargé clientèle à Ecobank Chef d’agence, Chef division région Responsable réseau à Banque atlantique et après directrice réseau |
F G | ORABANK | DSI | Poste commercial Poste des opérations DSI |
Dans ce chapitre, notre objectif est de mettre en évidence, à travers les résultats des entretiens, les différentes dimensions de la collaborativité entre les OTM, les fintechs et les banques traditionnelles.
Mais avant de présenter les différentes dimensions cette collaborativité en fonction du jeu de chaque acteur, il nous semble judicieux de comprendre un point essentiel : l’évaluation de la bancarisation et de la digitalisation par les trois acteurs qui nous intéressent. C’est sur la base de ces constats que nous pourrons comprendre plus efficacement l’intérêt de ces acteurs à proposer des services financiers innovants pour répondre aux évolutions du comportement des consommateurs et aux problèmes d’inclusion financière. Cela nous permet également de juger si ses trois acteurs, totalement indépendants, peuvent travailler ensemble et offrir une solution utile aux consommateurs finaux.
Les OTM et les fintechs considèrent que le niveau de bancarisation de l’Afrique subsaharienne est encore assez faible. Par exemple notre premier répondant appartenant à une start-up située à Togo stipule que la population africaine n’éprouve encore aucun intérêt à faire appel aux services bancaires ni à ouvrir des comptes bancaires ; d’autant plus que les banques n’offrent pas de crédit à la consommation, une des premières solutions qui répondent aux besoins primaires de cette population africaine. Ainsi, les start-ups considèrent qu’en Afrique subsaharienne, les banques ne sont pas forcément considérées comme un service destiné à tout le monde.
Selon notre interviewé auprès de la start-up « FEDAPAY », la population africaine ont encore beaucoup de difficulté dans l’utilisation des services bancaires sans parler du fait que l’accès à ces services est encore compliqué : « Par exemple, créer un compte ou avoir une simple carte de crédit est compliqué pour certaines personnes. D’autres problèmes sont liés aux cartes de crédit. En effet, il y en a qui ne sont pas prêtes à payer les frais qui y figurent. Ce sont principalement les raisons pour lesquelles les gens n’aiment pas les services bancaires parce que, pour eux, des gens leur prélèvent de l’argent à leur insu même si ces frais sont justifiés »78. Par conséquent, de nombreuses personnes se tournent vers d’autres solutions comme le Mobile Money. Le Mobile Money est considéré, par de nombreux africains, comme un moyen simple pour la gestion de leur trésorerie : paiement, transfert d’argent, etc. : « Ils descendent au coin de la rue, ils ont accès au service de Mobile Money où ils peuvent déposer de l’argent et en faire tous types de transactions »79.
Selon notre interviewé chez SEMOA, la population africaine n’éprouve aucun intérêt à ouvrir un compte bancaire ni à utiliser les services proposés par les banques traditionnelles : « les clients n’ont aucun intérêt à aller vers les banques et aucune incitation de la part de leur employeur ou autres, à recevoir leur salaire en banque, fondamentalement, la banque traditionnelle, telle qu’elle est aujourd’hui, pourrait disparaitre. Voilà une part de l’analyse que je peux partager d’abord »80.
Notre interviewé chez PAYPLUS AFRICA trouve également que le niveau de bancarisation de la population africaine est faible. Selon lui, cette situation peut s’expliquer par le fait que la population africaine aime le cash, donc l’accès facile et immédiate à l’argent. Une chose qui n’est pas encore possible avec les banques traditionnelles : « exemple : Un zémidjan, qui a fini sa journée, doit pouvoir, le lendemain matin, en allant vaquer à ses activités, donner, ne serait-ce que 1000F ou 1500F, à sa femme, pour pouvoir payer sa popote. Mais, si l’argent est sur le compte bancaire et qu’il doit faire d’abord aller faire la queue à la banque afin de retirer l’argent, ça ne l’arrange pas. ». Seuls les opérateurs de Mobile Money peuvent encore assurer cette disponibilité immédiate de fonds. A part cela, notre interviewé parle également de l’analphabétisme de la population qui est un grand frein la bancarisation.
Pour notre interviewé chez Bénin Fintech Group, le niveau de bancarisation la population africaine est encore faible. Pour remédier à cela, notre interviewé déclare qu’il faut se pencher davantage vers une logique de désintermédiation : « Je pense qu’aujourd’hui si on veut régler la question de bancarisation, de l’inclusion financière ou de l’inclusion numérique, dans notre environnement, il faut jouer sur des leviers d’intermédiation très importants qui, dans un premier temps, participent à l’utilisation des populations, ensuite à les rassurer qu’on n’a pas à affaire à de l’arnaque, mais plutôt à quelque chose qui est réelle. Lorsqu’il y a un intermédiaire humain dans l’interaction ou dans les échanges, ça passe plus facilement que lorsqu’il n’y a pas d’intermédiaire. Nous avons une mentalité fortement assise sur l’intermédiation. »81.
Selon notre interviewé chez MOOV (ETISALAT), le niveau de bancarisation de la population africaine est encore faible, entre 7% à 8%. Toutefois, il affirme que si l’on prend en compte les comptes virtuels et les comptes en Mobile Money, on peut avoir un taux plus élevé. Mais malgré cela, des défis sont encore à surmonter : « si on regarde les indicateurs sur le nombre de comptes enregistrés, le nombre de comptes actifs, on a à peine 29% ou 30%. Ça suppose qu’il y a encore beaucoup de questions à se poser en termes d’usage »82.
Notre interviewé auprès d’Open SI déclare que le niveau de bancarisation de la population africaine est encore très faible si l’on ne tient pas compte du parc client des OTM.
Comme les autres interviewés, celui de Digital World Technologies déclare également que le niveau de bancarisation de la population africaine est encore faible. Il déclare toutefois que ce faible niveau de bancarisation est compensé par les services proposés par les micro-finances et des opérateurs mobiles : « on peut également considérer, sans que ce ne soit pas tout à fait exact, que tout ce qui est Mobile money, est une forme de pré-bancarisation car ce n’est pas vraiment de la bancarisation. Je pense que ce sont plus les systèmes financiers décentralisés qui pallient aux services bancaires là où les gens ne sont pas vraiment bancarisés. Maintenant, la nuance est que le Mobile Money est surtout utilisé pour faire des transferts d’argent de personne à personne. L’aspect paiement reste encore embryonnaire et l’aspect crédit est quasiment inexistant. Quand on dit bancarisation, pour moi, c’est disposer d’un moyen de paiement pour pouvoir obtenir des prêts quand on en a besoin. Au-delà de retrait et dépôt, ce n’est pas la banque »83.
Tout cela montre que le niveau de bancarisation de la population en Afrique Subsaharienne, notamment ceux appartenant à la zone UEMOA, est encore très faible et nécessite par conséquent la mise en place d’une solution innovante qui s’adapte non seulemen au pouvoir d’achat de cette population mais également à son niveau d’éduction et à son habitude de consommation.
Lorsque nous avons analysé le mot population, en termes de réseaux de proximpité, nous avons pu constater que celui-ci se rapporte à différents éléments exprimant le beoin de la poluation africaine en termes de service financier : problème, solution, sens, exclu, accélérern, accès, défucation, rural, etc. Autrement dit, les besoins sont là, mais les solutions proposées par les banques traditionnelles ne permettent pas encore de répondre effectivement aux besions de la population africaine en termes de services financiers.
Les entretiens nous montrent que les banques traditionnelles, qui sont les principaux fournisseurs de services financiers, constatent également que le niveau de bancarisation de la population africaine est très faible. Pourtant, elles sont les premières à pouvoir fournir une solution formelle pour répondre à ce problème.
Par exemple selon le responsable que nous avons interrogé chez DSI BOA, qu’en termes de bancarisation, l’Afrique subsaharienne est restée sans bouger en prenant le cas de Bénin qui selon lui ne dispose que de trois banques mettant en place des systèmes de transactions mobiles : Ecobank, UBA, BOA etc. Notre répondant au sein de cette banque affirme que même si l’on veut optimiser le taux de bancarisation de la population, la connexion fait toujours défaut au sein de certaines zones. En plus de cela, il y a également le fait que beaucoup de personnes sont analphabètes et par conséquent ne sont pas capables d’utiliser les appareils mobiles comme les téléphones Android, etc. Selon toujours ce répondant, pour essayer d’augmenter le taux de bancarisation, il faut avoir une pièce d’identité, pourtant, une grande majorité de la population africaine n’en dispose pas encore. Pour cela, il estime qu’il se montre plus que nécessaire d’améliorer l’identification de la population (par exemple à travers un système d’identification unique) et faire en même temps une éducation financière de la population. Selon toujours notre interviewé chez BOA, la population ouest-africaine est vraiment très en retard en termes de bancarisation : « L’exemple que je donne rapidement pour étayer ça, est celui des pays de l’Afrique de l’Est. Si je prends, par exemple, le Kenya, il y a près de 80% de la population à bancariser avec le produit M-pesa de SAFARICOM. Aujourd’hui, en Afrique de l’Ouest, à part le Sénégal qui est en train d’évoluer un peu, les autres pays sont restés sans bouger. Le cas qui est réoccupant est celui du Bénin où, en 2020, seulement trois banques permettent réellement à la clientèle d’accéder à leurs services et de faire leurs opérations sur leur téléphone. Ecobank le permet, mais là, c’est via une application web. UBA, aussi, le permet par application web et par le code Ussd »84. Selon ce dernier, le faible niveau de bancarisation de la population africaine se rapporte premièrement au taux élevé d’analphabétisme tout en stipulant que ce n’est pas le web qui changer cette situation, car « qu’il faut, d’abord, avoir un android, télécharger l’application, se faire enrôler par la banque avant de l’utiliser »85.
Pour notre interviewé chez Coris Bank, le niveau de bancarisation de la population africaine située dans l’Uemoa est encore faible : « Elle tournerait autour de 20 à 30% au Bénin par exemple selon une récente publication de la BCEAO. En Côte d’Ivoire elle serait autour de 30 %, au Sénégal elle varie entre 20 et 25 %. Au Mali, je pense que c’est en dessous de 20 %. Au Ghana elle serait en dessous de 35 %. Donc la tendance tourne autour de 30% de taux de bancarisation dans l’UEMOA. C’est un taux très faible »86.
Notre interviewé auprès d’UBA Bank stipule que le niveau de bancarisation de la population africain est encore assez faible. Cela est dû au fait que beaucoup de personnes ne disposent pas de pièce d’identité ni d’autres pièces permettant de leur identifier : « Quand on te dit que pour ouvrir un compte, il faudrait que tu aies d’abord ta facture d’électricité. Le villageois, est-ce qu’il a de courant chez lui ? Il n’a pas de courant. Mais, comment peut-il avoir cette facture-là ? Et, on lui demande une photo d’identité ». Pour améliorer cette situation, les banques vont devoir se rapprocher plus des clients : « ce qu’elles devraient faire, c’est d’aller vers les clients parce qu’elles ont des produits digitaux que beaucoup d’analphabètes ne maîtrisent pas. Il faudrait qu’elles aillent réellement à la sensibilisation »87.
Comme les autres, notre interviewé chez Banque Atlantique stipule également que le niveau de bancarisation de la population africaine est encore faible : « On a encore un faible taux de bancarisation parce qu’on a beaucoup de personnes illettrées qui n’ont pas de pièce d’identité et dont la plupart ne veulent pas d’un compte. Il faut une action gouvernement banque central, institutions financières et SFD pour qu’on puisse vraiment régler ce problème-là »88.
Selon notre interviewé chez ORABANK, il reste encore des choses à faire quant à la bancarisation de la population africaine. Le développement des OTM devrait permettre de changer cette situation.
Cette considération de la bancarisation la population africaine par les banques traditionnelles confirme une partie de notre problématique qui sous-entend que les banques traditionnelles n’arrivent pas elles seules à proposer des solutions efficaces pour optimiser le niveau de bancarisation de la population africaine. C’est notamment la raison qui nous a poussé à nous intéresser à la recherche d’une forme de collaboration possible entre les banques traditionnelles, les OTM et les FinTechs, car nous pensons que ces derniers peuvent avoir les solutions nécessaires pour répondre de manière plus terre à terre aux besoins de la population africaine en termes de services financiers et aider les banques dans cette démarche.
Pour évaluer la possibilité de cette collaboration, nous allons dans la partie suivante, comprendre les jeux de chaque acteur, notamment leur position pour répondre aux problèmes de bancarisation de la population africaine.
Dans cette sous-partie, notre objectif est de mettre en évidence les solutions que peuvent apporter les OTM et les FinTechs pour optimiser le niveau de bancarisation de la population africaine.
Pour les OTM et les fintechs, plusieurs solutions de services financiers sont déjà proposées à la population africaine pour répondre au problème de bancarisation comme nous pouvons le constater à travers les résultats des entretiens. Les solutions proposées se basent dans la majorité des cas sur les nouvelles technologies de l’information et de la communication ainsi que sur les opérations mobiles.
- Les solutions pouvant être apportées par les fintechs et les OTM
Selon la première personne que nous avons interrogée, les nouvelles technologies apportent de nouveaux outils pour renforcer le système bancaire traditionnel. Les Fintechs offrent également aux banques des équipes de recherche et de développement pour les banques afin de les aider à créer des outils innovants répondant aux nouveaux besoins des consommateurs. Il a également été souligné par notre premier répondant qu’il est encore difficile pour les banques centrales de mettre en place et d’utiliser pleinement les nouvelles technologies de l’information et de la communication, elles ont encore besoin d’aide, d’où la nécessite des Fintechs. En outre, le fait de travailler avec les Fintechs donne aux banques la possibilité d’améliorer le quotidien de ses clients à travers des logiciels adaptés qu’elles mettent à leur disposition.
Par ailleurs, notre interviewé chez SIF Groupe évoque la rapidité de développement des Fintechs et leur grande part de marché : « Un seul opérateur de téléphonie mobile qui fait des émissions de monnaie électronique a des transactions qui dépassent l’ensemble des transactions des banques du pays »89. Notre interviewé stipule également que les fintechs sont plus proches de la population et ont une plus grande connaissance de leur besoin : « Nous leur disons que par rapport à la digitalisation, voilà ce que les clients pensent parce que nous sommes sur le terrain à plein temps. Nous avons les informations, les retours d’expériences au niveau des populations, nous les partageons avec les fournisseurs de services financiers »90.
Par rapport aux banques traditionnelles, notre interviewé chez FEDAPAY déclare que les Fintechs sont beaucoup plus rapides. Selon ce dernier, bien que les banques traditionnelles disposent des ressources et un certain pouvoir, elles sont limitées par certaines restrictions : « les Fintech sont dans une optique qui consiste à aller plus vite et tester le plus de choses possibles, contrairement à une banque qui est dans une situation plutôt formelle »91. Également, il faut noter qu’en étant entièrement digital, les fintechs se base sur des solutions digitales et sont plus aptes à se tourner vers le Mobile Money pour s’élargir et atteindre le maximum de client. Les banques traditionnelles africaines, ont encore du mal à adopter pleinement cette digitalisation et leur modèle économique se base encore entièrement sur un système d’agence et le contact physique avec les clients « Je pense que les banques devraient plutôt s’orienter et penser plus à la solution digitale parce que cela leur permettrait réellement de toucher le plus de personnes et de réduire les agences qui, en fin de compte, leur coûtent énormément plus chères »92.
Par rapport aux banques traditionnelles, Fintech SEMOA pense avoir de nombreux avantages. Le plus grand avantage concerne sa capacité en recherches et développement. Selon notre interviewé, très peu de banques africaines ont une équipe de recherche et de développement, seules des équipes informatiques sont disponibles. « Les fintechs ont la capacité de construire et de développer des outils et des logiciels qui sont à un certain coût. Du coup, …. Ensuite, c’est d’équiper les banques, de leur vendre ces outils et de les équiper à développer leurs activités, leurs services vis-à-vis des clients sur la base de ces outils-là »93. Dans ce contexte, les fintechs peuvent apporter différentes opportunités aux banques traditionnelles. Selon notre interviewé chez la Fintech SEMOA, les opportunités sont au nombre de quatre, notamment les différents services qu’elle offre :
- Paiement de masse sur Mobile money ;
- La plateforme « WhatsApp Banking » ;
- Une plateforme pour l’encaissement marchand ;
- Une plateforme Cash Pay.
Avant de parler des avantages que pourraient avoir les Fintechs sur les banques, notre interviewé chez PAYPLUS AFRICA souligne d’abord que les Fintechs ne sont pas des concurrents pour les banques traditionnelles : « En réalité, nous ne sommes pas les concurrents des banques. Nous sommes juste, en fait, des prestataires de services. Notre objectif, c’est de faciliter l’accès des clients ou des populations aux services financiers. C’est aussi simple que ça. Ça ne va plus loin. Si, aujourd’hui, on se positionne comme concurrents de la banque ou des opérateurs de téléphonie mobile, ce serait à tort parce que quand on parle d’agrégateurs de Fintech, nous utilisons, en grande partie, des services basés sur les opérateurs aussi bien de télécommunications que de banque »94. Selon lui, le premier avantage des Fintechs sur les banques est qu’elles ont la possibilité de proposer des services qui concernent directement la population, contrairement aux banques qui se positionnent comme de grosses institutions. Il affirme que les banques ne s’intéressent pas aux petits aspects des services, alors que les fintechs s’y spécialisent. Si ces deux types d’entité entre en concurrence, ce sera notamment en raison du fait qu’en voyant le développement conséquent des fintechs, les banques chercheraient à mettre en place les mêmes types de service. Pourtant, notre interviewé se penche plutôt vers une logique de partenariat à travers laquelle les Fintechs assurent « le dernier kilomètre », en s’intéressant uniquement à un segment réduit de la population pour répondre à des besoins spécifiques.
Le Gérant de Bénin Fintech Group déclare que le principal avantage des fintechs par rapport aux banques traditionnelles est qu’elles sont désormais le département digital des microfinances. Les fintechs peuvent donc développer de bonnes formes de collaboration avec les microfinances : « Pour les Fintechs, c’est une grosse opportunité parce que pour ces microfinances, ayant eu pour activité principale pendant longtemps, le crédit et l’épargne, n’ont pas senti le besoin d’avoir du personnel qualifié pour développer les applications. Et, ce n’est pas leur souci, non plus. D’ici à là, ce sera une grosse opportunité pour les Fintechs si elles savent lire les besoins de ces microfinances-là pour apporter des solutions en matière d’inclusion financière et de bancarisation »95.
Pour notre interviewé chez Moov, le principal avantage des OTM est qu’ils disposent d’un parc client important, ils peuvent par conséquent optimiser le niveau de bancarisation : « Nous apportons un nouveau type de clients à la banque dans une logique d’inclusion financière et donc de bancarisation. Notre parc d’abonnés est constitué de NEW USER pour la banque. Même pour faire de la finance digitale à travers un crédit digital, nous avons l’historique des clients de par les opérations de Mobile Money que nous pouvons mettre à disposition des banques »96. Également, notre interviewé déclare que les OTM disposent également de l’avantage d’atteindre des zones reculées : « On permet aussi à la banque de ne pas aller créer des coûts additionnels en zone rurale puisque nous pouvons supporter ça de par notre réseau de distribution et de points agent »97. Par ailleurs, bien que les OTM doivent encore passer par les banques traditionnelles pour l’émission de monnaie, notre interviewé chez Moov déclare que les OTM sont capables d’émettre de la monnaie s’ils obtiennent l’agrément.
D’après le chef d’entreprise chez Open SI, son plus grand avantage sur les banques dans le cadre de la digitalisation financière est le fait qu’elle peut fournir des moyens de paiement à l’écosystème financier. En plus de cela, notre interviewé déclare également qu’elle se base sur le réseau d’un portefeuille de Mobile Money, ce qui est un avantage conséquent par rapport aux banques traditionnelles : « Nous on se propose d’utiliser l’outil auquel ils sont familiers à savoir leur portefeuille Mobile Money adossée à leur téléphone qui est un outil qu’ils ont tout le temps sur eux pour des besoins de communications pour résoudre la problématique des services financiers »98. Par ailleurs, notre interviewé chez Open SI déclare que la transformation numérique de l’écosystème présente une opportunité de développement pour la population africaine : « Si les gens possèdent des moyens de paiement, d’épargne et de crédit, ils peuvent participer à l’activité économique. Et s’ils participent à l’activité économique, ils peuvent générer des revenus qui peuvent dans une certaine mesure les sortir de la pauvreté »99. En plus de cela, il déclare également que les opportunités offertes par le Mobile Money dépassent largement l’aspect économique, cela offre également plus de facilité dans les transactions et plus de sécurité : « Les démarcations des opérations permettent aux gens de gagner du temps et de ne plus se déplacer pour aller payer des services immatériels comme par exemple leur assurance. Quand l’argent est digitalisé, si derrière, les systèmes informatiques sont bien sécurisés, alors c’est toujours plus intéressant que de transporter du cash »100.
Le plus grand avantage des fintechs et des OTM sur les banques traditionnelles est, selon le chef département Mobile Money chez MTN, le fait qu’ils disposent de clients utilisant des appareils connectés : « C’est des clients qui sont assez mobiles ; on va pouvoir facilement les reconvertir »101. Notre interviewé stipule également que les fintechs ont déjà une bonne connaissance des clients dans le domaine du « retail » étant donné que la téléphonie mobile aujourd’hui est accessible à tout le monde. Toutefois, notre répondant stipule que les banques demeurent des acteurs clés sur le marché financier dans la mesure où les activités qu’elles mènent sont réglementées donc plus sécurisées.
Enfin, selon notre interviewé chez Digital World Technologies, l’un des plus grands avantages des fintechs sur les banques traditionnelles est la question de conformité. En effet notre interviewé stipule que les banques traditionnelles sont soumises à des règles plus strictes. Autrement, elles font face à de plus importantes contraintes réglementaires, notamment en termes de développement technologique : « Parce les banques sont soumises à de plus en plus de règles, de plus contraintes réglementaires qui sont difficiles à satisfaire manuellement. La technologie doit beaucoup aider à rester conforme. Ayant dit cela je reviens à la question : il y a aujourd’hui une tendance à voir un antagonisme entre les deux. C’est ça on observe sur le terrain. Les Fintech arrivent en essayant de piquer du business aux banques »102. Dans ce contexte, notre interviewé estime que le meilleur moyen de se développer est de travailler en partenariat, car de leur côté, les fintechs ont aussi leurs limites : « Parce que les Fintech ont des limites, elles ont le savoir-faire technologique qui leur permet de développer les solutions. Mais au finish, les besoins du client sont des besoins purement bancaires Si je dois faire des paiements, il y aura toujours des comptes bancaires qui devront être mouvementé quelque part, la banque centrale interviendra toujours pour réglementer un certain nombre de choses, il y aura toujours de la compensation et si on observe ce qui se passe avec les opérateurs mobiles, ça c’est une de leur limitation »103. Autrement dit, le métier de la banque reste à la banque ; il y a certaines limites que ni les fintechs ni les OTM ne peuvent franchir. Il y a par exemple les services de crédit ou d’épargne qui ne peuvent être octroyé que par les banques traditionnelles : « Pour moi, la solution se trouvera in fine dans une collaboration entre les banques et les Fintechs. Les banques apportant toute la partie service bancaire et conformité réglementaire et les Fintechs apportant l’accès aux clients »104. Notre interviewé chez Digital World Technologies stipule également que les fintechs bénéficient d’une plus grande agilité que ce soit en termes de développement de nouveaux produit ou d’élargissement de marchés : « Ils n’ont pas de limitation territoriale comme les banques »105. Toutefois, les banques ne peuvent agir seules. Elles ne peuvent pas encore se passer des banques traditionnelles, compte tenu de la règlementation actuelle : « même s’il y aura des changements en termes de réglementation, ce n’est pas demain que cela va se faire. Il faudrait de profonds changements dans la réglementation une dérégulation sérieuse pour qu’on puisse arriver. Et cette dérégulation ne va pas se produire de sitôt parce que par ailleurs, les risques deviennent de plus en plus importants dans le monde de la finance. Et donc, il faut encore plus de régulations et donc cela va être compliqué »106.
- Les formes de collaboration proposées
Bien que les OTM et les FinTechs proposent déjà des solutions de services financiers pour optimiser le niveau de bancarisation de la population, ils considèrent encore qu’il serait encore plus judicieux de travailler avec les acteurs traditionnels qui sont déjà présents sur le marché afin que les solutions proposées soient plus effectives.
Étant donné que les banques africaines ne sont pas encore structurées pour faire de l’innovation, notre premier répondant affirme qu’il se montre plus qu’important de mettre en place une forme de collaboration bienveillante s’inscrivant dans une phase de restructuration, et cela doit aller dans les deux sens. Il s’agit donc de mettre en place une collaboration responsable et solidaire afin que les acteurs concernés grandissent grandir ensemble. Il est alors important que les deux parties témoignent de la faisabilité et de la réussite de cette collaboration et montrer que c’est tout à fait possible. Par ailleurs, lorsque la collaboration n’est pas possible, notre premier interviewé stipule qu’il faut au moins un accompagnement. Cela peut se faire par exemple à travers la mobilisation d’un incubateur qui va inculquer l’utilisation des nouvelles technologies à chaque membre de l’organisation.
Pour notre le responsable de SIF GROUPE, la meilleure collaboration entre les fintechs et les banques traditionnelles serait de prendre l’exemple de « Banque to wallet » ou « Wallet to Bank ». Il s’agit de signer un accord de partenariat à travers lequel les opérateurs de téléphonie mobile se positionneront comme un « canal de distribution » : « vous pouvez épargner au niveau de ces structures-là à travers nous ; vous pouvez appeler votre agent depuis votre compte épargne sur votre Wallet »107.
Selon le promoteur de FEDAPAY, le modèle de collaboration qui peut être pertinent entre les banques traditionnelles et les fintechs serait un partenariat qui permettrait de rendre plus accessibles certains services financiers, par exemple les cartes de crédit. Il pense également que cela permettrait aux gens de gérer leurs dépenses sans nécessairement se déplacer pour aller dans les agences : « l’idée, en fait, c’est d’avoir une certaine interface entre les services des cartes de crédit sur lesquels on est beaucoup plus focalisés et les services Mobile Money et USSD. Il s’agit de créer un pont qui facilite les envois ou les transferts et les types de transactions qu’il peut avoir entre les cartes de crédit ou entre Mobile Money et plusieurs cartes de crédit ou encore entre plusieurs comptes. Ils appellent ça comptes virtuels des marchands ou distributeurs »108. Dans ce scénario, il s’agit donc de profiter des avantages des fintechs au profit des banques traditionnelles, notamment la rapidité et l’accessibilité. Par ailleurs, les fintechs auront l’avantage d’être plus conformes : « Les Fintech qui naissent n’arrivent pas forcément à être conformes à certaines normes que la BCEAO, par exemple, demande dans le domaine financier. C’est aussi l’une de nos préoccupations »109.
Pour la fintech SEMOA, la forme de collaboration avec les banques traditionnelles serait une idée de recherche et de développement ou encore de l’innovation. Cela permettrait aux banques traditionnelles de profiter de l’agilité des start-ups. Pour les start-ups, le bénéfice serait de pouvoir commencer sa phase de structuration avec un accompagnement bienveillant. Il s’agit donc d’un business à la fois solidaire et responsable afin de grandir ensemble : « Il faut aussi dire qu’on l’a fait pour mettre en valeur les uns et les autres »110.
Pour le gérant de PAYPLUS AFRICA, la collaboration à mettre en place avec les banques traditionnelles seraient un partenariat sur le plan transfert de fonds : « aujourd’hui, l’interconnexion des banques avec les Fintechs n’est pas quelque chose de vraiment évident. Le partenariat banque et Fintechs intervient, en tout cas à mon sens et pour ce que je vois actuellement, au niveau des transferts de fonds et de leur gestion »111. Cette forme de collaboration est déjà en place avec la start-up et ces partenaires. Dans la cadre de partenariat, les fonds doivent passer par un réseau bancaire avant d’être reçu par PAYPLUS AFRICA, lorsqu’il s’agit d’un transfert international. Les transferts se font totalement en ligne. Par ailleurs, notre interviewé déclare qu’il serait aussi opportun de mettre en place un partenariat sur le plan technique, et plus précisément sur les modes de paiement. La start-up dispose déjà d’un service de paiement par échelons, mais le statut de fintech ne lui a pas permis d’assurer la continuité de l’offre, c’est pourquoi un partenariat avec les banques est nécessaire. Dans ce contexte, les banques se présentent sous forme de garant et permettront aux start-ups d’avoir une autorisation légale et formelle : « Ce produit peut faire l’objet d’un partenariat entre une Fintech qui a développé la solution et la banque ou la structure d’assurance qui se porte garante de ce produit-là. Et, les deux, ensemble, font la promotion du produit. De même, il y a d’autres produits sur le terrain actuellement et qui sont l’œuvre de l’association des Fintechs et des banques »112. Selon toujours notre interviewé chez PAYPLUS AFRICA, la coopération entre les banques traditionnelles et les Fintechs est bénéfique pour les deux parties car premièrement, il y aurait partage de revenus. Ensuite, les banques pourront élargir leur clientèle, par exemple aux étudiants.
Par ailleurs, d’après notre interviewé chez Bénin Fintech Group, les fintechs et les banques traditionnelles, plus particulièrement les microfinances, doivent travailler ensemble pour fournir des services de paiement en ligne et se développer : « Les microfinances ont besoin des Fintechs pour développer des Api, des plateformes digitales pour leur permettre d’être présentes sur ces marchés. Toutes les banques ne sont pas contrôlées par des capitaux étrangers. L’avantage, pour les structures financières, c’est qu’on peut avoir des partenariats qui ne sont pas des partenariats où c’est du ” Pay As You Go”. Ce n’est pas comme si on leur demandait de payer 1 euro pour avoir une plateforme. C’est qu’on peut avoir des partenariats sur des modèles où on déploie la plateforme »113. Cette forme de collaboration devrait permettre d’offrir aux populations des solutions adaptées. Notre interviewé déclare également que le partenariat avec les microfinances est plus pertinent car elles sont plus ouvertes par rapport aux banques traditionnelles : « C’est une grosse perte de temps que de discuter avec les banques. Si vous discutez très longtemps, avec les gens, qui finissent par comprendre au bout de six, sept mois qu’ils ne peuvent pas prendre des décisions ».114 Pour faire face à cette situation, notre interviewé estime que l’État doit intervenir et entrer dans un modèle de protectionnisme un peu déguisé en imposant des quotas de collaboration aux institutions qui collectent de l’argent sur notre marché.
Notre interviewé chez Moov stipule qu’il faut mettre en place un système de partenariat équitable et cela en fonction de ce que chacun apporte : « Donc pour un modèle de partenariat équitable, il est important que les acteurs puissent réellement sortir leur proposition de valeur qui puisse avoir différents niveaux de risque »115.
Pour notre interviewé chez Open SI, plusieurs formes de collaboration peuvent être mise en place avec les banques mais cela n’est pas toujours facile : « les banques quand elles ne nous voyaient pas comme des concurrents, elles nous voyaient comme des menaces potentielles à la sécurité de leurs transactions »116. Face à cette situation, notre interviewé déclare que les collaborations ne peuvent se faire qu’avec les opérateurs de Mobile Money car seuls ces derniers sont ouverts et permettent le développement de plusieurs types d’activités : des transferts transfrontaliers, des activités de paiements à l’interne et des activités d’épargne.
Selon toujours le dirigeant de la fintech Open SI, c’est grâce au succès de cette forme de collaboration que les banques ont petit à petit accordé plus de considération aux fintechs. Une considération renforcée par les opérateurs Mobile money qui ont commencé à travailler avec elles et qui, grâce à cela, ont réussi à s’attaquer à des domaines dédiés uniquement aux banques traditionnelles : « par exemple avec notre agrégateur de paiement, c’est une collaboration avec les acteurs de Mobile Money pour commencer. Donc nous sommes connectés à l’infrastructure Mobile Money et on permet à quelqu’un d’utiliser son portefeuille pour payer. L’opérateur nous permet d’avoir accès à sa structure pour défalquer le client ou pour créditer son compte »117. Open SI effectue déjà ce type de service en collaboration avec les banques et à travers lequel les consommateurs peuvent utiliser leur compte en banque pour payer des services en ligne. Selon notre interviewé, le type de collaboration est encore de type structurel. Pour Open SI, la collaboration avec les opérations Mobile Money ou les banques revêt avant tout une valeur financière : « Nous apportons une infrastructure technique pour compléter et améliorer le service de l’opérateur financier, c’est-à-dire, la banque ou l’opérateur Mobile Money. Et nous revendons ce service à notre client qui est prêt à payer pour ça parce que les opérateurs et la banque n’ont pas ce service »118. Selon toujours notre interviewé chez Open Si, la collaboration avec les banques ou avec les opérateurs de Mobile Money offre des bénéfices mutuels car chaque partie y gagne.
Pour notre interviewé chez MTN, la forme de collaboration pertinente serait une collecte de ressources et un partage de service de paiement : « La Fintech permet aussi à la banque, avec un partenariat, de pouvoir mobiliser, collecter des ressources. Il y a plusieurs autres services tels que le service de paiement etc. On a des projets avec les banques pour accélérer l’inclusion financière. 119» Dans ce contexte, notre interviewé affirme que MTN considère les banques comme des partenaires et non comme des concurrents. Selon lui, les opérateurs mobiles et les fintechs couvrent les zones non couvertes par les banques : « Nous venons donc compléter les domaines où les banques ne pouvaient pas aller aussi pour des questions de rentabilité, de profitabilité. Une agence bancaire ça coûte beaucoup d’argent et forcément, la banque doit pouvoir avoir son modèle de telle sorte que cela puisse être soutenable. Pour nous, nous ne sommes pas dans une logique concurrentielle nous sommes dans une logique de complémentarité »120. Également, notre interviewé chez MTN déclare que le partenariat entre les banques et les OTM offre des bénéfices mutuels dans la mesure où les opérateurs mobiles apportent de nouveaux clients à la banque alors que cette dernière apporte une certaine légitimité aux OTM : « Les ressources qui étaient hors de contrôle des banques, c’est des ressources que nous, on ramène aujourd’hui dans le système financier. Du point de vue règlementaire, en étant émetteur de monnaie électronique, il y a des choses que vous n’êtes pas autorisés à faire et que vous ne pouvez faire qu’en étant en collaboration avec les banques. »121
Pour Digital World Technologies, la forme de collaboration envisagée avec les banques traditionnelles est le développement d’applications pour permettre l’e-banking. Pour notre interviewé, c’est le moyen de développer l’open banking. Le système fonctionne comme suit : « j’ai des partenariats avec des banques et si vous télécharger mon application et vous l’installer, elle vous donne des services dans les genres je peux envoyer western union ou recevoir directement à partir de mon application mobile. Je peux payer ma facture d’électricité ou d’eau à partir de l’application mobile. Maintenant je vais aller négocier avec les banques et leur dire ‘’permettez à vos clients d’intégrer leur compte bancaire sur la plateforme ou leur carte bancaire sur ma plateforme ou leur compte Mobile Money sur ma plateforme. Maintenant si le client veut payer sa facture il peut débiter directement sur son compte bancaire ou son compte Mobile Money ou il peut même agréger son compte bancaire à son Mobile Money pour faire l’appoint à partir de la même application »122. Toutefois, notre interviewé explique que l’application est encore difficile à vendre étant donné que les banques souhaitent garder leurs clients. Mais d’ici quelques années, les banques n’auront plus le choix que d’y accéder, car les solutions développées par les fintechs apporteront beaucoup d’avantages aux clients. Par ailleurs, Digital World Technologies développent également d’autres types de services pouvant intéresser les banques traditionnelles : le « correspondant banking’ ». Selon notre interviewé, cette solution est destinée aux banques internationales qui ne souhaitent pas être en correspondance avec les banques africaines à cause des problèmes de lutte contre le blanchiment d’argent, des risques qu’elles encourent en travaillant avec des banques qui n’ont pas une gouvernance solide, etc. : « il y a des banques africaines aujourd’hui qui ne peuvent plus faire des transactions à l’international parce qu’elles n’ont pas de correspondants. On a rencontré une banque qui nous a dit, moi j’ai une seule correspondance en France, ils ne font que de l’Euro. Je ne peux pas offrir de crédits documentaires à mes clients parce que ce n’est pas compétitif. Pour un crédit documentaire en dollars, je suis obligé de passer par la banque qui est en euro qui va passer par son correspondant en États-Unis qui est en dollars (….) ce n’est pas compétitif. Nous, on leur apporte une solution qui est en même temps une plateforme technologique de la Fintech plus un arrangement. Sur notre plateforme nous fédérons des banques du monde entier. On va chercher les banques correspondantes dans tous les pays du monde, un peu comme Swift à l’époque. Une fois qu’elles sont agrégées à notre plateforme, elles deviennent des relais des autres banques membres de la plateforme dans leurs propres pays »123. Dans le cadre de cette collaboration, notre interviewé déclare qu’il doit s’agir d’un partenariat gagnant-gagnant : « l’intérêt de la banque à être participante de cette plateforme c’est qu’elle peut dire à ses clients, si vous êtes mes clients j’assure vos transactions internationales. La banque pourra en ce moment dire à ses clients quel que soit l’endroit du monde où vous voulez faire des transactions, moi je vous garantis que je peux vous accompagner dans les délais très courts et des coûts moindres »124
Lorsque nous avons analysé le mot banque, nous avons pu observer un croisement avec différents points essentiels : partenariat, pouvoir, digital, collaboration, solution, service, permettre, compte, etc.
Cette analyse croisée met déjà en évidence le fait que les banques ont besoin d’une collaboration avec les entreprises innovantes pour élargir la portée de leurs services financiers et augmenter le niveau de bancarisation de la population africaine.
Toutefois, bien que la collaboration soit possible entre les trois acteurs, les OTM et les fintechs ont soulevé certains inconvénients qui pourraient nuire à son bon déroulement.
- Les possibles inconvénients de la collaboration selon les OTM et les FinTechs
Selon la première personne que nous avons interviewée, la première difficulté dans la mise en place des nouvelles technologies dans les banques africaines est le processus de décision trop long. En effet, les dirigeants sont souvent réticents quant à la réalisation de projets innovants, une situation qui freine grandement la numérisation des banques traditionnelles africaines.
Notre interviewé chez SIF GROUPE déclare que le premier inconvénient dans le cadre de la collaboration des banques traditionnelles avec les Fintechs est l’impossibilité pour certains personnels d’utiliser régulièrement les services proposés, notamment pour celles situées dans des zones enclavées ou dans les centres urbains : « l’inclusion financière n’a de sens que lorsque la personne ayant accès aux services l’utilise régulièrement. Si la personne a juste accès aux services, ce n’est pas encore de l’inclusion financière »125. Dans ce contexte, notre interviewé propose une optimisation de l’éducation financière.
Selon notre interviewé chez FEDAPAY, les principaux défis dans le cadre d’une collaboration entre les fintechs et les banques traditionnelles se rapportent à la législation et la normalisation des fintechs, d’autant plus qu’en Afrique, il n’y a pas encore de textes qui régissent ces types d’entreprise : « En fin de compte, les Fintech peuvent penser aux solutions. Ces dernières peuvent marcher. Mais, il reste que la BCEAO puisse vraiment donner son aval et dire que cette solution que cette Fintech a donnée est vraiment conforme à telle norme. Elle peut fonctionner, être élargie de tel à tel pays. La BCEAO n’a vraiment pas encore un environnement très bien pensé pour les Fintech »126. Ce qui fait que les fintechs existent et ne sont pas interdites, c’est qu’elles offrent des solutions auxquelles les banques ne peuvent pas vraiment penser. Étant donné que seules les banques traditionnelles disposent des moyens et des logistiques financières nécessaires, elles peuvent choisir les solutions fintechs qui leur correspondent en achetant directement une start-up ou en travaillant en collaboration avec elle. La collaboration se base donc sur un système de « Revenu chairing » : « là, la start-up grandit parce qu’elle a accès à un service, à un portefeuille. La banque va déployer son service. La banque peut, de cette façon-là, élargir son produit à d’autres pays. Ça, c’est le genre de modèle qui marche déjà dans les autres pays et qui est avantageux à la fois à la Fintech et à la banque »127.
Selon notre interviewé chez SEMOA, le principal inconvénient dans le cadre d’une collaboration entre les banques traditionnelles et les start-ups se rapporte au fait de subir les processus longs des grands groupes : « On va dire que pour quelqu’un qui démarre et qui n’a pas forcément de la trésorerie, ça peut être très impactant de subir finalement les process de décisions longs des grands groupes »128. Si la collaboration n’est pas possible, notre interviewé déclare qu’il faut que les banques adoptent une stratégie d’accompagnement : monter des bootcamp, monter des incubateurs, etc. A travers ces différentes formes de collaboration, notre interviewé déclare que la banque n’aura pas d’engagement commercial vis-à-vis des start-up. Elle apporte juste son environnement, ses connaissances et également ses contacts aux start-up qui en ont besoin.
D’après notre interviewé chez PAYPLUS AFRICA, la collaboration entre les banques et les Fintechs peut renforcer la concurrence. Autrement, les banques qui trouveront des avantages à travers leur collaboration avec les Fintechs peuvent être tentées à développer les mêmes services en faisant appel à des équipes internes pour les développer. Dans ce contexte, elles deviendront des concurrents directs pour les Fintechs « la banque elle-même ou l’opérateur de téléphonie mobile peut mettre en place tout ce qu’il faut comme services pour pouvoir le faire au vu de sa capacité financière ». Pour cela, notre interviewé déclare qu’il n’y a pas encore de modèle de partenariat pertinent pour que les deux parties puissent se protéger l’une et l’autre, notamment pour les Fintechs qui ont besoin d’autorisation pour se développer pleinement et légalement ; une autorisation qui ne peut s’obtenir sans avoir un statut de banque ou sans collaboration avec une banque : « Toutes les Fintechs que je vois, aujourd’hui, si vous voyez derrière, il y a forcément un partenariat avec les opérateurs de téléphonie mobile ou directement avec les banques. La Fintech a besoin d’être en partenariat avec la banque ou les opérateurs de téléphonie mobile. Maintenant, les opérateurs, eux, étant déjà gros, arrivent vite à passer parce qu’eux, aussi, sont en train d’obtenir des licences bancaires »129. La plus grande difficulté est donc du côté des Fintechs. Elles peuvent facilement disparaitre si les grands opérateurs et les banques traditionnelles arrivent à développer les mêmes services qu’elles. Face à cette situation, notre interviewé déclare que le plus grand atout des Fintechs est qu’elles sont très innovantes : « un opérateur de téléphonie mobile ou une banque ne peut pas penser à tout. La preuve, c’est que nous, aujourd’hui, on a notre casquette d’agrégateur. Mais, nous sommes en train de virer vers la casquette de prestataire de services parce qu’on sait que les moyens de paiement sont déjà là. Le reste est d’amener les gens à les utiliser. »130.
Pour notre interviewé chez Open SI, le premier inconvénient dans la collaboration avec les opérateurs de Mobile Money est qu’ils peuvent à tout moment décider d’arrêter la collaboration, par exemple lorsqu’ils ne sont pas satisfaits des profits réalisés ou lorsqu’ils décident de créer en interne le même type de service : « C’est comme des banques qui lancent des applications dans lesquelles elles veulent vendre du crédit AIRTIME ou avoir un canal USSD ou faire des applications de Mobile Money pour concurrencer les opérateurs de téléphonie mobile »131. En raison de ce risque, notre interviewé stipule que la seule forme de collaboration pertinente est soit d’étendre le service bancaire déjà existant soit de développer des modèles déjà existants. Par ailleurs, pour que les fintechs puissent se développer sans risque, il serait opportun qu’elles obtiennent un agrément de l’État : « comme en occident où à un moment donné l’État a sorti des directives pour dire qu’il faut faciliter l’intégration des Start up et leur permettre de lancer des services en « Stand Alone ». Il faut comme en occident mettre en place l’Open Banking comme le stipule la directive DSP2132.
Pour le gérant de Digital World Technologies, il n’y a généralement pas d’inconvénients dans le cadre la collaboration entre les banques traditionnelles et les fintechs. S’il y en a, cela sera au niveau des parties concernées « Ce n’est pas la collaboration en soi qui comporte des inconvénients. C’est la manière dont les uns et les autres peuvent concevoir la collaboration qui peut comporter les inconvénients. Par exemple cette conception qui a eu coup pendant un moment et qui persiste un peu pour les Fintech de penser qu’elles vont venir remplacer les banques, à mon avis ça ne peut pas prospérer. Les banques estiment toujours que la Fintech c’est des gadgets que ça ne marchera jamais dans le monde financier, à mon avis c’est dépassé cette conception. Mais si les deux comprennent qu’elles ont des intérêts à travailler ensemble et qu’elles définissent bien ce qu’elles attendent l’une et de l’autre, pour moi c’est tout bénéfique »133.
- La question de gestion des risques
La gestion des risques dans le cadre de la collaboration entre les banques traditionnelles et les Fintechs dépend grandement de la forme de collaboration mise en œuvre par les deux parties concernées. Pour ce qui est des risques liés au blanchiment d’argent, il est nécessaire avoir dans son entreprise une équipe qui s’occupe de cette problématique à travers l’intégration de normes qui régissent toutes les activités.
Pour faire face à la gestion des risques bancaires dans un contexte de digitalisation, notre interviewé chez FEDAPAY stipule que les logiciels utilisés doivent être conformes aux normes. Ainsi, compte tenu de ces risques, notre interviewé déclare qu’afin qu’il y ait une collaboration efficace, il faut d’abord que les banques traditionnelles soient ouvertes aux solutions proposées par les fintechs pour que ces dernières soient légitimées. Dans ce contexte, les banques traditionnelles se positionnent comme une sorte de bouclier pour les fintechs.
Selon notre interviewé chez SEMOA, si la collaboration entre les start-ups et les banques s’effectue dans une logique commerciale, alors aucun risque n’est encouru, particulièrement pour la banque. Par ailleurs, en ce qui concerne les risques se rapportant au blanchiment, et au terrorisme, la fintech SEMOA procède déjà à la sensibilisation de son personnel pour la gestion de ces problématiques : « Si vous voulez, dans l’éthique même, dans la formation des dirigeants et dans l’apprentissage des collaborateurs au quotidien, cet ADN-là est transmise de facto »134. Également, des normes PCIDSS sont déjà incluses dans son organisation interne. Notre interviewé déclare également que les banques traditionnelles africaines doivent adopter une démarche d’open innovation pour avoir plus d’agilité : « En se cachant derrière une vague notion de sécurité, on s’interdit de collaborer avec des petites structures alors que celles-ci ont peut-être des idées vraiment révolutionnaires »135.
Afin de gérer les risques se rapportant à la collaboration entre les banques et les Fintechs, notre interviewé chez PAYPLUS AFRICA déclare qu’il faudrait commencer par respecter les normes de sécurité. Ensuite, il faut rassurer les clients quant à la légitimité et la légalité des services offerts. Il faut également s’assurer que les clients, c’est-à-dire les marchands, soient enregistrés et mènent une activité légale.
Pour la question de gestion des risques, notre interviewé chez Moov déclare que les OTM mettent déjà en place des mesures destinées à assurer la sécurité de leurs opérations. Pour cela, ils exigent pour chaque client d’avoir un compte enregistré qui sera ensuite vérifié : « il faut que l’abonné qui veut faire une opération bancaire ait un compte enregistré ; donc il existe des fiches de souscriptions ou des formulaires que les abonnés signent ; il y a une équipe qui vérifient l’authenticité des pièces des abonnés pour être sûrs que ce sont les mêmes clients »136. Dans ce contexte, le client peut soit à être enregistré partiellement ou totalement. Dans le premier cas, les opérations effectuées ne doivent pas dépasser 200000 FCFA par mois. Des plateformes sont mises en place pour détecter les transactions suspicieuses, notamment les clients qui font des émiettements de transactions pour dépasser les limites établies : « Tous les jours le système sort ces numéros qui sont envoyés vers des services qui interpellent les abonnés. Aujourd’hui, aussi on travaille en étroite collaboration avec la Police, la CRIET, l’OCRC. Il est exigé que pour toutes les opérations de dépôt d’argent ou retrait, que l’agent exige la pièce d’identité du client »137. Dans le second cas, les clients peuvent faire des transactions atteignant les 10 millions de FCFA par mois. Par ailleurs, les OTM comme Moov se procurent également de structures et de services d’assurances et fraudes. Par ailleurs, notre interviewé stipule que Moov devrait avoir une liste noire ou une liste rouge pour identifier les transactions suspicieuses : « On devrait avoir une liste noire ou plutôt une liste rouge pour identifier que ces genres de transactions venant de tel ou tel numéro ne devraient pas passer ou être validées »138.
Pour notre interviewé chez Digital World Technologies, le principal risque dans le cadre de la collaboration entre les fintechs et les banques traditionnelles est le risque de crédit intrinsèque. Ce risque concerne plutôt les fintechs, car d’après notre interviewé : « si elles commencent à faire du crédit, elles seront exposées au même risque que les banques quand elles font du crédit et elles seront soumises à la même réglementation ce qui ferait d’elles pratiquement des banques. Donc ce sont des Fintech qui vont devenir des banques. Ou bien alors, elles seront obligées de rester sur leur métier de Fintech et laisser les banques à continuer à gérer les risques »139. Pour se protéger des risques encourus, notre interviewé chez Digital World Technologies déclare que la meilleure forme de collaboration serait le partage de revenus : « C’est le modèle le plus commun et le plus utilisé. En d’autres termes, si moi la Fintech je construis un réseau, une plateforme qui permet de canaliser les clients vers une banque, ce que j’attends de cette banque, c’est qu’elle me rétrocède une partie des revenus qu’elle gagne ou qu’elle me paye par client ramené ou par transaction ramenée. Moi c’est le modèle du futur si on considère qu’avec l’Open banking, les Fintech seront amenées à travailler avec plusieurs institutions bancaires à la fois »140.
Les différents résultats que nous avons présentés précédemment révèlent que les OTM et les FinTechs sont prêts à travailler avec les banques traditionnelles pour proposer des services financiers innovants et qui correspondent aux besoins de la population africaine. Toutefois, il y a certains défis qui doivent être relevés dont les principaux sont : la lenteur des banques traditionnels dans les processus de prise de décision, le caractère informel des FinTechs, la peur des fintechs quand à la possibilité de retournement des banques sur leurs décisions, etc.
Ainsi, il se montre important de voir la position des banques quant à la possibilité d’une collaboration avec les OTM et FinTechs, les risques encourus et les inconvénients. Mais avant de présenter ces éléments, nous jugeons utile de commencer par la considération des banques traditionnelles africaines de la digitalisation, car une grande partie de la collaboration à mettre en place se base sur cette dernière.
La position des banques quant à la mise en place d’une forme de collaboration avec les OTM et les FinTechs est analysée en fonction de trois points essentiels : considération de la digitalisation par les banques traditionnelles africaines, les défis en termes de digitalisation, les avantages dont elles disposent par rapport à ces deux acteurs, les opportunités qu’elles pourraient avoir à travers cette collaboration et les formes de collaboration qu’elles mettent déjà en place.
- Considération de la digitalisation par les banques traditionnelles et les projets qu’elles mènent actuellement
Pour le DSI BOA, la transformation était premièrement mise en place pour compenser le manque de sécurité des processus existants. L’adoption des nouvelles technologies pour cette banque est également de permettre aux clients d’avoir accès à leur compte de chez eux.
Le DSI BOA a décidé de travailler dans les banques car il constate que le monde actuel est en train de changer : « Pourquoi ai-je viré vers la transformation digitale ? C’est parce que c’est une exigence parce qu’au moment où, moi, j’ai commencé à travailler à la banque, il n’y avait pas trop de sécurité au niveau du système d’informations de gestion qu’on utilisait. Mais, avec l’évolution, il y a eu des mises à jour et d’autres paramètres qu’on a ajoutés. Et, finalement, on a vu qu’il est temps de permettre au client, depuis chez lui, d’avoir accès à son compte »141.
Actuellement, la DSI BOA met en place une plateforme qu’elle appel « Money for poor ». Cette plateforme a comme objectif de permettre à la population cible de payer leurs factures en mobilité sans nécessairement se déplacer.
Actuellement, UBA BANK est en train de mener un projet destiné à interconnecter les banques. Le projet est financé par Bill Gates. L’objectif du projet est de permettre aux banques de se rallier et surtout de comprendre les risques auxquels elles s’exposent face à l’émergence des nouvelles technologies de l’information et de la communication : « Dans le système bancaire, ce n’est pas la force financière qui vous maintient dans votre optique. Mais, en réalité, c’est comment vous arrivez à vous adapter aux marchés qui vous permet d’être toujours sur le marché »142.
L’an dernier, la Banque Atlantique a mené un projet avec le groupe Etisalat : Wallet to Bank et le Bank to Wallet (portefeuille électronique). L’objectif est de permettre aux gens de gérer leur compte sur leur portefeuille électronique.
- Les défis dans le cadre de cette transformation
Le premier défi pour les banques traditionnelles est de faire face à un environnement qui ne cesse de changer. Par rapport à la transformation digitale du secteur financier, notre interviewé chez BOA stipule également que cela est encore difficile, car en plus du niveau élevé d’analphabétisme, empêchant l’utilisation des Smartphones par la population africaine, il y a également la question de couverture des réseaux internet qui est encore très faible : « C’est vrai que selon les statistiques qui ont été envoyées, près de 40% du pays sont couverts, mais là, je dis non par rapport à la connexion internet dans le pays. Quand je vais en mission, dans le Nord, je constate qu’à des endroits donnés, je suis à Edge au lieu de 4G donc la connexion internet fait défaut. Or, les populations qu’on veut desservir sont dans ces zones-là »143. À part cela, notre interviewé déclare également que la plupart des banques traditionnelles africaines sont encore réticentes à entrer dans le mouvement de la digitalisation : « Il a fallu une bataille rude avec le top management pour que les gens comprennent que si on ne se lève pas tôt, on va laisser la place aux opérateurs de téléphonie mobile »144. Par ailleurs, notre répondant constate également que les banques traditionnelles font face à d’importants concurrents : les opérateurs mobiles. En effet, si les opérateurs téléphoniques obtiennent l’agrément des banques centrales, les banques commerciales traditionnelles risquent de disparaitre, il faut donc une forme de collaboration entre ces deux acteurs.
Pour la deuxième banque que nous avons approchée, c’est-à-dire Coris Bank, la personne que nous avons interrogée a indiqué que le premier défi rencontré par les banques face à la digitalisation est la survie de la banque en elle-même : « Je pense que la banque traditionnelle va disparaître petit à petit. Nos zones de conforts d’aujourd’hui sur lesquelles on se base pour faire à notre manière la banque traditionnelle, la banque conservatrice, vont disparaître »145. Selon cette personne, avec la digitalisation, les banques traditionnelles vont progressivement disparaitre. En effet, il peut être difficile pour les banques traditionnelles africaines de résister aux différents changements technologiques de son environnement. Ainsi, les banques risquent de perdre une part conséquente de leur part de marché, notamment les petites structures (les microfinances) face aux structures qui sont plus agiles. En effet, rivaliser avec les nouveaux acteurs du secteur est particulièrement difficile pour les banques, surtout pour celles qui ne sont pas encore digitalisées : « On va commencer par perdre ces parts de marché au profit de ces structures beaucoup plus affutées et plus agiles. Donc le défi sera de résister à toutes ces vagues là et de continuer à vivre. Il sera question aussi de se mettre à jour, de suivre le rythme et pouvoir rivaliser. À mon avis je pense que c’est les défis majeurs »146.
Pour notre interviewé chez UBA Bank, le premier défi des banques traditionnelles face à la numérisation est la dématérialisation des processus manuels : « Au lieu d’utiliser le processus manuel, il faudrait qu’on le digitalise. Au niveau des factures, des formulaires, il faudrait qu’on arrive à faire du digital »147. À part cela, il y a également la question de sécurité des données client et la sauvegarde : « Jusqu’aujourd’hui, les banques n’ont pas encore trouvé la formule idéale pour pouvoir bien sécuriser les cartes visa »148.
D’après notre interviewé chez Banque Atlantique, le plus grand défi à relever par les banques en termes de digitalisation est la lourdeur de leur processus tout en stipulant qu’à termes, les banques traditionnelles risquent de disparaitre si elles ne nouent pas une relation avec les Fintechs : « La banque standard traditionnelle va disparaître. Elle est en train de disparaître déjà. C’est pourquoi dans nos banques, on ferme nos agences parce qu’on n’a pas anticipé sur la digitalisation »149. Notre interviewé déclare également que les banques traditionnelles doivent réfléchir au concept d’Agency Banking.
Selon notre interviewé chez ORABANK, le plus grand défi des banques traditionnelles face à l’évolution des technologies de l’information et de la communication est la digitalisation elle-même, car d’après lui : « Maintenant, si une banque ne se met pas dans ce secteur, elle va disparaître »150. Notre interviewé déclare également que la transformation numérique va supprimer ou réduire certains services : « Il y aura certains services qui, d’une manière ou d’une autre, ça va être réduit. Je ne veux pas dire que ça va disparaître. Il y aura une intervention humaine réduite derrière. Ça, c’est quand même un vaste chantier. Si, une banque ne s’aventure pas sur ce chantier, elle va disparaître »151.
Les résultats des entretiens montrent que les banques traditionnelles africaines rencontrent encore de grandes difficultés en termes de digitalisation. En effet, elles stipulent que la lourdeur de leur processeur ne leur permet pas d’entamer entièrement la digitalisation bien qu’elles soient conscientes que cela pourrait répondre au problème de bancarisation, bien que pour une partie, étant donnée qua la majorité de la population africaine est analphabète et ne sait pas utiliser les appareils innovants. Toutefois, les banques traditionnelles africaines sont totalement conscientes que les OTM et les fintechs sont déjà en train de les concurrencer sur leur marché et que ces nouveaux acteurs attirent une grande partie de la population, surtout les personnes qui n’ont pas la possibilité ou qui ont d’ouvrir un compte bancaire ou celles qui n’ont pas les fonds nécessaires pour cela.
Toutefois, les résultats des entretiens mettent en évidence le fait que les banques traditionnelles ont différents avantages concurrentiels par rapport aux OTM et aux FinTechs.
- Les avantages concurrentiels dont disposent les banques face aux nouveaux acteurs : les Fintechs et les OTM
Le premier avantage des banques traditionnelles face aux nouveaux acteurs sur le marché est leur connaissance du métier de la financière, notamment en raison de leur expérience et de leur ancienneté sur le marché.
Pour notre interviewé chez Coris Bank, le premier avantage des banques traditionnelles face aux Fintechs est leur connaissance du métier de la finance, leurs expériences acquises depuis des décennies, leur maîtrise du risque et accessoirement leur forte capacité financière à faire face aux pertes ou aux dangers financiers.
Selon notre interviewé chez ORABANK, le plus grand avantage des banques traditionnelles est le fait que les Fintechs ne pourront jamais les remplacer. Et même si ces deux entités travaillent en partenariat, les banques auront toujours une position supérieure : « Elles vont exister, mais ne peuvent jamais travailler sans une banque. Si c’était une complémentarité, c’est à la banque de savoir mieux se positionner, mieux négocier. Moi, je pense que, du côté banque, on a tant de choses à faire. Et, on peut mieux utiliser ces OTM et ces Fintechs pour avancer et conquérir plus de part de marché »152.
Comme le montre la figure ci-dessus, les banques disposent d’un important pouvoir sur le marché financier par rapport aux OTM et aux FinTechs. Laur principal force se rapporte à leur caractère réglementaire.
Toutefois, bien que les banques traditionnelles disposent d’une certaine forme de légitimité sur le marché des services financiers, force est de constater que les services qu’elles fournissent sont limitées car ne correspondent pas à la majorité des populations africaines.
Ainsi, les banques traditionnelles que nous avons approché déclarent qu’il y a de nombreuses opportunités qui peuvent se présenter si elles entrent en partenariat avec les OTM et les Fintechs.
- Les mesures pour renforcer les avantages concurrentiels des banques traditionnelles
Selon notre interviewé chez BOA, la première solution est l’utilisation du code Ussd « où avec n’importe quel téléphone (ordinaire, classique), le client peut accéder à son compte en utilisant le code Ussd en tapant par exemple *919# pour avoir les menus qu’il faut »153. En plus de cela, il déclare également que la population africaine a besoin d’une éducation financière. Notre interviewé stipule également la nécessité d’un plafond pour les transactions.
Pour ce qui est des mesures à prendre pour renforcer les avantages concurrentiels des banques traditionnelles dans un contexte d’évolution numérique, notre répondant au sein de Coris Bank insiste sur la nécessité d’une coopération entre les acteurs du même secteur. Selon lui, les banques doivent s’unir pour mettre en place leurs propres services de connexion et d’infrastructures technologiques nécessaires pour répondre aux besoins évolutifs du marché. Il s’agit donc pour eux d’être solidaire sur les offres de services innovants. Dans ce contexte, les entreprises concurrentes doivent se mettre ensemble pour être beaucoup plus présentes et répondre plus efficacement aux défis de la digitalisation. Il suggère également que le gouvernement doit mettre en place plus de normes régissant la digitalisation.
Pour notre interviewé chez Orabank, la première mesure à prendre afin d’être plus compétitive dans un contexte de digitalisation est la qualité de service. Notre interviewé parle également de rapidité, car selon lui, « c’est celui qui initie ou qui est au début de l’opération, est lui qui prend l’avantage sur les autres acteurs, donc autant œuvrer pour être à ce niveau »154.
- Les opportunités des banques traditionnelles en travaillant en partenariat avec les opérateurs mobiles
Le plus grand avantage des banques traditionnelles à travailler avec les opérateurs mobiles et les Fintechs est que ces derniers disposent déjà d’une base de données de clientèle. Ainsi, les banques peuvent profiter d’une large clientèle pour faire de l’innovation et proposer d’autres produits sur le marché. Ensuite, il y a également le fait que sans nécessairement avoir besoin de se déplacer, ni d’avoir une connexion internet, les clients des banques peuvent transférer leur solde sur leur mobile au lieu de se déplacer sur de long trajet pour rejoindre les agences bancaires. En travaillant avec les Fintechs, les banques traditionnelles auront également la possibilité de mettre en place des applications innovantes pour mieux servir leurs clients. La banque reste une institution financière, et le fait de travailler avec les Fintechs lui permet de créer des applications pour mieux servir ses clients.
En effet, lorsque nous avons analysé la corrélation entre les banques et les fintechs, nous avons constaté plusieurs proximité avec la notion de collaboration, de ressource, de technologie, etc.
En proposant de nouveaux services aux clients, les banques traditionnelles bénéficient d’une autre source de financement, car les transactions ne sont pas gratuites. L’opportunité c’est réellement le partenariat.
Selon la personne que nous avons interrogé chez Coris Bank, il y a quatre principaux avantages et opportunités dont disposent les banques en travaillant en partenariat avec les Fintechs. Premièrement, elles bénéficient de l’avantage d’être présent sur un marché qui est en perpétuelle évolution, notamment en termes de technologies de l’information et de la communication : « c’est principalement de pouvoir répondre présente au marché qui ne cesse d’évoluer maintenant, déjà conserver sa part de marché et élargir son offre qui pourrait prendre en compte une clientèle de plus en plus exigeante et ne pas laisser totalement le marché dans les mains des Fintechs et des autres sociétés beaucoup plus habiles sur ce marché »155. Ensuite, le fait de travailleur avec les Fintechs leur permet d’élargit leurs offres et surtout de répondre aux besoins des clients les plus exigeants. Il y a également le fait qu’avec les Fintechs, les banques traditionnelles renforcent l’adoption et l’exploitation des nouvelles technologies afin de ne pas laisser totalement le marché dans les mains des opérateurs mobiles. Grâce à tout cela, elles disposent également de bons avantages concurrentiels.
Toutefois, notre interviewée chez Banque Atlantique déclare que les banques traditionnelles ont toujours besoin des Fintechs si elles veulent se développer, car les Fintechs peuvent toucher des zones reculées et tous les types de population : « Moi, je sais que les banques ont toujours besoin des Fintechs pour pouvoir mettre en place des plateformes conviviales dignes de ce nom. Ce que nous, les banques ne savent pas faire. Nous sommes vraiment encore banques, droits dans nos costumes, droits dans nos bottes alors qu’il faut enlever cette casquette pour être vraiment à l’image des clients d’aujourd’hui qui veulent des réponses rapides, des produits fiables qui fonctionnent dans le temps. Nous devons construire autre chose toujours dans le sens de proximité, mais de la digitalisation. Il faut qu’on se dise qu’à partir d’un certain niveau, pour les crédits qu’ils n’arrivent plus à financer, nous, on a déjà le portefeuille sur notre plateforme et dans nos bases aussi parce qu’ils n’ont pas le droit d’aller à un certain niveau. Il nous faut l’expertise des Fintechs et le service de proximité des SFD »156.
D’après notre interviewé chez ORABANK, l’avantage des banques traditionnelles en travaillant avec les Fintechs est le fait de pouvoir offrir de nouveaux services aux clients et d’élargir leur part de marché.
Selon le responsable que nous avons interrogé au sein de la DSI BOA, il n’est pas nécessairement question de valeur, car c’est la situation actuelle qui exige la digitalisation. Elle est obligée de se développer pour s’adapter aux autres acteurs, elle n’a pas le choix. Toutefois, en s’orientant vers le numérique et en travaillant en partenariat avec les Fintechs, les banques traditionnelles pourront optimiser la satisfaction de leur clientèle, par exemple en développant des applications qui pourront servir au mieux les clients.
À travers les projets de collaboration futures avec les Fintechs, Coris Bank envisage des valeurs positives et si les projets sont bien encadrés, ils permettront d’offrir des services impossibles jusqu’à présent. Pour ce qui est du type de collaboration, la personne que nous avons interrogée au de Coris Bank stipule qu’il n’y pas de meilleures modèles, chaque modèle de partenariat a ses propres avantages et inconvénients. L’enjeu porte essentiellement sur la manière de gérer la collaboration et la préparation.
Comme illustré ci-dessous, il y une grande corrélation entre les fintechs, le partenariat, le digital et les services financiers traditionnels.
Etant conscientes de ces différents opportunités, certaines banques traditionnelles ont déjà commencé à établir une forme collaboration avec les OTM et les fintechs.
En termes d’attentes, les OTM et les fintechs pensent qu’il faudrait relever certains défis dans le cadre d’une collaboration avec les banques traditionnelles. Du côté des banques traditionnelles, il s’agit de trouver des solutions quant à la rigidité de leur management.
- Les défis selon les OTM et les FinTech
Pour la première start-up que nous avons interrogé, le premier défi à relever par les banques africaines quant à la transformation numérique est la question de management. En effet, d’après le responsable que nous avons interrogé au sein de cette start-up, il est encore difficile pour les banques africaines de faire un virage à 360 degrés en termes de numérisation, c’est-à-dire d’adopter le tout digital. Par ailleurs, ce responsable stipule également qu’il est encore difficile pour les banques africaines de redéfinir de nouveaux process en interne.
Pour la personne interrogée auprès de la SIF Groupe, le plus grand défi des banques traditionnelles africaines est que leurs stratégies ne permettent pas encore d’atteindre les objectifs en termes d’inclusion financière, notamment parce qu’elles sont encore dans leur zone de confort. Selon toujours notre interviewé au de SIF Group, les banques réfléchissent trop en termes de risques : « Je connais des banques qui, pendant longtemps, ont dit : oui, nous voulons aller vers la démocratisation des services financiers, c’est-à-dire permettre au plus grand nombre d’y avoir accès, mais le plan n’a jamais été fait parce que le comité de risques a toujours demandé à réfléchir encore et encore donc ils n’ont jamais bougé »157. Pour cela, notre interviewé déclare qu’il faut que les banques travaillent en partenariat avec les fintechs car ces dernières ont des solutions, notamment en ce qui concerne le développement de la bancarisation. Pour tout cela, notre interviewé déclare également qu’il faut les banques trouvent une solution pour être plus proche de la population.
Selon notre interviewé chez FEDAPAY, le premier défis du secteur financier africain par rapport à la transformation numérique est le fait de pouvoir rendre accessibles les services y afférents, d’autant plus que selon ce dernier les Africains ont des besoins vraiment très minimalistes et ne cherchent à satisfaire que leurs besoins primaires (payer leurs impôts, recevoir leur pension): « les paiements en ligne ça représente une infime partie des services financiers auxquels on peut penser pour les Africains de façon générale »158. Seules les solutions de Mobile Money arrivent à satisfaire ces types de besoins. Pour faire face à ce défi, les banques et les services financiers Fintechs doivent réussir à permettre de faire payer certains services sur internet, par exemple le paiement d’impôts, etc.
Selon la personne que nous avons interrogée chez SEMOA, le plus grand défi à relever par les banques traditionnelles face à la transformation numérique se rapporte à la question de management, notamment en ce qui concerne la prise de décision quant au virage à 180 degrés : « il faut faire un vrai virage pour aller sur le “tout digital” parce que fondamentalement, tant qu’on va rester sur du physique, on va toujours avoir ce genre de problèmes. Maintenant, le deuxième niveau, ça va être en interne (les process internes) »159. La mauvaise définition des processus entrave l’expérience client : « D’après ce qu’on a compté pour un client qui veut ouvrir un compte. Dans le meilleur des cas, il vient trois fois à l’agence. Et, dans le pire des cas, il peut venir quatre ou cinq fois. Selon le process que j’ai défini, c’est qu’à partir du moment où le client met les pieds dans l’agence et qu’il a signifié sa volonté d’ouvrir un compte, il faut que trente minutes après, il soit sorti avec son Rib et son service “banque à distance” activé sur WhatsApp »160.
Pour ce qui est de l’inclusion financière, notre interviewé chez SEMOA déclare qu’il y a encore un grand problème au niveau de l’approche car le premier objectif du pouvoir public est de collecter des impôts sans nécessairement tenir compte des besoins de la population.
Par rapport à la transformation numérique des banques traditionnelles, notre interviewé chez PAYPLUS AFRICA déclare que le plus grand défi est de rassurer les clients quant à la sécurité de leurs fonds. Ensuite, il y a également la question de proximité. Seuls les opérateurs de téléphonie mobile arrivent à assurer cette proximité. Pour relever ces défis, notre interviewé considère que les banques traditionnelles doivent mettre les clients au centre de leur chaine de valeur. Il faut toucher tous les types de population et surtout les personnes qui ne sont pas lettrées car une grande partie des flux financiers passent d’abord par ces personnes : « C’est le client qui est au cœur de la chaîne des valeurs. En fait, quelle que soit la qualité des ingénieurs d’une entreprise, si elle n’a pas de clients, elle ne vit pas. La première étape, c’est, justement, les clients. Jusqu’aujourd’hui, les banques s’en sortaient parce que c’était une population totalement lettrée qui avait connaissance des banques, qui y allait. Mais, on s’est rendu compte que le gros flux financier passe d’abord par les personnes qui ne sont pas lettrées et qui sont dans des activités informelles »161.
Par rapport à la digitalisation des services financiers, notre interviewé chez Bénin Fintech Group déclare que le principal défi se rapporte au changement de mentalité de la population africaine et de leurs habitudes : « nous avons une mentalité très accrochée qui fait que c’est difficile pour les populations d’avoir le réflexe du digital, le réflexe du mobile. Lorsque, par exemple, en France, pour un rien, le premier réflexe, c’est qu’on veut voir si c’est possible à faire sur le téléphone, depuis sa maison. Mais, lorsqu’on est chez nous, ce n’est pas le premier réflexe. A la limite, c’est le dernier réflexe »162. Pour faire face à cette situation, notre interviewé déclare que la digitalisation doit nécessairement passer par l’argent mobile. Du côté des banques, le principal défi porte sur le fait que la majorité des banques appartient à de grands groupes européens par conséquent, elles ne font appel qu’à des Fintechs européennes, pourtant ces dernières n’ont pas totalement connaissance de la problématique sociologique de la population africaine et ne sont pas disposées à offrir des services adaptés : « elles proposent des solutions qui ne sont pas consommables par nos États. Ça, ce sont de gros budgets qui sont déployés. On a l’impression qu’on fait quelque chose pour la digitalisation. Mais, en fait, rien n’est fait. Un exemple simple. C’est, qu’aucune des banques de notre environnement n’a pu avoir une solution digitale qui est consommée par ses propres clients. Quand je prends la solution Yup de La Société Générale qui reste l’ombre d’elle-même parce que ça ne reste que sur des panneaux que ça soit à Dakar, à Ouaga, partout où ça été déployé. Même chose pour Orabank. Il y a plein de solutions qui ne sont consommées par personne »163. Notre interviewé estime que les banques présentent en Afrique ne sont pas encore disposées à travailler avec les Fintechs locales. Or, ces dernières ont la capacité d’offrir des services adaptés à la situation réelle de la population africaine.
Pour notre interviewé chez MOOV (ETISALAT), le principal défi dans la digitalisation du secteur financier en Afrique est la mise en partenariat de tous les acteurs qui composent le système. Pour le cas de Moov, notre interviewé stipule que la plus grande difficulté est la pénétration des milieux ruraux, notamment la recherche de moyens pour s’imposer. Toutefois, le fait de travailler avec d’autres entités (une vingtaine) comme les IMF, permet à Moov de mieux s’attaquer à son marché cible. Tous ses partenaires distribuent actuellement Moov Money. Par ailleurs, Moov a également renforcé son partenariat avec les banques traditionnelles comme Ecobank, UBA et NSIA banque. Ces derniers distribuent la monnaie électronique dans leurs agences : « grâce à cela, les abonnés ont la possibilité d’envoyer l’argent sur leur compte Moov money via leur compte bancaire et vice-versa grâce au partenariat »164. Dans ce contexte, notre interviewé affirme que sans partenariat avec des entités financières, les Fintechs et les OTM ne peuvent se développer en termes de Mobile Money : « On se rend compte aujourd’hui que sans le partenariat on est voué à l’échec mais il y a des problématiques sur le partenariat qui font que parfois tout ne réussit pas »165. Moov travaille également avec sept agrégateurs de paiement : « On a par exemple Fedapay qui travaille avec Apiex, OpenSi avec lequel on est intégré et on travaille sur le projet du gouvernement qui va lancer un microcrédit mobile, E-business Africa avec lequel on travaille sur le service des frais de branchement d’électricité, PayPlus qui permet de desservir les marchés du Togo »166. Toutefois, notre interviewé déclare que les partenariats ne réussissent pas toujours, car les IMF ne gagnent rien du tout : « les IMF approvisionnent nos points d’agents dans les zones rurales, par exemple 50 millions, elles ne gagnent rien comme profit. Elles ne gagnent de commission que quand les clients viennent faire des opérations de dépôt et/ou des retraits à aux guichets. Donc l’IMF se dit qu’elle est en train de financer pour nous notre réseau de distribution, mais en retour elle ne gagne rien. Donc elle préfère placer des crédits que de mettre à notre disposition la monnaie électronique »167. Selon toujours notre interviewé, un problème se pose également avec les banques traditionnelles, car elles seules peuvent assurer certains services comme l’épargne ou le crédit et pourtant, les deux parties déclarent toutes être insatisfaits des bénéfices reçus : « Les banques disent que les OTM collectent tous les flux d’argent et les OTM disent que les pourcentages perçus ne sont pas suffisants pour couvrir les frais de distribution. Mais personne ne veut remettre en cause les contrats parce que l’environnement nous les impose aussi et tous les acteurs seront amenés à se réunir pour redéfinir les contrats »168.
Selon notre interviewé chez Open SI, le premier défi dans la digitalisation des services financiers se rapporte aux limites naturelles auxquelles les banques font face. Ces limités sont directement liées à leurs activités : « nous avons des zones qui ne sont ni électrifiées et qui ne sont économiquement viables pour des activités bancaires, où ils n’ont pas assez de garantie de sécurité pour les activités que les banques considèrent pour justifier l’implantation d’une agence »169. En plus de cela, il y a également le fait que la majorité de la population africaine est analphabète : « les populations ont la barrière naturelle de l’alphabétisation pour avoir accès aux services bancaires qui sont libellés dans les langues étrangères. Au Bénin par exemple, le taux d’analphabétisme est de 64% et ce n’est pas étonnant que le taux de bancarisation stricte soit inférieur à 30% »170. Notre interviewé déclare également que la culture de la population africaine ne corresponde pas vraiment au modèle bancaire ni à sa compréhension : « La façon dont les Africains économisent leur argent culturellement et historiquement n’est pas un model bancaire. Et il est très basé sur la proximité et la confiance interpersonnelle alors qu’on leur demande de confier leur argent à une institution qui est à leurs yeux déshumanisée et vis à vis de laquelle ils ne peuvent pas désigner un interlocuteur comme ils le font dans les systèmes traditionnels »171. Selon toujours notre interviewé chez Open SI, c’est là que le Mobile Money a toute son importance en défiant les modèles traditionnels bancaire et en comblant toutes les manques afin que la population puisse avoir accès à son argent à tout moment et de la manière la plus facile possible. Par ailleurs, notre interviewé stipule que le Mobile Money font également face aux problèmes de confiance de la population africaine, car les gens ne déposent qu’un faible montant sur leur compte mobil ou sur leur compte électronique. Cela peut, selon lui, s’expliquer par le fait que les compagnies de mobile Money ne disposent pas encore d’agrément entant que d’émetteur de monnaie, ce qui est un grand frein dans l’optimisation de la bancarisation.
Notre interviewé chez MTN stipule que le plus grand défi du secteur financier est de pouvoir s’adapter à l’arrivée des télécoms et d’internet. Selon lui, le modèle bancaire traditionnel est actuellement remis en cause car tout doit désormais se faire sans nécessairement se déplacer : « Aujourd’hui, il y a des banques qui sont banques uniquement en ligne. Donc, c’est aujourd’hui une évolution vers laquelle les banques doivent pouvoir fonctionner de manière naturelle puisqu’avec la digitalisation le gain de temps est capital. Ce n’est plus acceptable pour un client de venir faire une heure d’attente pour faire des opérations dans une agence bancaire »172. Ainsi, notre interviewé déclare que les banques qui n’arrivent pas à se transformer et à relever le défi de la digitalisation auront du mal à rester compétitives sur le marché. C’est une nécessité. A part cela, il y a également le fait que les banques vont devoir mettre en place une stratégie « retail » en dehors de la banque traditionnelle : « Cela amène à une stratégie autre que ce que le secteur bancaire mettait en place avec un autre type de clientèle avec des CSP très disparates. Le secteur bancaire doit mieux répondre à ce type de clientèle, qui est différente de la clientèle traditionnelle qui était composée de fonctionnaires et de salariés »173. Ainsi, les banques vont devoir s’adapter à des solutions en ligne et avoir la capacité de limiter les risques qui s’y rapportent. Il y a également un autre défi, celui de l’optimisation des coûts. Certaines banques adoptent la digitalisation pour réduire les coûts de certains services bancaires et de proposer des services à forte valeur ajoutée : « en termes de coût, les données changent parce qu’entre une banque totalement digitale qui n’a pas d’agence, qui n’a pas ce niveau de frais de fonctionnement sera capable d’offrir les taux et des offres beaucoup plus agressives qu’une banque qui a des charges assez élevées »174.
Pour le gérant de Digital World Technologies, le principal défi des banques traditionnelles en termes de digitalisation est le faible pouvoir d’analyse des réels besoins des consommateurs : « La banque qui arrive aujourd’hui à développer cette intelligence de données clientèle va pouvoir proposer de meilleurs services, des services moins chers plus accessibles que ses concurrents »175. Notre interviewé stipule également que les banques traditionnelles rencontrent aussi des problèmes en termes de prise de décision.
Les entretiens nous montrent que les principales préoccupation des OTM et des fintechs portent sur les caractéristiques des banques que ce soit en termes de processus ou de prise de décision. Ils s’attendent également à ce que les services issus de la collaboration permettent de faire face au problème d’analphabétisation de la population africaine ainsi qu’au problème d’enclavement de certaines zones en termes d’électricité et de réseau internet.
- Les inconvénients selon les banques traditionnelles
Pour ce qui est inconvénients en termes de collaboration avec les Fintechs, notre répondant au sein de la DSI BOA affirme que c’est au niveau des acteurs bancaires ou plus précisément au niveau des membres de l’organisation « Quand je prends l’employé bancaire, lorsqu’il entend la finance digitale ou la transformation digitale, il a peur parce qu’il pense déjà à la suppression des emplois »176. En effet, avec le développement rapide des nouvelles technologies de l’information et de la communication, les employés ont peur, car ils sentent déjà la suppression de leurs emplois, les applications sont moins couteuses que la création d’agence bancaire. Par ailleurs, notre interviewé au sein de DSI BOA évoque également la suppression d’emplois. En effet, lorsqu’une organisation se digitalise, certaines fonctions seront assurées par l’intelligence artificielle et il y aura également un ralentissement du recrutement.
Selon notre interviewé, le premier inconvénient pour les banques traditionnelles en travaillant avec les Fintechs est le risque d’image.
Notre interviewée chez la Banque Atlantique déclare que le principal inconvénient dans la digitalisation des banques et dans leur collaboration avec les Fintechs est le fait qu’elles ne sont pas encore prête à mutualiser entre elles : « elles veulent toujours cacher leur process, leur façon de faire, leurs stratégies. Ce sont les banques avisées qui ont des leaders à leur tête et qui ont vraiment compris que, soit, elles avancent ensemble, soit, elles vont se faire bouffer par les telcos et les SFD qui vont mutualiser, ce sont elles qui vont toujours avancer »177. À part cela, il y a également la question d’investissement : « c’est-à-dire qu’une Fintechs va venir avec de très bonnes idées, de très bons concepts. Mais, la banque va opposer le volet coût et une lenteur dans la prise de décision »178. Par ailleurs, étant donné que certains employés des banques reçoivent régulièrement des primes de caisse, l’intégration des nouvelles technologies provoque chez eux une certaine réticence étant donné que la digitalisation supprime certaines tâches et donc leurs primes.
Selon notre interviewé chez Orabank, la principale difficulté dans le développement de la digitalisation se rapporte au contrainte de disponibilité de techniciens et de réalisation d’objectifs : « Quand je prends les techniques, ils n’ont pas les mêmes objectifs que moi. Pour le moment, on ne parle pas le même langage »179. À part cela, notre interviewé parle également de contrainte budgétaire et le manque de motivation de la hiérarchie.
Par ailleurs, notre interviewé chez Coris Bank déclare qu’actuellement, il n’y as pas encore de forme collaboration sans risque. Il faut tout simplement savoir se protéger : « En cas de soucis auquel on ne serait pas préparé, c’est de mettre en place une procédure ou bien trouver une solution qui nous permette de gérer au mieux ces inconvénients et surtout limiter au maximum les dégâts pour la banque »180. Notre interviewé stipule également que les banques peuvent par elle-même mettre en place leur propre infrastructure technologique afin de limiter les risques. Il s’agit également de mutualiser les coûts et travailler de façon solidaire : « On mutualise les coûts et on se met ensemble pour pouvoir mettre en place un service jadis inaccessible seul et on offre ensemble se service de façon solidaire. On participe ensemble aux charges et puis on fait un peu comme les OTM, on inverse un peu les rôles. Donc, on peut arriver à cette forme de Coopétition ne serait-ce que pour répondre aux défis de cette digitalisation »181.
Pour les banques traditionnelles, elles s’attendent en général à une collaboration sans risque ce que ce soit en termes d’images ou de pérennité des emplois. En effet, le fait de travailler avec les OTM et les FinTechs peut détériorer l’image des banques traditionnelles en cas de difficulté, par exemple des cyber attaques, etc. Egalement, la digitalisation peut entrainer la suppression de certaines postes ou de certaines tâches. Par conséquent, les banques peuvent être réticentes car elles veulent protéger leurs employés.
Par ailleurs, pour faire face aux risques potentiels issus de la collaboration entre les banques traditionnelles, les OTM et les FinTechs, des solutions sont déjà mises en place pour certaines banques qui ont déjà entamé cette collaboration.
- La gestion des risques
Pour la gestion des risques se rapportant à l’utilisation des nouvelles technologies de l’information et de la communication, la DSI BOA met en place certaines mesures. Par exemple, elle met en place des exigences auxquelles elle doit se conformer. À part cela, elle procède régulièrement au changement de ses procédures en interne ainsi qu’à la mise en place de limitation de plafonds sur les transactions mobiles.
Pour la gestion des risques bancaires face à l’évolution des nouvelles technologies, notre répondant au sein de Coris Bank déclare que les banques doivent se mettre ensemble, c’est à dire en Coopétition afin de maitriser efficacement l’environnement et avoir un regard plus prudent : « Dans ce cas de figure, je pourrais dire que le risque serait beaucoup plus mitigé et maîtrisé. Ensemble entre acteurs du même secteur, nous connaissons notre travail et nous maitrisons notre environnement. Nous savons de quoi il retourne »182.
Pour faire face aux risques se rapportant à la collaboration entre les banques traditionnelles et les Fintechs, notre interviewé chez UBA BANK déclare qu’il faut premièrement assurer la sécurité des données des clients, car cela risque de détériorer l’image des banques. Par ailleurs, il déclare également qu’il faut mettre en place un système de régulation pour les Fintechs « Il faudrait que la BCEAO arrive à mettre en place une régulation qui va permettre aux différents acteurs de pouvoir savoir comment réellement s’implanter dans la zone UEMOA »183.
Pour ce qui est de la gestion des risques dans le cadre d’une collaboration entre les banques traditionnelles et les Fintechs, notre interviewée chez la Banque Atlantique déclare qu’il y a déjà une réglementation en vigueur comme la nouvelle loi FATCA : « C’est de remplir le KYC et d’actualiser les données. Il y a des clients dont on envoie des informations quand on a des soupçons d’alerte »184.
Pour notre interviewé chez Orabank, la gestion des risques dans le cadre de la transformation digitale peut se faire par la création de systèmes financiers décentralisés, surtout lorsqu’il s’agît de travailler avec les OTM. Notre interviewé stipule que les OTM n’ont pas de compte dans les banques centrales, et par conséquent ils ne sont pas aptes à compenser les opérations. Ils doivent nécessairement passer par les banques. Autrement dit, il s’agirait de travailler en partenariat, non seulement avec les OTM, mais également avec des systèmes financiers décentralisés.
Les enquêtes que nous avons mené met en évidence qu’il existe des relations entre les OTM, les finctechs et les banques traditionnelles en termes de services financiers. Autrement dit, ses trois acteurs peuvent travailler ensemble pour proposer des services financiers innovants et adaptés aux besoins de la population africaine. Cette possibilité est déjà prouvée par les collaborations sont déjà mises en œuvre actuellement bien que certains défis doivent encore être relevé.
Actuellement, selon le responsable que nous avons interrogé, la DSI BOA travaille en partenariat avec deux opérateurs mobiles : Moov et CBS. Avec Moov le développement continue. Le partenariat consiste à mettre en place un nouveau service afin de permettre à la clientèle de transférer de l’argent depuis son compte bancaire à son compte mobile et de faire des virements sans avoir besoin d’intervention humaine. Avec CBS le partenariat consiste à la création d’un système de paiement mobile pour les impôts. C’est un service dédié aux entreprises. Il s’agit d’associer les banques et les départements d’impôts. Toutefois, notre répondant constate que même si les banques développent des services innovants avec les Fintechs, par exemple le Mobile Money, cela ne résout pas tout. Il y a toujours le problème d’accès à la connexion internet et l’analphabétisme de la population africaine : « Il faut des partenariats avec les opérateurs de téléphonie mobile et les Fintech. Là, les Fintech vont développer des applications mobiles pour les banques qui, avec leur clientèle, vont les faire utiliser par leur clientèle. Ce qui ne sera pas gratuit. L’opportunité pour la banque, ce sont les partenariats avec la banque et les Fintech »185.
Pour Coris Bank, étant donné qu’elle vient d’arriver sur le marché, il n’y a pas encore de collaboration avec les Fintechs, mais des projets de partenariat sont envisagés. Mais avec les opérateurs téléphoniques, il y a déjà l’émission de monnaie électronique. Par ailleurs, Coris Bank ne travaille pas encore en collaboration avec les fintechs ni avec les OTM mais des projets sont en cours : « nous n’avons pas encore eu des formes de collaborations dans ce sens. Pour la simple raison qu’on vient d’arriver sur le marché et on est en train de s’assoir peu à peu. Certainement on va y arriver mais pour le moment on n’en a pas encore. Mais on pense quand même à cela comme toute institution financière qui se veut être présente sur ce marché ». Selon toujours notre interviewé chez Coris Bank, la collaboration avec les fintechs aura des effets positifs pour les deux parties : « Elle permettrait sans doute à la banque d’offrir des services qu’elles n’offraient pas jusqu’à présent, de toucher une autre clientèle qui était inaccessible ». Également en travaillant avec les fintechs, les banques traditionnelles gagneront en image et optimiseront l’accès à certains types de services financiers.
D’après notre interviewé chez UBA BANK, la collaboration entre les banques traditionnelles et les fintechs est possible mais que cela reste compliquée : « dans le système, il y a des banques qui, jusqu’aujourd’hui, ont déjà impétré en leur sein des départements de développement interne, c’est-à-dire qu’elles ont créé des Fintechs en interne »186. Selon toujours notre interviewé, les banques traditionnelles doivent comprendre l’importance de la valeur ajoutée pouvant être apportée par les fintechs et aussi par l’innovation. Dans ce contexte, les banques peuvent faire appel à des innovateurs plutôt qu’à des fintechs. En travaillant avec les fintechs, notre interviewé déclare également qu’il faut que les banques arrivent à se rapprocher un peu plus de la population, notamment des gens qui habitent dans des zones reculées.
Selon notre interviewé chez ORABANK, la collaboration entre les banques traditionnelles et les fintechs devraient permettre de proposer des services financiers aux personnes non bancarisées : « Il faut qu’on sorte du carcan selon lequel pour bénéficier du service bancaire, il faut être un acteur ou un client bancaire. Il faudrait que celui qui est au bout de la chaîne du côté Fintech, étant là-bas, il peut faire les services bancaires. C’est pourquoi je dis que ça, c’est une question de complémentarité. Mais, ce qui est bon est qu’on aura à gérer tous ces services sans forcément développer de technologie autrement »187. Étant donné que les OTM et les fintechs disposent déjà de leur technologie, il suffit de trouver la bonne forme de collaboration dans laquelle chaque partie sortirait gagnante : « L’OTM a déjà sa technologie. Il suffit de voir la forme de collaboration pour pouvoir gérer ces services de bout en bout. Les formes de collaboration à avoir sont des partenariats. Il faut qu’on essaie de faire le partenariat pour que si c’est mon client qui doit passer d’un service vers l’autre service, je parle de commission. Si c’est l’autre qui doit passer du service de l’autre vers moi, il y a des partages de commission. Chacun essaie de trouver sa part »188. ORABANK mène déjà un projet de collaboration avec MTN, mais c’est encore encours. Il y a également un projet de monnaie numérique mené en collaboration avec Moov.
Bien que la possibilité de collaboration entre les banques traditionnelles, les OTM et les Fintechs a déjà pris forme, les différents acteurs concernés ont quant mêmes leurs attentes respectives pour mener à bien ce projet.
Par ailleurs, selon la personne que nous avons approché auprès de DSI BOA, il n’y a pas encore d’autres formes de collaboration envisagées. Toutefois, il y en a une, mais avec le gouvernement, par exemple en ce qui concerne le recouvrement des impôts. Si la collaboration avec les Fintechs est coûteuse pour les banques traditionnelles, notre interviewée chez la Banque Atlantique propose la mise en place d’une plateforme interopérable entre les banques. Cette stratégie permettrait de faciliter aussi la tâche des Fintechs qui peuvent proposer de bons produits ou de bon processus.
Bien que certaines banques doutent de la possibilité d’un partenariat numérique puisqu’à l’avenir, les fintechs vont pouvoir travailler efficacement et seront plus rapides et plus axées sur le client. L’autre perspective serait qu’une grande partie du financement de capital-risque et des investissements de démarrage pour les fintechs proviennent des banques. Pour ce qui est des prêts alternatifs par exemple, les fintechs ne donnent pas de crédit en tant que prêteurs normal, mais en tant que courtier et distributeur de crédit pour les banques. Dans ce scénario, la fintech est non un concurrent, mais un partenaire.
- Les OTM et les finTechs
Les OTM et les finTechs sont en accords sur le fait que le niveau de bancarisation de la population africaine est très faible. Les OTM et les fintechs souhaitent ainsi répondre aux problèmes de bancarisation de la population en proposant des services financiers innovants.
Les OTM et les finTechs considèrent que les banques ont encore du mal à entamer la digitalisation pour de nombreuses raisons : lourdeurs des processus, manque de compétences internes, peur des risques y afférents, etc.
Parmi certaines idées qui jettent les bases de l’adoption de la fintech et les OTM, un nombre croissant de publications reconnaît deux causes vitales de l’évolution des sociétés de fintech qui peuvent remonter à une décennie. D’abord, la crise financière économique mondiale de 2008 a également appelé la récession économique qui a clairement montré aux consommateurs les défauts du système traditionnel. Ensuite, l’évolution des nouvelles technologies qui ont stimulé la mobilité, facilité la circulation de l’information, accéléré la prestation de services et réduit les coûts
Pour tenter de perturber le marché des services financiers, les sociétés de technologie financière sont très actives. Un énorme boom est en train de se produire dans les services financiers, un boom similaire à celui qui s’est produit dans les années 2000, quand internet a commencé à évoluer et qu’il y avait d’énormes sommes d’argent alloué pour la recherche de nouvelles idées. Aujourd’hui, on retrouve les fintechs et les OTM dans trois segments de l’industrie des services financiers : les finances personnelles, les prêts ainsi que les paiements. À l’intérieur de ces deniers, on retrouve également plusieurs sous-segments. Il existe deux raisons principales pour lesquelles les fintechs et les OTM poursuivent ces segments.
Par conséquent, certaines banques pensent que les fintechs et les OTM sont des concurrents sérieux qui, dans un futur proche, vont prendre une part du gâteau des services financiers. Les banques pourraient risque donc de perdre la relation client sur Internet au profit de ces acteurs. Cependant, à cause du manque de confiance, les clients voudront encore garder leurs comptes dans une banque. De ce fait, plusieurs fintechs vont vouloir former des partenariats avec des banques. Les banques auront l’avantage d’une plus grande efficacité et d’un meilleur service client et s’efforceront donc de conserver les meilleurs partenariats avec les meilleures fintechs
- Les banques traditionnelles
Comme les OTM et les FinTechs, les banques traditionnelles sont conscientes que le niveau de bancarisation de la population africaine est très faible. Les banques traditionnelles souhaitent proposer des services innovants permettant d’optimiser le niveau de bancarisation de la population africaine.
Les banques traditionnelles considèrent également qu’elles rencontrent certaines difficultés pour entamer la digitalisation. Elles sont également conscientes du fait que leurs offres actuelles ne permettent pas encore tous les besoins de la population africaine en termes de services financiers. Elles manquent de souplesse et sont trop rigides.
Pour saisir l’opportunité d’accès universel du secteur financier africain, les banques traditionnelles ont besoin d’une transformation significative. Elles doivent développer de nouvelles capacités, couvrant la stratégie, la gouvernance, l’informatique et les opérations. Ils doivent également conclure de nouveaux partenariats commerciaux, car ils ne pourront pas développer toutes ces capacités en interne. De plus, dans certains cas, le déploiement doit être effectué tôt pour obtenir l’avantage du premier arrivé. Il ne fait aucun doute que la croissance du secteur financier africain s’accélère, créant une valeur considérable pour les clients et les institutions financières. Mais comment la valeur sera-t-elle partagée ? En particulier, la part de la valeur qui sera partagée entre les banques traditionnelles, les OTM et les sociétés de technologie financière dépendra de la capacité individuelle de ces entreprises à tirer parti de leurs avantages concurrentiels, à anticiper les changements, à se transformer, à naviguer dans les affaires changeantes et réglementaires et à structurer les partenariats les plus propices.
Tout en reconnaissant les gains potentiels importants de la Fintech, il existe des inquiétudes quant aux nouvelles vulnérabilités que ces technologies et modèles commerciaux peuvent apporter. De nouveaux concurrents sans expérience préalable dans le secteur fournissent des services financiers innovants. Par exemple, la technologie basée sur la blockchain promet de renforcer la confiance dans les échanges économiques. Ses applications sont conçues pour fournir une infrastructure numérique sécurisée pour vérifier l’identité, faciliter les paiements transfrontaliers plus rapides et moins chers et protéger les droits de propriété. Cependant, ces technologies peuvent créer rapidement de nouveaux types de risques qui ne sont pas bien compris ou couverts par la réglementation en vigueur.
Le modèle économique des FinTechs devrait très probablement converger de manière progressive vers le modèle utilisé par les banques. Dans ce cas, il n’est pas évident que les FinTechs ont un net avantage concurrentiel sur les banques, en plus des coûts hérités auxquels les banques doivent faire face dans la réorganisation de leurs activités. De plus, à mesure que les FinTech élargissent leur éventail d’activités, les possibilités d’arbitrage réglementaire vont diminuer. Une approche réglementaire au cas par cas devrait également être mise en œuvre, en appliquant essentiellement les réglementations existantes sur les FinTechs, sur la base du service qu’elles fournissent
Dans ce domaine, il existe un problème litigieux, et il semble qu’il n’y ait pas de terrain d’entente entre les banques et les fintechs. Les banques possèdent un cadre réglementaire très différent de celui auquel sont confrontées les entreprises de fintech. Cela tend à remettre l’accent sur les fintechs, car avec leurs capacités informatiques avancées et un cadre réglementaire beaucoup moins restrictif, elles ne sont pas vraiment sur un pied d’égalité avec les banques. Pour les fintechs, c’est moins complexe, car elles sont plus légères et n’ont pas à produire de contrats massifs. C’est une situation difficile, car cela signifie que les banques perdent des clients au profit des fintechs, notamment dans le domaine des transactions. C’est essentiel, puisque le véritable avantage pour les banques est qu’elles constituent le secteur qui détient le plus d’informations concernant les clients, et l’existence de ces informations dépend énormément des transactions. Si les banques continuent de perdre leurs clients, elles ne perdront pas seulement des revenus, mais aussi le principal avantage de comprendre et de connaître le profil de chaque client.
À cause de l’émergence des FinTechs, le plus grand des soucis est de savoir si les banques et les FinTechs seront des collaborateurs ou des vrais concurrents sur les marchés financiers. Par rapport aux banques, les FinTech ont des avantages concurrentiels.
Chapitre III : Discussion : Vers quels modèles de collaboration pour améliorer l’inclusion financière
Dans cette partie, nous discuterons des éléments que nous avons obtenus de nos enquêtes tout en analysant leur cohérence avec notre revue de littérature. Pour cela, nous commencerons par discuter de la situation des banques traditionnelles en Afrique Subsaharienne, notamment leur marché et leur possible développement vers l’économie numérique.
L’objectif de cette partie est de mettre en évidence le business model des services financiers à l’ère du numérique et la transformation des services financiers traditionnels en services innovants capables de répondre aux besoins et aux attentes de la population africaine.
La détermination du business model des services financiers dans un contexte numérique dépend premièrement des caractéristiques des utilisateurs finaux, c’est-à-dire de la population africaine. Les enquêtes et la revue de littérature nous montrent qu’il y a encore un certains problèmes dans l’adoption du numérique en raison, non seulement, de la faible couverture en réseau internet et en électricité, mais également en raison de l’analphabétisation de la majorité de la population africaine. Toutefois, la coopération entre les trois acteurs peut permettre de pallier à ces problèmes.
Il est également constaté que les entreprises financières en Afrique sont, soient de petites tailles, soient sous-développées ou entièrement dominées par les grandes banques. Cette situation est d’ailleurs confirmée par plusieurs études menées sur le secteur financier en Afrique Subsaharienne dont celle menée par PROPARCO (2013). Ce dernier souligne que les grands groupes bancaires développent des stratégies de développement très agressives au détriment des banques traditionnelles africaines. En plus de cela, force est de constater que le développement ainsi que l’expansion au niveau régional des grands groupes bancaires présents en Afrique subsaharienne ont été accompagnés par de nombreuses innovations financières. Une étape qui reste encore difficile pour les petites banques africaines. Les banques africaines se trouvent ainsi dans un marché très concurrentiel avec des stratégies qui commencent à devenir archaïques.
Par ailleurs, la technologie et les modèles commerciaux innovants ont attiré une gamme d’acteurs sur le marché financier qui est en constante évolution et a fait naitre des services financiers numériques dans le but de trouver des moyens durables de servir le marché de masse et d’atteindre toute la population, quelle que soit la zone géographique, le niveau de revenu, etc. Les solutions d’argent mobile offrent désormais des opportunités de transactions, d’épargne, de crédit et même d’assurance abordables, instantanées et fiables dans les villages ruraux et les quartiers urbains où aucune banque n’avait jamais ouvert de succursale.
Néanmoins, bien que se trouvant dans une situation de grande faiblesse, il y a certaines banques africaines qui sont très développées, par exemple Ecobank. Également, les banques africaines ont l’avantage de l’information, autrement dit, elles seules connaissent bien la culture de la population et des services dont elle a besoin. Elles ont également la réglementation à leur avantage.
En outre, nous remarquons qu’une grande majorité des banques traditionnelles en Afrique subsaharienne sont encore réticentes quant à la digitalisation de leur processus interne. Pourtant, c’est le seul moyen pour elles de se développer et d’être au même niveau que les grands groupes présents dans le continent et surtout de rivaliser avec les OTM qui sont en train d’attirer tous leurs clients potentiels. Bien que certaines banques aient déjà franchi le cap de la digitalisation, beaucoup restent encore réticentes. Cette réticence peut s’expliquer par de nombreux facteurs selon les réponses que nous avons obtenu des entretiens menés avec des professionnels travaillant dans des banques africaines. Premièrement, les banques africaines n’ont pas encore la possibilité de faire face aux différents changements technologiques comme le font certains grands groupes présents dans le continent. Ensuite, la faible couverture du réseau internet empêche la diffusion de la technologie auprès des populations cibles. D’autant plus que la plupart de la population sont analphabètes et beaucoup n’ont pas le moyen de s’abonner aux offres internet. Vient ensuite la question de culture, car comme la population africaine, les banques africaines ne veulent pas encore se séparer de leur méthode de développement traditionnelle, empêchant toute mise en place d’innovations. Enfin, il y a la lourdeur de la dématérialisation des processus manuels. En effet, que ce soit pour les grands groupes bancaires ou pour les banques africaines, la dématérialisation est une étape difficile, car cela demande non seulement d’importants moyens financiers et organisationnels, mais aussi une grande capacité à mobiliser et à faire adhérer l’ensemble du personnel.
Par ailleurs, nous constatons que certaines banques africaines ont conscience de l’importance de la transformation numérique. Pour certains de nos interviewés, la digitalisation est une étape nécessaire, car cela permet de s’adapter aux besoins du marché. Pour d’autres, il s’agit d’une transformation qui s’impose. En outre, si certaines banques sont réticentes, c’est notamment en raison du fait qu’il est encore difficile de mesurer réellement l’impact économique et social de cette digitalisation. En effet, la plupart des personnes que nous avons interrogé déclarent que les banques africaines font face à de nombreux défis pour entamer la révolution technologie. Pour certaines banques, la technologie financière ne fait pas encore partie de leur priorité et surtout ne fait pas l’unanimité. Cette situation a déjà été prouvée par une étude menée par la Banque européenne d’investissement en 2016 :
Graphique 5 : État du déploiement des nouvelles technologies dans les groupes bancaires africains
Source : Enquête 2016 de la BEI auprès des groupes bancaires d’Afrique subsaharienne
Environ 86% des groupes bancaires de l’Afrique subsaharienne mettent à la disposition de leurs clients des services de banque en ligne ou le mobile Banking . Cela met en avant la technologie financière ou la Fintech qui est utilisée par les banques en vue de faciliter toutes activités de prêt bancaire et d’autres services financiers plus courants. En Afrique subsaharienne, la Fintech est toujours considérée comme une nouvelle technologie. Aujourd’hui, près de la moitié des groupes bancaires envisagent le déploiement de la Fintech, cependant ils ne la considèrent pas comme une priorité. Il faut noter que le recours à la Fintech implique la mise en place de plusieurs infrastructures informatiques.
Pour les banquiers d’aujourd’hui, il est important d’être en adéquation avec le numérique. Les futurs clients sont en effet nés avec tout ce qui est évolution technologique et ils sont très sensibles à tout ce qui s’y rapporte. Cependant, cela ne veut pas dire qu’il faut négliger les anciennes générations. Aujourd’hui, ces dernières s’adaptent plus facilement aux évolutions technologiques. Pour le secteur bancaire, le numérique est en quelque sorte une grande révolution. En effet, les technologies sont un vecteur d’innovation ayant des effets substantiels sur les métiers de banquier. Que ce soit les services, les garanties ou les produits proposés aux clients, tous connaissent de véritables changements. La mutation touche également l’organisation interne des banques. Une restructuration des modèles d’agences bancaires est en ce moment en marche, bien qu’encore difficile pour certaines banques.
Comme nous l’avons évoqué précédemment, les banques en Africaines subsaharienne, ont encore des difficultés à entamer la transformation numérique et plusieurs défis doivent encore être soulevés. En plus des problèmes se rapportant à la société, comme l’analphabétisme, la situation géographique, la disponibilité de fonds, d’autres problèmes doivent également être résolus. Ces problèmes se rapportent directement à la situation des banques africaines comme le manque de qualification, le manque de ressource et d’infrastructures, la culture des dirigeants, etc.
De par les enquêtes que nous avons effectuées, nous constatons que les banques traditionnelles en Afrique subsaharienne sont encore très réticentes quant à la transformation numérique, pourtant le niveau de bancarisation de la population reste encore très faible. Pour la plupart d’entre elles, il s’agit d’un manque de savoir-faire et de compétences pour développer des services innovants. Effectivement, un des plus grands freins à la digitalisation de la population africaine est le manque de qualifications du personnel. D’autant plus que les stratégies numériques sont dynamiques, nécessitant des réajustements constants en fonction des retours clients et de l’évolution des conditions du marché. Également, une stratégie numérique nécessite le soutien interne du personnel, et une institution financière doit définir des moyens de surmonter la résistance initiale et la peur de ses clients de passer au numérique.189 En outre, les institutions financières africaines vont encore devoir apprendre à évaluer et à travailler avec des partenaires externes (c’est-à-dire les opérateurs de réseaux mobiles, les entreprises technologiques, etc.). Pourtant, la gestion de ses partenariats semble encore être un grand défi.
Dans le cadre ce travail et à travers les différents entretiens que nous avons effectués, nous avons pu soulever quelques points importants à l’égard des banques traditionnelles africaines, notamment les opportunités offertes par la digitalisation :
- Les canaux numériques peuvent fournir un modèle commercial viable pour les banques traditionnelles et les institutions de microfinance (IMF) ;
- Les canaux numériques sont efficaces pour atteindre de nouveaux clients et optimiser l’inclusion financière ;
- Les institutions financières devraient s’appuyer sur des stratégies, des bonnes pratiques et des critères de référence appropriés pour permettre au secteur bancaire de mettre en œuvre les canaux numériques ;
- Les modèles commerciaux et les références établis par d’autres acteurs du secteur, tels que les opérateurs de réseaux mobiles et les Fintechs ne sont pas reproductibles dans un contexte traditionnel du secteur financier ;
- Les stratégies de gestion du changement sont essentielles pour soutenir les changements organisationnels internes et externes dans les banques traditionnelles.
Pour d’autres, le problème se situe au niveau culturel. En effet, comme le déclare Boniface Bampoky dans son article « Les fondamentaux d’une transformation digitale pour les entreprises africaines » publié en 2017, les cultures africaines ont une influence importante sur les entreprises nationales. D’autres chercheurs comme Robey et al. (1990) et Bagchi et al. (2003) pensent que la culture figure parmi les facteurs d‘acceptation de la technologie. Selon Robey et al. (1990), les interprétations dépendent entièrement de la culture. L‘étude menée par le CGAP datant de 2008 a montré que les habitants des pays émergents, moins exposés aux TIC sont moins disposés à les adopter. Selon le Mobey Forum (2008) qui a validé cette information, les populations des pays développés adopteront facilement les TIC puisque les futurs consommateurs y sont exposés dès leur enfance. Ce qui n’est pas forcément le cas en Afrique.
D’autant plus que les styles de management, souvent issus de pratiques étrangères, ne correspondent pas forcément à la réalité de la population africaine. Une réalité qui se traduit le plus souvent par la solidarité, les relations familiales, etc. Dans ce contexte, la transformation numérique se présente comme une étape cruciale et par conséquent nécessite de grandes décisions. Au niveau de la population, il est important de noter que la population africaine a une vision très minimaliste des services financiers en générale dont seuls les services de Mobile Money peuvent satisfaire.
Pourtant, en raison du fait que l’évolution technologique touche tous les pays, développés ou moins développées, les entreprises africaines, notamment les banques, doivent tôt ou tard franchir le cap. Dans ce contexte, l’utilisation des nouvelles technologies de l’information et de la communication relève à la fois d’un développement économique et d’un développement social.
À ces différents défis s’ajoute le manque d’infrastructures. L’accès aux TIC suppose qu’il existe des infrastructures qui peuvent rendre possible son effectivité. En effet, il s’agit de réseaux électriques de très bonne qualité ainsi que diverses infrastructures en TIC. Cependant, pour que les technologies de l’information et de la communication puissent bien pénétrer dans les pays et au niveau de la population, il faut qu’il y ait un secteur de télécommunications très performant. Comparés à ce qu’il y a dans les pays développés, les opérateurs ne sont pas assez nombreux en Afrique. C’est ce qui empêche la libéralisation du secteur, un réel obstacle pour le développement du marché des télécommunications.
Selon une étude menée par l’union internationale des télécommunications (IUT), 2% des Africains ont accès à Internet dont 0,3% sont connectés à bande large contre 24% en Europe, 27% en Asie et 22% en Amérique du nord. En ce qui concerne l’accès aux TIC, une autre étude de l’IUT datant de 2017 a aussi montré qu’il y a un écart considérable entre l’Afrique et les autres pays. Les statistiques le montrent clairement, les africains ne profitent pas pleinement des technologies de l’information et de la communication.190
En effet, comme le souligne, Alain François Loukou, dans son article « Les TIC au service du développement en Afrique ». Simple slogan, illusion ou réalité ? », pour les Africains, il est très difficile de mener des projets ou de mobiliser des ressources pour le développement des infrastructures, un luxe improductif alors qu’il existe encore autant de problèmes sociaux à résoudre : santé, faim, accès à l’eau potable, éducation, construction des routes, électrification. Face à tant d’obstacles, il est tout à fait normal que de plus en plus d’Africains développent une vision négative vis-à-vis des TIC qu’ils commencent à peine à découvrir. Au lieu de considérer les TIC comme un outil de développement, la majorité de la population africaine pensent qu’elles sont totalement inutiles. Ces dernières pensent également que malgré les flatteries concernant les TIC, l’État ne doit pas y consacrer des investissements trop importants. Elles pensent que ce n’est pas une priorité pour le moment.
Bien que la question de coût n’ait été que faiblement évoqué durant les entretiens que nous avons menés, la littérature disponible classe la connexion Internet en Afrique subsaharienne comme étant parmi les plus chères au monde. Cette analyse concerne les différents acteurs de la fourniture de connexion Internet et le rôle joué par chacun sur le marché. L’analyse de la chaîne de valeur pour la fourniture de connexion Internet nous permet de nous attaquer aux différentes raisons du coût élevé de l’accès Internet dans la région de l’Afrique subsaharienne. Les tarifs Internet dans la région sont évalués en fonction d’un type particulier d’offre (connexion Internet haut débit filaire) et établissent des comparaisons entre les pays de la région et entre eux et le reste du monde. Les tarifs sont comparés au salaire minimum des pays de la région concernée afin de montrer le coût relatif de l’utilisation d’Internet par rapport au pouvoir d’achat des consommateurs.
Graphique 6 : Utilisation d’Internet en Afrique subsaharienne et dans le reste du monde
Source : International Telpecommunication Union (ITU), World Telecommunication/ICT Development Report and database, 2017
Figure 18 : Utilisation d’Internet par pays en Afrique Subsaharienne
Source: International Telecommunication Union (ITU), World Telecommunication/ICT Development Report and database, 2017
En faisant une analyse du terme coût dans les résultats de nos entretiens, nous pouvons remarquer, comme le témoigne la figure ci-dessous, que le mot coût est proche de trois termes bien distincts : banque, pouvoir et défi. Autrement dit, le coût a souvent été évoqué lorsque les interviewés parlaient de service bancaire, de pouvoir d’achat et également de défis pour les banques dans la mise en place de services plus innovants et dans le déploiement des technologies de l’information et de la communication.
Jusqu’à maintenant, il est encore difficile de déterminer exactement la pénétration réelle d’Internet en Afrique subsaharienne. Les abonnements Internet ne reflètent pas fidèlement l’utilisation d’Internet dans la région car en général, un abonnement Internet (fixe ou mobile) est partagé par plusieurs personnes. En outre, de nombreuses personnes ont accès à Internet par le biais de leur travail ou dans les écoles et collèges, en particulier au niveau universitaire. En outre, la principale source de connectivité Internet dans de nombreux pays est le cybercafé. Dans plusieurs pays, des CMC (Community Multimedia Centres) sont créés principalement en milieu rural pour faciliter l’accès à Internet des populations rurales.
En général, le coût de la connexion Internet pour un utilisateur comprend deux éléments : le coût de l’équipement et les frais mensuels payables pour la connexion Internet. L’accès aux communications mobiles peut être obtenu dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne pour moins de 20 USD, ce qui comprend un terminal mobile (modèle de base), une carte SIM fournie par l’opérateur mobile et un crédit d’appel jusqu’à 2 USD.191 Dans ce cas, la facturation est basée sur un abonnement prépayé ; un minimum de 1 USD d’appels par mois garantit la continuité de l’abonnement. Ce type de forfait est disponible auprès de plusieurs opérateurs au Bénin , en Côte d’Ivoire et au Togo. Malheureusement, cette disposition ne s’applique pas à la connexion Internet, pour laquelle un terminal (Smartphone, tablette, ordinateur portable ou ordinateur de bureau) est requis.
Au moins 120 USD doivent être payés pour un Smartphone, ce qui représente plus de six fois le coût d’un appareil mobile de base proposé par les opérateurs de téléphonie mobile. Une tablette, un ordinateur portable ou un ordinateur de bureau coûte au moins USD 500.192 Si une personne dispose d’un ordinateur, elle doit encore acheter une clé USB pour l’Internet mobile et acheter un abonnement, qui coûtera au moins 30 USD.193 La connexion Internet coûte au moins 20 USD par mois. En général, un abonnement Internet mobile coûte jusqu’à sept fois plus cher qu’un abonnement de téléphonie mobile. Il est à noter que les opérateurs ont commencé à émettre des cartes à gratter pour les forfaits de connexion Internet horaires, quotidiens et hebdomadaires.
Par ailleurs, il faut également noter que dans la plupart des pays africains, l’électricité est un obstacle majeur à l’accès à Internet pour les ménages pauvres. Les ménages qui ne disposent ni d’Internet ni d’électricité sont confrontés à au moins deux grands obstacles pour se connecter, à savoir une infrastructure adéquate et les ressources nécessaires pour acheter un appareil avec accès à Internet.
Outre les faiblesses du système bancaire traditionnel, nous avons également découvert de nombreux défis et même des difficultés rencontrées par les opérateurs télécoms et les Fintechs par rapport aux banques de détail :
- L’acquisition d’une licence bancaire : si dans la plupart des cas, les banques sont automatiquement (selon les lois de la réglementation bancaire) autorisées à mener des activités d’émission de monnaie électronique, la situation est assez différente pour les opérateurs de réseaux mobiles. Sur 89 marchés où il y a des services de monnaie électronique, 42 interdisent toujours aux opérateurs de téléphonie de détenir directement des licences de mobile Banking. Sans l’autorisation et l’agrément de la Banque Centrale, aucune institution ou établissement ne peut mener ou effectuer des activités d’émission de monnaie électronique. Pour ces derniers, la seule solution est donc de travailler avec des institutions bancaires, qui non seulement possèdent une autorisation, mais aussi font office de gestionnaire des relations avec l’autorité de tutelle. Par conséquent, en Afrique, l’organisation actuelle du marché de la monnaie électronique signifie que les banques et les opérateurs de réseaux mobiles sont encore très dépendants les uns des autres. Même si cela est possible, peu d’entreprises de télécommunications choisissent de rompre les partenariats bancaires en obtenant une licence en leur nom propre. Ces obstacles réglementaires ralentiront considérablement le développement du marché de la monnaie électronique. C’est le cas au Nigéria, où contrairement au Kenya, la réglementation entrave le fonctionnement du marché.
- Différences dans les réseaux de distribution : comme nous l’avons déjà dit, le modèle économique de la banque mobile est très dépendant des réseaux d’agents existants. En fait, les facteurs de succès dépendent de l’existence d’un réseau de distribution efficace et du réseau dominant. Par exemple, le succès de M-Pesa au Kenya peut être attribué à l’existence d’un opérateur de télécommunications de premier plan (Safaricom) avec près de 50 000 agents. D’autre part, l’échec de M-Pesa en Afrique du Sud (où un système bancaire traditionnel relativement complet a été mis en place) montre que le modèle ne peut pas s’appliquer à tous les pays africains.
En outre, de nombreux commerçants hésiteront encore à accepter les paiements numériques, car ils sont facilement suivis par les autorités fiscales. Pour les raisons ci-dessus, l’argent liquide continuera probablement à prévaloir dans les transactions quotidiennes. Cela n’est pas nécessairement spécifique à l’Afrique, mais reflète seulement les barrières générales qui expliquent pourquoi seuls très peu de pays dans le monde se rapprochent d’une économie sans numéraire, bien que des méthodes de paiement alternatives telles que les cartes de débit et les virements électroniques soient disponibles depuis longtemps
Étant donné que les conditions en Afrique sont très différentes de celles des économies développées, les modèles commerciaux qui réussissent autrement auront du mal en Afrique, tandis que d’autres sont particulièrement pertinents sur le continent. Cela peut paraître évident, mais il est étonnamment souvent négligé que les modèles commerciaux reposant fondamentalement sur l’accès à Internet, la disponibilité des données disponibles sur le Web, les Smartphones, les plateformes spécifiques comme Android ou iOS, la prédominance des médias sociaux, le commerce électronique, et l’utilisation généralisée des monnaies numériques et des transactions auront plus de mal à réussir en Afrique que dans les pays en développement. Sur toutes ces mesures, l’Afrique affiche des taux de pénétration nettement inférieurs, et cela a des conséquences. Nous pouvons illustrer cela à travers deux exemples :
- Bien que le secteur bancaire soit assez efficace dans d’autres pays comma les États-Unis, les prêts entre particuliers ont été couronnés de succès principalement en raison de l’existence de registres de crédit très performants et de l’abondance de données en ligne sur les emprunteurs, que ce soit via les médias sociaux ou des appareils connectés. Les registres de crédit sont exhaustifs et utilisés par les prêteurs, ce qui signifie que l’incitation à maintenir une bonne cote de crédit est très élevée. Les informations sur les réseaux sociaux via des plateformes telles que Facebook sont extrêmement riches et peuvent fournir des informations très précieuses pour évaluer la solvabilité. D’autres types d’informations pourraient inclure les relevés bancaires, largement disponibles sous forme électronique. En conséquence, les prêteurs peer-to-peer exploitent cette richesse de données – y compris les médias sociaux et les relevés bancaires avec l’approbation de leurs clients – et signalent tout défaut aux bureaux de crédit. En conséquence, ils sont en mesure d’évaluer de manière très précise la solvabilité et de bénéficier efficacement de la cote de crédit de l’emprunteur comme garantie. En revanche, les registres de crédit en Afrique sont soit inexistants, soit dysfonctionnels. La pénétration de Facebook n’est que de 12% et le support est utilisé par des personnes qui ont déjà accès au crédit. La disponibilité des relevés bancaires est encore plus rare, avec un taux de pénétration bancaire de seulement 17%. En raison de ce manque de données, malgré l’importante demande non satisfaite de crédit, les modèles de prêts entre particuliers risquent de se débattre en Afrique pendant un certain temps.
- Les sociétés de gestion financière tirent parti de leur accès à l’historique des transactions de leurs clients pour proposer des services financiers pertinents à leurs clients. Ce modèle part de l’hypothèse que les flux financiers numériques captés sont suffisamment représentatifs de la vie financière plus large de leurs clients. Mais ce n’est pas le cas en Afrique, où la plupart des agents économiques, y compris les PME, dépendent encore majoritairement du cash pour effectuer des transactions.
En outre, la mise à l’échelle en Afrique Subsaharienne est plus difficile que dans les économiquement développés. De nombreux acteurs technologiques fondent leur succès sur une stratégie de croissance agressive d’abord, puis de profits. Cela peut être une stratégie pertinente lorsque, par exemple, la valeur apportée aux clients repose sur un effet de réseau, ou lorsque les coûts d’entrée sont élevés. Cela explique pourquoi de nombreux modèles à succès ont d’abord été lancés sur les plus grands marchés comme les États-Unis ou la Chine. Cependant, atteindre rapidement une échelle donnée n’est pas facile en Afrique, car les marchés sont fragmentés et petits, et au sein de chaque économie, le marché adressable est souvent petit, en raison du pouvoir d’achat limité, de l’accès à Internet, etc.
Par ailleurs, il est important de noter que l’argent mobile étant de plus en plus largement adopté en Afrique, on peut légitimement se demander si cela pourrait conduire à une économie sans numéraire. Une analyse des coûts menée par Genesis Analytics montre que même les paiements par téléphone mobile restent chers pour les petites transactions. En effet, en prenant l’exemple de M-Pesa, alors que payer le loyer ou remettre des fonds à la famille coûte généralement moins de 0,5% du montant transféré, payer l’épicerie coûte généralement 4% de la valeur des marchandises. Ceci est nettement supérieur aux 2% généralement considérés comme les frais de paiement maximum acceptables.
- Les services pouvant être apportées par les fintechs pour pallier aux problèmes des banques traditionnelles
Dans la plupart des pays en développement, les institutions financières formelles se trouvent dans une situation de grande difficulté face aux larges pans de la société et cela n’est nulle part plus vrai qu’en Afrique subsaharienne où seulement un tiers environ a accès aux services financiers formels selon les dernières estimations de la Banque mondiale (Groupe de la Banque mondiale, 2018).
La digitalisation des services financiers est loin d’être réservée aux pays industrialisés. Même dans les pays émergents, les services numériques et surtout les services mobiles priment sur les agences des banques occidentales traditionnelles. L’Association des opérateurs téléphoniques, (GSMA), estime le nombre de comptes Mobile Money à 134 millions. Pour les non-bancarisés, les porte-monnaie électroniques viennent bouleverser leurs habitudes. L’expansion des services financiers numériques est très rapide dans les régions touchées par l’exclusion financière, notamment en Afrique. On compte plus de compte Mobile Money que de compte bancaire dans 19 pays de l’Afrique subsaharienne.
Techniquement, la digitalisation de ce modèle financier a pris de nombreuses formes : des banques qui mettent à la disposition de leurs agents de crédit des tablettes et de scooters pour se rendre directement chez le client et ouvrir des comptes, des opérateurs de téléphonie qui contournent les réseaux de cartes pour effectuer des paiements en magasin par le biais d’un simple téléphone, des start-ups qui sont en quête de la moindre inattention des acteurs du secteur, le continent regorge de projets novateurs. Si d’autres sont encore en phase expérimentale, les services proposés par M-Pesa au Kenya rapportent près du quart de son chiffre d’affaires total à l’opérateur Safaricom.
S’il existe des défis pour les institutions financières de concurrencer les entreprises de technologie financière, il existe également des opportunités de collaboration. En effet, les banques nouent de plus en plus des partenariats avec des opérateurs de réseaux mobiles et prennent part à cette innovation disruptive de l’argent mobile. Les progrès des nouvelles technologies permettent aux institutions financières de servir les entreprises et les consommateurs sans investissements coûteux. Une littérature récente, mais croissante commence à s’intéresser à la coopération entre les banques et la Fintech.
Comme nous l’avons vu plus haut, la digitalisation des banques africaines est confrontée à de nombreux défis dont les principaux sont les défis culturels, le manque de qualification et l’accès à internet par la population. Selon les recherches et les entretiens que nous avons mené, une grande partie de ces problèmes peuvent être résolus si les banques traditionnelles acceptent de travailler avec les Fintechs ou avec les opérateurs mobiles.
En analysant le terme « Fintech » et ses relations, nous constatons qu’il est souvent associé au mot « banque ». Autrement dit, la majorité des personnes qui ont fait l’objet de notre étude ont mis l’accent sur la nécessité d’associer les services proposés par les banques traditionnels à ceux proposés par les Fintechs. En regardant l’illustration ci-dessous, nous pouvons également constater que le terme Fintech a été associé à plusieurs autres variables : pouvoir, solution, service, etc.
Pour ce qui est du partenariat entre les banques et les Fintechs, le mot le plus fréquemment cité est la technologie financière. En effet, le principal objectif de la collaboration entre les Fintechs et les banques traditionnelles est de mettre en place des services financiers numériques accessibles et pouvant répondre aux besoins de la population.
Concernant la situation actuelle des banques traditionnelles en Afrique Subsaharienne, notre premier constat est que le niveau de bancarisation de la population africaine est très faible. Comme mentionné dans la première partie de ce travail, cette situation peut s’expliquer par le fait qu’une grande partie de la population africaine ne peut accéder aux services bancaires en raison de nombreux facteurs (distance, coût, analphabétisme, etc.). Également, cela a été confirmé par plusieurs de nos interviewés. Par conséquent, les gens préfèrent se tourner vers d’autres alternatives qui sont plus facile d’accès, comme le Mobile Money. Un moyen qui semble réussir non seulement pour la population, mais également pour les entreprises fournisseurs de service. En guise d’exemple, on peut citer les services de mobile banking qui se sont développés en Afrique de l’Est (ex. M-Pesa).
Nous avons ainsi mis en évidence deux tendances : une population qui se tourne davantage vers les solutions mobiles c’est-à-dire le Mobile money, le mobile money offre différents avantages pour la population africaine.
Par conséquent, la solution qui nous semble pertinente et utile en termes d’optimisation de la bancarisation par la population africaine est l’association du mobil money aux innovations apportées par les fintechs et leur adaptation aux offres des banques traditionnelles.
Auparavant, les banques tenaient un rôle majeur quand il s’agissait de faire des paiements. Aujourd’hui, la situation a totalement changé puisque les paiements ne dépendent plus forcément des banques à cause des innovations (ex : système de paiement mobile). Le M-paiement : système de paiement mobile met en concurrence et en opposition 3 grands acteurs à savoir les opérateurs de téléphonie, les banques, mais aussi les établissements financiers qui se spécialisent dans le transfert d’argent. Avant l’arrivée du mobile money en Afrique par exemple, ce sont les établissements financiers non-bancaires comme Western Union ou encore Money Gram qui dominaient le marché de transfert d’argent.
Graphique 7 : Taux de bancarisation par région en Afrique
Source : BEI, 2013
En analysant les réponses que nous avons obtenu durant les entretiens que nous avons menés, nous pouvons constater qu’en Afrique Subsaharienne, la déficience ne se rapporte pas uniquement à la bancarisation, mais aussi à d’autres domaines comme le niveau de vie, l’accès à internet, le montant de fonds disponible pour chaque foyer etc. En prenant le mot « faible », dans les résultats de nos entretiens, nous pouvons constater, à travers la figure ci-dessous, qu’elle se rapporte à plusieurs variables comme la bancarisation, le niveau de vie, internet, etc. Toutes ces variables impactent fortement le niveau d’inclusion financière de la population africaine.
Toutefois, il faut dire que cette situation, plus particulièrement le faible niveau de bancarisation, commence à changer depuis le développement du système de Mobile Money. En effet, au cours de ces dix dernières années, l’introduction de l’argent mobile, comme alternative aux services bancaires, a transformé le secteur financier en Afrique subsaharienne et a grandement contribué à l’expansion du taux d’inclusion financière. Cela bien que l’approche ne soit pas totalement formelle. Il faut également noter que la population africaine aime la facilité et la rapidité offertes par les services de money mobile. C’est la raison pour laquelle de nombreuses personnes optent pour ce type de service.
En Afrique subsaharienne, il existe deux raisons qui font que la population locale ne possède pas de compte bancaire : le manque de fonds à déposer et la distance à parcourir jusqu’aux banques. C’est ce qui explique en partie le grand succès de la banque mobile.
Le succès du paiement mobile vient en effet de la simplicité, mais également des faibles coûts des technologies nécessaires à son développement. En Afrique, l’Unstructured Supplementary Service Data ou l’USSD est la principale technologie utilisée par la plupart des institutions et opérateurs qui proposent des services de mobile money. Le principal avantage avec cette technologie, semblable à celle utilisée pour envoyer un SMS est qu’elle est compatible avec 99% des téléphones mobiles qui circulent en Afrique, en particulier les plus bas de gamme qui recouvrent le marché africain. Avec l’USSD, les clients peuvent envoyer diverses instructions de paiement à leurs fournisseurs, qui en retour confirmeront l’exécution de la transaction. Selon les calculs de McKinsey, les coûts opérationnels du mobile Banking, sont largement moins cher, 80% à 90% de moins que ceux des banques. Pour fidéliser les clients, les fournisseurs proposent des services gratuits, mais aussi des services peu facturés, pouvant être rentables si les clients font des transactions répétitives. Comparé au tarif des banques et celui des sociétés de transfert d’argent, le tarif proposé par le mobile Banking est trois à cinq fois moins cher194.
Dans le continent africain, le mobile Banking a restructuré le marché. Il est devenu possible qu’un acteur économique propose des services outre son cœur de métier. On parle d’une innovation multidimensionnelle qui outrepasse les frontières sectorielles des différentes activités économiques. La barrière entre les différentes activités est quasi-inexistante. Les Fintech, notamment les opérateurs de téléphonie satisfont les demandes des services financiers que les banques ne peuvent satisfaire.
En Afrique, les opérateurs de téléphonie n’ont pas seulement impacté la concurrence entre les systèmes de paiement, ils ont complètement modifié le métier du paiement. Dans ce système, la carte SIM est en quelque sorte la carte de crédit et l’agent de l’opérateur de téléphonie est une borne bancaire humaine. L’agent humain vient donc remplacer l’infrastructure qui est quasi-inexistante dans les banques traditionnelles. Dans le cas de M-Pesa par exemple, l’agent est en réalité un client. La différence avec le client classique c’est qu’il dispose de limites de dépôt et de transfert plus important. Pour être encore plus clair, quand un client de M-Pesa demande de l’argent liquide à un agent en échange de mobile money, la somme sera transférée directement sur le compte de l’agent et l’argent liquide transféré au client sortira directement de la poche de l’agent. De ce fait, peu importe la plateforme, les transactions entre les agents et les clients seront toujours les mêmes, c’est ce qui confère à ce système une grande simplicité.
Les facteurs qui peuvent influencer les individus à adopter les technologies sont plus d’ordre sociétal que personnel. Du point de vue sociétal, les chercheurs ont été plus attirés par les facteurs institutionnels, culturels et économiques. Dans l’adoption des technologies, nombreux éléments tels que le facteur économique, l’inflation, le PIB/habitant, et les inégalités des salaires jouent un grand rôle. Étrangement, on constate que dans les pays développés, les services financiers mobiles sont moins développés par rapport aux services financiers mobiles des pays émergents. C’est peut-être dû au fait que le M-Banking est la seule alternative pour accéder aux services financiers dans les pays en développement alors que ce n’est qu‘un canal de distribution en plus dans les pays développés. D’autant plus que les enquêtes nous montrent que la population africaine a vraiment du mal à accéder aux services bancaires traditionnels.
L’Afrique Subsaharienne ouvre la voie à l’adoption de la banque mobile. Dans les populations rurales, les intermédiaires bancaires traditionnels n’arrivent pas à atteindre les zones à faible densité de population et le coût de leurs services est souvent prohibitif pour les ménages à faible revenu et les petites entreprises. La récente flambée de l’argent mobile observée dans de nombreux pays d’Afrique subsaharienne est facilitée par de faibles coûts de transaction, des innovations croissantes et une forte croissance des abonnements aux téléphones mobiles. Aujourd’hui, il est moins nécessaire de parcourir de longues distances pour accéder aux services financiers. Le développement des systèmes de paiement mobile a contribué à intégrer de larges pans de la population dans le système financier, en particulier en Afrique de l’Est. L’augmentation significative de la part de la population incluse est mieux illustrée par le cas du Rwanda, où 89% de la population avait un accès financier en 2016, contre 75% quatre ans plus tôt195. La révolution numérique a permis aux gens d’effectuer des transactions financières et des transferts d’argent à partir de leurs téléphones mobiles. La baisse des coûts leur a permis de disposer d’un revenu disponible plus élevé et ils disposent désormais d’un moyen sûr de stocker de l’argent liquide, même ceux qui travaillent dans l’économie informelle.
Il faut tout de même noter que l’impact du M-Banking n’est pas toujours le même. En effet, selon les études menées par DFID en 2006 et FinMark Trust en 2007196, l’impact est différent selon les pays. Dans les pays où l’économie est très développée, le M-Banking est perçu comme un canal de plus dans la distribution des MFS (services financiers mobiles), un accès qui, en plus des traditionnels canaux, vient s’ajouter aux comptes bancaires. Par contre, dans certains pays en développement, le M-Banking est la plupart du temps l’unique canal permettant aux individus non-bancarisés d‘accéder aux services bancaires et financiers via leurs Smartphones.
Les entretiens que nous avons menés prouvent ce fait, car la plupart de nos interviewés ont déclaré que la population africaine préfère les services financiers proposés par les opérateurs mobiles en raison du fait qu’ils sont plus faciles et plus accessibles, même pour les gens analphabètes. Également, les comptes Mobile Money ne requièrent pas de fonds importants. Autrement dit, les services de Mobile Money arrivent à résoudre les problèmes de la population africaine en termes de transfert d’argent et de paiement à distance.
Dans les pays en voie développement, les fournisseurs en quête de nouveaux clients offrent une inscription gratuite et ne facturent pas la plupart des transactions telles que les dépôts d‘argent, rechargement de crédits, etc. Par contre, ils se rémunèrent sur d‘autres activités (ex : transfert d‘argent, retrait d’argent) en prenant une commission ou un pourcentage. Le faible taux de pénétration des banques ainsi que la vente de Smartphones qui explose ont permis aux opérateurs mobiles de comprendre l‘intérêt financier et marketing que ce moyen de communication représente. Avec la clientèle qu’ils ont eu grâce aux services de téléphonie, les opérateurs mettent en place de nouveaux services qui vont permettre aux clients de gérer leur compte à distance en se servant d’un outil en lequel ils ont confiance, un outil dont ils ne séparent jamais, sans avoir à franchir la porte d’une banque.
En ce qui concerne les clients qui utilisent ces services, les Smartphones leur ont permis d‘avoir un accès sur les services financiers de base qui leur permettent de se passer des canaux informels. Devenus portefeuille, les téléphones mobiles ont permis à tous les souscripteurs, non-bancarisés, d’accéder via une technologie maitrisée à un niveau d’inclusion financière. Mis à part le développement économique, un développement social a également été apporté par ces nouveaux services. Cela a entrainé une demande de services encore plus complexes. La volonté d’améliorer son niveau de vie a pour conséquence la création de nouveaux besoins en matière de services financiers. À travers les différents partenariats avec les instituts de microfinance, les opérateurs de téléphonie mobile ont pu proposer différentes offres de micro-crédit, de micro-assurance ou encore de micro-épargne. Très proches des services bancaires traditionnels, on peut parler de bancarisation qui peut avoir des impacts sur le développement culturel ; social et économique.
Dans les pays en développement, les téléphones mobiles sont perçus comme étant le meilleur outil pour accéder aux services financiers. Pour les banques, il est difficile de servir les individus non-bancarisés qui se trouvent la plupart du temps dans les zones rurales. La mise en place d‘agences, le recrutement d’agents de banque mais aussi le transport d’argent sont quasi-impossibles et ne seront pas rentables compte tenu du niveau de vie des individus ciblés. En proposant ces services, les opérateurs de téléphonie mobile ont montré qu‘à moindre coût et grâce aux téléphones portables, ils peuvent toucher la majorité des individus non-bancarisés. Effectivement, grâce au réseau de téléphonie déjà existant, cela réduit non seulement le coût, mais également l‘effort marketing grâce à un réseau de téléphonie déjà existant. Le coût d‘accès aux souscripteurs est donc mutualisé entre les services financiers et les offres de téléphonie mobile.
Les banques traditionnelles doivent opter pour les téléphones mobiles pour proposer leurs services aux futurs clients non-bancarisés. Contrairement aux réseaux d’agences, les téléphones mobiles permettent d‘atteindre, à faible coût, plus de consommateurs potentiels. Mis à part le développement culturel, social et économique que la bancarisation apporte, les banques doivent également se pencher sur l‘intérêt financier, les avantages des services bancaires proposés via un téléphone portable. Certes, ce serait peut-être de petits montants, mais compte tenu du nombre d’individus non-bancarisés, ce serait sans aucun doute des gros volumes de transactions.
L‘impact de l’utilisation des téléphones portables n’est pas du tout le même dans les pays développés. Les personnes interviewées n‘ont pas confirmé le fait que l’utilisation des portables pouvait diminuer le nombre de personnes non-bancarisées dans les pays développés. Effectivement, le Mobile Banking permet aux clients d’accéder à leur compte peu importe l’endroit où ils se trouvent. Indissociable avec un compte, le M-Banking ne propose que peu de solutions de paiement compte tenu des demandes qui émanent des clients. Il est donc impossible de proposer ces services de M-Banking pour résoudre pleinement le problème de la non-bancarisation puisqu’ils sont incomplets dans les pays développés.
Il faut noter que dans les pays développés, l’accès aux banques est plus facile grâce à un bon quadrillage des agences et grâce à un taux de pénétration élevé. Si les banques veulent réellement bancariser ces populations, si elles souhaitent vraiment les intégrer dans leur réseau, elles doivent tout d’abord proposer des comptes gratuits avec des services limités et minimum. Cependant, il n’existe pas assez de banques qui cherchent à venir en aide à ces individus défavorisés.
Notre étude nous a permis, pour une partie, de comprendre l’importance des services financiers mobiles dans les pays en développement, notamment en Afrique Subsaharienne. Ces services ont par la suite permis de proposer aux plus démunis, aux personnes que les banques traditionnelles ont écartées des services financiers de base. Le recours au système de microfinance via les téléphones portables a permis la bancarisation de la population et cela a entrainé un développement sur le plan culturel, social et aussi économique. Le téléphone portable s’avère donc être l’outil par excellence pour accélérer l’inclusion financière des habitants des zones rurales à moindre coût.
Partout en Afrique, les gens vivent dans une économie principalement monétaire et les avantages potentiels que les Fintechs peuvent apporter aux gens, aux entreprises et au gouvernement sont prodigieux. Cependant, la clé de l’évolution des Fintechs est le partenariat avec les banques traditionnelles. Alors que de nombreux services ont commencé comme des systèmes en boucle fermée, même ceux fournis par les banques et les IMF ont rapidement dû s’interconnecter avec d’autres comptes dans leurs propres organisations et avec d’autres institutions financières pour élargir l’offre. L’interopérabilité est un précurseur des services les plus sophistiqués, et cela devient de plus en plus courant sur tous les marchés. De plus en plus, des partenariats entre les banques et les OTM voient le jour et des services interconnectés sont nécessaires pour soutenir les services qui en résultent. Les banques disposent d’une expertise financière qui peut être associée aux énormes ensembles de données des OTM pour cartographier le comportement des clients afin de créer de nouveaux types de services financiers.
Dans ce contexte, une forme de collaboration gagnant-gagnant serait le plus adapté. Il s’agit de trouver un terrain d’entente pour mettre en place un partenariat à la fois responsable et solidaire. Si la collaboration avec les OTM ou les Fintechs n’est pas possible, il est toujours possible pour les banques d’adopter une stratégie d’accompagnement. Par exemple, elles peuvent faire appel à un professionnel qui va leur apprendre à utiliser et à exploiter les nouvelles technologies de l’information et de la communication.
Il est judicieux que les banques africaines investissent dans la technologie pour attirer les déposants, les servir efficacement et finalement contrôler les coûts. La Fintech – en particulier, l’utilisation de la technologie financière pour faciliter les activités de prêt des banques – apparaît toujours comme une nouvelle technologie, en particulier en Afrique subsaharienne. En effet, la Fintech suppose généralement une bonne quantité d’infrastructure informatique avant de pouvoir être déployée et les résultats de nos entretiens révèlent probablement un degré de séquençage de la technologie bancaire plutôt qu’un manque d’intérêt pour la Fintech en soi.
Les Fintechs sont en train de devenir une caractéristique établie de la vie urbaine et villageoise en Afrique subsaharienne. Sur tout le continent, il existe des centaines de milliers de kiosques d’agents bancaires – souvent clairement commercialisant leurs services dans les couleurs vives des prestataires de services. Les agents sont le visage des fournisseurs pour un nouvel ensemble de clients, dont beaucoup n’ont jamais mis pied dans une agence bancaire auparavant. Que les fournisseurs choisissent d’établir un réseau d’agents propriétaire ou de l’externaliser à un partenaire, la relation entre les agents et les clients est cruciale pour réaliser la promesse de digitalisation des services financiers en matière d’inclusion financière.
L’innovation technologique dans les services financiers remodèle de plus en plus le paysage financier et bancaire africain comme jamais auparavant197. Il existe un large consensus sur le fait que la Fintech profite aux personnes financièrement exclues et aux consommateurs mal desservis du monde entier et que cette tendance pourrait s’étendre au cours de la prochaine décennie à toutes les services financiers clés tels que l’épargne, les crédits et les investissements.
Bien que « Afrique » et « innovation » soient rarement associées, la position de leader mondial du continent africain dans le domaine de l’argent mobile commence à remettre en question cette perception ancienne. L’Afrique subsaharienne a joué un rôle central dans l’émergence et le développement de l’argent mobile198. Van Der Boor et al. (2014) remettent en question l’opinion largement répandue selon laquelle le « Nord » est la source unique de nouvelles technologies. Ils offrent la première étude empirique quantitative des sources d’innovation dans les services financiers mobiles en Afrique et montrent que les utilisateurs-innovateurs dans ce domaine viennent de pays moins développés ayant depuis longtemps un besoin non satisfait de services bancaires bon marché. Depuis le développement du Mobile Money, de nombreux régulateurs observent l’entrée d’acteurs entièrement nouveaux dans le secteur financier, incertains de la meilleure façon d’intervenir pour protéger les clients et les fonds, tout en permettant à ces nouvelles forces innovantes d’élargir l’accès aux services financiers. L’industrie a parcouru un long chemin depuis et est devenue un espace beaucoup plus ordonné.
Si le Mobile Money et les Fintechs attirent de plus en plus la population africaine, c’est notamment en raison du fait qu’ils peuvent fournir des services plus adaptés dont les banques n’ont su assurer jusqu’à maintenant la diffusion et la promotion. Autrement dit, ces nouveaux acteurs sont à la fois innovants, rapides, et plus proches des clients.
Les solutions mobiles et Internet ont donc le potentiel de stimuler l’inclusion financière, en fournissant un ensemble complet de services financiers – paiements, crédit, financement d’actifs, prêts, épargne et assurance – aux particuliers et aux entreprises, réduisant ainsi les coûts de transaction, la distance et permettant l’expansion à une base plus large de la population.
Par ailleurs, pour que le numérique soit considérée comme un moyen pour optimiser l’inclusion financière en Afrique Subsaharienne, des restructurations doivent être effectuées. Premièrement, il est plus qu’important de commencer par la mise en place d’infrastructures nécessaires à l’utilisation d’Internet haut débit et par le renforcement des réseaux téléphoniques dans toutes les régions. Ensuite, en ce qui concerne le cadre institutionnel, diverses réformes doivent être entamées pour que les services financiers numériques se développent convenablement. Dans ce contexte, il est primordial que les régulateurs et les institutions financières mettent en place des systèmes de protection notamment afin de se protéger et de protéger les clients contre les fraudes, l’exploitation illicite de données privées, les menaces et les autres types de cybercriminalités. Cela implique également de prendre des mesures destinées à protéger les consommateurs à travers des règles régissant le traitement et l’accès aux informations, etc.
Toutefois, il est important de noter qu’il faut aussi disposer d’un cadre réglementaire flexible et efficace afin que l’innovation dans le secteur financier ne soit pas figée. Les approches réglementaires qui permettent de mettre en œuvre des systèmes de distribution à faible coût, à l’exemple des magasins de détail locaux agissant en tant qu’intermédiaires financiers, peuvent promouvoir l’inclusion financière.
Ainsi, nous avons identifiés deux types de services qui peuvent être crées à travers la coopération entre les fintechs, les OTM et les banques traditionnelles.
Tableau 25 : Les types de services possibles qui peuvent être développés par les trois acteurs concernés selon les enquêtes effectuées
Types de services | Fonctionnement |
Différents services de paiement | Actuellement, les services de paiement figurent parmi les activités bancaires les plus pratiquées par les Fintechs. Cela permet aux clients de choisir entre différentes solutions de paiement telles que : Le paiement mobile qui est très avantageux puisque non seulement accélère le passage en caisse, mais aussi il diversifie les possibilités de paiement ; Le transfert d’argent à l’international à faible coût : virement à l’étranger sans frais (ex :TransferWise) ou encore un échange de devises comme Kantox exempté de toute commission; La gestion des flux de paiement, réservés pour les sites de commerce en ligne. Outre le fait qu’ils permettent de faire des paiements rapides, ces derniers incluent également des supports de paiement très innovants comme Lemon Way; Les cagnottes en ligne comme Leetchi qui facilitent énormément la collecte d’argent ; Le paiement entre particuliers via de simple virement (ex : Pumpkin) ; Fournir des terminaux de paiement en plus des solutions bancaires traditionnelles pour les petits commerçants très mobiles (ex : Famoco). |
Les services 2.0 destinés aux particuliers | Ils comprennent des services bancaires en ligne simples, réservés au grand public sans succursales physiques et à des coûts réduits ; des solutions pour faciliter la gestion du budget grâce à des agrégateurs de comptes (ex : Bankin’) ; et enfin divers outils de gestion financière personnelle. |
Dans la mise en œuvre de ces solutions, les banques traditionnelles sont les acteurs centrales car elles tiennent le plein pouvoir dans la mise en œuvre de la majorité des services financiers.
Le cas d’utilisation initial des Fintechs sur la plupart des marchés a été les paiements entre particuliers, un service qui a clairement et rapidement répondu à une énorme demande. Cela ne devrait pas surprendre, car la plupart des économies du continent sont des économies de migrants et de réseau dans lesquelles les envois de fonds nationaux jouent un rôle clé depuis longtemps. À mesure que les marchés mûrissent, la demande d’autres produits et services émerge. Il y a eu une adoption enthousiaste des prêts et de l’épargne numériques sur certains marchés, par exemple, et sur tous les marchés, il y a un certain nombre de paiements numériques marchands “ informels ”, car les utilisateurs paient pour des biens et des services en effectuant des dépôts directs à petite échelle.
L’extension spectaculaire de l’inclusion financière en Afrique subsaharienne au cours des dix dernières années n’aurait pas été possible si les prestataires de services financiers n’avaient pas trouvé une opportunité convaincante d’élargir la portée de leurs services. Pour l’industrie, la question importante est de savoir s’il existe une analyse de rentabilisation en faveur de l’inclusion financière ? La réponse est oui. Rappelons que M-PESA représente désormais 27% du chiffre d’affaires total de Safaricom au Kenya. Pour les autres OTM, la part de l’argent mobile se situe entre 5 et 15% du total des revenus bruts.199
Bien que certains services d’argent mobile n’atteignent pas encore le seuil de rentabilité par eux-mêmes, ils contribuent indirectement au chiffre d’affaires global en réduisant le taux de désabonnement et en augmentant la satisfaction des clients. Pour les banques, les opportunités de revenus en travaillant avec les Fintechs vont bien au-delà de celles des revenus de commissions, une unité de mesure clé pour définir la rentabilité d’une banque. Indépendamment de la pression concurrentielle ou de la demande des clients, il existe d’énormes incitations pour les institutions financières à passer au numérique.
Les banques de demain auront besoin d’une technologie très sophistiquée et de base de données qui leur permettront, ainsi qu’aux partenaires du marché, d’initier, d’authentifier, de traiter et de régler en temps réel pour permettre aux clients, par exemple, d’emprunter de l’argent pour acheter un actif directement via le commerce électronique et permettre aux fournisseurs de suivre et de surveiller leurs actifs. En termes de culture institutionnelle, un changement douloureux est souvent également la clé du succès lorsque les banques existantes passent au numérique.
En Afrique, le recours aux Fintechs a commencé dans les opérations de transfert de fonds. De son côté, cette innovation s’est traduite en offres plus agiles et de leur côté l’assouplissement des réglementations européennes et l’évolution des technologies ont eu un impact positif sur les Fintechs. Pour pouvoir concurrencer les banques traditionnelles, les nouveaux arrivants ont misé sur des délais de transfert réduits ainsi que sur des barèmes affichés au moment où les clients veulent initier la transaction. Avantagées par la taille de leurs bases clients, mais également par la densité de leurs réseaux, les banques répondent et développent des solutions pour pouvoir réaliser les transactions, que ce soit à l’international ou en domestique. En guise d’exemple, on peut citer le cas de BNP Paribas qui a noué un partenariat avec Orange, etc.
Les Fintechs peuvent être considérées comme un nouvel opérateur de services financiers. Pour pouvoir fournir des services aux abonnés, ils s’appuient sur différents réseaux que les opérateurs de télécommunication ont mis en place. Le recours aux Fintechs marque une grande évolution, une innovation, que les banques de détail africaines commencent également à expérimenter. Pour les banques et les institutions financières traditionnelles, la montée en puissance des nouveaux acteurs représente une grande menace. La raison pour laquelle les acteurs traditionnels ne vont pas disparaitre vient du fait qu’avec les nouveaux arrivants, ils sont complémentaires. En effet, les banques vont encore pour longtemps jouer leur rôle de coffre-fort où l’argent est conservé. Les autres acteurs quant à eux continuent à créer plus d’intermédiation entre les banques et les clients.
Mais malgré leurs volontés à participer à cette innovation, les banques sont ralenties par le cadre spécifique de leur propre activité, particulièrement en ce qui concerne la lutte contre le financement du terrorisme et le blanchiment d’argent, qui nécessitent la connaissance des clients, des origines et des destinations des flux. En même temps, les grands acteurs ont à leur disposition des ressources informatiques pour prendre en main ces innovations.
En analysant les relations entre les références sur les termes « banque » et « technologie financière », il en sort que les termes collaboration, opérateur, partenariat et moyen de paiement sont cités plusieurs fois comme le montre l’illustration ci-dessous.
Le cas de l’Afrique du sud et celui du Kenya sont des exemples concrets en termes de mobile Banking : les moyens pour assurer une inclusion financière de leurs populations respectives, qui ont été exclues des services financiers durant des décennies, ne manquent pas. Le fait de développer le mobile Banking stimulera non seulement l’épargne domestique, mais aussi fera progresser à moindre coût les transferts de la diaspora. Il va aussi permettre de minimiser les coûts de transaction, ce qui sera bénéfique pour le développement du secteur privé. Pour les Africains non bancarisés qui vivent dans la pauvreté, le téléphone portable est plus qu’un simple moyen de communication. Pour eux, c’est en quelque sorte une banque à portée de main. Pour aller encore plus loin, il faut réduire les coûts et miser plus sur la pénétration de la téléphonie mobile. Effectivement, cette situation varie selon les pays. En guise d’exemple, le taux de pénétration est de moins 10 % en Éthiopie contre 100 % au Gabon alors que la moyenne se trouve aux alentours de 33 % pour la totalité des pays africains200.
Sur le continent africain, de nombreux obstacles comme l’analphabétisme et la faiblesse des revenus constituent un frein à l’acquisition de téléphone portable. Les taxes qui sont très élevés viennent également s’ajouter à ces obstacles (ex : en Tanzanie ou encore en Ouganda, les taxes peuvent atteindre jusqu’à 30 % des frais globaux). Toutefois, les autorités ont la possibilité d’éradiquer ces problèmes en adoptant de nouvelles réformes politiques, mais aussi en allouant plus de budget dans le secteur des TIC. Par ailleurs, il faudrait également encourager les partenariats entre les différents acteurs de la téléphonie, les banques, les micro-finances mais aussi toutes les institutions financières. Pour que l’implantation et l’expansion du mobile Banking réussissent, il faudrait qu’il y ait un cadre intégré unique qui regroupe tous les opérateurs de téléphonie et toutes les institutions financières. Cela va non seulement permettre de réduire les coûts, mais également de fournir aux clients (en ville – en campagne ou dans des endroits reculés) les avantages de la banque à distance. Si les institutions de microfinance veulent adopter le mobile Banking, ils doivent améliorer leurs infrastructures techniques, mais aussi trouver des solutions faciles d’utilisation pour les consommateurs. Le fait de favoriser l’accès de la population africaine non bancarisée à la téléphonie mobile va constituer la plus avantageuse des méthodes du point de vue financière et la plus performante des méthodes du point de vue économique pour le renforcement de l’intégration financière en Afrique.
- Trouver une interface entre les services proposés par les banques et les solutions proposées par les Fintechs et les OTM
La pression croissante exercée à la fois par les clients et les parties prenantes des banques traditionnelles, combinée à une prolifération d’options technologiques et à la concurrence des Fintechs en pleine maturation, a fait de la Fintech une priorité de croissance pour les principales institutions financières en Afrique. Les dirigeants de ces organisations réalisent que le maintien du statu quo est probablement le plus grand risque pour le succès futur de leur entreprise. Afin de tirer le meilleur parti des opportunités de la Fintech, les entreprises de services financiers doivent traiter l’innovation Fintech comme une activité courante – et l’intégrer dans toute leur organisation. Le défi réside généralement dans ce qui vient en premier.
Notre étude révèle que la technologie est une source d’innovation pour de nombreuses institutions financières, mais il est facile de se plonger dans l’enthousiasme d’une nouvelle technologie et d’oublier de s’assurer qu’elle peut être utilisée au profit des clients et des organisations. Il n’est pas rare de voir de nouvelles technologies défendues au sein d’une institution financière, car elles sont intéressantes et convaincantes. Pourtant, les gens essaieront toujours de trouver des problèmes que la technologie doit résoudre, plutôt que de commencer par un problème et de rechercher une solution viable.
La Fintech doit être considérée d’un point de vue commercial holistique. Une stratégie d’adoption ad ’hoc conduit à des erreurs coûteuses que les entreprises peuvent éviter. Le secteur bancaire est considéré comme le plus mature des sous-secteurs des services financiers lorsqu’il s’agit de saisir des opportunités d’innovation. Cela peut expliquer pourquoi les entreprises du secteur sont plus axées sur la réduction des coûts que les autres ; de nombreuses banques ont déjà consacré des années à des initiatives visant à améliorer l’expérience client et se tournent désormais vers d’autres objectifs.
Selon les différents entretiens menés, l’amélioration de l’expérience client est l’objectif le plus important des institutions financières qui ont développé ou sont en train de développer des stratégies Fintech. Plus de 70% de nos répondants auprès des banques ont identifié l’amélioration de l’expérience client comme l’un de leurs deux objectifs les plus importants pour leur stratégie Fintech.
La plupart des institutions financières sont dans un parcours de transformation : un périple susceptible de prendre plusieurs années et nécessitant invariablement des investissements substantiels pour se concrétiser. Compte tenu de l’incertitude et de la rapidité des changements, les entreprises devront compléter ce programme par une capacité à apporter des changements progressifs beaucoup plus rapidement. C’est une expédition qui ne s’achèvera pas de sitôt. Cela est en partie dû à la transformation de l’infrastructure existante de base qui, par nécessité, accompagnera ce changement. C’est pourquoi de nombreuses entreprises ont deux courants d’innovation : l’un axé sur la transformation et l’autre axé sur les changements progressifs qui favoriseront les améliorations dans l’intervalle.
Les Fintechs ont su fournir l’agilité et la liberté nécessaires pour accéder à des services financiers plus rapides et plus abordables via Internet. L’écosystème Fintech fournit un environnement où les solutions peuvent être construites plus rapidement et beaucoup moins cher, bien que les entreprises établies devraient développer des mécanismes qui permettent d’intégrer les solutions proposées pour toute la population.
Conformément à la notion même que le cœur de la Fintech est l’utilisation de la technologie pour fournir de nouveaux services financiers et assurer leur amélioration, la technologie de l’argent mobile permet à une grande majorité de population africaine d’accéder à des services financiers tels que les transferts d’argent, les paiements, l’épargne, l’assurance et le crédit numérique.201 En raison de leur capacité de développement rapide, les Fintechs remettent en question les structures traditionnelles et créent des gains d’efficacité en ouvrant la chaîne de valeur des services financiers. L’intérêt pour les Fintechs est en grande partie lié à la manière dont l’innovation dans le secteur financier peut conduire à un accès accru, de meilleurs services et des gains d’efficacité. Cette innovation comprend la transformation de tous les aspects de la prestation des fonctions essentielles du secteur financier telles que le règlement des paiements, la facilitation des emprunts et de l’épargne, le partage des risques et l’allocation des capitaux. De plus, ce processus pourrait entraîner de profonds changements dans la structure du marché et l’infrastructure des marchés financiers existants pour la fourniture de ces services.
Figure 19 : Le rôle des services financiers numériques
Source : Quartz Africa (3 Août 2016), Fintech isn’t disrupting Africa’s financial industry—it’s building it
Les entretiens nous ont permis de constater que les ménages ayant un faible revenu ont besoin de services financiers abordables et de faible valeur qui leur permettent de gérer des revenus modestes et imprévisibles gagnés dans les secteurs informel et agricole. De nombreuses familles pauvres dépendent également des envois de fonds de faible valeur et des transferts gouvernementaux. Dans ce contexte, les Fintechs, avec des services innovants, peuvent aider cette population par le biais de comptes spéciaux et de produits de monnaie électronique prépayés qui ne pas associés à des frais de maintenance et de transaction onéreux ou de soldes minimaux, qui sont courants dans les institutions financières traditionnelles.
Pourtant dans les économies en développement, environ les deux tiers des adultes sans services financiers citent le fait d’avoir trop peu d’argent comme obstacle à la possession de comptes, et environ un quart disent que les comptes sont trop chers. Par exemple en Amérique latine et dans les Caraïbes, environ la moitié des adultes sans services financiers disent que les comptes sont trop chers. Avec des coûts marginaux et fixes plus faibles, les services financiers innovants sont à moindre coût. Cela permet également une tarification basée sur les transactions, ce qui peut être plus adapté aux pauvres.
Les banques doivent se transformer pour éviter de prendre du retard face aux nouveaux entrants. Avec les Fintechs, elles se retrouvent en situation de concurrence directe (c’est-à-dire coopération et concurrence). Les banques peuvent tout simplement acheter des start-up financières pour obtenir leur innovation technologique. En guise d’exemple, on peut citer le cas de Boursorama, une filiale de la Société générale qui a racheté Fiduceo, une spécialiste des solutions de gestion de finances personnelles en ligne, en 2015. Les banques peuvent également détenir des actions minoritaires ou majoritaires, qui pourront être concrétisées par des futures acquisitions. C’est le cas au Crédit mutuel Arkéa dans Prêt d’union ou encore dans Linxo (application de gestion financière personnelle). Aussi, les banques peuvent mettre en place des incubateurs d’innovation qui seront spécialement dédiés au développement des start-up. Afin de détecter les innovations dans le secteur bancaire, les banques nouent des partenariats externes sous forme de cellules de veille technologique, d’accompagnement stratégique, etc.
En Europe et aux USA, les banques veulent s’adapter à un environnement où les technologies règnent en maitre. Pour ce faire, elles se servent des savoir-faire des Fintech pour cerner et exploiter au maximum les technologies concernant les gestions de la relation client, la collecte et le traitement des données, etc. Les partenariats avec les Fintech ont également entrainé une diversification des opérations bancaires. En proposant aux particuliers une nouvelle gamme de services, les banques complètent leur cœur de métier (dépôt, crédit, paiement) et renforcent ainsi leur relation avec les clients (améliore l’expérience client), attirant ainsi les clients (notamment les jeunes) et les fidélisent.
Outre ces motivations économiques, il existe également des considérations stratégiques pouvant justifier un investissement excessif des banques dans la technologie financière, qui peuvent être analysées sous l’angle des barrières à l’entrée. En effet, face à une concurrence de plus en plus féroce, les banques achètent des technologies financières pour bloquer les entrants potentiels et ainsi renforcer leur pouvoir de marché. En outre, derrière cette « course aux armements », les banques cherchent également à gagner des parts de marché auprès des banques retardataires.
Les institutions financières ne manquent pas d’occasions de se lancer dans la Fintech. Mais choisir les bonnes opportunités est ce qui déterminera leur succès. Pour s’assurer que les opportunités Fintech soient bien définies et pleinement alignées sur leur stratégie commerciale globale, les grandes entreprises ont mis en place des stratégies Fintech spécifiques qui prennent en compte leurs objectifs commerciaux, les attentes des clients, la position sur le marché, la structure organisationnelle et la culture, les zones géographiques dans lesquelles elles opèrent et les opportunités et solutions Fintech qui s’offrent à eux.
Dans ce contexte, la réalisation d’une évaluation de l’état actuel des opérations existantes est un point de départ clé pour les institutions financières afin d’identifier les opportunités de changement, ainsi que les défis opérationnels spécifiques, les inefficacités et les obstacles potentiels. L’évaluation actuelle de l’état des banques traditionnelles africaines est souvent le moteur du développement d’une stratégie Fintech, car la capacité de la Fintech à aider à « combler le fossé » est une mesure clé du succès à long terme.
Le champ d’application de la Fintech est vaste : de l’analyse de données et de l’IA aux plateformes technologiques innovantes et aux modèles commerciaux alternatifs. Les entreprises de premier plan restent au fait des signaux de changement sur le marché, surveillant les activités Fintech menées par les entreprises en amont et en aval de la chaîne de valeur, par des concurrents et par de grands géants de la technologie comme Google, Microsoft, Amazon et Alibaba. Ils éclairent leurs priorités en évaluant la certitude d’un changement, ses implications potentielles et le moment probable. L’identification précoce des signaux de changement peut aider les entreprises à réagir de manière plus proactive aux innovations potentielles de la Fintech plutôt que d’être obligées d’être réactives.
Également, il faut noter que la Fintech est en constante évolution, présentant aux institutions financières de nouveaux défis presque tous les jours. Pour faire face à la nature nébuleuse de la Fintech, les entreprises leaders regardent leurs activités d’innovation sur un spectre plutôt que de se concentrer sur des initiatives individuelles à l’exclusion de la vue d’ensemble. À une extrémité du spectre se trouvent les activités Fintech axées sur des améliorations progressives afin de faire des progrès constants, tandis qu’à l’autre extrémité, il y aurait des changements transformateurs destinés à faire avancer une entreprise.
Les deux types d’évolution sont souvent nécessaires dans les cas où un changement aussi radical se produit dans une industrie. Le fait de ne pas prendre en compte les innovations aux deux extrémités du spectre peut conduire les institutions financières à mettre en œuvre des changements progressifs qui ne correspondent pas bien aux changements transformateurs à long terme. Une approche flexible basée sur le spectre peut aider à garantir que des progrès soient réalisés par rapport à des paramètres spécifiques (par exemple, la satisfaction du client, la satisfaction des employés) tout en contribuant aux efforts à long terme.
- Accompagner le changement et agir ensemble
L’intégration des nouvelles technologies de l’information et de la communication dans les banques traditionnelles africaines nécessitent des stratégies d’accompagnement afin de faire adhérer tout le personnel aux nouvelles logiques de la digitalisation et aux révolutions qu’elle apporte. Dans ce contexte, l’accompagnement doit commencer par la formation axée sur le développement numérique.
Les stratégies de gestion du changement sont essentielles pour soutenir les changements organisationnels internes et externes. Quant aux effets de la mise en œuvre des TIC au niveau du personnel et des clients, il est important de noter que la gestion du changement n’est pas facile et nécessite de gérer des réactions émotionnelles et des comportements de résistance. De plus, un projet numérique nécessite de placer les clients au centre des stratégies et des processus, une tâche difficile pour les employés qui sont normalement centrés sur le produit. Par conséquent, avoir une approche centrée sur le client nécessite un changement de mentalité pour la plupart des membres du personnel, et des mécanismes pour collecter et traiter correctement les avis et besoins des clients.
En ce qui concerne les facteurs internes, une institution devrait envisager de revoir les domaines suivants :
- La capacité des ressources humaines à mettre en place des compétences de gestion de projet, des études de marché, des technologies et des analyses de données adéquates nécessaires à la mise en œuvre d’une solution innovante ;
- La capacité de l’institution à se transformer : le projet numérique peut exiger que le personnel acquière de nouvelles compétences ou se familiarise avec les concepts de base. La capacité de former et de recycler le personnel nécessite la mise en œuvre de programmes de renforcement des capacités, de stratégies de communication et de plans de gestion du changement pour guider le personnel existant vers la transformation numérique.
- La durabilité de l’infrastructure existante et sa capacité à prendre en charge de nouveaux canaux numériques : la capacité du service informatique doit être évaluée en termes de systèmes d’entreprise et d’infrastructure informatique nécessaires pour prendre en charge le canal numérique en termes de systèmes bancaires de base, de services d’intégration, de matériel (serveurs, appareils mobiles, appareils de point de vente), et les communications réseau, par exemple. Les coûts liés à l’amélioration des systèmes existants ou à l’acquisition de nouvelles technologies doivent également être pris en compte, car ils peuvent devenir des éléments importants.
Il faut aussi noter que le défi managérial qu’impose la digitalisation des organisations et la digitalisation des économies est celui de la transition numérique et technologique dont la trajectoire reste inconnue. Dans cet environnement où le web est omniprésent, les managers se doivent d’être capables d’apporter une innovation en permanence. Ce défi du numérique ne concerne pas seulement les pays africains, mais presque tous les pays du monde entier. Un article du journal Les Echos datant du 2 août 2017 concernant la digitalisation dans les entreprises africaines a mis en gros titre « Afrique : la révolution numérique est en marche ». De nombreux indices montrent à quel point l’Afrique est décidé à profiter pleinement des avantages du numérique pour développer son économie, ses entreprises, mais également ses territoires. L’e-readiness ou la maturité numérique de la plupart des pays africains montre à quel point ils sont conscients de tous les enjeux de la digitalisation mais également de la difficulté du parcours qu’ils doivent suivre.
- Se focaliser sur la formation du personnel
L’innovation nécessite un personnel qui est convaincu qu’il est bien de tester de nouvelles idées et de créer de nouvelles solutions sans craindre l’échec. C’est particulièrement le cas avec le personnel existant qui peut se sentir menacé par le changement ; souvent le personnel des succursales craignant les fermetures d’agences suite au lancement d’un réseau d’agents. Il est donc utile de garder à l’esprit que le personnel des succursales est souvent la clé du succès d’un réseau d’agents. La capacité de gagner l’adhésion des employés qui seront affectés par des changements spécifiques peut faire ou défaire le succès d’une stratégie Fintech. Les entreprises doivent aligner à la fois l’expérience des employés et l’expérience client – ce que nous appelons la « colonne vertébrale » de l’organisation.
La culture est la main invisible qui façonne le changement organisationnel. Il a le pouvoir d’accélérer ou de renverser les initiatives de changement. L’une des questions les plus importantes qu’une équipe de direction puisse se poser est la suivante : « Notre culture soutient-elle ou inhibe-t-elle notre stratégie ? » Les initiatives de transformation à grande échelle échouent souvent parce que les personnes au sein d’une organisation ne sont tout simplement pas prêtes pour le changement. L’évaluation de l’état de préparation au changement des employés et de l’équipe de direction donne une impulsion à une stratégie de changement. Les entreprises doivent comprendre quelles barrières culturelles existent pour changer et adapter ainsi leur stratégie et leur exécution de la Fintech afin de contribuer à atténuer les défis culturels et encourager l’adhésion au fil du temps.
- Faire appel à des professionnels
En ce qui concerne les facteurs internes, une institution devrait envisager de revoir les domaines suivants :
- La capacité des ressources humaines à mettre en place des compétences de gestion de projet, des études de marché, des technologies et des analyses de données adéquates nécessaires à la mise en œuvre d’une solution innovante ;
- La capacité de l’institution à se transformer : le projet numérique peut exiger que le personnel acquière de nouvelles compétences ou se familiarise avec les concepts de base. La capacité de former et de recycler le personnel nécessite la mise en œuvre de programmes de renforcement des capacités, de stratégies de communication et de plans de gestion du changement pour guider le personnel existant vers la transformation numérique.
- La durabilité de l’infrastructure existante et sa capacité à prendre en charge de nouveaux canaux numériques : la capacité du service informatique doit être évaluée en termes de systèmes d’entreprise et d’infrastructure informatique nécessaires pour prendre en charge le canal numérique en termes de systèmes bancaires de base, de services d’intégration, de matériel (serveurs, appareils mobiles, appareils de point de vente), et les communications réseau, par exemple. Les coûts liés à l’amélioration des systèmes existants ou à l’acquisition de nouvelles technologies doivent également être pris en compte, car ils peuvent devenir des éléments importants.
Il faut aussi noter que le défi managérial qu’impose la digitalisation des organisations et la digitalisation des économies est celui de la transition numérique et technologique dont la trajectoire reste inconnue. Dans cet environnement où le web est omniprésent, les managers se doivent d’être capables d’apporter une innovation en permanence. Ce défi du numérique ne concerne pas seulement les pays africains, mais presque tous les pays du monde entier. Un article du journal Les Echos datant du 2 août 2017 concernant la digitalisation dans les entreprises africaines a mis en gros titre « Afrique : la révolution numérique est en marche ». De nombreux indices montrent à quel point l’Afrique est décidé à profiter pleinement des avantages du numérique pour développer son économie, ses entreprises, mais également ses territoires. L’e-readiness ou la maturité numérique de la plupart des pays africains montre à quel point ils sont conscients de tous les enjeux de la digitalisation mais également de la difficulté du parcours qu’ils doivent suivre.
Actuellement, l’Afrique et plus particulièrement l’Afrique Subsaharienne commence réellement à utiliser et à exploiter les technologies de l’information et de la communication. Certes, bien que de nombreux projets sont en cours, il reste à savoir si la population africaine saura prendre le virage. Nous l’avons vu dans les parties précédentes, plusieurs défis sont encore à relever que ce soit au niveau des banques ou au niveau de la population. Les plus grands défis se rapportent aux facteurs humains et culturels. En effet, la digitalisation ne se résume pas uniquement à la mise en place de structures adaptées, mais aussi et surtout aux compétences des ressources humaines qui doivent la déployer, donc à la vision, à la stratégie et à l’innovation (Soufyane Frimousse et Jean-Marie Peretti (2017). Dans ce contexte, il est plus que nécessaire que la digitalisation s’accompagne d’une conduite du changement orientée sur l’humain et la culture. La stratégie se base donc sur l’open innovation ; comme quoi les sociétés peuvent non seulement faire appel à de nouveaux acteurs : outside in, mais ils peuvent aussi utiliser leurs idées pour innover d’autres partenaires : inside out.
Pour tirer pleinement parti de l’inclusion financière numérique en Afrique subsaharienne, une approche globale et cohérente est nécessaire pour rassembler toutes les parties prenantes. Cette approche doit comprendre une vision commune du développement de la finance numérique, les partenaires utilisant leurs différents actifs avec le soutien des autorités nationales pour proposer des solutions interopérables, adaptables et modulaires. Pour instaurer la confiance entre les parties prenantes, les décideurs doivent développer et articuler des objectifs stratégiques et promouvoir la collaboration aux niveaux national et international, y compris dans l’apprentissage par les pairs.
La protection et la réglementation des consommateurs doivent suivre le rythme du développement rapide de l’industrie. Les décideurs politiques devraient encourager la technologie tout en préservant sa neutralité. En d’autres termes, les régulateurs devraient soutenir l’innovation technologique sans négliger la protection des consommateurs et la stabilité financière, et devraient éviter d’utiliser la réglementation comme moyen d’orienter les marchés vers des structures spécifiques. Il serait préférable qu’ils permettent aux participants au marché d’adopter la technologie la plus appropriée pour garantir que les mêmes principes réglementaires s’appliquent à tous les types de participants du marché.
Jusqu’à maintenant, il n’y a pas encore de modèle de partenariat pertinent pour que les parties puissent se protéger l’une et l’autre. Toutefois, il y a des actions qui peuvent être entreprises pour changer la situation.
Il existe différentes voies pour saisir les opportunités offertes par le numérique, en fonction des besoins de l’institution. Une stratégie numérique est un élément essentiel de la stratégie organisationnelle globale et doit être guidée par la vision, la mission et la stratégie globale de l’entreprise, ainsi que par les conditions du marché. Pour les banques, il existe trois modèles d’engagement de base : devenir une banque numérique, lancer des canaux ou produits numériques uniques ou lancer des filiales pour gérer des opérations bancaires numériques.
En outre, offrir des services financiers numériques ne doit pas nécessairement être une approche du tout ou rien. Il y a un intérêt croissant dans le secteur bancaire pour évoluer vers une approche omnicanale, où le numérique fait simplement partie de l’activité générale et couvre tout, de la gestion de la relation client back-end aux applications mobiles front-end pour les clients, en passant par l’accès ouvert aux partenaires Fintech et une expérience utilisateur transparente pour les clients via tous les canaux numériques. Pour y arriver, il est nécessaire de faire des investissements clés dans la technologie et la culture, et les deux se sont avérés difficiles à changer.
Le numérique peut réduire les frictions à chaque étape du cycle de vie des services financiers, de l’ouverture d’un compte à la vérification préalable des clients, à l’authentification des transactions et à l’automatisation d’autres processus spécifiques au produit. Les Fintechs se caractérisent donc par de faibles coûts marginaux par compte ou par transaction et peuvent apporter des économies d’échelle et réduire les coûts. Les Fintechs améliorent également la transparence, car chaque transaction génère une piste de données. Cette piste de données renforce la capacité des services financiers à développer formellement un mécanisme de notation du crédit pour les acteurs du marché informel.
Les ménages ne disposant que d’un faible revenu opèrent souvent dans le secteur informel où ils manquent de vérification d’identité appropriée et laissent peu de traces de leur activité économique et de leurs actifs. Cela pose des défis pour l’inclusion financière. Près d’un cinquième des adultes sans services financiers citent le manque de documentation comme un obstacle majeur à la propriété de compte. Les Fintechs peuvent aider les sans-papiers pauvres en tirant parti des moyens numériques d’authentification et de lancement de transactions, ce qui réduit les coûts. Dans ce contexte, le devoir de diligence client peut aider à surmonter les exigences de documentation plus strictes associées aux comptes traditionnels. En effet, les Fintechs ont la possibilité d’exploiter les données des transactions numériques et d’autres sources de données, telles que les réseaux sociaux ou les plateformes de commerce électronique pour surmonter les asymétries d’informations. Cela peut compenser le manque d’historique de crédit et d’états financiers formels adéquats des plus démunis, ainsi que leur capacité limitée à enregistrer des garanties, ce qui aurait pu leur permettre d’accéder à des services financiers à des conditions plus appropriées.
Les nouveaux utilisateurs potentiels des services financiers formels manquent souvent de connaissances sur les services financiers, ainsi que de compétences pour les comprendre et les utiliser de manière adéquate. En effet, ceux qui n’ont pas de services financiers sont plus susceptibles d’être moins instruits et sont beaucoup plus méfiants. Cette méfiance est l’une des raisons pour eux de s’abstenir d’utiliser les services financiers. De plus, les banques africaines présentent généralement des compétences en gestion financière plus faibles. Cela pose également des risques financiers plus élevés. Par conséquent, des cadres solides de protection des consommateurs et des connaissances financières sont des catalyseurs importants de l’inclusion financière dans les pays africains.
Également par rapport aux banques traditionnelles, de nombreux opérateurs en place offrent des services financiers standardisés, qui sont plus appropriés pour desservir tous types d’individus, car ils s’appuient sur des canaux de livraison hors ligne dans les zones urbaines et des sources d’information traditionnelles. Cependant, les personnes à faible revenu et qui ont des revenus volatils peuvent avoir besoin de plus de flexibilité pour étendre les paiements ou pour rembourser leur crédit. Les Fintechs qui sont ancrés dans de nouveaux modèles commerciaux, peuvent fournir des services à un coût différentiel moindre et peuvent être conçus avec la flexibilité nécessaire pour mieux répondre aux besoins financiers de ces types de consommateurs.
Par ailleurs, il est également constaté que dans de nombreuses économies en développement, les opérateurs en place ont bénéficié d’un pouvoir de marché considérable, protégé par des barrières à l’entrée par le biais de réglementations restrictives et d’un écosystème de démarrage faible. En conséquence, les institutions financières étaient libres de facturer des frais et des marges élevés et ont ressenti moins de pression pour investir et innover et pour exploiter de nouveaux segments de marché mal desservis. Les modèles commerciaux des Fintechs permettent aux nouveaux entrants d’offrir des services de type bancaire qui se font concurrence efficacement en termes de prix et de qualité. Les opérateurs historiques agiles qui se concentrent sur la transformation numérique ou s’associent à de nouveaux entrants peuvent également accroître la concurrence et promouvoir l’innovation.
Partie de rien sur le plan financier, l’Afrique saute actuellement de nombreuses étapes et invente même une nouvelle forme de banque : la banque 3.0, ce que les institutions occidentales ont du mal à mettre en place à cause des contraintes du système existant qui nécessite une réforme. Effectivement, l’expérience de l’Afrique ne peut être transposée telles quelles dans les pays occidentaux. Néanmoins, ils peuvent toujours être considérés comme des laboratoires pour les projets innovants en matière de technologie, de nouveaux modèles commerciaux, de nouvelles relations clients et même de nouvelles réglementations. Les grands acteurs comme Orange tentent actuellement de dupliquer ces expériences dans les pays du nord, notamment avec Orange money ou encore Orange Bank. Le Compte Nickel quant à lui, avec son recours à la téléphonie et son réseau de buralistes, a emprunté l’approche des grands opérateurs de Mobile Money. En ce qui concerne l’algorithme qui évalue la solvabilité de l’emprunteur, il permet d’accorder à des clients sans historique de crédit des prêts à la consommation en temps réel. Cet algorithme est utilisé par les start-ups dans les pays développés.
Pourtant, face aux différentes opportunités de développement des OTM et des Fintechs, il est important de préciser que les banques conservent une position dominant sur le marché financier. Cela s’explique premièrement par le fait qu’elles sont formelles et réglementées. L’utilisation des services proposés par les banques traditionnelles est donc plus sécurisée. Les banques ont également une bonne connaissance des métiers financiers et ont de bonnes expériences dans le domaine. À l’inverse, les acteurs tels que les opérateurs de téléphonie mobile et les entreprises technologiques doivent nouer des partenariats avec des banques traditionnelles pour des raisons à la fois économiques et réglementaires. En effet, ils sont souvent nouveaux dans le secteur financier et sont parfois nouveaux en Afrique. Dans de nombreux cas, par exemple, pour être autorisés à accepter des dépôts, ils sont également tenus par les régulateurs de s’associer avec des prestataires de services financiers traditionnels.
Les fournisseurs de technologies financières sont particulièrement bien placés pour tirer parti des données et des analyses afin d’élargir la base de clients et de fournir un service de meilleure qualité. L’acquisition de clients numériques et la gestion des transactions peuvent générer une mine de données sur le comportement des clients qui peuvent désormais être utilisées à des fins spécifiques, telles que la notation de crédit, mais peuvent également être utilisées plus généralement pour augmenter l’efficacité opérationnelle et générer une plus grande valeur pour les clients. Quel que soit l’objectif, un fournisseur de technologies financières qui se base sur les données, a la capacité d’agir sur la base de preuves, plutôt que d’observations anecdotiques ou en réaction à ce que font les concurrents sur le marché. L’analyse des données, y compris des techniques telles que la modélisation prédictive, peut être utilisée pour mieux comprendre le profil des clients afin de fournir un meilleur service client et d’innover avec de nouveaux produits. Il est également possible d’utiliser ces informations pour créer de meilleurs produits et leur communiquer des services qui correspondent mieux à leurs besoins, ou même développer de nouveaux produits en fonction d’une demande du marché.
Les modèles de comportement peuvent également être surveillés pour prédire les changements dans le comportement de remboursement ou l’attrition de la carte SIM, afin que les fournisseurs puissent contacter les clients pour inciter à la fidélisation. Tout cela conduit à plus d’efficacité pour le fournisseur et à un meilleur service pour les clients. Au fur et à mesure que les marchés en Afrique subsaharienne mûriront, cela deviendra de plus en plus important, non seulement pour gagner un avantage concurrentiel, mais aussi pour garantir que les services et produits développés répondent aux besoins des utilisateurs.
La transition du secteur bancaire vers le numérique pose en effet plusieurs types de problèmes : les problèmes des nouveaux métiers, des nouvelles compétences, et plus généralement, les problèmes de la nouvelle chaîne de valeur bancaire liée à l’émergence de ces métiers (Porter, 1986; Lamarque, 2008). La question de la transformation numérique ne peut être transférée à tous les pays africains comme des enjeux d’innovation de gestion.
Cette série d’enjeux de gestion concerne des niveaux opérationnels et stratégiques :
- Sur le plan opérationnel : les changements apportés par le numérique concernent particulièrement les systèmes de tarification. Pour la banque à distance par exemple, la tarification multicanale et les questionnements concernant les outils de suivi de la performance sont rattachés aux activités numériques « low cost ».
- Sur le plan stratégique : le passage au numérique pose des problèmes liés à la mesure générale de la productivité des pratiques numériques et à la mise en place d’outils de gestion stratégique.
Par exemple, les outils de contrôle et d’orientation stratégique telle que le Balanced Scorecard peuvent fournir une méthode particulièrement intéressante pour assurer un suivi multi-niveaux et multidimensionnelle des performances liées à la banque numérique. La méthode du Balanced Scorecard développée par Kaplan et Norton (1998) place spécifiquement la stratégie au cœur du modèle et assure une gestion autour de quatre axes interdépendants à savoir, l’axe financier, l’axe client, l’axe de processus interne, l’axe d’innovation et d’apprentissage. Cet outil n’a pas encore été développé dans le secteur bancaire, mais est devenu un modèle à succès pour de nombreux secteurs (ex : industrie, distribution, logistique).
La méthodologie Balanced Scorecard est basée sur la perspective des processus internes et son objectif principal est de fournir une vision stratégique de la gestion d’une entreprise, donnée par une vision, une mission et une stratégie comprenant la mesure de la performance à partir de vues financières et non financières.202 Le Balanced Scorecard est un outil complet dans lequel chaque unité organisationnelle doit adapter ses activités pour atteindre des objectifs spécifiques liés à la définition d’une stratégie commerciale. Les unités commerciales individuelles des entreprises doivent identifier leurs mesures pour relier les quatre perspectives fondamentales de BSC. Ces perspectives incluent la perspective client, la perspective des processus internes, la perspective de l’innovation et de l’éducation, et la perspective financière203. Chaque perspective est définie en fixant des objectifs stratégiques dans le domaine donné. Pour les objectifs stratégiques, des mesures sont choisies et servent de base au contrôle quantitatif. Il est également nécessaire de choisir des valeurs cibles et des actions stratégiques à travers lesquelles l’entreprise doit atteindre les objectifs fixés. Les objectifs stratégiques, les mesures, les valeurs cibles et les actions stratégiques sont mutuellement interconnectés par des liens fonctionnant sur un principe d’effet de cause. Les tâches ainsi définies constituent le principe de base du concept Balanced Scorecard204.
Par ailleurs, le Balanced Scorecard aide à visualiser comment les objectifs déterminés peuvent être atteints et quels facteurs de réussite sont nécessaires pour atteindre les objectifs souhaités205. Le concept BSC permet aux entreprises d’obtenir des commentaires de chaque unité organisationnelle concernant leur contrôle, ce qui aidera l’entreprise à obtenir de meilleures performances financières et la capacité d’innover dans des domaines organisationnels individuels. L’usage causal de la chaîne augmente l’attention portée aux mesures correspondantes et étend l’effort de recherche et la qualité de la prise de décision sous la responsabilité du résultat. Contrairement à cela, nous pensons que l’utilisation d’une chaîne causale dans le processus de responsabilité réduit l’effort de recherche et n’entraîne pas une amélioration similaire de la qualité des décisions.
Le Balanced Scorecard est également un concept portant sur la façon de traduire la vision et la stratégie en objectifs et leurs paramètres afin qu’ils couvrent de manière exhaustive non seulement les domaines de la performance financière de l’entreprise, mais également les domaines non financiers. Les objectifs et les mesures sont organisés au sein du BSC en quatre perspectives : financières, clients, processus et apprentissage internes, et croissance206. Le BSC est un outil de communication de mission et de stratégie entre les différents niveaux de direction et les salariés ordinaires. Il est utilisé pour tenir tous les travailleurs informés des activités qui affectent le succès actuel et futur.
La mission principale du concept de Balanced Scorecard est que l’entreprise ne soit pas gérée selon le passé, mais selon des stratégies tournées vers l’avenir pour assurer son existence à long terme. Il est important de formuler une stratégie globale et qui couvre tous les domaines d’activité afin qu’elle soit spécifique et transparente, touche tous les travailleurs spécifiques et soit motivante. Lors du choix des objectifs et mesures, le Balanced Scorecard explique l’orientation stratégique de l’entreprise tout en permettant sa mesure. Avec un choix approprié d’objectifs, le Balanced Scorecard peut guider les actions de l’entreprise en fonction des stratégies mises en place, car les objectifs affectent le comportement. La signification principale du concept de Balanced Scorecard est que les objectifs stratégiques et leur représentation sont au premier plan. Les objectifs stratégiques découlent d’une vision et d’une stratégie et deviennent ainsi des objectifs stratégiquement importants de l’entreprise qui décide de son succès global. Pour planifier et suivre leur réalisation, il est nécessaire d’attribuer les indicateurs financiers et non financiers correspondants à ces objectifs et les valeurs cibles et réelles de ces mesures. Les actions stratégiques assignées à chaque objectif doivent garantir la réalisation des objectifs. Par conséquent, chaque action stratégique a un délai, un budget et une personne responsable spécifiques.207
L’objectif principal du concept BSC est de remédier aux contraintes des outils traditionnels de mesure de la performance, ainsi que de transformer les stratégies commerciales en indicateurs clés de performance (KPI) pour assurer un équilibre entre la performance à court terme mesurée à travers des indicateurs financiers et des facteurs non financiers qui devraient diriger l’organisation vers une meilleure compétitivité et une durabilité à long terme208. Le modèle identifie les valeurs optimales qui sont utilisées comme éléments cruciaux pour atteindre des performances moyennes. Ce modèle combine ensuite les éléments immatériels de mesure de la performance, qui sont vitaux pour de nombreuses organisations209. La méthodologie du BSC traditionnel a évolué vers un bilan de durabilité des entreprises intégrant des perspectives institutionnelles, économiques, socioculturelles et environnementales. En termes de durabilité, le BSC détermine un lien de causalité entre les facteurs commerciaux afin de fixer des priorités et des objectifs dans un processus rationnel de prise de décisions.
La transformation numérique annonce une plus grande turbulence. Au-delà des affaires et de l’organisation, le véritable défi reste la vision. Demain, le continent africain devra compter sur des sociétés brevetées et maîtres de leurs données, des adeptes de l’analyse de données, des innovations dans le domaine de l’intelligence artificielle … À partir d’aujourd’hui, de nombreuses nouvelles opportunités forcent une transformation numérique réussie.
La finance technologique a représenté plus de la moitié des 270 produits bancaires mobiles vendus dans le monde. Les comptes actifs répertoriés en 2017 s’élevaient à 134 millions, et plus 84 millions sont situés en Afrique subsaharienne. Cette évolution offre aux acteurs de l’industrie financière l’occasion de structurer totalement leurs méthodes d’organisation et de gestion, dans lesquelles le numérique joue un rôle primordial. Le numérique est devenu une réalité et les institutions de microfinance (IMF) qui s’en rendent compte en font meilleur usage. La technologie offre des opportunités de services financiers, mais pose également des menaces majeures.
Dans plusieurs cas, la digitalisation a eu un effet fondamental sur les modèles économiques traditionnels des institutions financières. Les établissements qui effectuent les investissements nécessaires à la transformation numérique peuvent bénéficier de plusieurs avantages :
- Accroître l’avantage concurrentiel par le biais de nouveaux produits, de meilleures qualités de services et de prix compétitifs.
- Augmentation des revenus grâce aux nouveaux produits, aux ventes en ligne particulières, etc.
- Réduire les coûts opérationnels associés à l’automatisation ou à la numérisation et à la migration des transactions.
- Une portée décuplée et une bonne qualité du portefeuille client.
- Mener des compagnes d’éducation financière
Les campagnes d’éducation financière numérique devraient se concentrer sur l’établissement de la confiance par la diffusion d’informations précises et impartiales sur différents types de produits et services Fintech, y compris leurs avantages et leurs risques. Les campagnes doivent utiliser à la fois les canaux traditionnels et numériques pour atteindre les consommateurs. Les canaux traditionnels peuvent inclure l’intégration de cours d’éducation financière dans les programmes scolaires, des ateliers et formations ciblés, des conférences. Les agents bancaires peuvent également être une ressource précieuse pour les autorités pour communiquer avec les résidents des zones rurales. Les canaux numériques comprennent les plates-formes de médias sociaux, qui atteignent les populations plus jeunes qui ont tendance à être férus de technologie et à adopter précocement les nouvelles technologies.
- Mettre les clients au centre de la chaine de valeur (surtout les analphabètes)
L’itération rapide des produits et services nécessite un environnement dans lequel une institution peut écouter et répondre aux besoins des clients, en comprenant ce que les nouveaux utilisateurs du marché de masse trouvent utile. Cela nécessite un leadership clair de la part de la direction et que de nouvelles pratiques culturelles soient incarnées à tous les niveaux de l’institution en termes de présence physique de l’espace de travail, de mesures de performance utilisées et dans toutes les communications.
Décider où jouer et comment gagner avec la Fintech commence par une compréhension globale de la situation actuelle d’une entreprise et de ce qu’elle veut être dans le futur, une compréhension des signaux de changement et une compréhension de la préparation au changement interne. Les entreprises de premier plan utilisent ces éléments de base pour aider à développer une stratégie Fintech ciblée qui est entièrement alignée avec leur stratégie commerciale, et qui comprend des indicateurs et des mesures clés qui aideront l’entreprise à évaluer l’impact des initiatives au fil du temps.
Les banques devront s’adapter pour pouvoir atteindre leurs clients existants et d’éventuels nouveaux clients via des canaux dématérialisés. Ils peuvent souhaiter accélérer leur transformation vers la banque directe, en utilisant Internet et les réseaux d’agents. Ils peuvent souhaiter se recentrer sur des segments, tels que les services bancaires aux entreprises, où leur modèle est déjà dans une large mesure sans agence, et où ils conservent un avantage concurrentiel en raison de leur maîtrise de produits complexes et diversifiés. Pour atteindre le segment de la vente au détail, ils peuvent envisager de s’associer avec des opérateurs de réseaux mobiles ou d’acquérir des licences d’opérateurs de réseaux mobiles virtuels. Cependant, les banques doivent se rendre compte qu’en raison de leur accès privilégié aux clients, les opérateurs de réseaux mobiles disposent d’un pouvoir considérable dans la négociation de tout partenariat, qu’il s’agisse d’accords de service ou de coentreprises. Dans les négociations, les banques devront donc tirer parti de leurs avantages concurrentiels, y compris leur licence, leur connaissance de la réglementation, leur expérience avec une gamme complète de services financiers, la capacité de fournir un service sophistiqué personnalisé pour les différents segments d’entreprise, les opérations transfrontalières existantes, etc.
La coopération banque-OTM-Fintech peut comporter plusieurs avantages. Pour les banques, un tel partenariat peut apporter des avantages considérables en termes de développement de nouveaux segments de clientèle, produits et services. Cela peut également entraîner une expansion sur de nouveaux marchés, le développement de nouvelles capacités et l’accès à de nouvelles technologies qui génèrent de nouvelles sources de revenus et améliorent la performance. Ceci est important, car les banques sont souvent associées à un manque d’innovation soit en raison de leur position stable sur le marché, soit parce qu’elles sont soumises à des réglementations gouvernementales complexes et lourdes. En contrepartie, les Fintechs peuvent principalement bénéficier de la réputation bancaire mais aussi de nouvelles sources de financement et d’infrastructures.
Les innovations numériques, comme l’argent mobile, peuvent favoriser l’inclusion financière et améliorer les relations des banques avec les clients et tout en augmentant leur performance. Ainsi, le numérique offre aux banques la possibilité d’améliorer leurs interactions avec les clients, d’améliorer leur prise de décision et de mettre en œuvre de nouveaux modèles commerciaux de manière plus rentable et innovante . En outre, les Fintechs sont considérées comme plus rapides et plus agiles que les banques traditionnelles. Par conséquent, elles sont censées permettre aux banques de s’engager dans de nouvelles stratégies de réduction des coûts puisque les services bancaires restent chers.
Bien que ces avantages soient de nature générale et s’appliquent dans le monde entier, ils devraient être plus importants dans la partie la moins développée du monde où l’accès au financement formel reste un défi.
Bien que les opérateurs de réseaux mobiles soient les acteurs les plus actifs, les banques jouent un rôle majeur dans la fourniture d’argent mobile. Plus précisément, pour lancer des services d’argent mobile, les opérateurs de réseaux mobiles doivent établir des partenariats avec des banques ou d’autres institutions financières avec une licence de banque . Dans ce cas, les banques jouent le rôle de dépositaires pour les utilisateurs d’argent mobile en détenant un compte « fiduciaire » ou des dépôts sur compte « séquestre » qui correspondent à toute l’étendue de la monnaie électronique au nom des opérateurs de réseaux mobiles. Les banques peuvent utiliser ces fonds supplémentaires pour augmenter leurs prêts, ce qui n’est pas différent de la manière dont les banques utilisent les dépôts ordinaires. Ainsi, l’implication de la banque dans le système d’argent mobile comprend simplement la détention d’un compte fiduciaire / séquestre (passif), l’établissement d’un partenariat pour lancer des services d’argent mobile (actif), ou les deux.
En outre, les OTM disposent déjà d’une base de clientèle. Cela sera un moyen pour les banques d’élargir leur part de marché et d’intégrer les nouvelles technologies de l’information et de la communication dans leur processus interne, car les clients des OTM disposent d’appareils connectés.
Pour exploiter d’autres avantages potentiels liés à l’argent mobile, certaines banques par exemple établissent des partenariats avec des OTM pour augmenter le nombre d’utilisateurs de guichets automatiques bancaires pour les fonctions d’encaissement. Ces activités génératrices d’intérêts et de frais constituent de nouvelles sources de revenus susceptibles d’améliorer la rentabilité des banques. Par conséquent, les banques peuvent tirer parti des plates-formes d’argent mobile pour atteindre plus de personnes dans des zones traditionnellement mal desservies à un coût bien moindre. En outre, les OTM ont déjà développé de vastes réseaux d’agents pour vendre leurs services, tandis que la présence bancaire est souvent limitée aux zones urbaines ou à forte densité de population .
En termes de stabilité bancaire, la littérature prétend que la technologie financière peut potentiellement renforcer la stabilité financière en favorisant l’inclusion financière, en augmentant la diversification et la transparence ainsi qu’en permettant une meilleure évaluation des risques. Selon certains auteurs comme Ahamed et Mallick (2019), l’inclusion financière améliore la stabilité en accédant à des dépôts de détail bon marché auprès d’une large clientèle, en réduisant les contraintes de financement des PME et en atténuant l’aléa moral post-prêt. Ils constatent également qu’une plus grande portée des succursales bancaires et un système financier avec un meilleur accès aux comptes bancaires par habitant sont susceptibles d’accroître la stabilité des banques. Dans ce contexte, nous supposons que les effets de la participation des banques au système d’argent mobile sur leurs performances peuvent dépendre du résultat net de ces avantages et inconvénients potentiels.
En fait, l’adoption initiale de l’argent mobile peut n’indiquer que le moment après lequel une banque l’expérimente, mais pas le moment actuel où l’argent mobile se développe et ses impacts sur les performances bancaires commencent à se matérialiser. Ainsi, la recherche sur l’adoption de technologies financières montre qu’une innovation évolue de manière dynamique au sein de l’entreprise, à la suite d’un processus de diffusion qui commence par l’adoption de la technologie et nécessite du temps pour être achevée. Ainsi, il faut s’attendre à un certain retard dans la réalisation des gains de performance prévus, car les avantages découlant d’une nouvelle technologie sont rarement atteints au moment de l’adoption.
Traditionnellement, les banques offrent des services d’encaissement / retrait via des guichets automatiques et des succursales bancaires. Cependant, ces solutions sont trop coûteuses à mettre en place et à opérer sur des marchés où les populations sont à faible revenu ou à faible densité. Par conséquent, nous exploitons l’idée selon laquelle le partenariat banque-OTM dans la fourniture d’argent mobile peut permettre aux banques de tirer parti des réseaux d’agents d’argent mobile pour atteindre les zones à taille de population ou d’activité économique limitée. Le résultat est la diversification accrue des revenus et d’un accès élargi aux services financiers découlant de la coopération entre les banques et les opérateurs de réseaux mobiles dans la fourniture d’argent mobile. En conséquence, la relation positive illustrée entre l’implication des banques dans l’argent mobile et leur performance devrait être plus prononcée pour les banques à faible financement de dépôts ou à faible diversification des revenus.
Cette technologie financière pratiquement accessible à toute personne disposant d’un téléphone portable promet de « sauter » la fourniture de services bancaires dans les pays en développement grâce à la pénétration comparativement élevée des téléphones mobiles contrairement à la faible densité des infrastructures bancaires. Il permet aux banques de tirer parti de modèles commerciaux innovants et moins coûteux pour servir les personnes non bancarisées ou sous-bancarisées en surmontant les inefficacités existantes du marché et en réduisant le coût prohibitif de maintien des succursales bancaires physiques dans les zones rurales.
Les opérateurs de réseaux mobiles seront les pionniers de la dématérialisation des services financiers africains. Les raisons ont déjà été discutées dans la section ci-dessus expliquant pourquoi les opérateurs de réseaux mobiles sont les principaux acteurs de services financiers en Afrique. Ces raisons incluent l’accès inégalé des opérateurs de réseaux mobiles aux données et aux numéros de téléphone des clients. Un certain nombre de modèles commerciaux contribueront également à la dématérialisation, mais à plus petite échelle, notamment des sociétés de paiement comme Zoona qui offrent des services financiers via des agents au lieu de succursales.
Pour les institutions financières à la recherche de solutions personnalisées, il existe un nombre croissant de Fintech et d’autres sociétés de technologie capables de marquer en blanc un produit ou un service pour qu’elles puissent ensuite valoriser et vendre. Les avantages comprennent : les coûts prescrits, une approche diversifiée de l’innovation et la capacité de tester la valeur et de combler les lacunes des produits / services. Parmi les principaux défis figurent moins de contrôle que le développement de ces produits en interne, et la nécessité d’intégrer cette structure d’innovation au sein de l’entreprise et de partager les revenus.
Conclusion générale
Notre objectif dans cette étude est de donner des éléments de réponse à la question suivante : Comment améliorer l’inclusion financière en Afrique subsaharienne par la collaboration entre les acteurs bancaires classiques et les nouveaux acteurs ?
Dans le cadre de ce travail, nous avons pu constater qu’il n’existe que de très peu de littérature examinant l’impact de l’argent mobile sur les banques et, à notre connaissance, il n’y a aucune preuve empirique de savoir si l’argent mobile entrave ou favorise la performance des banques traditionnelles. Notre travail vise à combler cette lacune en utilisant un échantillon de données collectées sur le terrain et obtenues par ciblage. Nous complétons nos données avec des données bancaires spécifiques, des données macroéconomiques des Indicateurs du développement dans le monde, le nombre d’utilisateurs d’argent mobile et la valeur des transactions d’argent mobile de l’enquête sur l’accès financier (FMI).
Il existe deux raisons pour lesquelles on dit que l’Afrique est le terrain d’investigation par excellence. Tout d’abord, malgré le fait que 75% de la population africaine possède un téléphone mobile, la plupart d’entre eux ne sont pas bancarisés. Le manque d’infrastructure bancaire associé à des réglementations peu contraignantes ont permis aux opérateurs téléphoniques de s’imposer et de devenir des leaders incontestables en matière de portefeuilles électroniques et en systèmes de paiement (mobile Banking).
Comme les réseaux de téléphonies fixes qui ont été jetés aux oubliettes avec l’arrivée de la téléphonie mobile, les systèmes bancaires peu développés du continent africain vont sans aucun doute laisser place à un système financier gérés par les opérateurs télécoms. Mais, quelles pourront être les conséquences sur les économies africaines, mais aussi sur l’économie mondiale ? L’évolution de ces nouveaux systèmes financiers en Afrique a permis à de nouveaux types de services de s’étendre un peu partout dans le monde et il se peut que ces derniers puissent changer les paramètres du système bancaire. Selon certains auteurs comme Froud et al. (2017), les Fintechs ne perturbent pas le système bancaire des pays en voie de développement puisque le système est presque inexistant. Avec leurs petites tailles, les Fintechs n’ont jusqu’à présent pas remis en question le système bancaire, elles seraient au contraire un facteur de développement.
En bref, la technologie numérique modifie actuellement le paysage des paiements et des banques en Afrique. Le Mobile Money a été la principale incitation à ce mouvement, et il doit être accompagné et développé pour promouvoir davantage l’inclusion financière en Afrique subsaharienne. Cela met en évidence le fait que les solutions sur le marché sont très pertinentes pour lutter les inégalités socio-économiques et territoriales. L’accompagnement et la promotion de l’entreprenariat et de l’innovation par les gouvernements sont des apports nécessaires face au défi des exclus africains sur le plan financier.
La croissance rapide de ces solutions innovantes en Afrique a engendré de nouveaux types de services, qui semblent s’être répandus dans d’autres parties du monde et peuvent changer considérablement les paramètres du système bancaire traditionnel. Contrairement à la situation dans les pays développés, certains auteurs estiment qu’en Afrique ou dans les pays en développement, la Fintech ne détruira en aucune façon le système bancaire, car le système est quasiment inexistant, « Fintech is building an industry from scratch ». Jusqu’à présent, la plupart des petites entreprises de technologie financière ou les Fintechs n’ont pas remis en question le système bancaire, mais deviendront plutôt des véhicules pour son développement et même son optimisation.
Il est compréhensible qu’il existe des points de vue différents sur la technologie financière et la banque mobile, car le système financier africain est différent du reste du monde à plusieurs égards. Dans le continent africain, la désintermédiation se trouve impactée par une grande proportion de l’intermédiation financière informelle. En 2015, Asongu a mis l’accent sur le rôle des intermédiaires financiers informels, qui augmente et nuit aux mécanismes financiers formels. Ce dernier estime que les indicateurs classiques de l’intermédiation financière ne permettent pas d’étudier les conditions économiques et financières africaines.
Par conséquent, compte tenu des différents facteurs étudiés et soulignés dans ce travail, il apparaît que la situation en Afrique est caractérisée par une faible réglementation et des déficits au niveau des infrastructures bancaire. Cette situation a largement favorisé l’entrée en scène de nouveaux concurrents comme les opérateurs de téléphonie. Actuellement, ces derniers n’ont pas encore pu remplacer les acteurs financiers traditionnels. Pour tous les acteurs de ce marché, la perturbation qui est liée au développement du mobile Banking est une situation gagnant-gagnant. Outre le fait qu’elles ont réduit les coûts, les innovations ont également augmenté l’inclusion financière et ont considérablement amélioré la rapidité et la facilité d’utilisation. Nous constatons que les grandes entreprises de télécommunications africaines ont davantage opté pour une collaboration avec les Fintech et avec les banques au lieu de les concurrencer. Ce qui n’est pas le cas des pays développés qui possède une infrastructure bancaire très réglementée et très développée. L’entrée en scène des opérateurs mobiles dans le domaine bancaire n’est pas aussi impressionnante qu’en Afrique. Dans les pays développés, le développement du mobile Banking se fait plus à l’initiative des banques. Toutefois, en tant que laboratoire de recherche, l’Afrique nous a montré que la collaboration entre les opérateurs mobiles et les banques a des effets positifs. Ce genre de collaboration serait-elle envisageable dans les pays développés ?
Le dualisme économique traditionnel qui conduit à la coexistence des secteurs formels et informels, est la principale caractéristique du système commercial de la plupart des pays africains. On observe que parallèlement à une activité formelle qui est reconnue, une autre activité gravite en toute clandestinité. Cette caractéristique a toujours épargné le secteur global des TIC et des télécommunications. Il faut noter qu’en tant que secteur de très haute spécialisation, les technologies de l’information et de la communication ne se prêtent pas à l’informel. Toutefois, le fait qu’elles soient présentes dans différentes activités change cette vision, voire l’évolution du modèle des activités économiques africaines. Les différentes analyses ainsi que les descentes sur le terrain sur lesquelles cette étude s’appuie montrent dans la réalité à quel point les problèmes sont graves. En effet les technologies de l’information et de la communication ont introduit de la formalité alors qu’elles induisent en même temps les activités informelles. Cela laisse présager qu’il va y avoir une transition vers un système économique différent, un système hybride.
Notre étude a d’importantes implications politiques et contribue au débat sur la capacité du système d’argent mobile à galvaniser le secteur bancaire en améliorant la stabilité et en promouvant l’inclusion financière. Les résultats fournissent de nouvelles perspectives sur la commodité du développement de l’argent mobile pour le secteur bancaire africain. Plus précisément, nos résultats contribuent au débat sur l’intérêt de l’innovation de l’argent mobile sur la performance des banques traditionnelles. Néanmoins, alors que notre étude souligne les gains d’efficacité, de rentabilité et de stabilité qui reviennent aux adoptants de l’argent mobile, il est essentiel de garder à l’esprit les vulnérabilités potentielles (côté obscur) qui pourraient entraîner une concurrence accrue une fois que cette innovation mûrit. Étant donné la préoccupation constante que la réglementation est toujours à la traîne de l’innovation, il est très important que les recherches futures prennent en compte ces risques potentiels.
Malgré de nombreux obstacles, tels que la connectivité, les moyens économiques et l’analphabétisme de la majorité de la population, les activités liées à Internet se multiplient également. Bien entendu, le secteur Internet ne connaît pas le même succès que celui des téléphones mobiles, toutefois il fournit des services utiles et crée beaucoup d’emploi. Le développement de ce secteur dépend de différents facteurs tels que le pouvoir d’achat de la population locale, le niveau d’alphabétisation, le coût d’installation des infrastructures et des équipements, la réglementation en vigueur, etc. Actuellement, l’évolution des technologies de l’information et de la communication a totalement changé le système de transfert d’argent. En outre, il est important de noter que le transfert d’argent est une activité qui s’est développée à une vitesse impressionnante en Afrique à cause de l’interdépendance financière entre la population de la zone rurale et celle de la zone urbaine. Dans ces conditions, le transfert d’argent est la procédure la plus utilisée puisque c’est le plus rapide et la plus fiable. Effectivement, le destinataire peut retirer de l’argent directement dès qu’il aura reçu une notification par SMS disant que de l’argent a été transféré dans son compte. Il lui suffit d’apporter une pièce d’identité, de communiquer le numéro du transfert, de fournir le code secret de son compte et le montant de l’argent qui lui ont été envoyé.
En outre, du fait des réformes bancaires et des changements technologiques, l’environnement bancaire est progressivement devenu plus compétitif. L’Afrique subsaharienne est la région en développement du monde avec la plus grande proportion de banques étrangères. La faible concurrence sur de nombreux marchés d’Afrique subsaharienne a ouvert la voie aux banques d’Afrique subsaharienne pour opérer au-delà des frontières et concurrencer les banques locales. L’émergence de ces banques régionales africaines avec une ambition panafricaine claire a modifié le paysage bancaire et favorisé la concurrence et l’innovation. Les groupes bancaires régionaux africains ont leur siège dans divers pays et certains bénéficient d’une présence significative dans un grand nombre de pays. Ils couvrent de grands marchés bancaires comme l’Angola, le Kenya, le Maroc, le Nigéria et l’Afrique du Sud, mais aussi plusieurs autres pays plus petits. Le plus grand, Ecobank Transnational du Togo, est présent dans plus de 30 pays en Afrique Subsaharienne.
Aujourd’hui, le numérique est omniprésent et il impacte de façon durable les différents acteurs économiques. Dans le domaine du service financier, le numérique ou le digital change la relation des clients vis-à-vis de leurs banques, mais aussi vis-à-vis de leur argent. L’équilibre établi par les acteurs qui ont été présents depuis toujours est donc bouleversé par les Fintechs et par des acteurs plus agiles apportant des idées plus innovantes. Pourtant, les systèmes financiers en Afrique subsaharienne font face à plusieurs limites et l’inclusion financière reste trop étroite, limitant les perspectives de gains supplémentaires en matière de croissance durable, d’emploi et de réduction de la pauvreté.
Toutefois, il faut souligner que le passage vers le numérique n’est pas le premier grand changement auquel les banques doivent s’adapter. En effet, elles ont déjà connu par le passé un changement au niveau de leurs activités, en se tournant vers la téléphonie mobile ou encore les assurances (auto et habitation). L’environnement de ces dernières a subi de profondes transformations à savoir une modification des performances, mais aussi une restructuration de leur industrie. Les évolutions technologiques concernant la circulation et le traitement des informations ont permis de diminuer les divers coûts des opérations financières, de développer les métiers bancaires et de proposer plus d’offres et de produits aux clients. Ainsi, les banques deviennent une sorte d’industrie high-tech. D’autre part, les banques ont été confrontées à un choc réglementaire marqué par un durcissement des réglementations (depuis la crise de 2008), mais également par une phase de déréglementation qui date des années 80.
Les banques se trouvent confrontées à un double choc combinant innovation technologique à une évolution de la demande d’une clientèle plus jeune. Pour faire face à ce double choc, les banques traditionnelles sont moins armées par rapport aux opérateurs mobiles, aux jeunes start-up ou encore aux géants du high-tech. Certes, cette situation ne mènera pas à la disparition des banques, mais cela les oblige quand même à tout remettre en question.
Notre étude nous montre également que les technologies de l’information et de la communication peuvent permettre aux pays africains de se développer plus rapidement tout en leur donnant la possibilité de bénéficier d’une plus grande intégration culturelle et économique. Pour le cas du Kenya, l’innovation financière a largement contribué à l’élargissement, mais aussi à l’approfondissement des systèmes financiers au profit de l’économie du pays – que ce soit un échange entre les parties prenantes, la montée en puissance de nouveaux acteurs comme M-Pesa, le développement de nouveaux services bancaires via un téléphone mobile, ou par l’agency banking (assouplissement de la réglementation). En autorisant Safaricom à proposer des offres de services financiers, la Banque centrale kenyane a tenu un grand rôle dans ce processus. Elle a également su encourager la concurrence et regarder au-delà du modèle de réseau d’agences traditionnel. En se tournant vers une approche expérimentale et non vers une approche traditionnelle « législation-réglementation innovation », la Banque centrale kenyane a permis au secteur privé d’avoir un accès aux innovations financières. Encouragées par des ressources en capital et par un engagement en faveur de l’intégration financière, les banques kényanes commencent à se développer. Toutefois, il faut que le cadre réglementaire suive l’évolution d’un florissant et dynamique secteur financier.
Les opérateurs de téléphonie qui cherchent par tous les moyens à obtenir des agréments bancaires, ou encore les banques qui cherchent à obtenir une licence d’opérateur de téléphonie virtuelle pour assurer la diffusion de leurs produits et services financiers montrent que les Fintechs ne peuvent en aucun cas remplacer les banques, mais qu’elles se complètent et créent de la valeur.
Tout au long de notre travail de recherche, nous avons signalé que nous nous inscrivions dans une démarche exploratoire et qu’il ne faudra donc pas s’attendre à des résultats très précis et à des modèles totalement validés. Toutefois, nous espérons préparer le terrain pour des recherches ultérieures. Au travers de nos analyses nous avons identifié des éléments qui peuvent nous permettre de poser les bases de nouveaux modèles. Ces éléments sont les suivants :
- Les comportements de collaboration et/ou de coopération des différents acteurs ;
- Les facteurs de motivations et les freins liés à ces comportements de collaboration ;
- Les mécanismes pour compenser les risques liés à cette collaboration ;
Nous sommes arrivés à la conclusion que ces différents éléments peuvent être regroupé au sein de trois grandes familles théoriques que sont la théorie de l’écosystème financier, les théories de la collaboration à travers l’Open Innovation et la Coopétition et enfin la théorie des parties prenantes.
L’éco-système financier dans notre modèle peut ainsi être considérée comme une modalité et un fondement à toute collaboration (1) ou coopération nécessaire entre les différents acteurs. Nous pensons ici à un processus d’incitation, car la proximité des différents acteurs qui se retrouvent sur un même territoire inciterait les uns et les autres à une forme de collaboration et partenariat pour créer ainsi des écosystèmes (Nelson et Winter, 1982 ; Dosi, 1988 ; Dufourt, 1991). C’est ainsi que Zimmermann (2008) met notamment l’accent sur l’importance des interactions locales et le face à face dans les processus d’innovation.
Toute collaboration ou coopération engendre des interactions entre les différents acteurs que la théorie des Parties prenantes (2) pourra analyser, expliciter et réguler.
Cette régulation pourra être facilitée ou non en fonction des déclinaisons, des liens et des degrés de proximité (3) entre les différents acteurs, car ces derniers seraient susceptibles d’obéir aux mêmes règles et normes. L’asymétrie d’information se trouvera ainsi juguler ou maîtriser dans toute relation de partenariat. Si nous partons de la définition des Parties Prenantes : « un partenaire dans l’organisation est (par définition) tout groupe ou individu qui peut affecter ou être affecté par la réalisation des objectifs de la firme » (Freeman, 1984, p.46), il revient à dire que les relations se trouveraient faciliter, car les parties prenantes ici Banques, Fintechs et OTM, vont apporter « les ressources nécessaires à la réalisation du projet stratégique » (Cadiou et Morvan, 2007, p.458). Lequel projet ici relève de l’inclusion financière dans cette partie de l’Afrique.
Les données issues des différents entretiens nous ont également amener à penser à un modèle ou un outil managérial susceptible d’optimiser l’inclusion financière en Afrique subsaharienne et plus précisément au Bénin à travers une collaboration entre les banques, les Fintechs et les OTM. En nous référant à Cadiou et al. (2006) qui cherchent à hiérarchiser les partenaires impliqués dans la réalisation du projet stratégique, nous sommes amenés à soutenir que les Banques et SFD constituent les acteurs de premier plan. Ensuite viennent les OTM de par leur proximité et leur connaissance de la population en générale. Quant aux Fintechs, elles viennent clôturer ce premier groupe de partenaires et d’acteurs de premier plan. Il est à noter que l’environnement social, l’état et les institutions sous-régionales constituent des partenaires ou acteurs d’importance moyenne.
Sur les marchés financiers, les FinTechs renforcent la concurrence et fournissent des services que les institutions financières traditionnelles font moins efficacement ou ne font pas du tout, et élargissent le nombre de consommateurs qui utilisent ces services. Cependant, elles ne pourront jamais remplacer les banques dans la plupart de leurs fonctions clés. Dans certains cas, les FinTechs offrent la possibilité d’entreprendre les mêmes choses. Pourtant, les banques sont bien placées pour adopter les innovations technologiques et faire elles-mêmes les choses de la nouvelle manière
À travers nos investigations sur le terrain et en fonction des données recueillies, il nous apparaît opportun de définir un modèle capable d’expliquer l’environnement financier africain soumis à une problématique de digitalisation dans une perspective d’inclusion financière.
Primo, les relations entre les institutions financières et bancaires et les OTM (1) vont déboucher sur le développement et l’émission de la monnaie électronique.
Secundo, entre les Fintechs et les banques (2) leurs relations aboutiront à la banque digitale avec la mise en place et l’accroissement des produits et services digitaux et une digitalisation des services internes.
Tertio, les OTM et les Fintechs pourront de leur collaboration (3), tirer profit de la mise en place d’API en vue d’intensifier le Mobile Money et de développer les services de paiement digitaux entre les acteurs économiques et les populations.
Enfin en quatrième position (4) que nous pensons être la solution idéale, nous aurons une collaboration tripartite entre les institutions financières, les OTM et les Fintechs qui mettra en place ce que nous appellerons une plateforme d’interopérabilité. L’idée serait que ces trois principaux acteurs puissent mettre ensemble leur vision et des projets communs en s’appuyant les forces de chacun d’eux.
Les pouvoirs publics et les banques centrales pourront, dans un rôle de facilitateur, mettre en place des législations et créer des environnements propices à cette collaboration tripartite.
Nous sommes persuadés, et certains des acteurs que nous avons interviewés le sont également, que la clé de voûte à la réussite de l’inclusion financière passera par une relation tripartite et donc en la mise sur pied d’une plateforme commune d’interopérabilité qui permettra non seulement d’avoir une vue d’ensemble des potentialités des marchés, mais également en une mutualisation et un contrôle des risques.
L’approfondissement de ce modèle fera l’objet d’autres travaux qui pourraient essayer d’expliciter les liens entre les théories des parties prenantes et de proximité dans une relation de partenariat ou de collaboration. Il serait également intéressant de voir comment les différents acteurs dans une relation d’Open Banking pourraient gérer les asymétries d’informations. Ce sont donc quelques innombrables limites de notre travail de recherche et du modèle que nous apportons de façon théorique. Il va sans dire que dans nos futurs travaux, nous en tiendrons compte.
Par ailleurs, par rapport aux FinTech, généralement de petite taille, les banques traditionnelles possèdent une solidité financière incomparable. Même si les FinTechs satisfont les besoins de manière différente, il y aura toujours un certain segment de clients qui seront considérés comme des admirateurs de produits traditionnels. Ainsi, nous nous posons la question suivante pouvant être traitée dans des recherches ultérieures : les FinTechs peuvent-elles être à termes considérées à la fois comme un bon motivateur pour les banques et en même temps un collaborateur ?.
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Annexes
Annexe 1 : guide d’entretien de l’étude exploratoire
Guide d’entretien semi-directif
- Présentation de l’étude
Cet entretien est réalisé dans le cadre d’un projet de recherche en sciences de gestion que nous réalisons au sein du LEGO de l’Université Bretagne Occidentale. Nous nous intéressons à votre perception des relations de collaboration entre les banques et les nouveaux acteurs que sont les fintechs et les OTM. Plus particulièrement, nous aimerions avoir votre vision de la complémentarité des compétences dans l’écosystème financier UEMOA.
- Déroulement de l’étude
L’étude se déroule sous la forme d’un entretien semi-directif. Celui-ci consiste à vous poser plusieurs séries de questions regroupées en thématiques ayant trait à la collaboration dans l’écosystème financier UEMOA. L’entretien est anonyme et sera, avec votre accord, intégralement enregistré dans le but de retranscrire fidèlement vos propos et d’éviter tout biais d’interprétation.
- Informations sur le répondant
Fonction du répondant :
Age :
Sexe :
Ancienneté :
- Informations sur l’entretien
Date :
Lieu :
Heure de début :
Heure de fin :
- Le profil de l’interviewé et bancarisation / inclusion financière
- Pourriez-vous nous parler de la façon dont votre trajectoire professionnelle vous a conduit à votre fonction actuelle ?
- Comment évaluez-vous le niveau de bancarisation de la population africaine ?
- Quelle opinion avez-vous sur l’inclusion financière en zone UEMOA ?
- L’impact de la transformation numérique
- La transformation numérique va certainement bouleverser et modifier le paysage concurrentiel du secteur bancaire ; quels seront, selon vous, les défis majeurs et leurs impacts ?
- Quels pourront être les avantages concurrentiels des fintechs sur les banques ? et vice versa ?
- Quelles sont les opportunités les plus pertinentes que la transformation digitale pourra offrir aux banques/fintechs ?
- Les formes de collaboration
- Quelles sont les formes de collaboration entre les banques et les fintechs que vous connaissez ?
- Lesquelles avez-vous déjà mis en place ou pensez-vous mettre en place ? et pourquoi ?
- Les objectifs de la collaboration et la valeur apportée aux différents partenaires
- Selon vous, quelle valeur pourra revêtir la collaboration entre les banques et les fintechs dans une Afrique sous-bancarisée ?
- Quels seraient les bénéfices mutuels de cette collaboration ?
- Quelles pourrons être les avantages et/ou les inconvénients possibles d’une collaboration avec les banques/fintechs ?
- La construction de la relation
- Quels modèles de collaboration avec les banques/fintechs pourraient être plus pertinents pour vous ? et pourquoi ?
- Quelles mesures, autres que la collaboration avec les banques/fintechs, les fintechs/banques pourraient-elles instaurer afin d’obtenir un avantage concurrentiel dans le contexte de la transformation numérique du secteur bancaire ?
- Qu’en est-il de la gestion des risques bancaires ?
Annexe 2: RapportAlceste
Résultats généraux
Paramétrageutilisé
Apropos dutraitement
Informationspréliminaires
© IMAGE – Alceste Education
Nombre d’individus ou d’unités de contexte initiales (u.c.i.) Nombre total de formes contenues dans le corpus Nombre de formes distinctes
Effectif moyen d’une forme Effectif maximum d’une forme
Nombre de hapax (formes présentes une seule fois dans le corpus) Nombre de formes prises en compte dans l’analyse après réduction Nombre de formes supplémentaires (articles, pronoms, etc.) Nombre de modalités de variables ou mots étoilés
Nombre d’unités textuelles ou unités de contexte élémentaires (u.c.e) Nombre d’occurrences pour définir une unité textuelle
Richesse du vocabulaire (part des mots pleins en pourcentage) Fréquence minimum d’un mot pris en compte dans l’analyse Nombre moyen de mots analysés par unité textuelle
Nombre de couples de mots
14
47306
4352
11
1815
2053
822
262
17
1121
28
98.85 % 4
12
31014
Date du traitement Taille du corpus
Dernière modification du corpus Type de traitement (et son code)
Nombre de mots par unité de contexte pour la première classification Nombre de mots par unité de contexte pour la seconde classification Nombre de classes demandées par classification
Nombre de classes stables retenues
corpus-collaboration-
25 Février 2021 à 18 h 29
270 Ko
25 Février 2021 à 18 h 28
Classification double (121) Oui
Calculé par Alceste
Calculé par Alceste 10 (valeur par défaut) 4
Réduction du vocabulaire
Nom du corpus
EtapeA:Analyseduvocabulaire EtapeC:DéfinitiondesclassesetA.F.C
EtapeB:Définitiondesu.c.eetclassification EtapeD:Calculscomplémentaires
Classification double sur les u.c
Classification simple sur les u.c.i
Classification simple sur les u.c.e
Nombre de classes terminales par classification 10
1ère classif. nbre de mots analysés par u.c 2
2ème classif. nbre de mots analysés par u.c 2
Liste des u.c.e significatives
Recherche des segments répétés
Classification ascendante hiérarchique
Seuil minimal d’u.c.e pour retenir
une classe:
Auto
calculé par Alceste
Lemmatisation
Calcul automatique de la taille des u.c.e
Prendre les paragraphes du texte comme u.c.e
(Jeudi 25 Février 2021 à 18 h 29)
Catégoriesgrammaticales
© IMAGE – Alceste Education
Ce tableau représente les catégories grammaticales et leur statut dans l’analyse. Ces catégories peuventêtre soit analysées (prises en compte dans l’analyse) , soit supplémentaires (présentes uniquement dans la description du profil des classes, non prises en compte dans l’analyse), soit rejetées. Ces catégories sont affectées a priori aux formes reconnues du corpus. Par défaut, seuls les noms, les verbes (mis à part les auxiliaires être, avoir et les verbes modaux), les adjectifs, les adverbes et les formes non reconnues sont analyéss, dans la mesure où ces formes sont présentes au moins 4 fois dans le corpus.
Liste des catégories grammaticales
Valeur d’analyse
Adjectifs et adverbes Adverbes en “ment” Couleurs
Mois/jour Epoques/ Mesures Famille
Lieux, pays Interjections Nombres
Nombres en chiffres Mots en majuscules Noms
Mots non trouvés dans DICIN (si existe) Verbes
Prénoms
Formes non reconnues et fréquentes Formes reconnues mais non codées Mots outils non classés
Verbes modaux (ou susceptibles de l’être) Marqueurs d’une modalisation (mots outils) Marqueurs d’une relation spatiale (mots outils) Marqueurs d’une relation temporelle (mots outils) Marqueurs d’une intensité (mots outils) Marqueurs d’une relation discursive (mots outils) Marqueurs de la personne (mots outils) Démonstratifs, indéfinis et relatifs (mots outils) Auxiliaires être et avoir (mots outils)
Formes non reconnues
Analysée Analysée Analysée Analysée Analysée Analysée Analysée Supplémentaire Supplémentaire Eliminée Supplémentaire Analysée Analysée Analysée Supplémentaire Supplémentaire Analysée Supplémentaire Supplémentaire Supplémentaire Supplémentaire Supplémentaire Supplémentaire Supplémentaire Supplémentaire Supplémentaire Supplémentaire
Analysée
Dictionnairedesformes aprèsréduction
Pendant la phase préliminaire, Alceste, après avoir constitué le dictionnaires des formes du corpus, procède à leur réduction afin de constituer un dictionnaire des formes réduites. Ces formes sont classées en fonction de leur effectif dans le corpus.
Forme réduite
Effectif
Catégorie Grammaticale
banque aller faire service fintech client fait operat+
aujourd_hui compte niveau pouvoir+ prendre action digital bancaire argent permettre voir partenariat travail+ mettre chose financier population dire+ produit gens problem+ parler vraiment
mobile_money projet
solution credit plateforme train donner
developper
584
366
329
230
194
191
176
159
154
150
146
124
109
108
108
105
102
102
99
94
92
90
89
89
86
81
78
77
76
75
72
70
69
68
66
66
65
63
62
Noms Verbes Verbes Noms
Formes non reconnues Noms
Formes reconnues mais non codées Formes reconnues mais non codées Formes non reconnues
Noms Noms Noms Verbes
Formes reconnues mais non codées Adjectifs et adverbes
Adjectifs et adverbes Noms
Verbes Verbes
Formes non reconnues
Formes reconnues mais non codées Verbes
Noms
Adjectifs et adverbes Noms
Noms Noms Noms
Formes reconnues mais non codées Verbes
Adverbes en “ment”
Formes non reconnues Noms
Noms Noms Noms Noms Verbes
Verbes
© IMAGE – Alceste Education
collaboration marche arriver utiliser besoin
venir rester acces
commencer services_financiers systeme
paiement carte pays
est_a_dire question payer premier transaction
inclusion_financier epargne
penser base cote vrai terme bceao possible
microfinance benin
grand
monde avantage apporter electron+ creer temps risque monnaie fois
zone ligne est_ce modele clientele
developpement
60
59
58
58
57
56
54
53
53
51
49
49
47
46
46
45
44
44
44
44
43
42
41
41
41
41
40
40
40
39
39
39
39
38
38
37
37
37
37
36
36
36
36
36
36
36
Formes reconnues mais non codées Noms
Verbes Verbes Noms Verbes Verbes Noms Verbes
Formes non reconnues Noms
Noms Noms Noms
Formes non reconnues Noms
Verbes
Adjectifs et adverbes Formes non reconnues Formes non reconnues Noms
Verbes
Formes reconnues mais non codées Formes reconnues mais non codées Adjectifs et adverbes
Noms
Formes non reconnues
Formes reconnues mais non codées Formes non reconnues
Adjectifs et adverbes Adjectifs et adverbes Noms
Formes reconnues mais non codées Verbes
Formes reconnues mais non codées Verbes
Noms
Formes reconnues mais non codées Noms
Noms Noms Noms
Formes non reconnues Noms
Formes reconnues mais non codées
Noms
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groupe moment secteur personne+ abord applica+ demander telephone part finance bancaris proposer gros
cas comprendre passer rendre dernier envoyer opportunite genre agence nouveau trouver ensemble defi
jour type appeler
technolog+ sens
gerer forcement information utilisation portefeuille an
fond gagner essayer maniere agrement marchand egalement
interoperabilite
passe
35
35
35
34
33
33
33
33
32
32
32
32
31
30
30
29
29
29
29
29
28
28
28
28
28
27
27
27
27
27
26
26
26
26
26
26
25
25
25
25
25
25
25
25
25
24
Noms Noms Noms Noms Noms
Formes reconnues mais non codées Verbes
Formes reconnues mais non codées Noms
Noms
Formes non reconnues Verbes
Adjectifs et adverbes Noms
Verbes Verbes Verbes
Adjectifs et adverbes Verbes
Formes non reconnues Noms
Noms
Adjectifs et adverbes Verbes
Noms Noms Noms Noms Verbes
Formes reconnues mais non codées Noms
Verbes
Adverbes en “ment”
Formes reconnues mais non codées Formes reconnues mais non codées Noms
Noms Noms Verbes Verbes
Adjectifs et adverbes Noms
Adjectifs et adverbes
Adverbes en “ment” Formes non reconnues
Formes reconnues mais non codées
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petit uemoa securite education important peut_etre experience etat
reel facon formation
entreprise identifier mtn
cout seul mobile simple afrique centrale start_up
technique transfert concurrent directement sortir acheter interne chercher reglementer equipe identite regarder faciliter ressource informatique mois
taux forme donnee offrir rapide exister process africain
emetteur
24
24
24
24
24
24
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23
23
23
23
23
23
22
22
22
22
22
22
22
22
22
22
22
22
21
21
21
21
21
20
20
20
20
20
20
19
19
19
19
19
19
19
19
19
19
Formes reconnues mais non codées Formes non reconnues
Noms
Formes reconnues mais non codées Formes reconnues mais non codées Formes non reconnues
Noms Noms
Formes reconnues mais non codées Noms
Formes reconnues mais non codées Noms
Verbes
Formes non reconnues Noms
Adjectifs et adverbes Adjectifs et adverbes Adjectifs et adverbes Lieux, pays
Noms
Formes non reconnues
Formes reconnues mais non codées Formes non reconnues
Formes reconnues mais non codées Adverbes en “ment”
Verbes Verbes
Adjectifs et adverbes Verbes
Verbes Noms Noms Verbes Verbes Noms
Formes reconnues mais non codées Noms
Noms Noms Noms Verbes
Formes reconnues mais non codées Verbes
Formes non reconnues Adjectifs et adverbes
Formes non reconnues
© IMAGE – Alceste Education
© IMAGE – Alceste Education
integrer interesser disparaitre mener volet reseau suivre realite gestion+ connaitre
taux_de_bancarisati uba
fin+ pret poser assur+ vendre innover laisser investir
continuer structure competitif accompagner inconvenient sfd
lier annee moyen nombre avancer compris ecobank occuper mutualis collecter different
responsa+
strategie
19
19
19
18
18
18
18
18
18
18
18
17
17
17
17
17
17
17
17
17
17
17
17
17
17
16
16
16
16
16
16
16
16
16
16
16
16
16
16
Verbes Verbes Verbes Verbes Noms Noms Verbes Noms
Formes reconnues mais non codées Verbes
Formes non reconnues Formes non reconnues Noms
Noms Verbes
Formes reconnues mais non codées Verbes
Verbes
Verbes Verbes Verbes Noms
Adjectifs et adverbes Verbes
Noms
Formes non reconnues Verbes
Noms Noms Noms Verbes
Formes reconnues mais non codées Formes non reconnues
Verbes
Formes non reconnues Verbes
Formes reconnues mais non codées Formes reconnues mais non codées
Noms
Informationstechniques
Listedes formesanalysées
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role, norme, limite, commission, virer, evoluer, accepter, resoudre, atteindre, beneficier, collaborer, revenu, associat+, togo, fececam, infrastructur, code, frais, facile, ouvert, difficile, totalement, mise, impot, local, usage, aspect, analyse, facture, capacite, departement, lancer, abonner, decider, mesurer, autoriser, faible, present, confiant, accessible, connexion+, api, imf, business, decentralise, plein, public, certain+, commercial, vue, avis, main, visa, achat, etude, image, salaire, contrainte, environnement, partir, signer, aborder, acceder, rentrer, retirer, depasser, mobiliser, compliquer, participer, sorte, disposition, ussd, challenge, open_banking, plan, majeur, nouvel, orange, francais, regional, particulier, chef, cadre, rendu, region, chiffre, terrain, devenir+, condition, programme, proximite, nouer, regler, ajouter, imposer, montrer, pousser, deplacer, rassurer, ameliorer, consommer, controler, retrouver, enregistrer, fonctionner, bonne, direction, procedure, administrat+, manag, retail, segment, beninois, fournisseur, prestataire, sous_region, concurrentiel,
Après l’analyse du vocabulaire, Alceste procède au découpage du texte et à la classification. C’est lors de cette opération que les différentes techniques spécifiques d’Alceste sont utilisées , comme le découpage en unités de contexte et la classification descendante hiérarchique . Rappelons que dans une analyse standard , les paramètres sont prédéfinis par le logiciel, et qu’Alceste procède à deux classifications successives afin de retenir les classes les plus stables, alors que dans une analyse paramétrée, c’est l’utilisateur qui définit ses propres paramètres ainsi que le type de classification (simple ou double). En règle générale, on utilise une classification simple lorsque le corpus est de petite taille , par exemple pour le traitement de réponses à des question ouvertes, etc. En revanche, une classification double devient très intéressante lorsque le corpus est de grande taille ( voir les différentes techniques d’optimisation et de paramétrage). Rappelons par ailleurs qu’ un mot n’est analysé que lorsqu’il est présent dans au moins 4 unités textuelles.
Valeurs
1ère classification
2ème classification
Nombre minimum de mots par unité de contexte Nombre d’unités de contexte (regroupement des unités) Nombre de formes analysées différentes
11 mots analysés
849 unités de contexte 822 formes analysées
13 mots analysés
753 unités de contexte 822 formes analysées
Croisementdesclassifications
Dendrogramme de classification descendante
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Après la phase de classification, voici les résultats retenus par Alceste :
Nombre de classes stables
Nombre minimum d’unités textuelles pour retenir une classe Pourcentage d’unités textuelles classées
4
57
62 %
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Analysefactorielle descorrespondances encorrélations
Analysefactorielledes correspondancesen coordonnées
Classificationascendantehiérarchique surle corpus
Tableaucroisant classeset catégories
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Ce tableau à double entrée représente les catégories grammaticales corrélées aux classes.
Les valeurs dans le tableau indiquent les valeurs de Khi2 d’association d’une céagt orie grammaticale pour une classe donnée. Les valeurs positives correspondent à une forte présence, en revanche, les valeurs négatives montrent une absence significative. Le mot “Abs” signifie que la catégorie
est absente du corpus.
Catégories grammaticales
Classe 1
Classe 2
Classe 3
Classe 4
Adjectifs et adverbes
-3
0
Absent Absent
-3
Absent
-1
Absent 6
Absent Absent 0
Absent 0
Absent Absent
-4
0
6
-2
0
0
-10
2
8
-4
1
Absent
14
-1
Absent Absent 0
Absent 2
Absent 17
Absent Absent 0
Absent
-8
Absent Absent 0
0
-5
0
5
0
0
0
0
0
5
Absent
12
20
Absent Absent
-1
Absent 9
Absent
-4
Absent Absent 0
Absent
-3
Absent Absent 2
-6
0
2
-1
0
0
-4
-9
2
0
Absent
-15
-5
Absent Absent 4
Absent
-5
Absent
-15
Absent Absent 0
Absent 8
Absent Absent 0
2
-1
0
-1
0
7
0
0
1
-4
Absent
Adverbes en “ment” Couleurs
Mois/jour Epoques/ Mesures Famille
Lieux, pays Interjections Nombres
Nombres en chiffres Mots en majuscules Noms
Mots non trouvés dans DICIN
Verbes
Mots non reconnus et fréquents Mots reconnus mais non codés Mots outils non classés
Verbes modaux
Marqueurs d’1 modalisation Marqueurs d’1 relation spatiale Marqueurs d’1 relation temporelle Marqueurs d’1 intensité Marqueurs d’1 relation discursive Marqueurs de la personne Démonstratifs, indéfinis et relatifs Auxiliaires être et avoir
Formes non reconnues
Prénoms
Annexe 3 : Synthèse des réponses obtenues auprès des OTM et des Fintechs
La question de gestion des risques | Cela dépend de la forme de collaboration entre les deux parties |
Intégration de normes pour toutes les activités | |
Utiliser des logiciels conformes aux normes | |
Sensibilisation du personnel |
Annexe 4 : Synthèses des réponses obtenues auprès des banques
La gestion des risques bancaires dans le cadre de la transformation digitale | Changement de procédures |
Limitation de plafonds | |
Se mettre en Coopétition : les banques doivent s’unir pour mettre en place leurs propres services de connexion et d’infrastructures technologiques nécessaires pour répondre aux besoins évolutifs du marché. | |
Sécuriser les données des clients, car cela risque de détériorer l’image des banques. |
Annexe 4 : Exemples d’innovation dans le secteur financier
- Musoni : une nouvelle génération de microfinance
Plus de place pour les paperasses et la distribution de cash pendant les réunions. Au Kenya, le secteur de la microfinance est très optimiste. En effet, le Mobile money mène à une digitalisation de toutes les activités de distribution de microfinance vers des groupes d’emprunteurs qui ne sont pas bancarisés. Dans ce domaine, Musoni, la nouvelle génération de microfinance est en effet le précurseur. Depuis ses débuts en 2009, sous la direction d’entrepreneurs néerlandais, l’institution a fait appel à M-Pesa non seulement pour assurer le déboursement des prêts, mais aussi leur remboursement. Les emprunteurs reçoivent leur prêt via leur téléphone, puis se rendent chez un agent se trouvant à leur proximité pour retirer du cash. Pour le remboursement, ils peuvent également transférer leur mensualité par téléphone. Outre le gain de temps pendant la réunion et le maintien de la cohésion, l’utilisation du Mobile money apporte aussi plus de sécurité puisque les membres n’ont plus besoin de prendre les transports publics pour déposer la totalité de l’argent collecté dans les institutions des IMF. Pour les clients, la traçabilité est le principal avantage de ce nouveau mode de paiement. 210
Aussi, cette digitalisation impacte positivement sur l’efficacité des process internes de l’IMF. Effectivement, les agents de crédit de chez Musoni qui partent en quête de clients et qui vont rencontrer des emprunteurs se servent de tablettes. Grâce à ces outils innovants, les agents de crédit peuvent ouvrir directement des comptes par le biais d’une procédure appelée KYC digitalisée aux nouveaux clients. Ils remplissent les demandes des emprunteurs à l’aide d’un formulaire dématérialisé puis complètent la base de données avec les informations et les conditions de vie de chaque client. Grâce à ces données et grâce à ce procédé, la microfinance Musoni peut fournir à l’emprunteur une réponse dans un bref délai, maximum 72 heures211.
À terme, ces gains d’efficacité vont se traduire par une baisse du taux d’intérêt d’environ 20 % par an, facturé aux clients. « C’est l’objectif pour les produits nouveaux, explique James Onyutta. Améliorer la distribution de nos services, la rendre plus efficace et les tarifer en conséquence. »
- M-Changa procède à la digitalisation de la générosité familiale
Entre les membres d’une famille, la solidarité prend la plupart du temps une forme à la fois trébuchante et sonnante en Afrique. Pour les grands évènements tels les funérailles, les mariages ou encore les urgences médicales, un Kenyan n’hésite pas à emprunter, à collecter des fonds auprès de son entourage. C’est ce que l’on appelle le harambee, un mot swahili dont la traduction la plus proche est « se réunir ». Au Kenya par exemple, c’est en quelque sorte une obligation morale où règne le sentiment de réciprocité. Cette pratique est ancienne et implique depuis longtemps des échanges monétaires. Mais lorsque les ménages ont commencé à se fragmenter, les jeunes partent en quête d’emploi en ville, le besoin de transférer de l’argent à distance s’est alors affirmé.
En autorisant les transferts d’argent d’une personne à une autre, M-Pesa a parfaitement répondu au besoin cité au-dessus tout en ajoutant une touche d’opacité et divers frais au système : avant, il fallait passer par plusieurs membres de la famille avant que le bénéficiaire ne reçoive l’argent. « Traditionnellement, un harambee est piloté par un comité familial composé des membres qui ont le réseau le plus étendu. Chacun collecte pour le compte du bénéficiaire, mais cela manque de transparence, car il faut se réunir pour consolider les dons212» a déclaré Kyai Mullei, PDG de M -Changa213. Afin de digitaliser la pratique du harambee, certains start-ups mettent au point une plate-forme : sur internet ou par SMS, une personne peut lancer une collecte de fonds et mobiliser son entourage via une promotion ou des relances sur les réseaux sociaux. Les dons sont en majorité faits via le Mobile money.
En plus de simplifier les collectes, M-Changa cherche également à faire diminuer les coûts y afférents. « Un harambee peut coûter jusqu’à 50 % des fonds collectés lorsque des événements de fundraising sont organisés »214, explique Kyai Mullei. Par contre, le modèle M-Changa s’associe à des frais de 4,25 % des fonds collectés. Les frais sont facturés à celui qui a effectué la collecte. Quant au donateur, il ne prend aucune charge financière ni même le frais de transfert.
Bien que les clients de M-Changa soient initialement modestes et proviennent des plus grandes villes, la cible est depuis devenue plus âgée et elle est bien repartie dans les centres urbains du Kenya. Kyai Mullei a souligné que : « Nous avons constaté que les collectes les plus réussies étaient menées par des personnes de plus de 30 ans. Ils ont souvent étudié dans le supérieur, ont un certain niveau de vie et possèdent un smartphone, quand bien même ils utilisent la plate-forme via sa fonctionnalité SMS, probablement par manque de crédit pour la consommation de data. »215
La plupart du temps, les clients assimilent M-Changa à une plateforme de financement participatif et Kyai Mullei déclare que : « Techniquement, c’est du crowdfunding, sauf qu’il ne s’agit pas vraiment d’une “foule” de donateurs : ils sont connus, ce sont des parents et on sait que l’on pourra compter sur la réciprocité de la générosité. 216» Néanmoins, certaines campagnes sur M-Changa ne sont pas faites pour financer des projets personnels, elles sont initiées par des ONG ou des écoles pour des œuvres de bienfaisance. Au Kenya, des plateformes internationales de dons telles que Kickstarter, GlobalGiving et Indiegogo sont également utilisées, ou des plateformes locales comme Lepala qui cible le financement en fonds propres.
Par ailleurs en Côte d’Ivoire, Orange a lancé une initiative de même nature à M-Changa en collaboration avec le site français de crowdfunding HelloAsso. Dans le cadre de ce projet, Orange Collecte fait confiance à ses abonnés d’Orange Money qui compte actuellement plus 18 millions répartis en Afrique subsaharienne.
- Branch : de la Silicon Valley à la Silicon Savannah
Pour les entreprises locales, le Kenya n’est pas seulement un terreau : le pays attire également la Fintech International, comme Branch. Fondée par des entrepreneurs connus, notamment par la création de Kiva (une des pionnières des plateformes de crownfunding), Daniel Jung, Random Bares et Matt Flanery, Branch a su intégrer le marché de San Francisco, dans la Silicon Valley et un autre à Nairobi dans la Silicon Savannah. « Branch a décidé de venir y tester son application, car les Kenyans sont très innovants dans leur manière d’utiliser le Mobile pour les transactions financières. Pour un Européen ou un Américain, cela semble futuriste 217», a déclaré Sofia Zab, directrice marketing du start-up. En fait, la start-up a choisi de s’installer dans The Garage, un des espaces de co-working au Kenya et qui est spécialement consacré à l’innovation.
Une application développée par Branch permet aux publics, avec ou sans compte bancaire, de bénéficier d’un crédit en temps réel sur la base des simples informations disponibles sur leur appareil Mobile sans avoir à épargner à l’avance. Le modèle ressemble à celui de M-Shwari ou celui de KCB M-Pesa de Safaricom. Il existe diverses raisons qui poussent les Kenyans à emprunter de l’argent à Branch, à savoir les urgences médicales, les frais scolaires de leurs enfants, mais aussi l’achat de marchandises qui seront revendues le même jour. La moitié sont des entrepreneurs qui vivent à Nairobi et qui ont plusieurs sources de revenus. Branch les accompagne dans la gestion de la volatilité de trésorerie.
Parallèlement au téléchargement de l’application, la startup demande également au client l’accès à certaines informations disponibles sur leur appareil Mobile : marque, version de l’Android, la liste de contacts pour identifier si ces derniers sont déjà liés à un client existant, les données sur les réseaux sociaux qui par la suite confirmeront la cohérence des données, et enfin, le plus important les SMS qui sont liés aux transactions M-Pesa. « Nous utilisons environ 1 300 types de données pour le scoring initial 218», a déclaré Sofia Zab. Le montant du premier est souvent minime, environ 2,50 dollars qui peut être remboursé entre 3 à 5 semaines. Quant au prochain prêt, il peut atteindre 500 dollars, voire plus. Cependant, la moyenne est de 40 $. Le taux d’intérêt dépend du comportement de remboursement du client. Il est de 16 % au début et en fonction de la relation entre le prêteur et le client, il peut descendre jusqu’à 6 %.219
À l’instar de son concurrent M-Shwari, Branch garantit à ses clients de bénéficier d’un taux de remboursement intéressant. « Grâce au principe du machine learning, notre algorithme s’est affiné avec le temps, en utilisant les corrélations découvertes entre les données des clients et leur comportement de remboursement. De 25 % lorsque nous nous sommes lancés, le taux de défaut est tombé à 5 % aujourd’hui 220», a déclaré Sofia Zab, la directrice marketing. La start-up essaie également de s’améliorer en se servant de méthodes plus traditionnelles : rappel par SMS, car de nombreux incidents de paiement viennent des oublis, recours à des experts en recouvrement et rapport au fichier national de crédit.
1 Cygler, J. Sroka, W. (2017). Coopetition disadvantages: The case of the high tech companies. Eng. Econ. 28, 494–504.
2 Soufyane Frimousse et Jean-Marie Peretti, « COMMENT ACCOMPAGNER LA TRANSFORMATION DIGITALE DES ENTREPRISES EN AFRIQUE ? », carin, Revue question management, 2017
3 Soufyane Frimousse et Jean-Marie Peretti, « COMMENT ACCOMPAGNER LA TRANSFORMATION DIGITALE DES ENTREPRISES EN AFRIQUE ? », carin, Revue question management, 2017
4 Banque européenne d’investissement, « Le secteur bancaire en Afrique subsaharienne Évolutions récentes et inclusion financière numérique », 2016
5 Bureau de l’économiste en chef AEB Volume 6 Numéro 52015
6 Thorsten Beck, « Évolution du secteur bancaire africain : nouveaux acteurs, nouveaux modèles ? », La revue de proparco, 2017
7 “Finance for All: Financial Inclusion in Central Africa”. Regional conference hosted by BEAC and the IMF, Brazzaville (Congo), 23 March 2015
8 IMF. Central African Economic and Monetary Community (CEMAC). Financial System Stability Assessment, April 2016
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10 PwC (2013) Digitale Transformation – der grobte Wandel seit der industriellen Revolution. PwC, Frankfurt
11 RAJHI M.T. et Ben Romdhane.S. «Impact de la technologie sur les économies d’échelle des banques commerciales tunisiennes », Acte du Colloque International « LIFE », Juin 2002.
12 PwC (2017) ‘Global FinTech Report 2017 – Redrawing the lines: FinTech’s growing influence on Financial Services
13 Camarate, J. and Brinckmann, S. (2017) A marketplace without boundaries: The future of banking – A South African perspective, PWC: Strategy&
14 Cité dans : Thenet. G. et R. Guillouzo « La conception de la technologie comme boîte noire par le contrôle de gestion bancaire : la mesure de la performance opérationnelle des agences par la méthode DEA », Laboratoire d’Economie et de Sciences Sociales de Rennes, 2002, pp. 1-20
15 Investec (2019) Banking on disruption, Focus Insights
16 Desmangles, L. et al. (2018) Global Retail Banking 2018: The Power of Personalization.
17 He, D. et al. (2017) Fintech and Financial Services: Initial Considerations.
18 Popper, N. (2018) The ‘Neo-Banks’ Are Finally Having Their Moment, New York times.
19 Weichert, M. (2017) ‘The future of payments: How FinTech players are accelerating customer-driven innovation in financial services’, Journal of Payments Strategy & Systems.
20 Coetzee, J. (2018) ‘Strategic implications of Fintech on South African retail banks’, South African Journal of Economic and Management Sciences, 21(1), pp. 1–11
21 David Porteous, « THE ENABLING ENVIRONMENT FOR MOBILE BANKING IN AFRICA », REPORT Commissioned by Department for International Development (DFID), 2010
22 BAGCHI K., CERVENY R., HART P. and PETERSON M. (2003) “The Influence of National Culture in Information Technology Product Adoption”, AMCIS 2003 Proceedings, Paper 119
23VERDIE J.F. (1998), « Les incidences des nouvelles technologies sur les activités de la banque », Gestion 2000, janvier.
24 Chesbrough H. (2003), The New Imperative for Creating and Profiting from Technology , Harvard Business Review Press, pp. XX et XXI.
25 Chesbrough H. (2003), The New Imperative for Creating and Profiting from Technology , Harvard Business Review Press, pp. XX et XXI.
26 Chesbrough, 2006, p. 1, dans Chesbrough H., Vanhaverbeke W. and West J. (2006), Open Innovation: Researching a New Paradigm, Oxford University Press
27 Mortara, L., & Minshall, T. (2011). How do large multinational companies implement open innovation ? Technovation, vol. 31, n. 10, pp. 586-597.
28 Chiaroni, D., Chiesa, V., & Frattini, F. (2011). The Open Innovation Journey: How firms dynamically implement the emerging innovation management paradigm. Technovation, vol. 31, n. 1, pp. 34-43
29 Gatti M., Cesareo L. (2012).Market-driven management and corporate culture: competitiveness and innovation. Giappichelli Editore, Torino
30 Jullien N. et Pénin J. (2013), Innovation ouverte : Vers la génération 2.0, à paraître dans L’encyclopédie de la Stratégie, Économica
31 Isckia T. et Lescop D. (2011), Une analyse critique des fondements de l’innovation ouverte, Revue Française de Gestion, 210 (1), pp. 87-98.
32 Kutvonen, A.(2011)Strategic application of outbound open innovation.European Journal of Innovation Management, vol.14, n. 4, pp. 460-474
33 Lichtenthaler, U., & Lichtenthaler, E. (2009). A capability‐based framework for open innovation: Complementing absorptive capacity. Journal of Management Studies, vol. 46, n. 8, pp. 1315-1338
34 MALERBA, F., ORSENIGO, L. « Technologicalregimes and firmbehavior », Industrial and Corporate Change, 1993
35 Banque européenne d’investissement, « Le secteur bancaire en Afrique subsaharienne Évolutions récentes et inclusion financière numérique », 2016
36 Mathilde Fox et Nathalie Van Droogenbroeck, « LES NOUVEAUX MODÈLES DE MOBILE BANKING EN AFRIQUE UN DÉFI POUR LE SYSTÈME BANCAIRE TRADITIONNEL ? », Association de recherches et publications en management | « Gestion 2000 », Volume 34 | pages 337 à 360, 2017
37 Mathilde Fox et Nathalie Van Droogenbroeck, « LES NOUVEAUX MODÈLES DE MOBILE BANKING EN AFRIQUE UN DÉFI POUR LE SYSTÈME BANCAIRE TRADITIONNEL ? », Association de recherches et publications en management | « Gestion 2000 », Volume 34 | pages 337 à 360, 2017
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39 Fernandez, Anne-Sophie, et Frédéric Le Roy. (2010). « Pourquoi coopérer avec un concurrent ? » Revue française de gestion, n° 204(5), pp. 155-69
40 Dyer, Jeffrey H., et Harbir Singh. (1998). « The Relational View: Cooperative Strategy and Sources of Interorganizational Competitive Advantage ». Academy of Management Review, 23(4), pp. 660-79
41 Fernandez, Anne-Sophie, et Frédéric Le Roy. (2010). « Pourquoi coopérer avec un concurrent ? » Revue française de gestion, n° 204(5), pp. 155-69
42 Lane, C.; Backhmann, R. (1998). Trust Within and between Organizations; Oxford University Press: Oxford, UK.
43 Fernandez, A.-S.; Le Roy, F. (2014). Gnyawali, D.R. Sources and management of tension in co-opetition—Case evidence from telecommunications satellites manufacturing in Europe. Ind. Mark. Manag.
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45 Geraudel, M.; Salvetat, D. (2014). What are the antecedents of coopetition? Eur. Bus. Rev, 23–42.
46 Oláh, J.; Bai, A.; Karmazin, G.; Balogh, P.; Popp, J. (2017). The role played by trust and its effect on the competiveness of logistics service providers in Hungary.
47 Le Roy, Frédéric, Anne-Sophie Fernandez et Paul Chiambaretto (2018). “From Strategizing Coopetition to Managing Coopetition. Abingdon: Routledge.
48 Nemeh, A.; Yami, S. (2016). The Determinants of the emergence of coopetition strategy in R&D. Int. Stud. Manag. Org. 159–178.
49 Vaidya, S. (2011). Understanding strategic alliances : An integrated framework. J. Manag. Policy Prac. 12, 90–100.
50 Belderbos, R.; Gilsing, V.; Lokshin, B. (2012). Persistence of, and interrelation between horizontal and vertical technology alliances. J. Manag., 1812–1834.
51 Carayannis, E.G.C.; Alexander, J. (2004). Strategy, structure and performance issues of precompetitive R&D consortia: Insights and lessons learned from SEMATECH. IEEE Trans. Eng. Manag., 226–232.
52 Gnyawali, D.R.; Park, B.-J.R. (2009). Coopetition in technological innovation in small and medium-sized enterprises: A multilevel conceptual model. J. Small Bus. Manag. 308–330.
53 Coy, P. Sleeping with the enemy. (2006). More companies are finding that “co-opetition”, or learning to work with rivals on certain projects, may be the best strategy. Bus Week, pp. 96–97.
54 Hamel G., doz Y. et Prahalad C.K., «Collaborate with your competitors and win», Harvard Business Review, 1989, 133-139
55 Cité dans : Douglas, K. (2017) African banks must ‘adapt or die’ as emerging Fintechs evolve into bigger threats, Africa Business Insight
56 Douglas, K. (2017) African banks must ‘adapt or die’ as emerging Fintechs evolve into bigger threats, Africa Business Insight
57 CHESBROUGH, H. (2003), Open Innovation: The New Imperative for Creating and Profiting from Technology, Harvard Business School Press.
58 Meriem Haouat Asli. (2003). Open innovation : Quels enjeux pour le secteur bancaire ?. De Boeck Supérieur | « Innovations »
59 COHEN W.M., LEVIN, R. C. (1989), Empirical studies of innovation and market structure, Handbook of Industrial Organization, 2, 1059-1107.
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61 Chesbrough, 2006, p. 1, dans Chesbrough H., Vanhaverbeke W. and West J. (2006), Open Innovation: Researching a New Paradigm, Oxford University Press
62 Chesbrough, 2006, p. 1, dans Chesbrough H., Vanhaverbeke W. and West J. (2006), Open Innovation: Researching a New Paradigm, Oxford University Press
63 Jong, B. De, Little, M. and Gagliardi, L. (2017a) Open for business. Available at: https://www.accenture.com/_acnmedia/PDF- 56/Accenture-Strategy-Digital-Open-Banking-POV.pdf.
64 Arner, D., Barberis, J. and Buckley, R. (2015). The evolution of Fintech : A new post-crisis paradigm ?. University of New South Wales Law Research Series, Paper No. 2015/047.
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69 Nedbank Ltd (2018b) Reaching Rural South African With Financial Services.
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75 AFI (2018), “FinTech pour l’inclusion financière”, disposnible sur https://www.afi-global.org/FinTech-financial-inclusion
76 Verbatim
77 Verbatim
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